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Full text of "Bulletin de la commission des antiquités e la Seine-Inférieure ..."

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BULLETIN 


DE    LA 


COMMISSION  DES  ANTIQUITÉS 


BULLETIN 


DE    LA 


COMMISSION   Dhs  ANTIQUITÉS 


DB   LA 


SEINE-INFÉRIEURE 


TOME  VI 
—  1882  à  1884  — 


TiOUECX 

IMI'RIMKRIK    KSFKRANCK    CAGNlAKl) 

Rues  Jeanne-d'Arc,  88,  et  des  Basiuge,  5 


i885 


9  • 


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*  k 


PROCÈS-VERBAUX 


DE   LA 


COMMISSION    DES    ANTIQUITÉS 

DE  LA  SEINE-INFÉRIEURE 

PENDANT   L'ANNÉE  1882 


■^^^ 


SÉANCE  DU  25  JANVIER  188a 

La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence 
de  M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Présents  :  MM  ..Paul  Baudry,  le  marquis  de  Blos- 
seville,  Bouquet,  le  docteur  Ernest  Guérouh,  Lefort, 
Tabbé  Robert,  l'abbé  Tougard  et  Brianchon,  secrétaire- 
adjoint. 

Absent  et  excusé  :  M.  Sauvageot. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  1 5  décembre  1 88 1 
est  lu  et  adopté. 

—  La  correspondance  imprimée  comprend  : 

Comité  archéologique  de  Senlis,  Comptes-rendus 
et  Mémoires,  2*  série,  t.  VI,  année  1 880  ;  —  Mémoires 
de  la  Société  des  antiquaires  du  Centre,  1881,9*  ^^^'  i 
—  Société  des  antiquaires  de  la  Morinie^  Cartulaires 
de  l'église  de  Térouanne,  publiés  par  Th.  Duchet 
et  A.  Giry. 

M.  de  Beaurepaire  donne  lecture  d'une  lettre  de 
M.  Paul  Le  Cœur,  architecte,  en  date  du  22  janvier 


courant,  qui  motive  les  retards  apportés  dans  Taché- 
vement  du  porche  de  Téglise  de  Ry. 

Les  travaux  du  menuisier  étaient  subordonnés  à 
ceux  du  sculpteur.  Ce  dernier,  ayant  fait  une  chute  au 
Théàtre-des-Arts,  s^est  vu  forcé  de  surseoir  à  l'exécu- 
tion des  sculptures  qui  ont  été  terminées  trop  tard 
pour  être  posées  avant  l'hiver.  Ce  retard,  du  reste,  est 
un  mal  pour  un  bien,  puisqu'il  a  permis  au  bois  neuf 
de  jouer,  et  de  produire  les  gerçures  qui  disparaîtront 
au  moyen  de  flipois  introduits  de  force,  comme  cela 
se  tait  habituellement. 

Aussitôt  que  la  saison  le  permettra,  M.  Le  Cœur 
donnera  des  ordres  pour  la  reprise  des  travaux,  qui 
devront,  dès  lors,  s  achever  promptement  et  dans  les 
meilleures  conditions. 

«  Croyez,  M.  le  Vice-Président,  dit  en  terminant 
M.  Le  Cœur,  que  j'ai  tout  intérêt  à  terminer  le  plus 
tôt  possible  une  œuvre  de  restauration  à  laquelle  j'ai 
donné  tous  mes  soins.  » 

Ces  explications  de  M.  Le  Cœur,  jugées  satisfai- 
santes par  M.  de  Beaurepaire,  obtiennent  également 
l'assentiment  de  la  Commission. 

—  Notre  collègue,  M.  Lefort,  architecte  en  chef  du 
département,  donne  lecture  d'un  Rapport  détaillé  sur 
r agrandissement  du  Palais  de  Justice  de  Rouen, 
dont  la  teneur  suit  : 

Au  moment  où  les  travaux  d'agrandissement  du  Palais 
de  justice  sont  en  pleine  activité,  il  ne  sera  peut-être  pas 
sans  intérêt  de  jeter  un  coup-d'œil  en  arrière  et  de  rap- 
peler brièvement  les  phases  diverses  qui  ont  précédé  la 
période  d'exécution. 

C'est  au  mois  d'août  1879  que  le  Conseil  général,  sur 
la  proposition  de  M.  Limbourg,  préfet  du   département. 


3 

reconnaissait,  à  la  suite  d*une  visite  sur  place,  la  com- 
plète insuffisance,  on  peut  même  dire  l'inconvenance  des 
locaux  affectes  aux  services  du  tribunal  de  première 
instance  de  Rouen. 

Au  mois  d'avril  18B0,  le  projet  d'agrandissement,  pré- 
sente par  Tarchitecte  du  département,  était  approuvé  par 
le  Conseil  général.  —  Ce  projet  s'étendait  non  seulement 
sur  remplacement  de  Fancien  tribunal,  mais  empruntait 
encore  1000  mètres  environ  à  la  place  Verdrel  ou  du 
Marché-Neuf,  située  à  Touest  du  Palais  et  appartenant  h 
la  ville.  La  rétrocession  au  département  de  cette  portion 
de  terrain  communal  ne  devint  définitive  qu'à  la  suite 
d'un  acte  d'échange  conclu,  en  juillet  1880,  entre  la  ville 
et  le  département.  Ce  dernier  donnait  comme  compensa- 
tion le  jardin  et  les  dépendances  de  Thôtel  de  la  première 
présidence. 

Pendant  les  négociations  auxquelles  donnait  lieu  cet 
acte  d'échange,  le  projet  recevait  l'approbation  du  Ministre 
des  Beaux-Arts  et  celle  de  la  Commission  des  monuments 
historiques  :  de  telle  sorte  qu'au  mois  d'août  1880,  le 
Conseil  général,  en  adoptant  les  mesures  financières  néces- 
saires, permettait  de  commencer  sans  retard  les  travaux  ; 
il  témoignait  ainsi  de  la  manière  généreuse  dont  il  dotait 
les  services  départementaux,  et  de  l'intérêt  si  vif  qu'il  porte 
aux  arts  de  Normandie. 

Le  20  septembre  suivant,  M.  le  Maire  de  Rouen  remet- 
tait au  département  le  terrain  cédé  par  la  ville,  et  dès  le 
lendemain  les  terrassiers  commençaient  les  fouilles  :  on 
était  entré  dans  la  période  d'exécution. 

Le  1 1  août  1880,  les  travaux  avaient  été  mis  en  adjudi- 
cation. Les  entrepreneurs  adjudicataires  étaient  : 

MM.  Lefebvre  et  fils,  de  Rouen,  pour  la  terrasse  et  la 
maçonnerie  ;  Baudet,  Donon  et  C»«,  de  Paris,  pour  la  serru- 
rerie; Menut'Gallet,d'Elbeuf,pour  la  peinture  et  la  vitrerie; 
Bcrson,  de  Rouen,  pour  la  couverture  et  la  zinguerie; 
Mesureur  et  Monduit,  de  Paris,  pour  la  plomberie  d'art. 


Les  sculpteurs  soumissionnaires  ont  été  : 

MM.  Despois  de  Folleville,  Fouchcr,  Chcdeville,  Bonei 
père,  Bonet  (Léopold),  Bonet  (Félix),  Devaux,  Corbcl, 
Billiard,  Bonet  (Edmond),  Guilloux  père,  Gautier  et  Jean. 

Les  statuaires  de  la  tour  d'horloge  ont  été  : 

MM.  Gaudran,  Guilloux  fils,  Peynot. 

Le  7  septembre,  M.  Brière,  de  Rouen,  était  déclaré 
adjudicataire  des  travaux  de  menuiserie. 

Tels  sont  les  entrepreneurs  à  Taide  desquels  nous  espé- 
rons mener  à  bonne  fin  Tédifice  aujourd'hui  largement 
commencé. 

La  profondeur  des  fondations  atteint,  sans  la  dépasser,  la 
moyenne  prévue  au  devis.  Le  bon  sol  (un  tuf,  mélange 
d'argile  et  de  silex)  s'étend  sous  toute  la  surface  des  con- 
structions, a  une  profondeur  de  4"  5o  environ,  rue  Saint- 
Lô,  et  de  5™  5o,  rue  aux  Juifs,  avec  une  pente  régulière 
(celle  de  la  vallée),  de  Tune  à  l'autre  rue.  Le  sol,  d'allu- 
vion  et  de  remblais,  laissait  passer  de  place  en  place  de 
forts  suintements  d*eau,  dont  le  ciment  et  le  béton  ont  fini 
par  avoir  raison.  Ces  suintements  provenaient  sans  doute 
de  l'ancien  lit  de  la  Renelle,  ruisseau  qui  servait  d'égout 
h  la  source  Gaalor  et  qui  a  été  supprime  lors  de  la  création 
des  rues  Jeanne-Darc  et  Thiers. 

Les  pluies  de  novembre  1880  détrempaient  les  terres 
coupées  par  les  fouilles,  et  des  étayements  d'une  résistance 
considérable  ont  été  indispensables  pour  éviter  des  ébou- 
lements  et  les  accidents  qui  en  auraient  été  la  consé- 
quence; la  maçonnerie,  hourdée  en  mortier  de  chaux 
hydraulique  et  ciment,  s'élevait  rapidement;  le  travail, 
pendant  un  mois,  était  poussé  jour  et  nuit;  et  le  i5  dé- 
cembre 1880,  quand  arrivèrent  les  grands  froids  (17°), 
les  murs  étaient  assez  élevés  pour  maintenir  les  terres,  et 
des  contre-murs  en  planches,  garnis  de  sable,  établis  le  long 
de  leurs  deux  parements,  les  protégeaient  contre  la  gelée. 
Enfin  une  couche  de  o"*  5o  de  sable  était  superposée  au 
radier  de  béton.  Ces  précautions  ont  été  efficaces  :  à  la 


reprise  des  travaux,  après  la  gelée,  le  20  janvier  1881,  pas 
une  pierre  n'avait  souffert  du  froid. 

Les  travaux  ont  été  activement  menés  pendant  toute 
Tannée  1881,  et  aujourd'hui,  20  janvier  1882,  les  maçon> 
neries  sont  achevées  et  les  sculptures  finies  jusqu'à  hau- 
teur de  la  corniche  inclusivement.  Toutes  les  gargouilles 
sont  en  place;  la  pose  du  comble  va  commencer  incessam- 
ment. On  taille  ou  on  sculpte  en  ce  moment  les  parties 
supérieures,  telles  que  lucarnes,  balustrades,  étage  de 
rhorloge,  pignon  occidental,  dont  nous  espérons  voir  la 
pose  achevée  le  3o  avril  prochain. 

Les  terrassements  exécutés  sur  la  place  Verdrel  ont  sup- 
primé une  fontaine,  très  lourde  de  dessin  et  d'exécution, 
construite  à  la  fin  du  siècle  dernier,  située  au  centre  de 
la  place,  et  dont  la  disparition  ne  laisse  aucun  regret  dans 
l'esprit  de  personne.  Un  aigle  tenant  une  guirlande  a  été 
déposé  au  jardin  Sainte-Marie  et  en  provient. 

Cette  fontaine  avait  remplacé  un  édicule^  surmonté  de  la 
statue  de  Louis  XV,  élevé  en  1 722,  lequel  succédait  lui- 
même  à  une  fontaine  construite  en  iSqS. 

OBJETS  TROUVÉS  DANS   LES  FOUILLES 

Les  fouilles  du  nouveau  tribunal  ont  été  pratiquées 
dans  un  sol  de  remblai  relativement  moderne  pour  les 
trois  premiers  mètres.  Quelques  caves  provenant  des  mai- 
sons de  l'ancien  quartier  des  Juifs  y  ont  été  rencontrées  ; 
la  construction  n'en  semblait  pas  antérieure  au  xv«  siècle. 
Les  couches  inférieures  du  sol  étaient  constituées,  sur  une 
grande  surface,  par  une  sorte  de  compost  noir  et  rempli 
d'ossements  d'animaux.  La  rue  Massacre,  ancien  empla- 
cément  de  la  moitié  des  boucheries  de  la  ville,  se  prolon- 
geait jusque-là,  et  ce  furent  les  fosses  où  étaient  enfouis 
les  détritus  animaux  que  les  terrassiers  ont  mis  à  décou- 
vert. Ces  restes  de  fosses  ont  été  trouvés  principalement 
entre  la  rue  Percière  et  la  rue  du  Tambour,  sur  une  ligne 
parallèle  à  la  rue  Jeanne-Darc.  I-a  profondeur  moyenne 


au-dessous  du  sol  actuel  de  la  place  en  était  d'environ 
5  mètres. 

En  ÙLce  de  la  première  lucarne  de  la  salle  des  pas-perdus 
(façade  longitudinale  ouest),  du  côte  de  la  rue  Saint- Lô, 
les  terrassements  ont  mis  à  découvert  une  fondation,  très 
probablement  romaine,  de  3  mètres  de  largeur,  sur  i™  1/2 
de  hauteur  et  d'environ  i5  mètres  de  longueur.  Cette  fon- 
dation était  massive,  très  compacte  et  admirablement  bien 
conservée;  la  mine  seule,  avec  beaucoup  de  peine,  parvint 
à  la  disjoindre.  Le  mortier,  constitué  par  de  la  chaux  et  du 
sable  très  pur,  était  vitrifié,  à  la  suite  d'une  véritable  com- 
binaison chimique  de  chaux  et  de  silice.  Les  pierres  cal- 
caires de  la  côte  Bihorel,  sans  doute,  avaient  participé  à 
cette  combinaison  dans  le  voisinage  du  mortier,  et  acquis 
de  ce  fait  très  remarquable  un  supplément  de  dureté  très 
considérable. 

La  direction  est-ouest  de  cet  îlot  de  blocage  est  assez 
intéressante.  On  sait,  en  effet,  que  la  première  enceinte 
gallo-romaine  de  la  ville  a  été  retrouvée  place  des  Carmes 
et  rue  des  Fossés-Louis- VI II  (ainsi  nommée  parce  que  ce 
roi  fit  don  à  la  ville  de  l'emplacement  des  fossés  romains), 
dans  l'enclave  Saint-Lô,  et  avec  la  même  direction,  assez 
inexplicable,  puisque  ces  directions  parallèles  ne  sont 
pas  dans  le  prolongement  l'une  de  l'autre.  D'autre  part,  le 
caractère  romain  de  la  structure  nous  paraît  certain  pour 
la  maçonnerie  en  question.  L'enceinte  devait,  par  suite, 
rejoindre  ces  deux  directions  en  coupant  l'emplacement 
occupé  aujourd'hui  par  Thôtel  de  la  première  présidence, 
peut-être  même,  en  suivant  la  rue  de  la  Poterne,  englober 
la  fondation  retrouvée  par  nous,  et,  aussitôt  après  (puis- 
qu'elle existait  près  de  ta  rue  Massacre),  changer  de 
direction  et  descendre  à  la  Seine. 

Nous  avons  l'honneur  de  déposer  sur  le  bureau  diffé- 
rents objets  trouvés  près  de  cette  fondation  :  plusieurs 
pièces  de  monnaie  très  frustes  et  dont  il  semble  difficile  de 
reconnaître  l'effigie  exacte  ;  une  coupelle  et  des  fragments 


en  terre  dite  de  Samos  :  un  vase  et  un  fragment  de  terre 
grise.  Ces  objets  semblent  d'origine  romaine  ou  gallo- 
romaine. 

Nous  y  joignons  d'autres  objets  de  date  postérieure,  et 
dont  quelques-uns  paraissent  mériter  une  étude  complète 
de  la  part  de  personnes  plus  compétentes  que  nous.  Nous 
proposons  en  particulier  à  votre  bienveillante  attention  un 
sceau  du  xui^  siècle,  fort  curieux,  de  forme  doublement 
ogivale,  avec  figurine  au  centre  et  l'exergue  :  Sigilium 
Matllis  "  sur  le  bord.  La  figurine  est  celle  d'un  religieux 
vêtu  de  la  cape  et  de  la  tunique  et  tenant  un  livre  dans  les 
deux  mains.  La  gravure  en  est  fine,  et  tout  l'ensemble 
d'un  beau  caractère. 

L'époque  mérovingienne  semble  représentée  par  une 
rondelle  gravée,  des  perles  de  colliers  en  os,  ainsi  que  par 
un  peigne  dont  la  monture  est  gravée  d'oves  grossières. 

Nous  attribuons  au  commencement  du  xvic  siècle  un 
robinet  de  cuivre  et  plusieurs  cruches  ou  fragments  de 
pots  en  terre,  recouverts  d'un  enduit  rouge  ou  jaune,  avec 
dessins  en  creux,  et  inscriptions  en  lettres  encore  gothi- 
ques; l'une  d'elles,  très  lisible,  est  :  •  Penser  à  la  mort, 
pauvre  sot.  >  —  Le  vase  et  les  filets  en  relief  ont  été  Êibri- 
qués  au  tour;  les  dessins  en  creux  ont  été  faits  assez  gros- 
sièrement, d'ailleurs,  à  la  main.  La  panse  du  vase  est  di- 
Corée  de  bâtons  rompus  et  de  raies  de  cœur.  Un  autre 
vase,  plat,  porte  au  fond  gravé  le  monogramme  du  Christ 
et  l'inscription  :  •  Le  votre  (suis).  •  Deux  autres  cruches 
dont  la  forme  n'est  pas  sans  élégance  et  l'origine  un  peu 
antérieure,  sont  revêtues  d'une  décoration  qui  n'est  pas, 
comme  la  précédente,  empruntée  aux  ornements  de  l'ar- 
chitecture :  elle  est  constituée  par  des  points  saillants,  en 
forme  de  perles,  disposés  suivant  des  dessins  géométriques, 
la  plupart  circulaires,  ingénieux  et  d'un  bon  effet. 

Une  figurine  de  i3  centimètres  de  hauteur  environ, 
mutilée,  en  poterie  vernissée,  peut  être  attribuée  à  la 
même  époque. 


8 

Si  nous  nous  sommes  un  peu  étendu  sur  ces  poteries, 
c'est  qu'elles  sont  peut-être  le  commencement  de  cette 
fabrication  rouennaise  qui,  un  siècle  et  demi  plus  tard, 
devait  briller  d'un  si  vif  éclat. 

Il  est  à  remarquer  que  les  objets  de  cette  époque  trou- 
vés  au  Palais,  bien  que  vulgaires,  portent  une  décoration 
inspirée  des  idées,  nouvelles  en  art,  de  la  Renaissance  :  ces 
idées  avaient  pénétré  partout  et  inspiré  la  fabrication 
même  des  ustensiles  les  plus  ordinaires. 

D'autres  pièces  de  monnaie  ont  été  trouvées  dans  les 
remblais,  tout  à  fait  modernes  :  la  plus  ancienne  d'entre 
elles  n'est  pas  antérieure  à  Henri  IV  ;  elles  sont  déposées 
sur  le  bureau.  Les  ouvriers  ont  trouvé  également  une 
collection  de  trente  ou  quarante  jetons  ou  faux  liards. 
Cette  falsification  devait  être  assez  commune,  si  Ton  en 
croit  la  locution  populaire  :  c  Faux  comme  un  jeton.  » 

La  démolition  des  bâtiments  du  xvnic  siècle  a  fait  décou- 
vrir la  plaque  commémorative  de  la  pose  de  la  première 
pierre.  Cette  plaque  est  ainsi  conçue  : 

€  L'an  1739,  le  14  du  mois  de  juillet,  la  première  pierre 
c  de  ce  bâtiment  a  été  posée  par  haut  et  puissant  seigneur 
c  messire  Geoffroy  Mace  Camus  de  Pontcarré,  chevalier, 
c  seigneur  de  Pontcarré,  baron  de  MafHiers,  Monssoul  et 
«  Bethemont,  seigneur  de  Villaine,  Quinquempoix,  Ar- 
«  pentigny  et  autres  lieux,  conseiller  du  Roy  en  tous  ses 
<  conseils,  maître  des  requêtes  honoraire  de  son  hôtel  et 
«  premier  président  du  parlement  de  Normandie. 

t  Du  Dessein  de  P.  Jarry,  architecte  du  Roy.  • 

Elle  a  été  déposée  au  Musée  d'Antiquités. 

Le  sieur  Jarry,  notre  confrère  du  siècle  dernier,  dont  il 
est  question  sur  cette  plaque,  n*avait  pas  un  très  grand 
respect  de  l'oeuvre  de  ses  prédécesseurs  :  quelques  gar- 
gouilles du  Palais  étaient  ruinées  par  le  temps,  disait-il, 
—  il  en  fit  scier  cinq.  —  Il  avait  conçu  le  projet  de  rempla- 
cer la  galerie  de  pierre,  tombée  dans  une  longueur  de 
soixante  pieds,  par  une  balustrade  en  fer  carré;   il  est 


heureux   qu'il   n'ait   pu   mettre   son    idée  à   exécution. 

Aussi  devons-nous  avouer  que  la  nature  de  son  talent 
nous  est  peu  sympathique;  et  si  le  peu  de  valeur  de  son 
œuvre  ne  nous  avait  déjà  délivré  de  tout  remords  pour  la 
démolition  que  nous  en  avons  dû  faire,  les  détails  qui  pré- 
cèdent suffiraient,  pensons-nous,  pour  nous  en  débarras* 
ser  complètement. 

La  destruction  des  bâtiments  modernes  a  amené  la  sup- 
pression de  la  maison  de  justice.  Les  inculpés,  les  préve* 
nus,  les  accusés,  n'habitent  plus  les  cachots  humides  et 
malsains  où  ils  subissaient,  innocents  ou  coupables,  par  le 
seul  fait  du  mauvais  état  des  constructions,  une  aggrava- 
tion de  douleur  et  de  châtiment.  Les  services  de  la  justice 
ont  dû  être  déplacés  également;  ils  ont  été  provisoire- 
ment installés  dans  Thôtel  de  la  première  présidence,  et 
aussi  au  rez-de-chaussée  de  la  salle  des  pas-perdus.  Ce 
rez-de-chaussée  a  été  aménagé  :  tous  les  murs  inutiles  à 
la  stabilité  de  la  construction,  et  qui  y  avaient  été  accu- 
mulés pour  satisfaire  aux  circulaires  administratives  de 
plusieurs  siècles  sur  l'installation  des  prisons,  ont  été  sup- 
primés. L^aération  des  salles  ne  peut  que  se  bien  trouver 
d'une  semblable  mesure,  utile  également  à  l'assainisse- 
ment des  murs.  Ce  travail  nous  a  permis  la  reconstitution 
d'une  salle  de  gardes,  qui  servira  d'entrée  aux  voitures 
cellulaires.  Cette  salle,  avec  sa  grande  cheminée  du  temps 
et  la  retombée  de  ses  voûtes  sur  un  pilier  central,  est  d*un 
réel  intérêt.  C'est  un  exemple  de  la  facilité  avec  laquelle 
on  savait  autrefois,  à  l'aide  des  plus  simples  moyens,  obte- 
nir un  saisissant  résultat  artistique. 

Un  fait  singulier  se  produit  fréquemment  dans  les  édi- 
fices de  cette  époque  :  les  précautions  à  prendre  pour  la 
stabilité  des  constructions  sont  moins  rigidement  obser- 
vées que  les  lois  intuitives  de  l'art. 

Ainsi,  les  travaux  d'appropriation  exécutés  sous  la  salle 
des  pas-perdus  nous  ont  révélé  une  négligence  véritable- 
ment incroyable  des  premiers  constructeurs.  Ceux-ci,  en 


10 

effet,  se  sont  contentés  (nous  Pavons  vu  par  des  sondages 
pratiques  près  de  la  rue  aux  Juifs,  aussi  bien  que  près  de 
la  rue  Saint-Lô)  d'abattre,  en  1499,  les  maisons  de  Sigot 
et  de  la  Palette  et  les  deux  du  Petit-Dourdonne,  pour 
l'acquisition  desquels  les  gens  de  justice  avaient  été  impo- 
sés de  1000  livres.  Ils  n'ont  aucunement,  dans  l'établis- 
sement de  leurs  murs  de  refend,  cherché  un  sol  de  bonne 
qualité  :  les  caves  des  maisons  primitives  ont  été  rem- 
blayées, et  les  murs  construits  sur  un  béton  appuyé  sur  ces 
remblais.  Ceux-ci  en  se  tassant  ont  amené  des  mouve- 
ments qui  ne  se  sont  pas  fait  attendre.  En  i5o2,  des  ex- 
perts signalaient  les  désordres  survenus  dans  les  pignons, 
rue  Saint-Lô  et  rue  aux  Juifs  (les  lézardes  de  ce  dernier  y 
sont  encore  apparentes).  Ce  qui  nous  étonne,  c'est  que 
ces  pignons,  bien  que  consolidés  en  i5o2,  soient  encore 
debout.  Le  tassement  des  remblais  situés  sous  le  béton  a 
produit  un  vide  qui  atteint  quelquefois  70  centimètres,  et 
le  béton,  ainsi  que  les  maçonneries  supérieures,  s'appuie 
uniquement  sur  les  murs  des  maisons  rasées,  lesquels 
murs  coupent  d'une  façon  fort  irrégulière  le  vide  provenant 
du  tassement  du  remblai^  et  ne  sont  pas  situés  le  moins  du 
monde  sous  les  murs  supérieurs  du  Palais. 

D'ailleurs,  quand  nous  avons  cherché  à  raccorder  avec 
les  assises  du  monument  ancien  celles  de  la  construction 
nouvelle,  il  nous  a  été  impossible  de  le  faire,  les  dénivel- 
lations provenant  des  tassements  étant  générales,  irrégu- 
lières et  atteignant  parfois  plus  de  3o  centimètres. 

Cette  situation  n'offre  d'ailleurs  rien  d'inquiétant  pour 
le  présent;  les  mouvements  qui  pouvaient  se  produire 
sont  bien  finis;  —  et  si  des  voitures  trop  pesamment 
chargées  ne  viennent  pas  détruire  l'équilibre  actuel  par 
des  trépidations  violentes,  il  y  a  tout  lieu  de  croire  que 
cet  équilibre  se  perpétuera  pendant  des  siècles  encore. 
Nous  croyons  néanmoins  devoir  signaler  l'utilité  qu'il  y 
aurait  à  interdire  d'une  manière  permanente  la  circu- 
lation des  voitures  lourdes  dans  l'étroite  rue  aux  Juifs  ; 


II 

c'est  de  ce  côté,  en  effet,  que  le  mal  est  le  plus  grand. 

Doit-on  rendre  le  maître  de  F  œuvre,  le  modeste  inconnu 
créateur  d'une  merveille,  responsable  d'une  telle  négli- 
gence? Nous  ne  le  pensons  pas.  Uexiguité  des  ressources 
mises  chaque  année  à  sa  disposition,  le  manq<ue  d'indcpen- 
dance,  de  considération  et  d'autorité  morale,  attestes  par 
Tanonymat  opiniâtre  qui  le  poursuit  dans  toutes  les  pièces 
ou  actes  qui  devraient  le  désigner,  les  tracasseries  et  les 
jalousies  violentes  qui  ont  existé  entre  la  ville,  qui  payait 
la  grande  majorité  de  la  dépense,  la  magistrature  et  la 
royauté,  qui  y  contribuaient  un  peu  et  en  profitaient  le 
plus,  expliquent  la  difficulté  de  cette  situation  et  les  incon- 
vénients pratiques  qui  en  résultèrent. 

Ces  inconvénients,  nous  espérons  ne  pas  les  connaître  : 
le  département,  la  magistrature  et  la  ville  sont  en  complet 
accord  et  se  prêtent  le  plus  entier  et  le  plus  dévoué  con- 
cours. Trente  et  une  années  suffisaient  à  peine  pour  four- 
nir au  maître  ancien  les  ressources  qui  devaient  lui  per- 
mettre de  terminer  son  œuvre  de  génie.  L'architecte 
moderne,  plus  favorisé,  espère  achever  sa  construction 
en  trois  années  au  plus.  Il  est  secondé  par  des  entre- 
preneurs d'élite  et  soutenu  par  toutes  les  sympathies.  Le 
concours  de  toutes  les  bienveillances  n'est  pas  trop  pour 
diminuer  notre  appréhension  ;  nous  sentons  combien  le 
voisinage  est  redoutable,  et  nous  éprouvons  pour  nous- 
méme  la  vérité  de  cette  parole  de  Fontenelle  :  c  II  est 
des  gens  auxquels  on  succède,  mais  qu'on  ne  remplace 
pas.  > 

Il  est  vrai  que  loin  de  chercher  à  remplacer,  nous  n'avons 
qu'une  ambition  :  compléter,  ainsi  qu'aurait  pu  le  faire 
l'architecte  du  xvt^  siècle,  vivant  à  notre  époque,  et  chargé 
d'exécuter  le  complément  de  son  Palais. 

Ce  complément  coûtera  i,85o,ooo  francs. 

Le  Palais  ancien  avait  coûté  3oo,ooo  livres  en  i53i, 
époque  à  laquelle  il  était  considéré  comme  suffisamment 
terminé,  dont  90,000  livres  environ  pour  la  grande  salle 


12 

des  Procureurs.  (Registre  secret  du  Parlement,  cité  par 
Floquet.) 

Si  Ton  tient  compte  du  pouvoirde  l'argent,  les  3oo,ooo  liv. 
équivaudraient  à  1,800,000  fr.  aujourd'hui,  d'après  les  tra- 
vaux de  M.  Natalis  de  Wailly  sur  les  variations  de  la  livre 
tournois. 

Or,  la  partie  achevée  en  i53i  comprenait  la  salle  des 
pas-perdus,  la  salle  des  assises  jusqu*à  la  tourelle  du  centre 
de  la  cour  inclusivement,  ainsi  que  le  rez-de-chaussée  de 
la  partie  à  droite  de  cette  tourelle.  La  construction  de 
cette  partie,  faite  actuellement,  ne  dépasserait  pas  sensi- 
blement ce  chiffre  de  1,800,000  fr.  Or,  le  perfectionnement 
des  voies  et  moyens  de  communication  depuis  le  xvi^  siècle 
a  diminué  d'une  manière  considérable  le  prix  de  revient 
des  matériaux.  Comme  ceux-ci  viennent  sensiblement  des 
mêmes  carrières,  situées  dans  la  vallée  de  TOise,  il  en 
résulte  que  l'énorme  diminution  du  prix  des  transports  a 
amélioré  d'autant  les  salaires  et  la  main-d'œuvre  dans  une 
proportion  qui  ne  serait  pas  moindre  de  80  0/0,  ce  dont 
il  est  impossible  de  ne  pas  se  féliciter. 

L'ancien  Palais  a  été  construit  d'une  manière  qui  se 
rapproche  beaucoup  du  mode  dit  aujourd'hui  en  régie.  Les 
matériaux  étaient  fournis  par  la  ville,  et  amenés  à  pied 
d'œuvre  t  le  plus  près  que  faire  se  pourra,  »  dit  le  devis  de 
1499,  rapporté  par  Robert  le  Lieur.  Roger  Ango  recevait 
en  octobre  iSog  le  payement  d'une  somme  de  1,906  livres 
4  sous  6  tournois  pour  ouvrages  par  lui  fait  faire  au  Palais 
de  justice,  depuis  Pâques  jusqu'à  la  Saint-Michel. 

Roger  Ango,  et  ses  fils  Robert  et  Richard  étaient  donc 
les  régisseurs  comptables  de  la  ville,  —  pour  employer  une 
locution  administrative  moderne.  —  Étaient-ils  aussi  les 
auteurs  du  projet?  Rouland  le  Roux,  l'architecte,  ou, 
comme  on  disait  alors,  le  maître  des  œuvres  de  la  cathé- 
drale (l'auteur  du  tombeau  des  Cardinaux  d'Amboise  et 
du  grand  portail  de  Notre-Dame)  a  certainement,  comme 
juré,  mesuré  des  pierres  apportées  de  Saint -Leu,  en  i5o9, 


i3 

pour  la  construction  du  Palais  de  justice  :  auquel  des  deux 
sommes-nous  redevables  du  monument  qui  nous  occupe  ? 
Le  grand  homme  qui  a  doté  Rouen  et  son  pays  de  ce 
splendide  édifice  est  encore  anonyme;  il  est  triste  de  penser 
que  s'il  eût  vécu  en  Italie,  les  cites  à  Tenvi  se  dispute* 
raient  T honneur  de  lui  avoir  donné  naissance,  et  son  nom 
serait  célébré  partout.  Les  anciens  rendaient  un  culte  au 
dieu  inconnu  ;  si  Fart  mérite  un  culte,  qu'il  nous  soit  per- 
mis d'apporter  ici  à  Tartiste  inconnu  le  modeste  témoi- 
gnage de  notre  religieuse  admiration. 

La  Commission  remercie  M.  Lefort  d^une  page  his- 
torique qui  marquera  -dans  ses  archives,  et  examine 
avec  intérêt  les  objets,  provenant  des  fouilles,  si  curieux 
à  différents  titres,  tels  que  :  un  peigne  mérovingien^  un 
pichet  rouge  à  engobe  gravée  du  xve  siècle,  avec  Tîns- 
cription  rapportée  ci-dessus,  une  terrine  rouge  de  la 
même  époque,  aussi  à  engobe  gravée,  présentant  au 
fond  le  monogramme  du  Christ  —  J  H  S  —  et,  sur 
le  marli,  cette  inscription  — JE  VOSTRE  S  VIS  (i) 
—  et  surtout  le  très  beau  sceau  matrice  ovale  du 
xiii«  siècle,  de  MATLLIS,  dont  M.  Gouellain  nous 
avait  fait  admirer  le  surmoulage  dans  une  précédente 
séance  (2). 

Toutes  ces  reliques  du  vieux  Rouen  sont  destinées 
au  Musée  d'antiquités. 

Il  est  à  remarquer  qu'on  n^a  rien  trouvé  qui  eût 
rapport  aux  Juifs  dans  ce  quartier  qui  portait  leur 
nom  (3)  et  qu'ils  habitèrent  pendant  au  moins  trois 

(i)  Cf.  Catalogue  du  Musée  d'Antiquités  de  Rouen  y  par  Tabbé 
Cochet,  1875,  p.  59. 

(2)  Séances  de  la  Commission  des  Antiquités. 

(3)  Cf.  Rues  et  places  de  Rouen,  verbo  le  Clos  aux  Juifs,  par 
Nicétas  Périaux,  p.  ii^'i^o. 


14 

cents  ans,  du  xi«  au  xiv^  siècle,  depuis  Philippe  !«'  jus- 
qu'à Philippe-ie-Bel. 

—  Sous  le  titre  d^ Analyse  partielle  de  la  correspon- 
dance imprimée  offerte  à  la  Commission  des  anti- 
quités, dans  sa  séance  du  iS  décembre  i88i,  le 
secrétaire-adjoint  donne  l'indication  de  ce  qui,  dans 
cette  Correspondance^  se  rapporte  aux  Normands  ou 
à  la  Normandie. 

—  M.  de  Beaurepaire  donne  lecture  de  la  notice 
suivante  relative  au  Prieuré  de  Saint-Michel,  sur  la 
côte  Sainte-Catherine  de  Rouen> 

Je  ne  sais  si  près  de  nous  on  trouverait  aisément  un 
lieu  plus  propre  à  faire  saisir  les  différences  des  temps 
que  cette  côte  de  Sainte-Catherine,  que  nous  avons  tous 
plus  d'une  fois  parcourue,  soit  pour  satisfaire  notre  curio- 
sité d'archéologues,  soit  pour  nous  procurer  le  plaisir  d'un 
des  points  de  vue  les  plus  variés  et  les  plus  intéressants 
qu'on  puisse  imaginer.  Cette  côte  qui  domine  la  ville, 
qu'on  ne  gravit  pas  sans  peine,  n'a  cependant  présente 
qu'un  faible  obstacle  aux  entreprises  de  nos  ingénieurs. 
La  montagne  ne  s'est  pas  montrée  plus  rebelle  que  le 
fleuve  voisin.  Comme  lui,  elle  a  dû  se  prêter  au  passage 
des  rapides  locomotives.  A  sa  base,  et  presque  au  niveau 
des  prairies  de  Sotteville,  une  route  souterraine  la  tra- 
verse de  part  en  part,  pendant  qu'un  chemin  large  et 
facile,  récemment  tracé,  serpente  autour  de  ses  hauteurs, 
autrefois  réputées  inaccessibles.  Ses  flancs,  du  côté  de 
Saint-Paul,  ouverts,  au  siècle  dernier,  pour  la  confection 
de  la  grande  route  de  Rouen  à  Paris,  ont  été,  du  haut  en 
bas,  et  sur  une  grande  profondeur,  entames  pour  fournir 
les  matériaux  nécessaires  aux  constructions  de  la  cité,  et 
ce  sol  factice,  h  l'aide  duquel  récemment  on  a  rétréci  le 
lit  delà  Seine  et  on  lui  a  imposé  de  nouvelles  rives.  Ainsi 
l'on  a  vu  des  pentes  verdoyantes  qui  descendaient  autre- 


î5 

fois  jusqu'à  la  berge  du  Heuve,  remplacées  par  des  falaises 
abruptes,  assez  semblables  à  celles  du  rivage  de  la  mer  le 
long  du  pays  de  Caux.  Combien  nous  voici  loin  de  ces 
temps  où  c'était  une  affaire  sérieuse  pour  nos  échevins 
d'indiquer  au  jeune  roi  Louis  XI II  le  chemin  qu'il  devait 
suivre  pour  faire  son  entrée  dans  sa  bonne  ville  de  Rouen  (  i  ), 
sans  risque  pour  sa  personne  et  pour  son  train  I  où  Colbert, 
devant  l'opposition  inconsidérée  des  échevins  dt  cette 
même  ville,  renonçait  au  projet  qu'il  avait  conçu  de  faire 
ouvrir  un  grand  chemin  par  les  hauteurs  de  Bonsecours  (2)! 
où,  en  plein  siècle  de  Louis  XIV,  on  signalait  sur  le 
chemin  de  Paris,  à  quelques  lieues  de  nous,  de  grandes 
fondrières  où  s'abîmaient  les  voitures  et  les  voyageurs  (3)! 
Malheureusement,  si  bienfaisant  qu'il  soit,  le  progrès  ne 
saurait  s'accomplir  sans  quelques  pertes  plus  ou  moins 
fâcheuses.  Comme  nos  plaintes,  toutes  platoniques,  ne 
sauraient  rien  entraver  ni  faire  tort  à  personne,  on  nous 
pardonnera  cette  expression  timide  d'un  regret  :  Qu'est 
devenu  le  temps  où  sur  cette  côte,  aujourd'hui  inha- 
bitée, on  voyait  se  dresser  les  murailles  crénelées  et  le 
donjon  d'une  citadelle  royale,  mentionnée  au  bas  de  tant 

(i)  Voir  les  délibérations  de  la  vîlls  de  Rouen  161 7.  On  crai- 
gnait que  rhonneur  de  la  ville  ne  se  trouvât  compromis,  si 
Louis  XIII  venait  par  la  porte  Martainville.  Il  fallut,  aux  abords 
de  Rouen,  améliorer  les  routes  et  jeter  des  ponts  sur  la  rivière 
d'Aubette. 

(2)  Voir  cette  lettre  dans  les  Annales  des  Ponts-et-Chaussées. 
«  Le  roi  n'entendait  pas  faire  le  bien  des  Rouennais  en  dépit 
d*eux.  » 

(3)  Voir  les  Plumitifs  du  Bureau  des  finances  de  Rouen.  «  Sur 
le  grand  chemin  royal  du  Pont-Saint-Pierre,  qui  conduit  de 
Rouen  à  Écouis,  Andely,  Vernon,  Mantes,  Magny,  Gisors,  grands 
précipices  causés  par  les  inondations...  Entre  Téglise  de  Saint- 
Nicolas  du  Pont-Saint-Pierre  et  THermitage,  précipice  de  5  pieds 
de  profondeur  et  3o  pieds  de  largeur...  personnes  noyées;  il  y 
en  tofnb2  journ:llemcnt...  »  Commission  nommée,  29  oct.  1659. 


ï6 

d*ordonnances  de  nos  rois?  où  une  abbaye  célèbre  était 
abritée  dans  cette  enceinte  fortifiée  ?  où  l'on  rencontrait  à 
mi-côte  une  église  plus  modeste  dans  ses  proportions, 
dédiée  à  S.  Michel,  le  patron  des  lieux  élevés  ?  La  côte 
Sainte- Catherine,  que  Ton  appelait  autrefois  le  AfonN^e- 
Rouen^  a  perdu  de  son  cachet  pittoresque;  elle  n'a  rien 
conservé  de  son  aspect  monumental.  Plus  de  château, 
plus  d'abbaye,  plus  d'église!  II  ne  lui  reste  que  ces 
grands  mouvements  de  terrain  qui  indiquent  les  prépara- 
tifs des  sièges,  et  qui  subsisteront  longtemps  encore,  tant 
!a  terre  a  été  creusée  profondément.  Elle  n'offre  absolu- 
ment rien  de  religieux,  à  moins  de  reconnaître  ce  carac- 
tère au  cimetière,  qui  fut  relégué  là,  peu  d'années  avant  la 
Révolution,  comme  dans  une  solitude,  par  un  sentiment 
jusqu'alors  inconnu,  et  qui  était  déjà  comme  un  signe  de 
temps  nouveaux  et  d'une  société  nouvelle. 

De  ces  trois  établissements  que  je  viens  de  nommer,  le 
seul  dont  je  me  propose  de  vous  entretenir,  est  le  prieuré, 
non  qu'il  présente  plus  d'intérêt  que  les  autres  (c'est  le 
contraire),  mais  parce  qu'il  ne  demande  qu'une  notice  de 
peu  d'étendue.  Il  me  suffira  de  l'appeler  succinctement 
quelques  particularités  relatées  par  D.  Pommeraye,  dans 
son  Histoire  de  l'abbaye  de  Saint-Ouen,  en  y  mêlant  ce 
que  j'ai  pu  découvrir,  çà  et  là,  dans  des  documents  négligés 
par  cet  auteur,  ou  postérieurs  à  l'époque  où  il  vivait. 

Il  n'est  pas  douteux  que  le  prieuré  de  Saint-Michel,  dit 
plus  tard  le  prieuré  du  Mont-Gargan,  n^existât  antérieu- 
rement à  io3o,  date  assignée  à  la  fondation  de  Tabbayede 
Sainte-Catherine.  La  pièce  la  plus  ancienne  où  il  en  soit 
fait  mention  est  une  charte  du  duc  Richard  II,  par  laquelle 
ce  prince  confirme  aux  moines  de  Saint-Ouen  t  montem 
Sancti'Michaelis  cum  ecclesia  et  pratis  ad  eam  pertinenti^ 
bus  sub  fluvium  Rodebec  quant  dédit  Rodulphus  qui  prœ- 
uominabatur  Torta  ». 

Vers  le  temps  de  l'abbé  Nicolas  de  Normandie,  qui  fut 
fils  et  frère  de  nos  ducs,  et  qui  gouverna   l'abbaye  de 


î; 


Saint-Ouen  dans  la  seconde  moitié  du  xi°  siècle,  une  dame 
de  Pavilly  (de  Palliaco),  nommée  Odda,  du  consentement 
de  Hugues,  son  fils  (i),  donna  aux  moines  de  Saint-Ouen 
et  spécialement  à  ceux  d'entre  eux  qui  desservaient  l'église 
de  Saint-Michel  du  Mont-de-Rouen,  60  acres  de  bois  à 
Normare  (2),  la  masure  (ïun  nommé  Valentin  et  une  autre 
masure  qui  avait  été  donnée  en  gage  à  Bernard  de  Blo- 
ville,  et  dont  on  venait  de  faire  le  rachat,  au  moyen  de 
fonds  fournis  par  le  prieur  de  Saint-Michel.  Cette  dona- 
tion, suivant  un  usage  alors  assez  commun,  fut  déposée, 
ainsi  que  le  marque  la  charte,  sur  l'autel  du  prieuré 

Ce  fut  dans  l'église  de  Saint-Michel  que  furent  déposées, 
en  attendant  que  l'archevêque  Guillaume  Bonne-âme  en 
fît  la  translation  solennelle  en  Tabbaye  de  Saint-Ouen,  les 
reliques  de  S.  Romain  et  de  S.  Godard,  que  ce  même  abbé 
Nicolas  avait  obtenues  des  moines  de  Saint-Médard  de 
Soissons. 

En  1142,  un  autre  abbé  de  Saint-Ouen,  Rainfroi, 
s'étant  démis  pour  raison  de  santé,  de  la  dignité  abbatiale, 
se  retira  au  prieuré  de  Saint-Michel,  où  il  vivait  encore 
avec  le  titre  de  prieur  en  1 1 5o. 

Ce  sont  là  des  documents  authentiques  qui  donnent 
déjà  une  idée  assez  favorable  de  Tantiquité  du  prieuré  de 
Saint-Michel,  mais  ils  ne  nous  apprennent  rien  de  sa  fon- 
dation, qu'il  faudrait  faire  remonter  à  une  époque  bien 
plus  reculée,  si  l'on  en  croyait  une  inscription  qu'on 
voyait  au  xvn^  siècle,  dans  la  chapelle  Saint-Michel,  et 
dont  Pommeraye  nous  a  conservé  le  texte  : 

(i)  La  famille  de  Pavilly  possédait  de  grands  biens  près  de  la 
côte  de  Sainte-Catherine,  notamment  un  fief,  dit  plus  tard 
le  fief  d'Esneval. 

(2)  Normare  est  le  nom  d'un  hameau,  encore  aujourd'hui  con- 
nu. C'était  autrefois  le  nom  d'un  bois  d'une  assez  vaste  étendue. 
Tout  le  plateau  entre  le  Mesnil-Esnard  et  TAndelle  paraît  avoir 
été  occupé  par  des  forêts. 

2 


t8 

«  Je  suis  Clovis  le  premier  Roy  chrétien 
Qui  ay  fondé  ceste  dévote  place, 
Semblablement  ay  fondé  Saint-Ouen. 
Entre  les  deux  n'y  a  pas  grande  espace. 
Je  régnois  lors  par  la  divine  grâce 
L*an  quatre  cens  quatre  vingts  et  quatre  ans. 
Priez  Dieu  pour  moy,  qu'il  efi'ace 
Tous  mes  péchez  et  ceux  de  mes  enfons.  » 

«  Il  y  a  grande  apparence,  ainsi  que  le  fait  observer  le 
savant  bénédictin,  que,  comme  le  poète  s'est  trompé  en 
ce  qui  concerne  Tabbaye  de  Saint-Ouen,  dont  il  attribue 
la  fondation  à  Clovis,  il  n*a  pas  mieux  rencontré  à  Tégard 
de  Téglise  de  Saint-Michel.  »  Toutefois,  sans  reporter 
aussi  loin  la  fondation  de  ce  prieuré,  Pommeraye  conjec- 
ture qu'elle  a  dû  suivre  de  bien  près  celle  du  Mont-Saint 
Michel  au  péril  de  la  mer,  qui  eut  lieu,  après  l'apparition 
de  l'archange  S.  Michel  à  S.  Aubert,  évêque  d'Avranches, 
en  l'an  709. 

Sans  prendre  le  moins  du  monde  parti  pour  ce  rimeur 
anonyme,  vraisemblablement  du  xvi^  siècle,  dont  l'asser- 
tion nous  doit  être  à  bon  droit  suspecte,  je  me  permettrai 
de  faire  remarquer  que  ce  n'est  pas  lui  qui  a  créé  la 
légende;  il  n'a  fait  que  la  suivre  :  elle  existait  longtemps 
avant  lui,  et  elle  était  si  bien  admise,  qu'elle  est  rapportée 
de  la  manière  la  plus  positive  dans  un  mandement  des- 
tiné à  une  grande  publicité,  puisqu'il  devait  être  lu  par 
tous  les  cures  du  diocèse  à  leurs  paroissiens,  et  que  son 
objet  était  de  solliciter  les  aumônes  des  fidèles  pour  la 
restauration  de  la  chapelle  en  question. 

Ce  document  nous  a  paru  intéressant  par  ce  qui  s'y 
trouve  relaté  et  aussi  par  la  forme  de  sa  rédaction.  Nous 
en  donnons  le  texte  d'après  une  copie  du  xvii^  siècle^  que 
nous  avons  retrouvée  dans  les  archives  de  l'abbaye  de 
Saint-Ouen. 

c  A  tous  bons  Chrestiens  qui  au  jour  de  jugement  se 
verront  estre  appeliez  vrais  fils  et  filles  de  Dieu,  qui  voul- 


»9 

liront  aidier  h  réparer  h  digne  et  saincte  chapelle  de 
mons.  S.  Michiel  angre  du  Mont-de-Garguen,  laquelle  est 
la  première  chapelle  qui  oncquesfut  fondée  en  royaume  de 
France,  en  Tonneur  et  révérence  de  mons.  S.  Michel  ;  et  la 
fonda  le  roy  Clovis,  qui  fut  le  premier  roy  chrestien  qui 
oncques  fut  en  France,  auquel  Dieu  envoya  les  ampoulles 
de  quoy  il  fut  sacré  par  certain  angre  ;  et  pour  la  grâce 
que  Nostre  Seigneur  luy  fist,  il  fonda  ceste  noble  chapelle, 
laquelle  a  esté  des  truite  parle  làict  et  occasion  de  la  guerre, 
par  quoy  toute  bonne  personne  en  doit  avoir  grant  pitié. 
Car  c'est  notre  premier  advénement  que  Téglise,  par  quoy 
il  n'est  pas  bon  chrestien  qui  n'a  pitié  de  Téglise  et  de  la 
destruction  qui  y  a  esté  faicte,  comme  chacun  sait,  et 
comme  plusieurs  personnes  de  loing  et  de  près  y  viennent 
réquérir  grâces  et  merci  à  Dieu  et  à  S.  Michiel  angre, 
lequel  est  chevalier  de  Paradis  et  prévost  de  Paradis,  con- 
diteur  et  garde  des  âmes  de  tous  ceuls  qui  ont  en  luy  par- 
faicte  dévocion.  Car  oncque  créature  ne  fut  tant  descon- 
fortée, soit  en  adversité  de  mal,  ou  en  péril  de  feu  ou  e:i 
temptacion  de  Tennemy  d*enfer,  qu'ils  niaient  esté  fort  ei 
hastivement  secourus  par  luy.  Car  c'est  celui  qui  se  combat 
contre  Tennemy  d'enfer  et  [est]  avocat  envers  Nostre  Sei- 
gneur Jésus-Christ,  par  quoy  tous  ceus  et  celles  qui  ceste 
grâce  vouldront  acquérir  doivent  avoir  Téglise  de  mons. 
S.  Michiel  pour  recommandée.  Et  aussi  nostre  souverain 
prélat,  meu  en  pitié,  nous  mande  à  tous,  curés  et  chappel- 
lains,  que  nous  vous  recommandions  la  chappelle  de  mons. 
S.  Michiel,  et  que  nous  vous  amonestions,  de  mot  en  mot, 
la  grand  pitié  et  désolation  d'icelle  chappelle,  et  comme 
en  pitié  et  osmone  il  vous  plaise  à  eslargir  et  envoier  de 
vos  biens  que  Dieu  vous  a  prestez  en  ceste  mortelle  vie, 
soit  cire  pour  enluminer  la  dite  chappelle,  ou  or  ou  argent 
entier,  quassé  ou  rompu,  pour  aidier  à  reparer  les  reli- 
quères  et  galices  de  lad.  église,  et  aussi  que  le  sainct  ser- 
vice divin  y  soit  faict  et  accompli  comme  autrefois  a  esté. 
Et  à  tous  ceus  et  celles  qui  de  leurs  biens  y  envoyèrent, 


20 

nostre  sainct  père  le  pape,  qui  est  Dieu  en  terre,  leur 
donne,  pour  le  sauvement  de  leurs  âmes  les  grâces  et 
pardons  qui  ensuivent,  c'est  assavoir  :  à  la  Nativité  de  la 
Vierge  Marie,  ung  an  et  xl  jours  de  vray  pardon  ;  à  la 
Saint-Ouen,  ung  an  et  xl  jours;  à  la  Saint-Nigaise,  ung 
an  et  xl  jours  ;  à  la  dédicace  de  la  dite  église  de  Saint- 
Ouen,  ung  an  et  xl  jours  de  vray  pardon,  et  par  tous  les 
octaves  ded.  festes,  ung  an  et  xl  jours  de  vray  pardon. 
Item,  mons.  le  cardinal  de  Sainle-Crois  de  Jérusalem  y  a 
donné,  en  la  Nativité  de  N.  S.  Jésus-Christ,  cent  jours  de 
vray  pardon;  à  la  Nativité  de  la  Vierge,  cent  jours  de  vray 
pardon;  à  la  Nativité  de  S.  Jehan  Baptiste,  cenl  jours  de 
vray  pardon;  à  la  S.  Pierre  et  S.  Paul,  cent  jours  de 
vray  pardon  ;  à  la  S.  Martin,  cent  jours  de  vray  pardon  ; 
à  la  S.  Ouen,  cent  jours  de  vray  pardon.  Item,  tous  les 
bienfaiteurs  de  mons.  S.  Michiel  sont  associez  à  mort  et  à 
vie,  eulx  et  tous  leurs  amis,  mors  ou  vifs,  en  toutes  les 
messes,  prières  et  oraisons  qui  sont  et  seront  jamais  faictes 
en  l'abbaye  de  mons.  S.  Ouen  de  Rouen  et  en  toutes  les 
églises  dépendantes  d'icelle.  Sy  en  faictes  tant,  tous  et 
toutes,  que  Dieu  et  mons.  S.  Michiel  vous  en  saichent  grey, 
et  que  devant  Dieu,  au  jour  périlleux,  il  soit  vostre  advo- 
cat  et  escu  contre  Tennemi  d'enfer  ;  et  de  Dieu  soit-il 
benoist  que  bien  y  fera  !  » 

Le  nom  du  cardinal  de  Sainte-Croix  permet  de  dater  ce 
document  à  quelques  années  près.  Ce  prélat  n'a  pu  oc- 
troyer des  indulgences  pour  la  restauration  du  prieuré  de 
Saint-Michel,  qu'en  vertu  de  ses  fonctions  de  légat  du 
Saint-Siège,  qu'il  exerça  en  France  au  temps  de  la  domi- 
nation anglaise.  Les  guerres  auxquelles  il  est  fait  allusion 
sont  précisément  celles  qui  s'engagèrent  entre  l'Angleterre 
et  la  France  sous  Charles  VI  et  sous  Charles  VII,  et  prin- 
cipalement ce  siège,  aussi  long  que  meurtrier,  que  Rouen 
eut  à  soutenir,  en  141 2,  contre  l'armée  de  Henri  V.  Ces 
mots,  la  grand  pitié  de  la  chapelle^  sont  bien  de  la  langue 
de  cette  triste  époque.  Ils  nous  rappellent  cette  exprès- 


21 

sion  touchante,  par  laquelle  Jeanne  d'Arc  expliquait  son 
héroïque  résolution,  et  indiquait  le  motif  de  son  sublime 
dévouement  :  «  La  grand  pitié  qui  était  au  royaume  de 
France!  • 

Les  termes  de  ce  mandement  nous  autorisent  à  penser 
que  si  la  chapelle  avait  été  pillée  et  endommagée,  elle 
n'avait  pas  cependant  été  démolie,  puisqu^l  n*est  pas  fait 
allusion  à  des  travaux  de  reconstruction. 

Les  guerres  de  religion  lui  furent  plus  funestes.  Il  est 
certain  qu'elle  fut  jetée  bas  par  les  protestants  en  i562, 
puisque,  peu  de  jours  après  que  Charles  IX  eut  repris  la 
ville  de  Rouen  sur  le  prince  de  Condé,  le  prieur  de  Saint- 
Michel  s'adressait  au  Parlement,  et  lui  demandait  restor 
d'une  somme  de  7,000  1.  t.  sur  les  gens  de  la  nouvelle 
religion,  qui  avaient  démoli,  rasé  et  abattu  l'église  et  les 
maisons  du  prieuré. 

A  peine  reconstruite,  elle  se  vit  en  butte  à  de  nouveaux 
orages,  à  l'époque  de  la  Ligue,  lorsque  l'armée  royale, 
commandée  par  Henri  IV,  vint  mettre  le  siège  devant  la 
ville  de  Rouen.  Je  serais  porté,  cependant,  à  supposer 
qu'elle  ne  fiit  pas  démolie,  parce  que,  dans  les  premières 
années  du  xvii*  siècle,  on  trouve  un  devis  des  travaux  à 
faire  à  l'église  Saint- Michel,  et  que  ce  devis  a  trait,  non 
pas  à  une  reconstruction,  mais  à  une  augmentation  de 
l'édifice.  On  devait  démolir  le  pignon  du  côté  de  l'autel, 
prolonger  l'église  de  dix-huit  pieds,  en  donnant  à  la  par- 
tie nouvelle  deux  travées,  comme  à  la  partie  conservée. 
Les  murs  devaient  être  faits  «de  caillou  biset  et  chaîne  de 
pierre,  avec  deux  ovales  de  pierres  de  taille,  une  de  chaque 
côté,  l'une  et  l'autre  de  deux  pieds  de  diamètre.  Ces  murs 
devaient  avoir  trois  pieds  d'épaisseur  à  leur  base,  afin 
d'être  en  état  de  résister  aux  coups  de  vents  et  à  la  pous- 
sée des  voûtes  qui  devaient  être  de  pendant,  avec  branches 
d'ogive  et  pierres  du  Val-des-Leux,  le  tout  couvert  de 
caillou  biset  à  double  lit  de  ciment,  avec  un  enduit  de 
ciment  de  deux  poyces  d'épaisseur  par  dessus  le  caillou. 


22 

à  moins  que  l'entrepreneur  ne  préférât  les  couvrir  de  pierre 
du  Val-des-Leux,  de  la  plus  dure  que  faire  se  pourrait.  » 
On  laissait  à  l'entrepreneur  la  faculté  d'employer  aux  tra- 
vaux, les  matériaux  du  fort  Sainte-Catherine,  démoli  par 
ordre  du  Roi,  sur  les  réclamations  des  États  de  Norman- 
die. 

Je  doute  fort  que  ce  travail  ait  été  exécuté,  parce  que 
Pommeraye,  qui  écrivait  en  1662,  nous  apprend  que,  de 
son  temps,  c  le  prieuré  était  réduit  à  une  petite  chapelle 
bastie  de  pierre  de  taille,  de  douze  pieds  en  carré,  i  ce  qui  me 
paraît  être,  à  en  juger  par  les  dimensions,  la  chapelle  indi- 
quée sur  un  plan  assez  informe  joint  au  devis  que  je 
viens  de  citer.  On  voit  par  ce  plan  que  cette  chapelle  se 
terminait  par  un  double  pignon,  qu'il  n'y  avait  qu'une 
porte  à  cette  chapelle,  près  du  pignon,  dans  le  mur  laté- 
ral, du  côté  du  chemin  qui  montait  à  la  côte  Sainte- 
Catherine. 

Le  temporel  de  ce  prieuré  ne  fut  jamais  bien  considé- 
rable. Il  comprenait  quelques  rentes  au  faubourg  Martain- 
ville,  dans  les  villages  de  Pierreval,  d'Icquebeuf,  du  Mes- 
nil-Esnard,  dans  les  hameaux  du  Faulx  et  de  Normare, 
les  dîmes  de  la  paroisse  et  des  moulins  de  Cailly.  Pendant 
longtemps,  le  fief  de  Montigny,  près  Saint-Martin-de- 
Boscherville,  appartint  à  ce  prieuré  ;  il  fut  vendu,  en  iSoj, 
à  Guillaume  la  Vieille,  grènetier  de  Rouen,  pour  un  prix 
qui  prouve  combien  peu  de  chose  ce  pouvait  être  qu'un 
fief.  Un  autre  fief  sans  importance,  situé  aux  paroisses  de 
Saint-Pierre  et  de  Notre-Dame  de  Franqueville,  fut  éga- 
lement vendu,  en  1577,  à  un  bourgeois  de  Rouen.  Le  re- 
venu, en  1578,  ne  dépassait  pas  i5o  1.  On  l'évaluait  à 
800  1.  vers  le  milieu  du  siècle  dernier. 

Pendant  un  assez  long  espace  de  temps,  le  prieuré  du 
Mont-Saint-Michel  fut  administré  directement  par  les  reli- 
gieux de  l'abbaye  de  Saint- Ouen.  Plus  lard,  il  redevint 
un  bénéfice  régulier,  auquel  était  nommé  un  des  moines 
de  cette  abbaye. 


23 

J'ai  essaye  d'établir  la  liste  des  prieurs.  Je  n*ai  pu 
retendre  au-delà  des  premières  années  du  xvc  siècle,  ni 
arriver  à  toute  la  précision  de  dates  désirable. 

Voici  ceux  dont  j'ai  retrouvé  les  noms  : 

Dom  Bertrand  Le  Blanc,  dernier  mai  1408.  (Tabellion, 
de  Rouen j  reg.  9,  fo  181,  reg.  14,  f»  Si  v^.) 

Robert  de  Beaunay,  22  mars  1422  —  2  mars  1432. 

Thomas  Marie,  bachelier  en  théologie,  5  avril  1437  — 
27  mars  1448. 

Richard  Quesnel,  bailli  de  Saint-Ouen,  2  juillet  1479. 

Nicole  de  la  Fosse,  1479  —  ^  ^^^  '49>' 

Roger  Louvel,  bachelier  en  théoL,  24  nov.  1492  —  1499. 

Anseaulme  Du  Fay,  juin  1 5o6. 

Dom  Pierre  de  Rouves,  à  partir,  de  1 5o6.  Il  était  en 
même  temps  prieur  de  Chambray. 

Dom  Michel  de  Rouves.  Il  fut  pourvu  du  prieuré  sur 
la  résignation  de  Pierre  de  Rouves,  le  3o  octobre  1546. 
Il  se  qualifiait  encore  prieur  de  Saint-Michel  en  i35o. 
On  trouve,  avec  le  titre  de  prieur,  un  nommé  Nicole 
Le  Port,  du  27  mai  i55i  à  i552  ;  un  nommé  Coignard,  de 
i555  à  1557.  Michel  de  Rouves  reparait  comme  prieur  de 
i558  à  1578.  Il  était  en  même  temps  maître  de  Tœuvre  de 
Saint-Ouen. 

Guillaume  Hazard,  du  10  septembre  iSôy  à  161 5.  Après 
la  mort  de  Hazard,  Jean  Thomas,  religieux  profès  de 
Saint-Denis  en  France,  se  fit  nommer  par  Tabbé  de  Saint- 
Ouen  au  prieuré  de  Saint-Michel,  en  vertu  d'un  induit 
accordé  à  M*  Charles  Barentin,  conseiller  d'État.  Il  en 
jouit  quelque  temps.  Je  ne  sais  pour  quel  motif,  en  i632, 
le  titre  lui  en  fut  contesté  par  un  concurrent,  Jean  de  la 
Forge,  sous-prieur  de  Saint-Ouen.  Le  procès  fut  porté  au 
Conseil  d'Etat  et  se  termina,  suivant  toute  vraisemblance, 
heureusement  pour  ce  dernier,  puisque  c'est  lui  que  nous 
voyons  porter  le  titre  de  prieur  du  Mont-Saint-Michel  de 
i632  à  juillet  1646,  époque  de  sa  résignation  en  faveur  de 
Jean  de  Brétignières. 


24 

Jean  de  Brétignières,  tiers  chantre  cenelier  de  Saint- 
Ouen,  nommé  en  cour  de  Rome,  sur  la  résignation  de 
Jean  de  la  Forge,  1 2  des  calendes  de  juillet  1646,  obtint 
des  lettres  de  provision  à  l'archevêché,  le  1 2  novembre  de 
cette  année,  et  conserva  ce  prieuré  jusqu'en  1664,  époque 
où,  se  sentant  malade,  il  résigna  à  son  tour  en  faveur  de 
Pierre  Tesson.  Ayant  survécu  à  celui-ci,  il  se  fit  de  nou- 
veau pourvoir  à  ce  bénéfice  par  l'abbé  de  Saint-Ouen. 

Louis  Fremonty  docteur  de  Sorbonne,  religieux  de  Saint- 
Benoît,  est  cité  avec  le  titre  de  prieur  de  Saint- Michel  le 
5  décembre  1671.  Le  19  octobre  1674,  il  permute  avec 
Claude  Dufresne,  religieux  profès  de  Sainte-Foi  de  Lon- 
gueville,  trésorier  de  Cluny,  qui  lui  abandonna  son 
prieuré  de  Notre-Dame-de-Grâce,  au  diocèse  d'Amiens. 
Dufresne  était  encore  prieur  de  Saint-Michel  en  1689. 

Pommeraye  remarquait  qu'à  l'époque  où  il  écrivait 
(1612),  le  prieuré  de  Saint-Michel  du  Mont-Gargan  était 
le  seul  de  tous  les  bénéfices  de  Saint-Ouen  qui  fût  demeuré 
en  règle.  On  voit  par  les  noms  des  prieurs  qu'il  nous  reste 
à  citer,  qu'il  n'en  fut  pas  ainsi  jusqu'à  la  fin.  Après 
Dufresne,  nous  trouvons  en  effet  comme  prieurs,  des 
prêtres  séculiers,  présentés  par  l'abbé  de  Saint-Ouen  et 
nommés  à  seule  fin  de  leur  assurer  un  revenu  sans  grande 
charge.  Ce  furent  : 

Jean-Baptiste-Etienne  Duhamel,  abbé  d'Aubignac,  con- 
seiller au  Parlement  de  Normandie,  chanoine  de  Rouen, 
i3  juillet  1693- 1729. 

Charles- Félix  Galéan  de  Gardagne,  licencié  en  droit 
canon,  de  la  Faculté  de  Paris,  prieur  de  Saint-Martin  de 
Crécy,  1 741-1760. 

Thomas  de  Kennedy,  licencié  en  théologie  de  la  Facul- 
té de  Paris,  prêtre  du  diocèse  de  Cassel,  chanoine  de 
Cambray,  1760-1790. 

Bien  que  le  prieuré  ne  fût  plus  qu'un  bénéfice,  la  dévo- 
tion, s'il  faut  en  croire  Dom  Pommeraye,  se  serait  conser- 
vée dans  la  chapelle,  et  même  s'y  serait  accrue  t  par  le 


25 

.  zèle  de  quelques  personnes  de  pictc  et  de  mérite  qui  ve- 
noient  souvent  révérer  S.  Michel,  dans  cet  édifice  sacré, 
que  Ton  pouvoit  dire  avec  certitude  (ce  sont  ses  propres 
expressions)  le  plus  ancien  de  tous  ceux  du  diocèse,  qui 
sont  dédiés  à   ce  prince  des  Anges.  > 

Le  jour  de  Saint-Michel,  des  religieux  de  Saint-Ouen 
allaient  y  célébrer  le  service  divin  €  au  milieu  d'une  grande 
multitude  de  peuple  qui  s'y  rendait  de  toutes  parts.  >  Il 
paraît,  par  un  récit  de  miracle  du  xv«  siècle,  qu'on  y  por- 
tait anciennement  le  corps  de  S.  Romain,  et  il  est  à  pré- 
sumer que  cet  usage  était  fort  ancien,  puisque,  dans  un 
texte  de  1 1 5o,  cité  par  Pommcraye,  on  mentionne  les 
oblations  faites  par  les  fidèles,  en  ce  même  lieu,  aux  fêtes 
S.  Michel  et  S.  Romain. 

Ajoutons  à  ces  jours,  ceux  de  S.  Marc,  du  Vendredi- 
Saint  et  du  mercredi  des  Rogations.  En  1447,  il  s'engagea 
un  procès  entre  le  prieur  et  les  gardes  et  maîtresses  du 
métier  de  cirerie  en  menue  œuvre.  Ceux-ci  prétendaient 
avoir  droit  de  vendre  leurs  chandelles  aux  alentours  du 
prieuré,  spécialement  sur  le  chemin  ou  sente  menant  de 
Rouen  à  Saint-Michel,  et  de  Saint-Michel  à  la  chapelle 
Sainte-Catherine,  qu'ils  disaient  être  chemin  royal,  tan- 
dis que  le  prieur  soutenait  qu'il  appartenait  au  territoire 
de  son  église.  L'affaire  se  termina  par  un  accord  conclu 
entre  eux,  devant  le  lieutenant-général  du  bailli,  aux  termes 
duquel  <  les  chiriers  et  chirières  pouvoient  vendre  leurs 
chandelles  au  dessous  du  prieuré,  près  de  la  mare  ou 
citerne  d'icellui,  et  sur  le  chemin  ou  sente  sus-indiquée, 
aux  jours  de  dimenche  jusqu'à  l'eure  que  on  heurte 
premièrement  prime  en  l'église  Nostre-Dame  de  Rouen, 
et  semblablement  le  vendredi  aouré  et  le  mercredi  de  la 
sepmaine  des  Rogations  jusqu'à  none.  >  Le  procureur  du 
Roi,  Robert  Lermite,  protesta  contre  cet  accord  et  fit 'des 
réserves  formelles  en  faveur  du  Roi,  auquel  il  disait  que 
le  chemin  en  question  appartenait.  Je  ne  saurais  dire  si 
c'était  celui  que  je  vois  désigné,  dans  des  titres  de  la  même 


26 

époque,  sous  les  noms  de  ruelle  du  Roulle  ou  côte  de 
l'Arquet,  et  que  Ton  indique  comme  aboutissant  au  som- 
met de  la  montagne  et  comme  la  ligne  de  séparation  des 
paroisses  de  Saint- Paul  et  de  Blosville.  Une  autre  sente 
servait  de  limite  entre  les  terres  de  Saint-Michel  et  celles 
de  Sainte-Catherine  :.elle  longeait  un  clos  entouré  de  murs 
dit  le  clos  Freschet,  sur  lequel  était  de  temps  immémorial 
une  croix,  déjà  citée  sous  le  nom  de  croix  Freschet,  dans 
une  charte  de  1277.  Ces  chemins  aboutissaient^  vers  le  bas, 
à  des  marches  en  pierre  souvent  mentionnées  sous  le  nom 
de  degrés,  et  qui  étaient  un  reste  de  ce  long  escalier  que 
le  fameux  Enguerrand  de  Marigny,  en  i3i2,  au  temps  de 
sa  prospérité,  avait  fait  établir  à  grands  frais,  pour  accéder 
du  bas  de  la  côte  à  l'entrée  du  monastère  de  Sainte - 
Catherine.  C^était  par  là  que  montaient  les  processions  de 
toutes  les  paroisses  de  Rouen,  le  mercredi  des  Rogations, 
la  veille  de  l'Ascension  et  de  la  délivrance  du  prisonnier. 
Là,  comme  à  Saint-Gervais,  la  prédication  se  faisait  en 
plein  air.  Lorsque  l'église  Sainte-Catherine  eut  été  démo- 
lie, les  processions  prirent  une  autre  direction.  I^  station 
se  fit  d*abord  à  Saint-Vivien,  par  souvenir  de  l'ancienne 
route,  et  enfin  à  Saint-Nicaise,  comme  cela  a  lieu  encore 
aujourd'hui. 

D'après  Pommeraye,  il  y  aurait  eu  autrefois,  dans  ce 
prieure,  plusieurs  beaux  bâtiments  qui  accompagnaient 
l'église,  «  ce  qui  se  prouve,  dit-il,  par  l'éloge  de  Dom 
Renault  Du  Quesnay,  qui,  après  avoir  esté  élu  abbé  (i  1 39), 
y  alla  coucher  avec  son  train  qui  n'étoit  pas  petit.  » 

En  1378,  il  n'est  pas  douteux  que  le  prieuré  ne  fût 
encore  habité,  puisqu'il  est  question  de  gages  de  servi- 
teurs, de  dépenses  de  bouche,  etc. 

En  i555,  Jean  Coignard,  prieur  de  Saint-Michel,  loue  le 
prieuré  de  Saint- Michel  du  Mont-Gargan  à  Robert  Le 
Mercier,  prêtre  de  la  paroisse  de  Saint-Jcan-de-la-Neu- 
villc,  lequel  prit,  en  conséquence,  le  titre  de  vicaire  du 
prieuré.  Le  bailleur  se  réserva  une  chambre,  dans  laquelle 


27 

Vantique  abbé  de  Valmoni,  naguère  prieur  de  Pavilly, 
aurait  droit  de  se  loger  lui  et  son  train.  Le  preneur  s'en- 
gagea à  faire  dire  chaque  dimanche  de  Tannée  une  messe 
au  dit  s',  à  Theure  accoutumée,  et  une  autre  messe  le 
samedi,  à  entretenir  les  cordes  pour  la  sonnerie  de  la 
cloche,  à  fournir  le  luminaire  requis,  à  recevoir  les  reli- 
gieux de  Saint-Ouen  et  à  leur  fournir  bois  de  chauffage 
et  de  cuisine,  linge,  lits,  couverture  et  vaisselle,  aux  jours 
des  Rogations,  de  S.  Michel  et  de  S.  Marc. 

Mais,  dans  un  bail  du  4  décembre  1 5()4,  le  prieur,  en 
louant  le  prieuré,  n'obligeait  le  fermier  qu'à  fournir  un 
homme  pour  conduire  les  chevaux  employés  à  porter  à 
somme  les  matériaux  nécessaires  à  la  réparation  de  la  toi- 
ture de  la  chapelle.  La  terre  louée  consistait  en  deux  acres 
et  demie  de  terre  labourable  et  en  deux  clos  proches  de 
la  chapelle. 

Au  xviiic  siècle,  il  n'y  avait  plus  de  maison  attenante  à 
l'église,  et  les  terres  étaient  louées  à  un  propriétaire  voisin 
M.  Jacques  Levavasseur,  négociant  à  Rouen. 

Ce  fut  lui  qui  se  rendit  acquéreur,  le  20  décembre  1791, 
par  un  prix  de  2,900  l.,  de  la  chapelle  et  des  quatre  acres 
de  terre  qui  en  dépendaient.  La  Nation  s'en  était  emparée 
à  la  suite  de  la  suppression  des  Communautés  religieuses. 
Ainsi  finit  une  des  plus  anciennes  chapelles  du  diocèse. 
Il  n'en  reste  pour  en  indiquer  l'emplacement  que  la  base 
d'une  croix  que  nous  avons  vue  encore  pourvue  de  son 
fût,  il  y  a  quelques  années. 

Après  cette  lecture,  M.  Bouquet  demande  la  parole 
pour  en  confirmer  et  compléter  certains  passages. 

Notre  confrère  fait  observer  qu'il  est  bien  vrai  que 
Henri  IV  ne  put  causer  aucun  dommage  au  prieuré  de 
Saint-Michel,  lors  du  siège  de  Rouen  en  1 591-1592, 
car  il  ne  put  jamais  dépasser  ni  enlever  les  bastions  et 
la  courtine  du  vieux  fort  de  l'abbaye  de  Sainte-Cathe- 
rin e,  situés  à  Tautre  extrémité  de  la  montagne^  vers  Test. 


28 

Il  dit  aussi  qu'il  exista,  entre  Tabbaye  et  ce  prieuré, 
un  fort  du  nom  de  Montgommery,  élevé  en  i562, 
lorsque  ce  capitaine  défendit  Rouen  contre  Tarmée  de 
Charles  IX.  Il  porte  même,  dans  le  plan  de  Valdory, 
le  nom  de  «  Fort  de  Saint-Michel.  » 

De  l'autre  côté  du  prieuré,  sur  le  versant  méridio- 
nal de  la  montagne,  d*après  une  vue  de  Rouen  faite 
vers  1 58o,  et  tirée  d'une  cosmographie  allemande,  il 
existait  un  clos  entouré  de  murs  et  planté  d'une  vigne, 
dont  on  voit  très  distinctement  les  ceps.  Ce  clos  se 
prolongeait  sur  la  partie  delà  montagne  que  l'on  en- 
tama, vers  1 69  î ,  pour  faire  la  chaussée  jetée  sur  le  Pré 
aux  Loups,  entre  l'église  Saint-Paul  et  le  quai  de 
Paris. 

C'est  une  nouvelle  preuve  que  la  vigne  était  cultivée 
à  Rouen,  et  il  faut  l'ajouter  à  celle  qu'on  tire  du  nom 
de  «  Côte  de  la  Vigne  »,  donné  à  une  côte  placée  le 
long  de  la  route  de  Darnétal,  entre  le  cimetière  monu- 
mental et  l'église  de  Long- Paon. 

M.  Bouquet  se  souvient  d'avoir  vu,  rue  du  Haut- 
Mariage,  entre  la  rue  du  Mont-Gargan  et  la  rue  Pré- 
fontaine, dans  le  voisinage  de  la  première,  les  vestiges 
des  degrés  construits  par  Enguerrand  de  Marigny,  et 
par  lesquels  on  descendait  de  la  côte  Sainte-Catherine 
à  TAubette.  M.  Chéruel  en  a  parlé  dans  son  Histoire 
de  la  commune  de  Rouen. 

M .  de  Blosseville  demande  si  l'on  sait  à  quelle  époque 
a  disparu  le  dernier  vestige  de  l'abbaye  de  Sainte- 
Catherine,  que  l'on  a  vu  si  longtemps  se  dresser  au 
sommet  de  la  côte.  M.  Bouquet  répond  que  ce  fut  à  la 
fin  dedécembre  1870,  pendant  l'occupation  prussienne. 
Il  a  consigné  le  fait  avec  quelques  détails  dans  la 
Revue  de  la  Normandie,  et  ce  fut  le  dernier  article  de 


29 

cette  Revue,  où  Tauteur  a  introduit  un  chronogramme 
rappelant  ces  deux  faits  contemporains  : 

Omnia  in  hiscecidere  locis  :  non  faxa  superstant  (i). 

Un  membre  ajoute  que  M.  Sarrazin  a  donné,  en 
même  temps,  un  dessin  de  ce  pan  de  muraille  et  des 
ruines  de  Tabbaye  de  la  côte  Sainte-Githerine  dans  la 
même  Revue  (2), 

A  quatre  heures  et  demie  la  séance  est  levée. 

Le  Secrétaire- Adjoint  y 
Brianchon. 

(i)  Tout8*e8t  effondré  en  ces  lieux  :  il  n*y  reste  plus  pierre 
sur  pierre. 

En  réunissant  les  lettres  numérales  de  ce  vers  chronogramme, 
on  trouve  la  date  de  1870. 

oMnIa  lu  his  CeCIDere  LoCIs  :  non  saXa  sVpenunt. 
My  1000;  D,  5oo;  trois  C,  3oo;  L,  5o  ;  X,  10;  V, 5;  cinq  1,5. 

MDCCCLXVmiI^iSyo. 
(2)  Revue  de  la  Normandie,  t.  X,  année  1870,  p.  753-756. 


3o 


SÉANCE  DU   10  MARS  1882 

La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence 
de  M.  de  Béaurepaire,  vice-président. 

Présents  :  MM.  Paul  Baudry,  de  Bellegarde,  Biiliard, 
le  marquis  de  Blosseville,  Maillet  du  Boullay,  Bouquet, 
de  Girancourt,  de  Glanville,  Gouellain,  Le  Filleul 
des  Guerrots,  d'Iquelon,  Lefort,  Pelay,  Tabbé  Robert, 
Tabbé  Tougard,  et  Brianchon,  secrétaire-adjoint. 

Absents  et  excusés  :  MM.  le  vicomte  d'Estaintot, 
secrétaire,  le  docteur  Ernest  Guéroult,  de  la  Londe  et 
Sauvageot. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance,  en  date  du 
25  janvier  1882,  est  lu  et  adopté. 

—  La  correspondance  imprimée  comprend  : 

Annales  de  la  Société  historique  et  archéologique 
de  Château'Thierry,  années  1879-1880;  —  Société 
des  antiquaires  de  la  Morinie,  Bulletin  historique, 
3o*  année,  nouvelle  série,  i20«  liv.,  octobre,  novembre 
et  décembre  1881  ;  —  Bulletin  de  la  Société  des  anti- 
quaires de  l'Ouest^  4*  trim.  de  1881  ;  —  Album 
Caranda  (suite) .  Les  fouilles  de  Breny  (Aisne) ,  1 880. 
Envoi  de  M.  Frédéric  Moreau,  père. 

Sur  la  proposition  de  M.  le  Vice-Président,  qui  fait 
observer  que  c'est  pour  la  quatrième  fois  déjà  que  le 
département  de  la  Seine- Inférieure  est  l'objet  des 
splendides  attentions  archéologiques  de  M.  Moreau, 
en  souvenir  particulier  sans  doute  de  Pabbé  Cochet, 
dont  il  se  glorifie  d'être,  à  yb  ans,  devenu  Télève,  le 
secrétaire-adjoint  est  chargé  par  la  Commission  d'adres- 
ser au  généreux  donateur  de  Y  Album  Caranda  ses 
félicitations  et  ses  remercîments. 


3i 

—  M.  de  Beaurepaire  donne  communication  des 
lettres  suivantes  : 

La  première,  en  date  du  24  février  1882,  émane  du 
Ministre  de  l'instruction  publique  et  des  beaux-ans  et 
annonce  que  la  20«  réunion  des  Sociétés  savantes  aura 
lieu  à  la  Sorbonne  au  mois  d'avril  prochain. 

Une  seconde  lettre  de  M.  Mantz,  directeur  général 
des  beaux-arts,  relative  au  même  objet. 

—  Dans  une  lettre  du  26  février  1882,  M.  Lebreton- 
Deshayes,  maire  de  Graville-Sainte-Honorine,  expose 
à  M.  le  Président  de  la  Commission  des  antiquités  que 
le  mur  de  soutènement  de  la  partie  ouest  du  cimetière, 
très  rapproché  du  bas  de  Téglise  et  dernièrement 
reconstruit^  s^est  écroulé  de  nouveau  ;qu*une  délibéra- 
tion du  Conseil  municipal  du  19  février,  constatant 
cette  fâcheuse  situation,  vient  d^étre  transmise  à  M.  le 
Préfet  avec  plan  et  devis  à  l'appui,  et  que  si^  par  impos- 
sible, la  commune  de  Graville  restait,  en  cette  circons- 
tance, abandonnée  à  ses  seules  ressources,  elle  ne  verrait 
d'autre  moyen  de  sortir  de  difficulté  que  de  demander 
à  M.  le  Préfet  l'autorisation  de  transférer,  dans  une 
autre  partie  du  cimetière,  les  tombes  dont  Passiette  est 
continuellement  menacée,  et  d^abandonner  ainsi  le 
monument  à  une  ruine  certaine. 

M.  le  Vice-Président  résume  la  question.  Le  mur 
de  soutènement  de  la  partie  ouest  du  cimetière  de  Pab- 
baye,  situé  à  droite  du  grand  escalier^  s'étant  affaissé 
au  commencement  de  Tannée  dernière,  une  somme  de 
3,5oo  francs,  sur  l'avis  conforme  de  la  Commission  des 
antiquités,  a  été  accordée  par  le  département  pour  sa 
reconstruction  (i).  A  peine  relevé,  ce  mur  s^est  écroulé 

(i)  V.  Séances  de  la  Commission  des  antiquitcs  des  24  juin 
et  28  octobre  1881. 


32 

de  nouveau.  Il  y  a  là  un  fait  non  seulement  regret- 
table, mais  anormal,  qui  résulte  peut-être  d'un  vice  de 
construction. 

Le  secrétaire-adjoint  répond  que  précisément  ce  vice 
de  construction  a  été  reconnu  dans  Pexpertise  qui  a  eu 
lieu,  et  que  la  commune  de  Graville  est  bien  résolue 
d^exercer  son  recours  en  garantie,  à  défaut  de  Tarchi- 
tecte  lui-même,  décédé  depuis  rachèvementdes  travaux, 
sur  les  héritiers.  Cette  réclamation  est  trop  juste  pour 
qu'il  n'y  soit  pas  fait  droit,  dans  un  temps  plus  ou 
moins  éloigné,  mais  il  ne  faut  pas  oublier  que,  en 
attendant,  la  reconstruction  du  mur  est  urgente,  qu'il 
y  a  connexité  entre  la  conservation  du  cimetière  et  celle 
du  monument,  et  d^ailleurs  que,  en  raison  des  sacrifices 
considérables  qu'elle  s^est  imposée,  surtout  depuis  dix 
ans,  pour  Tentretien  de  la  vieille  abbaye  et  de  ses 
dépendances,  la  commune  de  Graville-Sainte-Hono- 
rine  se  recommande  d'une  manière  toute  particulière  à 
la  sollicitude  de  la  Commission. 

Examen  fait  du  plan,  et  sans  nier  l'intérêt  qui  s'at- 
tache à  Péglise  de  Graville,  plusieurs  membres  sont 
d'avis  que  la  relation  alléguée  entre  le  terre-plein  du 
cimetière  et  le  mur  de  Téglise  n'existe  pas. 

Elle  existe,  réplique  le  secrétaire-adjoint,  au  moins 
par  voie  de  conséquence,  et  si  Ton  transporte  les  tom- 
bes de  cette  partie  du  cimetière  dans  une  autre,  comme 
le  fait  craindre  M.  le  Maire,  et  qu'on  abandonne  les 
terres  à  leur  inclinaison  naturelle,  on  arrivera  vite  à  ce 
double  résultat  de  compromettre  l'église  en  découvrant 
ses  fondations  et  de  fermer  à  Tancien  cloître  et  au  pres- 
bytère leur  chemin  d'accès. 

La  réfection  d'un  mur  de  cimetière,  observent 
d'autres  membres,  est  une  charge  exclusivement  com- 


33 

munale,  étrangère  de  sa  nature  aux  attributions  de  la 
Commission. 

Sans  prendre  de  décision  pour  ou  contre,  la  Com- 
mission estime  que,  en  l'état,  ce  qu'il  y  a  de  mieux  à 
faire,  pour  elle,  c'est  d'attendre,  et  pour  l'administra- 
tion  de  Graville-Sainte-Honorine ,  de  revendiquer 
l'application  de  la  garantie. 

—  M.  le  Vice-Président  donne  lecture  d'une  lettre 
du  Conseil  de  fabrique  de  la  paroisse  de  Saint-Paul  de 
Rouen,  dont  le  résumé  suit  : 

Des  réparations  urgentes  ont  été  exécutées,  il  y  a  deux 
ans,  à  l'ancienne  église  Saint-Paul,  servant  actuelle- 
ment de  sacristie.  Ces  réparations  ont  été  faites  sous  la 
direction  de  Tarchitecte  de  la  ville  de  Rouen,  aux  frais 
de  la  ville  et  du  département.  Le  crédit  voté  n'a  pas 
été  épuisé.  Dès  1879,  le  Conseil  de  fabrique  avait 
signalé  l'utilité  qu'il  y  avait  à  réparer  la  toiture  du 
vieil  édifice  au  moyen  du  reliquat  de  fonds  disponible, 
mais,  avant  qu'on  eût  eu  le  temps  de  faire  les  démar- 
ches nécessaires,  l'exercice  s'est  trouvé  clos. 

Aujourd'hui,  considérant,  d'une  part,  le  fâcheux 
état  de  la  toiture  de  l'ancienne  église  Saint-Paul,  où 
la  solidité  des  voûtes  est  compromise  par  l'infiltration 
des  eaux  ;  de  plus,  la  nécessité  de  remédier  à  une  lézarde 
qui  existe  au  mur  qui  sépare  la  nef  d'une  petite  cha- 
pelle annexe  de  la  sacristie  ; 

Le  Conseil  de  fabrique  demande  qu'on  affecte  à  ces 
réparations  urgentes  la  somme  restée  disponible  sur  le 
chiffre  alloué  précédemment  au  nom  du  département. 

Pour  ne  pas  retarder  la  réalisation  des  travaux,  la 

fabrique  prendrait    la  place  de  la  ville,   c'est-à-dire 

qu'un  tiers  de  la  dépense  lui  resterait. 

En  conséquence,  la  dépense  totale  étant  évaluée  à 

3 


34 

i,200  francs,  si  la  Commission  départementale  voulait 
bien  allouer  900  francs,  la  fabrique  prendrait  le  sur- 
plus de  la  dépense  à  sa  charge. 

Après  en  avoir  délibéré,  la  Commission  est  d'avis  de 
recommander  tout  particulièrement  à  la  bienveillance 
de  M.  le  Préfet  une  demande  qui  a  pour  objet  la  con- 
servation d'un  des  plus  curieux  et  assurément  du  plus 
ancien  monument  de  la  ville  de  Rouen. 

Extrait  de  la  présente  délibération  sera  transmis  à 
M.  le  Préfet  par  les  soins  du  secrétaire-adjoint. 

—  La  parole  est  à  M.  Maillet  du  Boullay  pour  di- 
verses communications. 

La  première  concerne  la  proposition  faite  par  un 
sieur  Guionnet  d'offrir,  au  Musée  départemental  d'an- 
tiquités, un  groupe  d'animaux  en  bois  sculpté,  exécuté 
par  son  frère,  mon  en  1875,  et  sur  lequel  notre  con- 
frère demande  Tavis  de  la  Commission. 

Tout  en  laissant  à  l'honorable  directeur  du  Musée 
sa  complète  liberté  d'action,  et  pour  répondre  unique- 
ment à  la  question  qui  lui  est  posée,  la  Commission 
estime  que  l'oeuvre  dont  il  s'agit  étant,  par  sa  nature, 
étrangère  aux  objets  conservés  dans  le  Musée  d'anti- 
quités^ ne  saurait  y  être  admise  et  trouverait  mieux  sa 
place  au  Musée  de  peinture  et  de  sculpture  de  notre 
ville. 

Notre  confrère  a  reçu  les  restes  gallo-romains  et 
mérovingiens,  découverts  à  Alincourt  en  1880-1881, 
qui  lui  ont  été  expédiés  de  Lillebonne  par  M.  Duval, 
le  5  mars  courant.  Il  ne  dira  rien  aujourd'hui  de  cet 
envoi,  si  ce  n'est  qu'il  le  trouve  assez  important  pour 
en  faire  l'objet  d'un  rapport  spécial  à  la  prochaine 
séance. 

Enfin,  M.  Maillet  du  Boullay  a  été  assez  heureux 


35 

pour  retrouver  d'admirables  fragments  de  bois  sculpté 
déposés  au  poste  de  police  de  Saint-Sever,  et  provenant 
d'une  maison  du  xvi«  siècle,  démolie  à  Rouen,  rue  de 
la  Grosse-Horloge,  pour  Touverture  de  la  rue  Jeanne- 
d'Arc,  et  décrite  par  M.  De  la  Quérière.  Aussitôt,  dans 
un  rapport  adressé  à  M.  le  Maire  de  la  ville  de  Rouen, 
notre  confrère  a  sollicité  de  Fadministration  muni- 
cipale la  concession  de  ces  fragments  artistiques  au 
Musée  d'antiquités. 

M.  Pelay  demande  si  la  reconstruction  de  cette 
vieille  maison  ne  serait  pas  le  meilleur  moyen  d^en 
conserver  les  restes. 

M.  Maillet  du  BouUay  répond  que  la  réédification 
ne  pourrait  avoir  lieu  qu^aux  frais  de  la  ville  ou  du 
Musée,  dont  les  deux  budgets  sont,  l'un  trop  chargé, 
l'autre  trop  limité,  pour  permettre  de  songer  à  une  re- 
constitution qui  serait  d'ailleurs,  en  raison  des  pièces 
absentes  ou  endommagées,  presque  impossible. 

M.  le  Vice-Président  félicite  M.  Maillet  du  Boullay 
et  ajoute  que  la  Commission  fait  des  vœux  pour  le  suc- 
cès de  ses  négociations. 

—  M.  Brianchon  donne  lecture  à  la  Commission 
d''une  suite  aux  quelques  vieilles  maisons  de  Caudebec- 
en^Caux,  par  M.  le  docteur  Guéroult,  qui  achève,  avec 
la  plume^  ce  que  M.  Lesage  avait  commencé  avec  le 
crayon. 

MANOIR   DE  LA  PLAKQUETTE 

Cette  note  concerne  une  maison  dessinée  par  feu 
M.  Lesage,  et  qui  subsistait  encore,  il  y  a  vingt-quatre  ans, 
place  de  ia  Planquette^  n^  12. 

Elle  touchait,vers  rorient,  a  rhôtellerie  dite  de  Henry  IV 
dont  j'ai  parle  précédemment. 


36 

Elle  se  composait  d'un  pignon  en  pierre  de  taille,  don- 
nant, au  nord,  sur  la  place  ou  rue  de  la  Planquette. 

Le  rez-de-chaussée  offrait,  à  droite,  une  porte  à  cintre 
surbaissé;  à  gauche,  deux  fenestrelles  carrées,  avec  grilles. 

Le  premier  étage  était  éclairé  par  une  belle  ogive  à 
double  baie,  divisée  perpendiculairement  par  un  meneau 
épais,  que  surmontait  un  trèfle;  quatre  autres  ouvertures 
plus  petites  donnaient  du  jour  dans  le  grenier.  De  chaque 
côté,  à  la  base  du  pignon,  était  placée  une  gargouille. 

La  cour  peu  spacieuse,  où  Ton  accédait  par  le  corridor 
de  rentrée  septentrionale,  séparait  le  corps  de  logis  d'une 
seconde  habitation,  située  au  midi,  avec  vue  sur  la  Seine. 

L'ensemble  du  logement  accusait  le  style  de  transition 
du  xui«  au  XIV®  siècle. 

La  mention  la  plus  ancienne  que  j'aie  pu  me  procurer 
de  ce  manoir  m'a  été  fournie  par  la  sentence  rendue  le 
10  mars  i453,  par  Jean  Hovard,  bailli  de  Caux;  il  adjuge 
cette  maison  à  Guillaume  des  Hais,  écuyer,  s^  du  Boscgue- 
roult,  pour  se  payer  d'une  rente  de  cent  sols  avec  arrérages 
à  lui  dûs,  par  un  certain  Jean  Poisson,  bourgeois  de  Cau- 
debec,  propriétaire  de  la  dite  habitation. 

Les  titres  la  désignent  ainsi  :  t  Un  fonds  de  terre  avec 
hostel  et  jardin  planté^  qui  fut  et  appartint  à  feu  Denis 
Ancelf  aïeul  de  Jean  Poisson  (i);  le  tout  se  pourporte  et 
ex  tend  de  long  en  lay,  jouxte  d'un    costé   Guillaume  de 

(i)  Celui-ci,  ainsi  que  le  rapporte  le  registre  ms.  de  la  fabri' 
qui  de  Notre-Dame-de-Caudebec,  p.  26,  s'était  engagé  par  con- 
trat devant  les  notaires  de  Caudebec,  le  10  octobre  1407,  «pour 
5o  sols,  un  plat  d'oubliés,  et  les  œufs  dûs  à  Vabbate  de  Saint- 
Wandrille,  à  la  charge  de  pater  5  sols  à  lad,  fabrique,  en  dimi- 
nution desd.  5o  sols,  » 

Le  7  septembre  1412,  Denis  Âncel  acquitte  46  sols  en  à-compte 
desd.  5o  sols,  et,  le  7  octobre  1465,  un  acte  constate  «  que  les 
d.  5  sols  ont  été  aumosnés  par  Denis  Ancel,  afin  d'être  enterré 
avec  sa  femme  en  moustier,  qui  est  le  bas  de  Véglise  N,'D,  de 
Caudebec.  » 


3? 

Pinchemont^  d'un  bout  le  canel  de  Seyne,  les  murs  de  lad. 
ville  séants  dessus,  d'austre  costé,  Thomas  Boudiery  d'aulx 
tre  bout  la  rue  du  prieuré  et  pavement  du  Roy.  » 

A  la  mort  de  Guillaume  des  Hais,  son  fils,  Gille,  écuyer, 
hérita  de  l'immeuble,  lequel  passa,  après  son  décès,  à  ses 
héritiers.  En  i5i6,  c'étaient,  d'une  part  :  Robert  des  Hais, 
sr  de  Saint-Luc,  son  second  fils  ;  d'autre  part  :  Olivier  des 
Hais,  sr  de  Boscgueroult,  et  Gille  des  Hais,  s'  de  Tour- 
nebu,  les  petits-fils  de  Guillaume  (i)  et  enâmts  de  des 
Hais,  l'aîné. 

Ils  le  vendirent  d'un  commun  accord,  le  24  août  i5i6, 
moyennant  3oo  1.,  à  Guillaume  Le  Veaultre,  lieutenant  du 
bailli  de  Caux.  Cet  immeuble  est  indiqué  au  contrat 
comme  assis  en  la  ville  de  Caudebec,  rue  de  la  Planquette^ 
mais  les  voisins  n'étaient  plus  les  mêmes.  C'étaient  Robert 
Baqueler,  écuyer,  et  les  enfants  de  Richard  des  Hais  ei 
d^Isabelle  de  Pinchemont,  sa  femme. 

Le  17  septembre  i558,  Marguerite  Le  Veaultre,  héri- 
tière de  Guillaume  Le  Veaultre,  épouse  de  Guillaume 
Varin,  demeurant  à  Ectot-les-Baons,  délaissa  cette  pro- 
priété pour  le  prix  de  i,3oo  1.  tournois  et  20  escus  d'or,  à 
Me  Jacques  Grieu,  sr  de  Hocqueville,  conseiller  avocat  du 
Roi  au  siège  présidial  de  Caudebec. 

On  la  signalait  alors  comme  étant  bornée,  à  l'orient,  par 
noble  homme  Michel  Baqueler,  sr  de  Sorent  et  de  Calle- 
tot,  vicomte  de  Caudebec;  à  l'occident,  par  Pierre  Pai- 
sant  (2),  prêtre,  et  par  la  rivière  d'Ambion  ;  au  midi,  par 

(i)  Le  ms.  de  la  fabrique  de  Caudebec,  loc.  civ.,  apprend, 
p.  35,  que  le  prénommé  Guillaume  des  Hais,  sieur  du  Boscgue- 
roult, par  contrat  devant  les  notaires  de  Caudebec,  le  1 5  décem- 
bre 1451,  «  avait  fieffé  par  i3  livres  de  rente  une  maison  appe- 
lée Vécu  de  France,  seize  en  la  grande  rue  de  la  ville.  » 

(2)  Était-il  le  fils  de  Pierre  Faisant,  «  lequel  trespassa  le 
22^  iour  dejuing,  Van  1482,  »  et  dont  on  lit  Tépitaphe  devant 
l'autel  de  la  Ste  Vierge,  dans  Téglise  de  Rançon-les-Caudebec- 
en-Caux  ? 


38 

les  murailles  de  la  ville  et  le  fleuve  de  Seyne  ;  au  septen- 
trion, par  la  place  de  la  Planquette, 

Jacques  Grieu,  ]e  nouveau  propriétaire,  laissa  l'héritage 
à  son  fils,  Michel  Grieu,  qui  mourut  jeune  après  avoir 
légué  ses  biens  à  son  oncle,  Isembart  Grieu. 

Ce  dernier  vendit,  le  6  octobre  1574,  moyennant  i,5oo' 
1.  tournois,  à  M»  Pierre  Isnel,  s^  de  Soreng,  avocat  royal 
au  présidial  du  bailliage  de  Caux,  la  maison  en  question, 
dont  les  abornements  étaient  restes  les  mêmes,  sauf  à 
l'ouest,  où  ils  sont  formés  par  Nicolas  Deschamps  et  par 
l'hôtel  Sainte^ Anne, 

Elle  appartenait,  en  1680,  à  Angélique  Isnel,  femme  de 
Charles  Desmares,  chevalier,  domicilié  à  Valliquerville,  et 
fille  d'Adrien  Isnel,  s^  de  Veules,  conseiller  au  bailliage 
de  Caudebec. 

Le  10  janvier  1680,  elle  fut  vendue  par  dame  Angélique 
Isnel,  pour  2,400  1.  tournois,  à  M«  André  Le  Gras, 
avocat. 

Celui-ci,  le  1 3  mars  i683,  la  revendait  3,3oo  1.  à  Me  Jean 
Le  Maistre,  avocat  au  parlement  de  Rouen. 

Le  22  novembre  1749,  Marguerite  Le  Maistre,  seule 
fille  de  Michel-Alexandre  Le  Maistre,  président,  lieutenant 
civil  et  criminel  au  bailliage,  siège  présidial  à  Caudebec, 
arrière-petite-fille  d'André  Le  Gras,  cédait  pour  2,5oo  1. 
à  Mo  André  Pécuchet,  conseiller  du  Roi,  président  en 
l'élection  de  Caudebec,  y  demeurant,  le  logis  assis  place 
de  la  Planquette, 

Ce  logis  était  alors  borné,  à  Test,  par  les  héritiers  de  Jean 
Marpeley,  président  en  l'élection  de  Caudebec,  et  par  ceux 
de  Christophe  Dallet,  greffier  à  la  dite  élection  ;  à  Touest, 
par  Pierre  Guéret,  marchand  tanneur,  et  par  la  rivière 
d'Ambion. 

Le  27  octobre  1 784,  Pierre  Alexandre  Eléonore  Fenestre 
de  Hotot  (i),  sr  du   Mont-au-Roux,  la  Chevauchée,  etc., 

(i)  Louis  XVI  lui  accorda,  à  pareille  date,  par  brevet,  la   per 


39 

conseiller  au  bailliage  présidial  de  Caux,  prcsident  en 
rélection  de  Caudebec,  et  dame  Anne-Françoise  Pécuchet, 
son  épouse,  fille  et  unique  héritière  d'André  Pécuchet, 
abandonnent,  moyennant  12,000  livres,  le  logis  précité  à 
Me  Louis-FrançoiS'Romain  Lemarchand,  conseiller  pro- 
cureur du  Roi,  au  bailliage  présidial  de  Caudebec.  Il  était 
fils  du  président  au  bailliage  de  Caudebec  ;  il  épousa  Marie- 
Anne- Charlotte  Comare,  et  mourut  le  i«r  juillet  18a 5  (i). 

Le  5  octobre  iSSq,  le  manoir  de  la  Planquette  fut 
acheté  des  héritiers  du  procureur  Lemarchand,  moyennant 
12,000  fr.,  par  M.  Robert- Nicolas  Le  Féburc,  chevalier 
de  la  Légion  d'Honneur.  Trois  mois  plus  tard,  il  le  reven- 
dit pour  pareille  somme  (en  conservant,  toutefois,  une  por- 
tion de  jardin  en  £Eiçade  sur  le  quai) ,  a  M«  Pierre- Eugène 
Desbois,  notaire  honoraire,  maire  de  Caudebec  et  conseil- 
ler de  Tarrondissement  dTvetot. 

A  son  décès,  la  maison  passa  à  sa  veuve,  Françoise- 
Eugénie  Lebret. 

Le  i5  juillet  1857,  celle-ci  la  vendit  à  M.  Alexandre- 
Emile  Drouet,  ancien  maître-tanneur,  rentier  à  Caudebec, 
actuellement  possesseur  de  Timmeuble,  à  qui  je  dob  la 
communication  des  documents  qui  m'ont  permis  de  rédi- 
ger cette  notice. 

mission  de  démolir,  sur  une  longueur  d'environ  92  pieds,  la  par- 
tie des  murs  de  la  ville,  en  face  de  sa  propriété. 

(i)  De  leur  union  sont  issus  François-Xavier  Lemarchand, 
domicilié  en  la  commune  de  Bocasse- Val-Martin,  et  Marie-Fran- 
çoise-Louise Lemarchand,  mariée  à  M.  Barthelemy-Claudc 
Auzanet,  chevalier  de  Saint-Louis. 

Us  eurent  cinq  enfants  :  Barthelemy-Edouard  Auzanet,  aussi 
chevalier  de  Saint-Louis  ;  Barthelemy-Raoul  Auzanet,  conseiller 
à  la  cour  d'appel  de  Rouen,  chevalier  de  la  Légion  d'Honneur  ; 
Marie-Edwige,  épouse  de  M.  de  Mathouville;  demoisellea 
Alexandrine  et  Annette-Télasie  Auzanet. 

Les  Auzanet  portaient  :  de  gueules,  à  la  croix  pattée  d'or, 
cerclée  de  gueules  formant  tau  au  milieu  j  qui  est  Au^^anet. 


40 

M.  Drouet  aurait  voulu  faire  réparer  cette  maison,  mais 
elle  était  dans  un  tel  état  de  vétusté  qu'il  fut  forcé,  à  son 
grand  regret,  de  la  démolir  en  i858. 

L'année  suivante,  fut  édifice,  dans  le  goût  de  la  Renais- 
sance, la  jolie  maison  qui  remplace  Tancien  manoir  de  la 
Planquette. 

HOSPICE   SAINTE- AN  NE 

L'enclave,  située  quartier  de  la  Planquette  et  appelée, 
avec  ses  dépendances,  Sainte-Anne^  provient  de  la  géné- 
reuse donation  faite,  au  xvi<^  siècle,  par  le  sieur  Jehan 
Houel  (i),  bourgeois  élu  de  Caudebec,  d'une  propriété 
pour  l'établissement  d'un  hôpital  en  cette  ville. 

Le  22  février  i533,  Jehan  Houel  adresse  aux  habitants 
de  Caudebec  une  requête  ainsi  conçue  :  c  Considérant 
l'urgence  de  Maison-Dieu  afin  de  logier  et  allimenter  les 
pauvres  manants  de  la  paroisse,  qui,  par  maladie,  fai- 
blesse, antiquité,  sont  contraints  de  mendier  leur  pain 
sur  places  publiques  en  charité  et  pitié,  etc.  »  Houel  offrait 
f  ung  manoir,  hostel,  maison,  cours,  jardins  édifRcs,  telles 
qu'ils  sont  et  se  pourportent  de  long  en  lay,  assis  en  la 
ville  de  Caudebec,  joignant  d'un  costé  la  muraille  de  lad. 
ville;  d'austre  costé,  la  rivière  d'Ambion;  d*un  bout  la  for- 
teresse de  la  Mordière,  et  d'austre  bout  les  hoirs  de  Robert 
le  Dun,  maintenant  Robert  Lestaigre,  à  la  charge  de  40 
sols  de  rente  fontière,  dûs  à  maistre  le  Dun,  prestre, 
afHn  que  les  paulvres  membres  de  J.  C,  qui  sont  logiez 
en  lad.  Maison-Dieu,  puissent  à  chacun  dimanche  vaquer 
à  office-messe  perpétuelle  dite  à  toujours,  à  huit   heures 

(i)  II  était,  j*ai  lieu  de  le  supposer,  neveu  de  Jehan  Houel, 
natif  de  Caudebec,  y  demeurant  en  1498,  et  qui  fît,  en  Téglise 
N.-D.,  une  fondation  de  messes  vers  i5o9,  octobre,  afin  d'ob- 
tenir sépulture  «  soubs  la  clef  pendante  de  la  voûte  de  la  grande 
chapelle,  » 

Il  occupa  en  qualité  de  prêtre,  la  cure  du  Tronq,  près  le  Neuf- 
bourg. 


4» 

du  matin,  en  la  chapelle  ou  oratoire  qui  pourra  estre  cons- 
truit en  lad.  maison  de  Dieu. 

c  Suppliant  le  s^  Jehan  Houel,  MM.  les  curé,  vicaire, 
gens  d'église,  officiers  du  Roy  desservir  lad.  église,  accô- 
der  à  la  donation,  et  prester  ayde,  affin  que  led.  couvent 
soit  parfait  et  augmente.  » 

—  Le  i«r  mai  i533,  roffre  de  Jehan  Houel  est  agréée. 
En  vertu  de  Tentérinement  de  cette  requête,  les  juges, 

tenant  les  assises  de  Caudebec  du  28  avril  i534,  confir- 
ment Tœuvre  de  donation  de  Jehan  Houel  et  s'accordent 
pour  demander  quatre  religieuses,  sœurs  de  Saint- P>an- 
çoisy  destinées  au  service  de  l'asile  hospitalier. 

—  Un  acte  notarié,  en  date  du  2  août  i538,  à  Caudebec, 
constate  le  contrat  des  dons  faits  par  Jehan  Houel,  con- 
sistant en  divers  bâtiments,  lui  appartenant  et  affectes  à 
la  création,  à  la  fondation  de  l'hospice  Sainte-Anne,  f  en 
f  Vhonneur  de  Dieu  le  Père,  du  Fils  et  du  S.  Esprit,  de 
«  la  glorieuse  Vierge  Marie ^  mère  de  grâce  et  de  miséri- 
€  corde,  de  Madame  Sainte  Anne,  mère  de  lad.  Vierge^ 
•  de  tous  benoists  saints^  sainctes  du  Paradis,,,  etc.,  etc.  » 

Le  même  contrat  rappelle  le  dépôt  sous  seing  privé,  en 
date  du  22  février  1 533,  et  paraphé  par  grand  nombre  d'ha- 
bitants, savoir  :  entre  autres,  discrète  personne  maistre 
Clément,  vicaire  du  dit  Caudebec,  Pierre  de  Rebot,  cha- 
pelain du  S.  Esprit,  Roger  Nette,  chapelain  de  N.-D.,  etc.  ; 
Nicolle  des  Mares,  échevin,  NicoUe  le  Dun,  prêtre;  hono- 
rable homme  Guillaume  Le  Veaultre,  lieutenant  en  la 
vicomte  de  M.  le  bailli  de  Caux  ;  Robert  Baqueler,  sei- 
gneur de  Vertot,  lieutenant-général  du  vicomte  de  Caude- 
bec; Jehan  Lefébure,  vicomte  de  Maulévrier,  lieutenant- 
général  du  capitaine  de  Caudebec;  Roger  Le  Preux, 
contrôleur  du  grenier  à  sel  de  cette  ville  et  trésorier  de 
Téglise....  etc. 

La  donation  de  Jehan  Houel,  après  délibéré  des  bour- 
geois notables  précités,  fut  c  escrite  che^  les  tabellions  de 
Caudebec  pour  registrer,  » 


42 

—  Trois  pièces  manuscrites  sur  papier,  datées  des 
3o  janvier  1544,  6  février  1649,  3o  avril  i553,  font  con- 
naître l'état  des  rentes  dues  par  divers  à  l'Hôtel-Dieu  de 
Caudebec;  la  nomination  d'un  syndic-procureur  pour  le 
recouvrement  des  biens  des  pauvres  ;  le  chiffre  des  sommes 
encaissées  par  le  receveur  de  THôpital  Sainte-Anne  et  les 
devis  en  marché  pour  la  construction  du  corps  de  maison 
commencé  à  Tobjectif  du  susdit  refuge  humanitaire. 

—  Un  certificat  délivré  le  21  juin  i556,  par  les  habi- 
tants et  manants  de  Caudebec,  atteste  :  qu'il  y  a  en  cette 
localité  un  Hôtel-Dieu  fondé  par  Jehan  Houel^  sous  le 
vocable  Sainte-Anne. 

L'emplacement  et  une  fraction  du  logis  qu*il  occupait  se 
voient  encore.  Il  se  composait  d'un  grand  corps  de  bâti- 
ment en  pierres  et  briques,  oblong,  en  forme  de  parallélo- 
gramme. 

Le  rez-de-chaussée,  percé  au  milieu  d'un  vaste  corridor, 
surmonté  extérieurement  de  la  statue  patronale  de  Sainte- 
Anne^  qui  y  subsiste,  était  éclairé,  comme  à  Tunique  étage, 
par  quatre  fenêtres  carrées. 

Le  corridor  énoncé,  se  dirigeant  du  nord  au  sud,  divi- 
sait deux  salles  spacieuses  ;  celle  sise  à  Touest,  servait  aux 
malades,  lesquels  au  moyen  d'un  huis,  «  pouvaient  de  leur 
lit,  ouVr  dire,  célébrer  la  messe  ;  au-dessus  estaient  héber- 
géez  les  femmes  de  Thôpital  et  serviteurs  d'icelles;  »  au 
bout,  du  même  côté,  s'élevait  la  chapelle  ou  oratoire  ac- 
tuellement détruit. 

L'autre  salle,  à  Test,  était  réservée  aux  cuisines  et  au 
logement  séparé  du  chapelain  ou  prieur  (i).  Il  y  avait  un 

(i)  Les  noms  de  deux  chapelains  sont  seulement  conservés  : 
10  Charles  Saulmont,  prêtre,  clerc  de  l'église  de  Caudebec  en 
1584  c^  ^^^  chapelain  de  1692  à  1604,  d'après  les  registres  des 
comptes  delà  fabrique,  prieur  de  la  chapelle  Sainte-Anne.  11  fut 
inhumé  dans  le  cimetière  Saint-Maur,  le  seul  alors  à  Caudebec  ; 
20  Jehan  Chopart,  clerc  de  l'église  de  1608  à  161 5,  prêtre  en  lad. 
église,  de  16 18  à  i63o. 


43 

trésorier  et  un  régent-gouverneur  de  l'asile.  Jehan  Houel 
remplit  pendant  sa  vie  ce  dernier  poste. 

—  Suivent  plusieurs  parchemins  du  xvii^  siècle,  en 
grande  partie  illisibles  et  de  médiocre  intérêt,  concernant 
des  règlements  et  procédures. 

—  Le  3i  mai  i683,  François  Lemonnier,  cure  de  Cau- 
debec,  remontre  à  haut  et  puissant  seigneur  M.  le  Bailli  de 
Caux  que  les  capitaines,  gouverneurs  et  maires  se  sont 
emparés  de  la  Maison  Sainte^Anne  sans  aucun  droit  ni 
titre  légitime,  depuis  environ  5o  ans. 

Les  pauvres  ont  été  prives  par  cette  usurpation  de  jouir 
des  biens  inaliénables  en  leur  faveur,  dont  les  autorités  les 
ont  dépouillés,  en  les  convertissant  à  autre  usage. 

Le  suppliant  conjure  M.  le  Bailly  qu'il  lui  plaise  de  re* 
mettre  les  indigents  en  possession  de  leur  demeure. 

—  Plusieurs  réclamations  se  succédèrent  sans  succès; 
en  1G84  et  1686,  elles  furent  adressées  directement  au  Roi 
qui  les  prit  en  considération,  ainsi  qu'il  appert  de  ses  let- 
tres patentes  sur  parchemin,  scellées  d*un  grand  cachet  en 

Jehan  Chopart  était  chargé,  de  1620  à  1637,  d^assister  les  ma» 
lades  du  mal  contagieux.  Il  s*y  distingua  notamment  dans  la 
terrible  épidémie,  en  i636,  laquelle  jeta  tellement  Tépouvante 
dans  Caudebec  que  la  plupart  des  habitants  s*enfuirent  de  la 
ville.  Quatre  prêtres  moururent  de  la  contagion^  du  1 8  juillet  au 
12  octobre.  Le  même  mois  on  compta  184  décès!...  Jehan  Cho* 
part,  pour  se  tenir  plus  à  portée  de  soulager  les  malades,  alla 
s^installer  dans  une  maison  vide  au  cimetière  Saint-Maur  et 
proche  la  chapelle  de  cette  nomination. 

On  trouve  à  ce  sujet  d'intéressants  détails  dans  les  registres  du 
temps,  à  l'église  et  à  la  mairie.  (Y.,  aux  archives  départementales, 
la  liasse  G.  1364.) 

Par  testament,  daté  du  xi  novembre  1668,  Jehan  Chopart 
demande  à  être  inhumé  dans  le  cimetière  Saint-Maur,  «  soubs  la 
tombe  de  Me  Charles  Saulmont,  feu  son  prédécesseur.  »  Ce  vœu 
ne  fut  pas  exaucé,  car  on  l'enterra  dans  Péglise  N.-D.  de  Cau- 
debec. 


44 

cire   brune.   (Voir   les  documents  manuscrits,  déposés  à 
rhôtel-de-ville  de  Caudebec.) 

—  Le  cahier  no  2  3  des  délibérations  municipales  relate, 
à  la  date  du  22  février  1753,  que  t  le  s^  Gallois  de  Maquer- 
ville,  frère  de  Jehan- Louis- Gaspard  Gallois,  chevalier,  sei- 
gneurde  Maquerville,  Cai.idu,  Âmpenois,  Bourg- Baudouin, 
Perriers-sur-Andelie,  conseiller  du  Roi  en  ses  conseils,  son 
premier  avocat  général  en  sa  Cour  des  Comptes,  aydes  et 
finances  de  Normandie,  lieutenant  de  Sa  Majesté  au  gou- 
vernement des  ville  et  château  de  Caudebec,  maire  de 
Rouen  et  vice-président  de  l'Académie  royale  des  sciences, 
belles-lettres,  gouverneur  de  Caudebec  en  1755,  réclamait 
la  maison  Sainte-Anne  pour  son  logement,  comme  étant 
le  CHATEAU  DE  CAUDEBEC,  ce  quî,  ayant  excité  le  bureau  à 
faire  rechercher  dans  les  anciennes  archives  dudit  Hôtel 
Sainte-Anne,  t  il  s*y  est  découvert  pièce  vieille,  authen- 
«  tique  de  plus  de  deux  cens  ans^  signée  par  deux  cens 
«  habitans  (i),  où  il  est  justifié  que  la  maison  dont  il 
«  s^agit  a  esté  aumônée  par  un  sieur  Houel  pour  servir 
€  d* Hôpital  et  Hôtel-Dieu  aux  malades  de  ceste  ville  et 
tfauxbourgs  seulement,  oit  il  devait  demeurer  quatre  reli- 
«  gieuses  de  Saint-François  afin  de  soigner  les  malades  et 
«  qu'il  jr  avait  une  chapelle  dédiée  sous  le  titre  de  Sainte- 
«  Anne,  dans  laquelle  se  célébrait  la  messe  les  dimanches  et 
«  fêteSy  pour  lesd,  nécessiteux;  c'est  à  la  connaissance  de 
«  la  plupart  des  habitans  que  la  ceste  chapelle  existait 
«  encore  en  ijôo » 

Les  lettres-patentes  de  Louis  XV,  de  1 767,  confirmant 
le  décret  de  Louis  XIV  ci -dessus,  permettent  la  vente  delà 
maison  de  santé  Sainte-Anne  et  autorisent  sa  translation, 
rue  des  Capucins,  à  Thospice  de  Caudebec,  auquel  elle  est 
aujourd'hui  réunie. 

—  M.  Lefort  présente  quelques  observations  au  sujet 

(i)  J'en  ai  précédemment  analysé  la  teneur  :  vide  supra  p.  41» 
contrat  d\x  22  février  i533. 


45 

d^une  fouille  qui  vient  d  être  faite  à  cinq  mètres  de 
profondeur  rue  Saint-Lô,  à  Tangle  nord-ouest  de  la 
salle  des  Pas-Perdus  du  Palais. 

A  cette  profondeur,  et  sur  une  largeur  de  trois 
mètres,  le  côté  interne  de  la  fondation  du  mur  romain 
a  été  mis  à  jour.  La  contexture  du  mortier,  son  iden- 
tité avec  la  maçonnerie  découverte  un  an  auparavant, 
place  Verdrel,  ne  laisse  pas  de  doute  sur  la  nature  ro- 
maine de  la  maçonnerie. 

Cette  fondation,  qui  est  celle  du  mur  d^enceinte  de 
la  ville,  était  orientée  de  Touest  à  Test,  se  dirigeant  du 
centre  de  la  place  Verdrel  au  centre  du  jardin  de  l'hô- 
tel de  la  Présidence,  très  approximativement. 

La  première  enceinte  de  Rouen,  reconnue  il  y  a  un 
siècle  place  des  Carmes  et  rue  des  Fossés  Louis  VIII 
[côté  sud),  est  donc  déterminée  sur  une  petite  mais 
nouvelle  portion  de  son  parcours. 

M.  Lefort  fait  hommage  à  la  Commission  d'une 
photographie  représentant,  après  son  achèvement,  la 
façade  ouest  du  Palais  de  Justice  de  Rouen,  aujour- 
d'hui en  cours  d'exécution. 

Etant  admis  le  nouveau  vestige  de  première  enceinte 
de  Rouen,  précisé  par  M.  Lefort,  M.  de  Beaurepaire 
observe  que  Téglise  de  Saint-Martin-su r-Renelle,  oti 
Grégoire  de  Tours  rapporte  que  Mérovée  et  Brunehaut 
cherchèrent  asile,  se  serait  trouvée  en  dehors  de  cette 
enceinte. 

A  propos  de  la  communication  de  M.  Lefort, 
M.  Bouquet  fait  observer  qu'elle  sert  à  confirmer  et  à 
rectifier  un  passage  de  Dom  Toussaint  Duplessis,  qui 
dit,  dans  sa  Description  de  la  Haute-Normandie , 
que  «  la  première  enceinte  de  Rouen  était  marquée  par 
une  ligne  tirée  le  long  de  la  rue  de  TAumône,  depuis 


46 

le  pont  de  Robec  jusqu'à  la  Poterne.  De  la  Poterne,  il 
fallait  tirer  une  seconde  ligne  par  le  Marché-Neuf  en 
rasant  le  Palais,  et  par  la  rue  Massacre  jusqu'à  la  rue 
aux  Ouës  ;  de  là,  tirer  une  troisième  ligne  jusqu'à  la 
Calende  au  travers  de  PHôtel-Dieu,  et  la  continuer 
jusqu^à  Peau  de  Robec.  Robec  faisait  la  quatrième 
ligne  (i)  ». 

M.  Bouquet  ajoute  qu'on  a  rencontré  des  vestiges  de 
murailles  romaines  au  pont  de  Robec,  à  Tabbaye  de 
Saint-Amand,  à  l'hôtel  de  France,  dans  le  prieuré  de 
Saint-Lô.  Ceux  que  M.  Lefort  vient  de  retrouver,  sous 
le  pignon  du  Palais  de  Justice,  prouvent  que  la  ville 
n'avait  pas,  sous  les  Gallo-Romains,  la  forme  d'un 
rectangle  parfait,  mais  qu'il  fallait  tirer  une  diago- 
nale du  prieuré  de  Saint-Lô  à  la  Poterne,  place 
vide  appartenant  aux  religieux  de  Jumièges,  sur 
laquelle  on  édifia  la  Chambre  de  la  Tournelle  en 
1609.  Le  Palais  de  Justice,  sur  le  Marché-Neuf, 
en  1470  (date  de  l'ouvrage,  de  Dom  Duplessis), 
n'avait  pas  la  façade  qui  vient  d'être  démolie  sur  la 
place  Verdrel.  Elle  fut  terminée  seulement  en  1761, 
pour  la  plus  grande  partie  (2). 

La  forme  d'un  «  carré  oblong,  »  donné  à  notre  ville 
par  Dom  Duplessis,  se  rapporterait,  d'après  lui,  «  au 
premier  duc  Rollon,  »  et  non  à  l'époque  gallo- 
romaine,  de  sorte  que  ce  qu'il  appelle  «  la  première 
enceinte  »  serait  en  réalité  «  la  seconde,  d  puisqu'il 
dit  que,  «  à  partir  du  v«  siècle,  les  murs  de  la  ville 
s'étendirent  quelque  temps  après  du  côté  du  nord  jus- 

(i)  Description  de  la  Haute-Normandie,  par  Dom  Toussaint 
Duplessis,  t.  II,  p.  6. 

(2)  Dictionnaire  indicateur  et  historique  des  rues  et  places  de 
Rouen,  par  Nicétas  Périaux,  p.  423. 


47 

qu'auprès  de  Saint- Martin-sur-Renelle.  »  La  confu- 
sion naît  de  ce  qu'il  place  le  terrain  appelé  «  la 
Poterne  »  beaucoup  trop  bas,  à  un  endroit  où  elle 
notait  pas,  et  qu'il  supprime  Tenceinte  gallo-romaine 
remplacée  par  une  simple  rue  allant  de  l'archevêché 
jusqu'au  Gros  Horloge  (i). 

L'existence  de  cette  enceinte  gallo-romaine  est  donc 
constatée  aujourd'hui,  d'une  façon  incontestable,  sur 
un  cinquième  point  de  son  parcours,  par  la  décou- 
verte de  M.  Lefort  (2). 

—  M.  le  Vice-Président  donne  lecture  de  deux 
notices  relatives,  la  première,  au  projet  de  Henri  IV, 
d'étendre  la  ville  de  Rouen  du  côté  de  Saint-Sever, 
et  la  seconde,  au  droit  de  vingt  et  une  paroisses  d'en- 
voyer leurs  lépreux  à  la  maladrerie  du  Mont-aux- 
Malades. 

I 

AGRANDISSEMENT  DR    LA   VILLE  DE    ROUEN,    DU   COTÉ 
DU    FAUBOURG  SAINT-SEVER 

Ce  qu'on  appelait  le  faubourg  Saint-Sever  a  pris,  depuis 
le  commencement  de  ce  siècle,  un  développement  si  con- 
sidérable et  si  constant,  qu'il  est  à  prévoir  que  le  Rouen 
de  la  rive  gauche  finira  par  balancer  le  Rouen  de  la  rive 
droite,  le  vieux  Rouen,  le  Rouen  des  monuments  histo- 
riques et  des  souvenirs. 

Au  xvie  siècle,  ce  faubourg  était  encore  assez  peu  popu- 

(i)  Description  de  la  Haute^Normandie,  t.  II,  p.  5  et  6. 

(2)  Cf.  Histoire  delà  ville  de  Rouen,  par  Farin,  t.  II,  p.  87.  — 
Description  de  la  Haute-Normandie,  par  Dom  Toussaint  Duples- 
sis,  t.  II,  p.  5  et  6.  —  Dictionnaire  des  rues  et  places  de  Rouen, 
par  Nicétas  Périaux,  p.  58  et  4a 3.  —  Les  origines  de  Rouen  d'ch- 
près  Vhistoire  et  Varcheologie,  par  M.  l'abbé  Cochet,  p.  41-52. 


48 

ieux.  Une  partie  de  son  territoire  était  rattachée  à  des 
paroisses  de  l'intérieur  de  la  ville,  telles  que  Saint-Mar- 
tin-du-Pont,  Saint- Etienne-des-Tonneliers  et  Saint-Eloi, 
circonstance  à  première  vue  assez  étrange.  Je  ne  saurais 
me  l'expliquer  qu'en  admettant  qu'à  une  époque  ancienne 
la  Seine  paraissait  plus  aisée  à  traverser  que  les  prairies 
qui  avoisinaient  la  chaussée  et  qui  interceptaient  les  com- 
munications entre  les  rives  dû  fleuve  et  Téglise  du  fau- 
bourg. 

Un  des  projets  de  Henri  IV  fut  de  fevoriser  l'extension 
de  la  ville  de  Rouen  du  côté  de  Saint-Sever.  Il  avait  re- 
connu que  la  vieille  cité  étouffait  dans  son  ejiceinte  de 
murailles,  qu'il  lui  fallait  de  l'espace  et  de  la  lumière.  Les 
délibérations  des  échevins  font  mention  du  projet  du  Roi, 
mais  sans  faire  bien  clairement  connaître  si  les  Rouennais 
y  étaient  favorables  ou  défavorables.  11  m'a  paru  intéres- 
sant, afin  de  provoquer  des  recherches  sur  ce  sujet,  de 
donner  le  texte  de  deux  ordonnances  du  Bureau  des 
finances  relatives  au  projet  de  Henri  IV. 

«  4  nov.  i6o3.  Sur  la  requeste  présentée  par  Michel 
Pochon^  Michel  Duhen  et  Pasquet  Le  Genevoys,  maîtres 
massons  en  la  ville  de  Rouen,  tendant  affîn  de  leur  estre 
faict  taxe  de  la  somme  de  1 5o  escus  sol  pour  leur  peynes, 
sallaires  et  vaccations  d'avoir,  suivant  le  vouUoir  et  inten- 
tion de  S.  M.,  et  le  commandement  verbal  qu'ilz  auroient 
reçeu  de  Monsieur  le  marquis  de  Rosny,  et  depuis  à  eulz 
réitérez  par  Mgr  le  duc  de  Montpensier  (i),  vacqué  par 
l'espace  de  deux  mois,  tant  à  prendre  les  mesures  du  faulx- 
bourg  de  ceste  ville,  scitué  hors  le  pont,  parroisse  Saint- 
Sever,  que  pour  dresser  le  plan  et  desseings  de  l'augmen- 
tation de  ville  que  S.  M.  désire  faire  bastir  du  costé  droit 
dudit  faulx-bourg,  et  oultre  pour  avoir  par  eulx  mis  et  em- 
ployé, durant  xii  jours,  quatre  hommes  pour  leur  ayder  à 

(i)  Henri  de  Bourbon,  duc  de  Montpensier,  gouverneur  de 
Normandie. 


49 

prendre  les  mesures  dudit  faulx-bourg,  qu'ils  auroient  paie 
à  leurs  frais, 

<  Se  retireront  les  supliantspar  devers  Monsieur  le  mar- 
quis de  Rosny,  par  le  commandement  duquel  ils  ont 
dressé  le  plan  de  lad.  augmentation  de  ville,  pour  leur 
estre  pourveu  sur  lad.  taxe,  suivant  le  voulloir  et  inten- 
tion du  Roy,  et  députeront  l'un  d'entre  eux  pour  parler 
audit  sr  marquis  et  fiaiire  veoir  autant  (i)  dudit  plan,  pour 
faire  lequel  voiage,  et  en  attendant  que  taxe  leur  soit 
faicte  de  leur  vacation,  leur  sera  payé  par  M^  Nicollas 
Sergent,  receveur,  la  somme  de  60  L  qui  lui  sera  passée 
et  allouée  par  tous  qu'il  appartiendra,  rapportant,  etc.  (2).» 

«  10  nov.  i6o3.  Sur  la  requeste  présentée  par  Jérôme 
Cairel,  bourgeois  de  Rouen,  contenant  que,  par  comman- 
dement de  Mgr  de  Montpensier  de  se  tenir  prest  pour 
aller  avecques  luy  en  court  pour,  en  sa  présence,  faire 
entendre  au  Roy  ce  que  S.  M.  désire  sçavoir  pour  l'advan- 
cement  de  l'augmentation  de  la  ville  du  costé  des  faulx- 
bourgs  de  Saint-Sever,  à  quoy  désirant  obéyr,  il  nous  pleust 
ordonner  qu'il  luy  sera  dellivré  quelques  deniers  pour 
subvenir  aux  frais  dudit  voiage, 

c  Est  ordonné  au  suppliant,  pour  les  causes  contenues 
en  lad.  requeste,  la  somme  de  90  1.  t.,  laquelle  luy  sera 
payée  par  M«  Nicollas  Sergent,  receveur,  des  deniers  tant 
ordinaires  qu'extraordinaires  de  sa  recette,  sans  diffi- 
culté (3).  i 

Il  est  certain  que  ce  projet  ne  reçut  pas  son  exécution, 
pas  plus  que  celui  d'abréger  la  distance  entre  Rouen  et 
Paris  en  redressant  le  lit  du  fleuve.  Toutefois  Saint-Sever 
doit  conserver  quelque  reconnaissance  à  la  mémoire  de 
Henri  IV. 

Ce  fut  à  partir  du  règne  de  ce  prince  que  ce  faubourg 

(1)  Copie. 

(2)  Archives  de  la  Seine-Inférieure,  C.  1121. 

(3)  Ibid.yC.  1122. 


5o 

tendit  à  devenir  le  quartier  manufiaicturier  de  Rouen.  Une 
verrerie  royale  y  fut  établie  en  1606  ;  cette  même  année, 
une  Compagnie  hollandaise  y  fut  appelée  pour  y  inau- 
gurer  la  fabrication  des  toiles  fines.  Ces  deux  établisse- 
ments furent  vus  de  mauvais  œil  par  les  bourgeois  de 
Rouen,  mais  nous,  que  l'intérêt  particulier  n'aveugle  pas, 
nous  ne  pouvons  manquer  de  reconnaître  qu'ils  font 
grand  honneur  au  gouvernement  de  Henri  IV  ainsi  qu'à 
l'administration  de  Sully. 

II 

NOTES  SUR    LES   LÉPREUX 

On  sait  que  vingt-et-une  paroisses  avaient  droit  d'en- 
voyer leurs  lépreux  à  la  maladrerie  du  Mont-aux-Malades. 
L'entrée  de  cet  asile  de  la  douleur  n'était  pas,  pour  ces 
malheureux,  absolument  gratuite  ;  mais  s'ils  étaient  indi- 
gents, c'était  une  obligation,  pour  leur  paroisse,  de  leur 
venir  en  aide.  Un  contrat  passé  devant  les  tabellions  de 
Rouen,  3  fév.  1478,  fait  connaître  ce  que  chaque  lépreux 
avait  coutume  d'apporter.  C'étaient  : 

c  Un  bon  lit  fourni  de  3  paire  de  draps  de  lé  et  demy  ; 
2  oreilliers;  2  queuvre-chiefz  ;  2  couvertures;  20  aulnes 
de  touailles;  18  aulnes  de  doubliers;  2  paire  de  chemises; 
6  escuelles  d'estain  ;  6  saulciers  ;  4  platz  ;  6  cuilliers  de 
lacton;  i  salliere;  i  pot  d'estain  et  unechoppine;  3  ha- 
naps,  l'un  d'argent,  pesant  6  onches,  l'autre  de  madré,  et 
l'autre  de  cailler,  bons  et  suffisans  ;  3  paelles  d'arain  ; 
2  pot  de  cuivre  ;    1  bachin  et   i    pot  laveur;   i    trevet; 

I  greil;  icroqàchar;  2  bouquets;  i  crameillée;  1  hache; 

I  paelle  de  fer  ;  i  leschefrite  ;  i  broque  de  fer  ;  i  mortier; 

i  pestel  ;  i  kalit  ;  2  paire  de  robes  ;  2  chapperons  ;  2  paire 
de  chausses  de  drap  brun  ou  gris  ;   2  paire  de  souUiers  ; 

1  coffre  ou  huche,  bon  et  suffisant  ;  pour  le  prieur,  62  sous 

1  denier  ;  pour  le  portier  et  pour  les  varlets,  5  sous,  » 
Quelques  objets  de  ce  mobilier  doivent  être  notés  :  les 


51 


hanaps  d'argent,  de  madré  et  de  cailler.  On  peut  remar- 
quer que  le  mot  paire  était  autrefois  invariable  au  singu- 
lier et  au  pluriel,  par  souvenir  de  la  forme  latine. 

Cette  fourniture,  que  le  prieuré  réclamait  comme  obli- 
gatoire, donna  lieu  à  une  contestation  entre  les  religieux 
et  les  paroissiens  de  Saint-Jean  de  Rouen,  lorsqu'une  des 
paroissiennes  de  cette  église,  Perrecte  Deshays,  c  entéchée 
de  la  maladie  de  lèpre,  i  y  fut  envoyée  en  conséquence 
d'une  sentence  de  Fofficialité. 

Cette  femme  était  pauvre,  ses  parents  et  ses  amis  Té- 
taient aussi.  Les  paroissiens,  à  la  charge  desquels  elle  re- 
tombait, combattirent  les  prétentions  des  religieux.  Le 
débat  se  termina  par  un  accord  aux  termes  duquel  il  fut 
reconnu  qu'à  l'avenir,  pour  la  réception  de  chaque  malade 
natif  de  la  paroisse  Saint-Jean,  Tune  des  vingt-et-une  pa- 
roisses du  droit  du  Mont-aux-Malades,  comme  on  disait, 
on  fournirait  les  ustensiles  ci-dessus  déclarés,  si  le  lépreux 
était  riche.  Dans  le  cas  contraire,  les  trésoriers  et  les  pa- 
roissiens en  devaient  être  tenus  quittes  moyennant  une 
somme  de  20  livres.  Le  paiement  fait,  si  le  malade  était 
trouvé  avoir  aucuns  biens  de  plus  grande  valeur,  les  tré- 
soriers devaient  être  restitués  sur  lesdits  biens  de  la  somme 
qu^ils  auraient  payée,  et  le  reste  devait  être  laissé  aux  re- 
ligieux. 

La  léproserie  du  Mont-aux-Malades  était  la  plus  célèbre 
du  diocèse,  témoin  cet  auteur  d'un  libelle  dif&matoire 
poursuivi,  en  1468,  à  Tofïîcialité  de  Montivilliers,  pour 
avoir  ainsi  qualifié  un  habitant  d'Harfleur  :  c  Jaloux, 
mesel,  plein  de  mesellerie,  jaune  comme  saffren.  Je  vous 
baudrey  cloquette  de  frarie  pour  vous  conduire  jusques  au 
Mont  de  Rouen  »  ;  à  preuve  encore  deux  documents  que 
nous  fournissent  les  registres  de  la  même  officialité,  et 
que  nous  croyons  à  propos  de  faire  connaître  : 

Johannes  Dangomare^  alter  thesaurariorum  de  Fonte- 
neyOy  non  obstantibus  ordinationibus  per  nos  factis  eidem, 
quatinus  duceret  apud  Rothomagum  et  Montent  Lepro- 


52 

sorum  lociy  cum  litteris  nostris  requisitoriiSy  infra  oc- 
tavam,  sut  excommunicacionis  et  decem  lihrarum  turo- 
nensium  pénis,  visitandi  (causa)^  Johannem  Le  Tellier, 
morbo  lèpre  suspectum,  nihilominus  contempnendo  ordi- 
nacionem  et  preceptum  nostrum  ac  juridicionem  pertur- 
bandOf  presumpsit  ipsum  Le  Tellier  visitari  facere  sine 
litteris  nostris,  litteras  condempnatorias  domini  officialis 
Rothomagensis  accipiendo,  de  quo  fuit  incarceratus  per 
spacium  unius  hore,  et  in  exitu  fecit  emendam^  dequa  sol- 
venda  pro  eo  fidejusserunt  Oliverus  Randou  et  Guilmetus 
RandoUy  quos  promisit  servare  indempnes^  die  xviia  julii 
anno  millesimo  quadringentesimo  lxxxviiio.  Taxatus 
ad  sommant  xl  solidorum.  Solvit  xx  solidos.  Domina 
(rabbesse),  donavit  eidem  residuum,  die  xiiii<3  maii  anno 
(l)xxxix®. 

Cognito  per  nos,  decanum  et  officialem  Monasterii 
VillariSy  de  negocio  coram  nobis  introducto  inter  venera- 
bilem  virum  dominum  promotorem  curie  nostre^  ad  de- 
nunciationem  Pétri  BeaUfix  et  Bertauldi  Avisse^  thesau  - 
rariorum  modernorum  parrochie  de  Octovilla,  actorem, 
ex  una,  et  Johannem  Hardi  et  Johannem  Le  Page^ 
alias  Bas  tard  y  de  dicta  parrochia,  oriundos  et  morbo  lèpre 
suspectos  denunciatoSy  ex  altéra  partibus,  visis  per  nos 
relacionibus  venerabilis  viri  Guillermi,  prioris  prioratus 
de  Monte^Leprosorum,  de  mandato  venerabilis  et  cir- 
cumspecti  domini  officialis  Rothomagensis ^  ad  requestam 
nostram  factis,  ac  per  ipsum  nobis  transmissis^  juxta 
qiias  nostrum  consenserunt  audire  decretum  predicti 
Hardi  et  Page,  denunciatiy  dicimus  et  declaramus  ipsos 
esse  de  dicto  lèpre  morbo  tact  os  et  in/ectos,  pr  opter  ea  a 
sanorum  consortio  esse  segregandos,  prout,  in  quantum 
possumus,  segregamus,  et,  salvis  dictorum  (et)  promotoris 
expensis, .  taxatione  nobis  in  posterum  reservata,  ita  pro- 
nunciantes,  Lata  anno  Domini  millesimo  quingentesimo 
xviP,  die  veneris  xxii»  maii.  Registrata, 

Suivant  une  pratique  qui  paraît  avoir  été  générale,  c'é- 


53 

tait  à  l'official  qu'il  appartenait  de  constater  la  lèpre  et 
d'ordonner  la  séquestration  de  ceux  qu'on  prétendait  en 
être  atteints  ;  la  poursuite  avait  lieu  constamment  sur  la 
dénonciation  des  trésoriers  de  la  paroisse  où  résidait  le 
lépreux,  obligés  à  veiller,  comme  représentants  de  Tauto- 
rite  publique,  pour  le  civil  aussi  bien  que  pour  le  culte,  à 
la  sauvegarde  des  autres  paroissiens.  L'official  ne  se  pro- 
nonçait qu'après  avoir  pris  l'avis  de  médecins  et  de  chi- 
rurgiens qu'il  avait  délégués  pour  faire  la  visite  du  malade, 
et,  dans  le  plus  grand  nombre  de  cas,  il  ne  lui  paraissait 
pas  nécessaire  d'envoyer  au  Mont-aux-Malades  chercher 
Tavis  de  juges  compétents. 

Voici,  à  titre  d'exemples,  quelques  sentences  relatives  à 
des  poursuites  pour  fait  de  lèpre. 

In  nomine  Domini,  Amen.  Visa  per  noSy  decanum  et 
officialem  Monasterii-  Villaris,  relatione  venerabilis  et  ho- 
nestorum  virorum  magistri  Michaelis  Cornet^  presby" 
teriy  curie  nostre  advocati  jurati  et  mediciy  necnon  Pétri 
Gaultier  et  Nicolai  Gieuffroy^  cirurgicorum  ejusdem  loci 
Monasterii'  VillariSf  de  consensu  honestorum  eciam  viro- 
rum Ludovici  Fouet,  Ludovici  Guillart,  Jacobi  Basin^ 
atque  Johannis  Sauvage,  modernorum  thesaurariorum  ec- 
clesie  parrochialis  Sancti  Martini  de  Harefloto,  fada 
de  et  super  visitacione^  tactu  et  palpatione  Perrine  Dalby, 
ejusdem  parrochie,  de  morbo  lèpre  suspecte  et  calump- 
niate,  insequendo  dictorum  medici  et  cirurgicorum  rela- 
cionem,  cui  se  retulit  dicta  Perrina^  dicimus  et  déclara^ 
ramus  predictam  Perrinam  de  hujusmodi  morbo  lèpre 
fuisse  et  esse  tactam  et  infectam  et  ob  hoc  a  sanorum  con- 
sorciOj  ne  deterius  inde  contingat,  segregandam  esse  et 
segregari  debere,  ita  pronunciantes  viii*  augusti  mille- 
simo  quingentesimo  quinto-decimo. 

In  nomine  Domine,  Amen,  Visa  per  nos,  decanum  et 
officialem  Monasterii-VillariSy  relacione  venerabilis  viri 
magistri  Michaelis  Cornet^  presbyteri,  mediciy  ac  Pétri 
Gaultier,  cirurgici,  de  mandato  nostro,  super  palpatione 


54 

et  visitatione  Ricardi  Coquerel  senior is^  nunc  in  parrochia 
de  Octovilla  commorantïSy  de  morbo  lèpre  suspecti^  facta 
ad  instantiam  honestorum  virorum  Philippini  Boyvin  et 
Johannîs  Dupuis,  thesaurariorum  modernorum  dicte  par- 
rochie  de  Octovilla^  insequendo  dictant  relacionentj  cui  se 
retulerunt  partes  predicte  ac  nostrum  audire  decretum 
consenseruntj  dicimus  et  declaramus  predictum  Coquerel 
non  esse  de  dicto  lèpre  morbo  in/ectum  aut  tactum  et  prO" 
pterea  a  sanorum  consorcio  non  esse  segregandum,  prout 
nec  segregamuSy  ita  pronunciantes^  etc,  Lata  die  lune 
XVII*  martiianno  Dominimillesimo  quingentesimo  decimo^ 
septimo. 

In  nomine  Domini,  Amen.  Visa  per  nos^  decanum  et 
officialem  Monasterii-Villaris^  relacione  venerabilis  viri 
magistri  Michaelis  Cornet,  presbyteri^  medici^  ac  Nicolai 
Gieffroy^  cirurgici,  de  mandato  nostro,  super  palpatione 
et  visitatione  Johanne  Tanquerel^  parrochie  Sancti  Salva- 
ioris,  de  morbo  lèpre  suspectey  facta^  instante  promotore 
causarum  officii  curie  nostre^  denunciantibusque  Petro 
Gaultier  ac  Petro  Hemeri,  thesaurariis  predicte  parro- 
chie^ insequendo  dictam  relacionem  cui  se  retulerunt  par- 
tes predicte  etjuxta  quam  nostrum  audire  decretum  con- 
senseruntj dicimus  et  declaramus  dictam  Tanquerel  esse 
separandam  et  segregandam,  prout,  in  quantum  possu- 
muSy  segregamus,  ita  pronunciantes.  Lata  die  mercurii 
quarta  mensis  augusti  anno  Domini  millesimo  quingente- 
simo decimo-septimo. 

Ces  sortes  d'actes  sont  très  communs  pendant  la  pre- 
mière partie  du  xyi^  siècle.  Il  est  à  remarquer  que  la  pa- 
roisse d'Octeville  était  celle  des  paroisses  de  l'exemption 
de  Montivilliers  qui  fournissait  le  plus  de  lépreux.  On 
peut  encore  remarquer  qu'à  cette  époque  beaucoup  de 
docteurs  en  médecine  appartenaient  à  l'état  ecclésias- 
tique. 

La  lèpre  étant  constatée,  il  restait  au  pouvoir  de  ToiOfi- 
cial  de  donner  au   malade  la  permission  de  rester  en 


55 

dehors  de  la  léproserie,  pourvu  qu'il  pût  être  séquestre 
des  sains.  C'est  ce  que  prouve  cet  acte  inséré  dans  un 
Formulaire  de  l'abbaye  de  Fécamp. 

Novembre  1 540.  Dominus  vicarius  dédit  facultatem  et 
licentiam  Andrée  Manisier^  se  tenenti  pro  suspecta  morhi 
lepre^  in  parrochia  Sancti  Stephani  Fiscannensis  commo^ 
rantij  vivendi  extra  leprosariam  in  loco  remoto  ab  aliis 
domihus  et  non  alias,  ac  in  loco  sacro  ubi  non  fuerit  homi- 
num  frequentatio  per  curât um  suum,  aut  ejus  vicarium^ 
aut  aliquem  per  eum  deputatum^  missam  celebrari/aciendi^ 
atque  ibidem  aut  etiam  domi  suCy  interveniente  infirmitatis 
necessitate,  sacramentum  penitentie  et  eucharistie  ab  eo 
recipiendi. 

Pour  comprendre  ces  mots  :  f  Je  vous  baudrey  (bail- 
lerai) cloquette  de  frarie. ...»  rapportés  ci-dessus,  il  faut 
se  rappeler  que  la  conduite  du  lépreux  à  la  léproserie  se 
faisait  avec  les  mêmes  cérémonies  qu*un  enterrement,  et 
qu'on  y  convoquait  tous  ceux  de  la  confrérie  à  laquelle 
appartenait  le  lépreux. 

Nous  en  trouvons  un  exemple  dans  les  statuts  de  la 
confrérie  de  Saint-Pierre,  Saint-Paul,  Saint-Nicolas,  Saint- 
Marcou  et  Saint-Éloi  fondée  en  Téglise  de  Saint*Pierre- 
le-Petity  de  l'exemption  de  Fécamp,  au  xvi«  siècle  : 
«  Item,  se  aucun  des  frères  ou  seurs  estoit  aprouvé  mesel 
en  lad.  ville  et  banllieue,  le  seroient  tenus  convoier  jusques 
à  sa  malladeriCi  pourveu  qu'elle  ne  seroit  hors  de  lad. 
ville  et  banllieue  y  le  maistre  et  varlets  portans  leurs 
sourplis  et  capperons  vestus  à  toult  la  croix  et  bannière 
et  clochette,  et  sy  luy  feroit  Ten  semblable  service  comme 
à  ung  trespassé  en  l'église  où  il  seroit  demourant  en  la 
dicte  ville  et  banllieue,  comme  dict  est...,  et  sy  seroit 
ledict  varlet  tenu  crier  par  les  carfours  comme  pour  ung 
trespassé.  >  (i) 

(i)  Arch.  de  la  Seine»lnférie\ire,  G.  5238. 


56 

—  M.  Paul  Baudry  demande  ce  que  c'était  qu'un 
édifice  religieux  indiqué  sur  un  plan  manuscrit,  ap- 
partenant à  la  bibliothèque  de  Rouen  et  levé  en  i  Sg  i . 
Cet  édifice,  représenté  à  Touest  par  rapport  aux  château 
et  fortde  Sainte-Catherine  et  à  Téglise  des  religieux, 
est  indiqué  avec  la  mention  paroisse. 

Quêtait  cette  «  paroisse  ?  » 

M.  de  Beaurepaire,  quia  étudié  tout  particulière- 
ment ce  point  de  notre  histoire  locale  (i),  pense  que  le 
mot  «  paroisse  »  se  rapporte  ici  au  prieuré  de  Saint- 
Michel,  dont  on  verrait  la  chapelle  avec  un  petit  bâti- 
ment y  accolé.  Cette  chapelle,  détruite  en  1 562,  était 
donc  réédifiée  alors. 

Le  dessin  signalé  par  M.  Paul  Btfudry  est  d'autant 
plus  précieux  que,  de  la  chapelle  qu'il  figure.  Tannée 
suivante  il  n'en  restait  rien.  Nous  lisons,  en  effet,  dans 
Nicétas  Périaux,  un  paragraphe  ainsi  conçu  : 

«  Vers  ce  même  temps  (1592),  Henri  IV  avait  or- 
donné la  démolition  de  l'église  de  Saint- Michel  au 
couvent  du  mont  Sainte-Catherine.  Elle  fut  remplacée 
plus  tard  par  une  petite  chapelle  insignifiante,  qui 
tomba  en  ruines  à  la  fin  du  xviii«  siècle,  pendant 
l'époque  révolutionnaire  (2).  » 

—  M.  Gouellain  fait  passer  sous  les  yeux  des  mem- 
bres de  la  Commission  un  fiacon  rond  et  plat,  de  o"^ 
07  de  diamètre,  en  verre  filigrane  polychrome,  orné 
en  son  pourtour  d'appliques  de  verre  blanc,  posées  au 
chalumeau,  et  se  terminant  par  des  pointes  étirées  à  la 
pincette.  Cet  objet  est  présenté  à  l'appréciation  des 
membres  de  la  Commission  pour  avoir  leur  avis  sur 
son  âge,  son  origine  et  sa  destination. 

(i)  Voir  séance  du  a5  janvier  i88a. 

(a)  Histoire  de  Rouen,  par  Nicétas  Périaux,  p.  354. 


^7 

M.  le  Vice- Président  déclare  que  c'est,  à  n'en  point 
douter,  une  tabatière,  du  genre  de  celles  appelées 
pigeassières  dans  le  patois  de  la  Basse-Normandie. 
Cest aussi  l'opinion  de  M.  Gouellain  qui  a  vu  à  Paris 
dans  la  collection  Garnault,  réunie  aujourd'hui  au 
musée  de  Limoges,  une  tabatière  de  la  même  forme, 
en  porcelaine  de  Chine,  provenant  du  Palais  d'Été, 
sur  Tune  des  faces  de  laquelle  est  peint  un  cadran  de 
montre.  Voilà  pour  la  destination. 

Quant  à  Tâge  et  à  l'origine,  M.  de  Girancourt,  dont 
les  savantes  recherches  sur  les  origines  de  la  verrerie 
sont  connues,  n^hésite  pas  à  rapporter  cette  pièce  au 
xvii«  siècle,  et  à  la  considérer  comme  un  très  intéres- 
sant spécimen  de  verrerie  française^  sinon  normande. 

A  cette  époque,  en  effet,  nombre  de  privilégiés  affir- 
maient posséder  le  secret  de  la  fabrication  du  verre  à 
lajaçon  de  Venise,  et  nous  rencontrons  fréquemment, 
dans  les  collections,  des  échantillons  de  cette  nature 
qui  ont  une  origine  locale.  Le  verre  est  plus  lourd, 
moins  transparent,  et  n'a  pas  l'élégance  et  la  beauté  des 
pièces  vénitiennes,  malgré  les  éloges  que  ne  craignent 
point  de  s'adjuger  les  porteurs  de  privilèges. 

En  résumé^  M.  de  Girancourt  estime  que  le  flacon 
présenté  est  un  type  très  rare  d'ancienne  verrerie  indi- 
gène, avec  émaux  filigranes  dans  la  masse,  et  dont  on 
peut  reporter  la  fabrication  au  commencement  du 
xvïi«  siècle. 

A  quatre  heures  la  séance  est  levée. 

Le  Secrétaire-Adjoint , 
BRIANCHON. 


58 


SEANCE  DU  i«^  MAI  1882 

La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence  de 
M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Sont  présents  :  MM.  P.  Baudry,  Billiard,  le  marquis 
de  Blosseville,  Bouctot,  Bouquet,  Brianchon,  de  Glan- 
ville,  l'abbé  Loth,  de  Merval,  Tabbé  Tougard  et  le 
vicomte  d'Estaintot,  secrétaire. 

Excusés  :  MM.  Gouellain,  Guéroult,  Lefort,  Lor- 
mier.  Maillet  du  Boullay,  Sauvageot  et  de  Vesly. 

M.  Brianchon,  secrétaire-adjoint,  donne  lecture  du 
procès-verbal  de  la  séance  du  10  mars,  qui  est  adopté. 

Rouen.  Traces  de  murs  gallo-romains.  —  A  propos 
de  ce  procès- verbal,  M.  Simon  signale  Inexistence,  par 
lui  constatée,  lors  des  fouilles  nécessitées  par  les  fon- 
dations de  l'hôtel  d'Iquelon,  place  de  THôtel-de- Ville, 
d'un  mur  romain  subsistante  4  met.  72  c.  au-dessous 
du  niveau  du  sol  actuel,  et  se  présentant  dans  une 
direction  légèrement  oblique,  par  rapport  à  la  façade 
de  l'hôtel. 

M.  d'Estaintot  hésite  à  penser  que  ces  fondations 
aient  des  rapports  quelconques  avec  le  mur  d'enceinte 
signalé  aux  environs  du  Palais-de-Justice.  Des  cons- 
tructions romaines  existaient  évidemment  en  dehors 
delà  cité.  La  présence  en  a  été  constatée  en  face  Téglise 
Saint-Laurent,  lors  de  la  fondation  de  la  maison  de 
M.  Vaucquier  du  Traversain,  et  sans  doute  celles  ren- 
contrées sur  remplacement  de  Thôteld^Iquelon  étaient 
des  propriétés  particulières. 

La  correspondance  comprend  : 

Tables  générales  des  vingt  premiers  volumes  de  la 


59 

Société  archéologique  du  département  de  Constan* 
tine,  20«  vol.,  1881  ;  —  Bulletin  de  la  Société poly^ 
mathique  du  Morbihan,  année  1880  ;  —  Bulletin  de 
la  Société  archéologique  et  historique  de  P  Orléa- 
nais, t.  VII,  no*  109,  1 10,  1 1 1  ;  —  Bulletin  de  la  So- 
ciété historique  et  scientifique  de  Soissons,  t.  X, 
2«  série;  —  Congrès  archéologique  de  France, 
47«  session,  1881  ;  -*  Antiquités  et  Monuments  du 
département  de  P Aisne,  par  M.  Edmond  Fleury, 
4«  partie,  1882. 

Indications  relatives  à  la  correspondance  impri- 
mée de  la  précédente  séance.  —  M.  Brianchon  pré- 
sente l'analyse  des  parties  les  plus  intéressantes  de 
la  correspondance  imprimée,  mentionnée  au  procès- 
verbal  du  10  mars^  et  insiste  tout  spécialement  sur  les 
documents  mentionnés  aux  annales  de  la  Société 
historique  et  archéologique  de  Château^Thierry, 
1879-1880,  2  vol.  in-80,  et  notamment  sur  celles  de 
M.  Frédéric  Moreau,  dont  la  suite  de  V Album  Ca- 
randa  contient  les  découvertes  les  plus  intéressantes, 
fournies  par  les  fouilles  de  Breny  (Aisne),  dans  une 
série  de  1 1  planches  que  notre  collègue  décrit  avec  son 
exactitude  ordinaire.  M.  F.  Moreau  s^est  signalé  de- 
puis 1873  par  Pexploration  de  près  de  10,000  tom- 
beaux gallo-romains  ou  francs. 

Allocation  à  l'Église  Saint-PauL  —  M.  le  Prési- 
dent donne  communication  d^une  lettre  par  laquelle 
M.  le  Préfet  de  la  Seine-Inférieure  informe  la  Com- 
mission, à  la  date  du  6  avril  1882,  que  la  Commission 
départementale^  dans  sa  séance  du  27  mars,  a  alloué 
un  secours  de  900  fir.  à  la  fabrique  de  Péglise  Saint- 
Paul  «  pour  la  restauration  de  la  vieille  église  de  ce 


6o 

nom^  classée  au  nombre  des  monuments  historiques». 
Cette  allocation  répond  au  vœu  exprimé  par  la  Com- 
mission des  antiquités,  dans  sa  séance  du  lo  mars. 

Blason  des  Montmorency,  dans  les  fondations  de 
Véglise  Notre-Dame-du-Havre.  —  Anciennes  salles 
ogivales  sous  le  musée.  —  M.  Rœssler  a  adressé  la 
note  suivante  relative  à  des  fouilles  récemment  faites 
à  la  base  du  clocher  de  Notre-Dame-du-Havre,  et  au- 
dessous  du  musée. 

Une  exploration,  habilement  conduite,  a  permis  de 
reconnaître  une  petite  salle  sous  le  clocher  de  Notre- 
Dame-du-Havre.  Cette  salle  paraissait  destinée  à  Técoule- 
ment  des  eaux,  en  même  temps  qu'elle  donnait  de  la 
solidité  à  la  base  de  la  tour  du  clocher. 

La  pierre  de  fondation  s'y  est  retrouvée.  Autour  de 
reçu  français  des  Montmorency  on  lit  : 

LA.  PREMIERE.  PIBRE.  A.  ASSIS. 
DE.  CESTE.  TOVR.         LE.  BON.  BARON. 
DE.  POSSEVLX.  ET.  8Y.  Y  A.  MIS. 
SES.  ARMES.        DIGNES.  DE.  REGNON. 
LAN.  ZVC  ZXX  IZ         .  JE.  DIS. 
DV.  MOY8.  DAPVRIL.  LE.   XZl. 

Cette  pierre  est  transportée  au  musée  du  Havre. 

Sous  le  musée  on  a  procédé,  vendredi  dernier,  à  une 
reconnaissance,  consentie  gracieusement  par  la  munici- 
palité du  Havre,  en  faveur  d'une  grande  publication  histo- 
rique entreprise  par  M.  Alexis  Lemâle. 

La  galerie  Cochet  est  la  plus  basse  de  tout  le  musée. 
On  y  a  descellé  la  pierre  donnant  accès  dans  la  grande 
salle  souterraine,  bâtie  sous  le  gouvernement  de  Villars 
pour  servir  de  citerne  en  cas  de  surprise.  Sous  Henri  IV, 
on  n'avait  pas  oublié  les  circonstances  du  siège  de  1 563  et 
la  nécessité  où  la  garnison  anglaise  avait  été  réduite  faute 
d'eau  douce. 


6i 

L'immense  réservoir,  qui  s'étend  encore  sous  la  cour 
d'honneur  et  une  grande  portion  du  musée,  d'une  rue  à 
Tautre,  était  si  bien  cimenté  qu'on  n'y  a  jamais  constaté 
d'infiltrations  d'eau  de  mer.  Les  ogives  et  les  piliers  carrés 
portant  les  nervures  prismatiques,  soutenant  les  voûtes  à 
arête,  se  reconnaissent  surtout  sous  la  cour,  où  les  recon-. 
structions  de  voûtes,  vers  1842,  étaient  moins  nécessaires 
que  dans  les  fondations  du  musée. 

Quelques  membres  demandent  si  des  caractères  ar- 
chitecturaux de  la  construction  de  la  salle  souterraine, 
indiqués  dans  cette  note,  ne  supposent  une  époque 
sensiblement  antérieure  à  la  date  de  1 563. 

Décès  de  MM,  de  la  Londe  et  Desmarest,  membres 
de  la  Commission,  —  M.  de  Beau  repaire  exprime  les 
regrets  qu^a  éprouvé  la  Commission  de  la  perte  de 
deux  de  nos  collègues,  Pun,  M.  de  la  Londe,  qui  por- 
tait un  intérêt  si  vif  à  nos  séances,  et  Tautre,  M.  Des- 
marest,  qui  se  promettait  de  faire  profiter  la  Com- 
mission des  loisirs  que  devait  lui  donner  sa  retraite. 

Notice  sur  V  ancien  château  de  Croisse  t.  —  M.  de 
Glanville  donne  lecture  d'une  note  intéressante  sur 
Tancien  château  de  Croisset. 

On  ne  possède,  nous  le  croyons  du  moins,  d'autre  plan 
du  château  de  Croisset,  commune  de  Canteleu,  que  la 
gravure  donnée  par  Gomboust,  dans  la  bordure  qui 
encadre  son  plan  de  Rouen,  daté  de  i655.  Cette  gravure, 
par  trop  restreinte  pour  que  l'on  puisse  apprécier  les 
détails  et  le  style  de  l'architecture,  paraît  être  du  moins 
d'une  grande  exactitude  dans  son  ensemble. 

Nous  ne  connaissons  pas  non  plus  de  renseignements 
écrits  qui  puissent  jeter  quelque  lumière  sur  l'époque  de 
la 'construction  ni  sur  l'histoire  de  ce  monument. 

En  l'absence  de  tout  autre  document,  nous  avons  pensé 


62 

qu'il  ne  serait  peul-être  pas  tout  à  fait  sans  intérêt,  pour 
les  membres  de  la  Commission  des  antiquités  de  la  Seine- 
Inférieure,  de  faire  passer  sous  leurs  yeux  une  pièce 
authentique,  contenant  quelques  détails,  malheureusement 
incomplets,  que  le  hasard  m'a  fait  rencontrer  dans  des 
papiers  de  famille.  C'est  le  procès-verbal  établissant  l'état 
de  la  terre  et  du  château  de  Croisset,  en  1 748,  au  moment 
de  la  vente  faite  par  messire  Hyacinthe  de  Pardîeu,  héri- 
tier, sous  bénéfice  d'inventaire,  de  feu  M .  François-Alphonse 
de  Pardieu,  son  frère,  écuyer,  et  seigneur  de  Croisset,  au 
sieur  Jean-Baptiste  Heutte,  marchand,  demeurant  à 
Rouen,  rue  Grand- Pont.  Ce  procès- verbal  fut  dressé  par 
maître  Nicolas  Royer,  expert  juré  des  bâtiments  pour  la 
ville  et  ressort  du  Parlement  de  Rouen,  assisté  de  maître 
Louis-François  Guilyot,  greffier  juré  des  mêmes  bâtiments, 
qui,  partis  chacun  de  leur  domicile  à  Rouen,  se  transpor- 
tèrent, le  lundi  sixième  jour  de  mai  1748,  au  lieu  de 
Croisset,  paroisse  de  Saint-Martin  de  Canteleu,  en  exécu- 
tion d'une  sentence  du  bailliage  de  ladite  ville,  pour  dresser 
procès-verbal  des  bâtiments,  murs,  talus,  plantes  et  fossés 
étant  sur  le  fief,  terre  et  seigneurie  de  Croisset,  et  des 
matériaux  et  décombrements  qui  pouvaient  rester  de  l'an- 
cien château. 

Le  procès-verbal  nous  apprend  que  : 

c  Après  chaque  vacation,  l'expert  et  son  greffier  se  reti- 
raient audit  Croisset  pour  prendre  leur  réfection  en  l'au- 
berge où  pendait  pour  enseigne  le  Cceur  d! amour ^  occu- 
pée par  la  dame  veuve  Trugard.  » 

Nous  avons  extrait  de  ce  long  procès-verbal  les  quelques 
détails  intéressants  qu'il  renferme. 

Le  château  de  Croisset  se  composait  de  quatre  corps  de 
logis,  réunis  ensemble  par  leurs  angles,  de  manière  à  for- 
mer une  cour  intérieure  qu'on  appelait  la  cour  d'honneur. 
Des  quatre  faces  de  cette  construction,  du  côté  de  la  cour, 
deux  avaient  vingt-sept  toises  et  quatre  pieds  de  longueur  ; 
les  deux  autres  n'en  avaient  que  vingt-cinq,  mesures  prises 


63 

entre  les  murailles.  Elles  étaient  toutes  construites  de  la 
même  manière,  en  pierres  de  taille,  provenant  des  car- 
rières de  Caumont  et  de  Saint-Leu,  jusqu'à  une  hauteur 
de  onze  pieds,  se  terminant  ensuite,  dans  la  partie  supé- 
rieure, par  une  charpente  qui  tombait  en  ruine  au  moment 
où  le  procès-verbal  fut  dressé,  et  n'avait  qu'une  très  faible 
valeur,  au  dire  de  l'expert,  la  construction  étant  faite  en 
bois  de  châtaigner  à  moitié  pourri.  Deux  tourelles,  égale- 
ment en  charpente  de  châtaigner,  complétaient  cet  inté- 
rieur ;  elles  étaient  octogones,  couvertes  en  ardoises  et  leur 
amortissement  se  terminait  par  des  épis  en  plomb. 

Les  façades  extérieures,  entièrement  en  pierres  de 
taille,  provenant  des  mêmes  carrières,  étaient  reliées  entre 
elles  aux  quatre  angles  par  des  tourelles  cylindriques  sur- 
montées d'épis. 

Tout  cet  ensemble  était  entouré  d'un  vivier  ou  étang 
revêtu  d'une  maçonnerie  en  moellon  avec  chaînes  de 
pierres;  un  canal  également  maçonné,  long  de  vingt-trois 
toises,  le  faisait  communiquer  avec  la  rivière,  qui,  en  cet 
endroit,  était  bordée  par  un  talus  en  pierre  de  bitte  qui 
avait  quatre-vingt-quinze  toises  de  longueur. 

On  franchissait  Tétang,  du  côté  de  la  rivière  et  du  côté 
de  la  côte  de  Canteleu,  par  deux  ponts,  composés  chacun 
de  trois  arches  en  maçonnerie,  formant  ensemble  une  lon- 
gueur d'environ  trente-six  pieds  sur  dix  de  hauteur.  Cette 
mesure  donne  la  largeur  de  l'étang. 

Le  pied  des  murs  du  château  était  porté  sur  un  talus 
de  pierre  dure  en  glacis,  qui  avait  une  hauteur  de  dix 
pieds,  en  comprenant  quatre  pieds  et  demi  de  profondeur 
dans  l'eau  de  l'étang  et  cinq  pieds  et  demi  hors  œuvre 
jusqu'au  niveau  de  la  cour  d'honneur. 

Les  deux  ponts  correspondaient  à  un  même  nombre  de 
portes,  qui  donnaient  accès  dans  le  château  par  un  large 
vestibule.  Elles  étaient  flanquées  chacune  par  deux  élé- 
gantes tourelles  destinées  autrefois  à  contenir  des  fours 
pour  cuire  le  pain  et  autres  dépendances. 


64 

Les  vantaux  de  ces  portes,  larges  de  huit  pieds  et  demi 
sur  une  hauteur  de  dix  pieds,  étaient  composés  de  caissons 
ou  panneaux  assemblés,  en  manière  de  parquet,  dans  de 
fortes  membrures,  le  tout  en  bois  de  chêne.  Ils  étaient 
ferrés  de  quatre  pentures  roulant  sur  des  gonds  en  cuivre 
et  fermés  par  des  fléaux  garnis  de  serrures,  avec  des  gui- 
chets à  double  charnières  et  fermant  à  clef. 

Les  aîtres  ou  appartements  compris  entre  la  £siçade 
intérieure  et  l'extérieure  avaient  vingt-quatre  pieds  de 
profondeur.  Si  on  ajoute  cette  largeur  de  vingt-quatre 
pieds,  répétée  deux  fois,  à  la  longueur  des  façades  inté- 
rieures que  nous  venons  de  donner,  c'est-à-dire  vingt-sept 
toises  et  quatre  pieds,  plus  quarante-huit  pour  les  appar- 
tements, et  aussi  pour  Tépaisseur  approximative  de  quatre 
murailles,  environ  douze  pieds,  on  trouve  que  le  château, 
à  Textérieur,  pouvait  avoir  deux  cent  vingt-cinq  pieds,  ou 
soixante-quatorze  mètres  environ,  de  façade  dans  sa  plus 
grande  longueur,  et  dans  l'autre,  c'est-à-dire  vers  la 
rivière  et  vers  la  côte  de  Canteleu,  soixante-neuf  mètres 
trente,  sans  compter  la  saillie  des  tourelles,  mesures 
qui  accusent  une  construction  de  premier  ordre  et  qui 
paraissent  en  rapport  avec  le  plan  donné  par  Gomboust. 

Dans  l'intérieur  de  l'un  des  appartements,  on  remar- 
quait une  ancienne  cheminée  dont  le  manteau  et  les  cor- 
belets  en  fer  méritaient  d'attirer  les  regards. 

Le  procès- verbal  signale,  à  peu  de  distance  du  château, 
un  colombier  construit  en  chaînes  de  briques  et  de  pierres 
sur  un  plan  octogone,  portant  dix  pieds  sur  chaque  face 
et  couronné  d'un  entablement  en  corniche  avec  une  plate- 
forme en  rond  point.  Il  était  couvert  en  tuiles  avec  un 
épi  en  plomb  à  l'amortissement. 

Ce  colombier  existe  encore  ainsi  que  deux  portes  assez 
intéressantes.  La  première,  placée  autrefois  vis-à-vis  l'une 
des  entrées  de  l'ancien  château,  se  voit  sur  le  bord  du 
chemin,  tendant  de  Bapeaume  à  Croisset.  Elle  se  compose 
d'une  arcade  à  plein  cintre,  élevée  au  milieu  d'un  mur  en 


65 

demi-lune,  long  de  six  toises  et  construit,  dans  son  pour- 
tour, en  briques,  avec  compartiments  en  bijet  ou  silex 
noir,  taillé  au  marteau,  le  tout  surmonté  d'une  frise  avec 
chapiteaux  et  corniches  sur  les  deux  piliers. 

L'autre  grande  porte,  d'une  construction  analogue  à  la 
première,  mais  plus  richement  ornée  d'encadrements  et 
de  profils  d'architecture,  figure  fort  honorablement,  par 
son  aspect  pittoresque,  sur  la  petite  place  du  village  de 
Croisset.  Elle  portait,  dit-on,  avant  Tépoque  de  1793,  les 
armes  de  France,  sculptées  sur  un  écusson,  placé  au  fron- 
ton de  la  grande  arcade,  qui  occupe  le  milieu  du  monu- 
ment. Ce  qu*il  y  a  de  certain,  c'est  que  Ton  voit  très  bien 
l'arrachement  de  crampons  qui  maintenaient  en  place  un 
écusson  quelconque.  Nous  serions  plus  disposé  à  croire 
que  c'était  celui  du  seigneur  du  lieu.  Cependant  une  tra- 
dition populaire  voudrait  que  Henri  IV  ait  logé-  au  châ- 
teau de  Croisset  pendant  le  siège  de  Rouen,  et  l'on  verrait 
dans  ce  fait  l'explication  naturelle  de  la  présence  de  l'écu 
de  France  sur  une  des  portes  d'entrée.  Mais  où  Henri  IV 
n'aurait-il  pas  loge  en  Normandie,  si  on  en  croyait  la 
légende  ? 

Dans  la  cour  de  ferme,  dite  de  la  bergerie,  où  était  situé 
autrefois  le  château  de  Croisset,  on  découvre,  sans  peine, 
remplacement  qu'il  occupait,  et  une  dépression,  facile 
à  suivre,  accuse  les  dimensions  de  l'étang  et  du  canal 
qui  le  mettait  en  communication  avec  la  rivière. 

Les  matériaux  du  château,  démoli  par  les  nouveaux 
propriétaires,  ont  servi  à  construire  des  bâtiments  ruraux 
d'une  architecture  assez  remarquable. 

Voici  donc  tout  ce  qui  reste  de  cette  antique  demeure 
grandiose  et  presque  princière  :  Un  colombier,  deux 
portes  à  moitié  ruinées  et  le  souvenir. 

Nous  devons  a  l'obligeance  de  M.  Stéphane  de  Merval, 
notre  savant  collègue,  la  liste  des  anciens  seigneurs  de  la 
châtellenie  et  plein  fief  de  haubert  de  Croisset,  dont  on 
retrouve  la  trace  ;  nous  la  donnons  ici  : 

5 


66 

Un  titre  de  i2o5,  cité  dans  Thistoire  de  la  maison 
d*FIarcourt,  porte  qu'Amaury  de  Meull^nt,  le  plus  ancien 
seigneur  de  Croisset  connu,  en  mariant  sa  fille  Alisande 
à  Guillaume  de  Tancarville,  lui  donna  en  dot  les  terres  et 
seigneuries  de  Sahurs,  Croisset  et  Bapeaume. 

Alix  de  Tancarville,  fille  de  Raoul,  lors  de  son  mariage 
avec  Robert  Bertrand,  baron  de  Briquebec,  etc.,  reçut  en 
dot  les  seigneuries  de  Sahurs,  Croisset^  Feuguerolles, 
Oystreham,  etc.  (v.  Histoire  de  la  maison  cTHarcourt). 

Leur  second  fils,  Guillaume  Bertrand,  prenait  les  titres 
de  vicomte  de  Fauguernon,  sieur  du  Mesnil-Patry,  de 
Feuguerolles,  de  Sahurs,  de  Croisset,  de  Bapeaume,  de 
Courvandon,  etc.  Il  était  mort  avant  i32o  et,  dans  la 
généalogie  de  ses  descendants,  il  n'est  plus  fiait  mention 
du  titre  de  seigneur  de  Croisset,  que  Ton  ne  retrouve  qu'à 
la  montre  des  nobles,  tenue  le  troisième  jour  de  juil- 
let i486,  par  Pierre  Rolin,  lieutenant  général  du  bailly 
de  Rouen,  commissaire  du  roi,  en  laquelle  comparait  : 
Pierre  Le  Clerc,  sieur  de  Croisset,  de  Bouville  et  du 
Grand-Quevilly. 

Depuis  cette  époque  jusqu'au  mariage,  en  1668,  de 
Suzanne  Le  Clerc,  fille  d'Alonce  Le  Clerc,  sieur  de  Crois- 
set, et  de  Suzanne  de  Bailleul,  née  à  Croisset  le  2  juil- 
let 1647,  *vec  François- Alphonse  de  Pardieu,  seigneur  et 
patron  de  Sain t-Denys-du- Val,  la  seigneurie  de  Croisset 
appartînt  à  la  famille  Leclerc,  puis  à  la  famille  de  Pardieu. 
qui  la  posséda  pendant  quatre  générations. 

François-Hyacinthe  de  Pardieu,  mort  le  22  juillet  1767, 
eut,  de  Geneviève- Barbe  Cavelier  de  Mocomble,  six 
enfants,  tous  baptisés  à  Cantelcu.  C'est  celui  qui  vendit  le 
château  de  Croisset  à  son  frère,  ainsi  que  nous  Pavons 
dit. 

Alonce  Le  Clerc,  député  aux  États  de  Normandie 
en  i583,  dont  il  vient  d'être  question,  était  ce  même 
Alonce  chez  lequel  fut  transporté  son  cousin,  François  de 
Civille,  lorsqu'il  fut  blessé  au  siège  de  Rouen,  ainsi  qu'il 


6; 

le  raconte  dans  ses  Mémoires,  réimprimés  par  la  Société 
des  Bibliophiles  normands 

Le  caveau  funéraire  de  la  famille  Le  Clerc  était  placé 
sous  le  chevet  de  Téglise  Saint- Vincent  de  Rouen. 

Le  i6  mars  i5o5,  Pierre  Le  Clerc,  écuyer,  seigneur 
châtelain  de  Croisset^  de  Quevilly,  de  Bouville  et  de  Gaîl- 
lardbois,  fonda  une  messe  en  cette  église  de  Saint- Vincent, 
où  ses  prédécesseurs,  avaient  donné  deux  grandes  vitres 
peintes  sur  lesquelles  leurs  armes  sont  représentées.  Elles 
sont  da^ur^  à  trois  lions  naissants  d'or^  armés  et  lampas- 
ses  de  gueules^  les  queues  passées  en  sautoir^  à  la  bordure 
engreslée  de  gueules, 

M.  Bouquet  communique  le  renseignement  suivant 
sur  les  anciens  sceaux  de  la  vicomte  de  Gaillefontaine. 

La  châtellenie  de  Gaillefontaine  resta  dans  la  famille 
d'Orléans- Longue  ville  depuis  1488  jusqu'en  iSgS.  Elle 
possédait  une  haute  justice,  qui  avait  un  sceau^  aux  armes 
de  cette  maison,  pendant  toute  cette  période.  Il  y  avait  le 
grand  et  le  petit  sceau,  et  tous  les  deux  étaient  en  argent, 
portant  les  armes  d'Orléans- Longueville,  bande  et  le  lam- 
bel,  et  surmontés  de  la  couronne  comtale  (sept  perles), 
avec  une  légende  en  lettres  gothiques  au  pourtour.  L'une 
était  :  Le  Grant  scel  aux  causes  de  la  Vicôté  de  Gaille- 
fontaines,  et  l'autre  :  P.  5.  (petit  scel)  de  la  Viconté  de 
Gaillefontaines.  Le  grand  sceau  a  été  longtemps  porté  ^ 
après  la  Révolution  de  1789,  comme  breloque  de  montre, 
par  un  habitant  de  l'arrondissement  de  Neufchâtel,  de  qui 
M.  Mathon,  ancien  bibliothécaire  de  cette  ville,  l'a  racheté. 
Mme  la  générale  Hoche  avait  fait  prendre  une  empreinte 
de  l'un  et  de  Fautre,  en  cire  rouge,  à  la  prière  de  M.  Bou- 
quet, qui  les  croit  assez  curieuses  pour  en  faire  hommage 
a  la  Commission. 

Notice  sur  le  domaine  de  la  Motte,  —  Notre  col- 
lègue, M.  Paul  Baudry,  dont  le  domaine  de  la  Motte 


68 

a  été  récemment  touché  par  l'expropriation,  a  extrait 
de  ses  titres  de  propriété  une  note  destinée  à  en  retracer 
la  physionomie  toute  particulière. 

La  maison  de  La  Motte,  ou,  comme  on  le  dit  quelquefois 
beaucoup  trop  pompeusement,  le  château  de  La  Motte, 
qui  avait  autrefois  pour  voisinage  le  prieuré  de  Notre- 
Dame -des- Prcs,  entra,  le  4  mai  iSog,  dans  la  famille 
d'Harcourt,  par  la  succession  de  Artut  de  Vierville. 

En  1746,  le  célèbre  chirurgien  rouennais  Le  Cat  en  fit 
l'acquisition,  en  même  temps  que  celle  d'une  pièce  de 
terre  y  attenante,  à  charge  de  les  tenir  et  relever  de  la  sei- 
gneurie d'Emendreville,  par  tous  droits,  devoirs  seigneu- 
riaux et  rentes  seigneuriales,  et  moyennant  la  somme  de 
5,5oo  livres. 

Cette  petite  propriété  passa  dans  ma  famille  en  18 17  et 
m'appartient  personnellement  depuis  1868. 

C'est,  dans  son  genre  et  dans  sa  simplicité  relative,  un 
manoir  curieux,  avec  l'avenue  qui  en  décore  l'entrée  et 
que  je  trouve  citée  dès  l'année  iGSg;  avec  sa  vieille  grange  ; 
avec  un  bâtiment  à  deux  pignons,  qui  peut  appartenir  au 
xvi«  siècle;  avec  son  jardin  français,  si  r^re  aujourd'hui; 
avec  ses  rangées  de  tilleuls  et  ses  charmilles,  contempo- 
raines peut-être  de  celles  de  Versailles,  et  dont  le  dessin, 
habilement  disposé,  ne  déshonorerait  pas  la  main  de  Le 
Nôtre,  auquel  on  Ta  quelquefois  attribue,  sans  preuves, 
du  reste. 

Cet  immeuble,  suivant  l'expression  contemporaine,  n'a 
pas  seulement  un  intérêt  quasi  historique.  Des  souvenirs 
intimes  me  le  rendent  cher  :  Je  pourrais  dire,  en  alté- 
rant très  peu  les  vers  d'Andrieux  à  propos  du  meunier  de 
Sans-Souci  : 

Mon  vieux  père  y  mourut  et  mon  fils  y  naquit  ; 
C'est  mon  Postdam,  à  moi. 

Aussi,  avec  quel  soin  n'ai-je  pas  conservé  cette  sorte  de 
relique  des  temps  passés!  J'ai  renouvelé  les  plantations  à 


69 

mesure  qu'elles  disparaissaient.  J'ai  décoré  la  façade  de 
faïences,  dont  notre  savant  collègue,  de  regrettable  mé- 
moire, M.  Desmarest,  a  brillamment  reproduit  le  genre 
dans  sa  maison  de  la  rue  Pouchet.  J'y  ai  mis  pour  sus- 
cription  deux  mots  qui  m'ont  été  gracieusement  suggérés 
par  un  autre  de  nos  savants  et  aimables  collègues, 
M.  Bouquet  :  Et  mets  et  amicis,  invitation  de  visite  que 
je  reprocherai  affectueusement  à  l'inspirateur  de  cette 
devise  de  ne  pas  assez  mettre  en  pratique. 

Au  moment  où,  cédant  à  la  loi  d*expropriation,  qui 
atteint  tant  de  monuments  rouennais,  l'avenue  extérieure 
et  une  partie  des  charmilles  de  La  Motte  vont  bientôt 
céder  la  place  aux  rigueurs  de  l'alignement,  excusez-moi, 
Messieurs,  d'être  sorti  des  questions  d'intérêt  général  et 
de  vous  avoir  un  peu  parlé  j^ro  domo  med 

J'ai  eu  l'occasion,  il  y  a  quelques  années,  de  faire  litho- 
graphier  l'extérieur  de  La  Motte.  Je  vous  demande  la 
permission  de  laisser  dans  nos  cartons,  si  vous  le  jugez  à 
propos,  un  exemplaire  de  cet  essai,  dû  a  Varin. 

Bolbec  :  chapelle  Saint  -  Martin-  du -Vivier.  — 
Cercueils  gallo-romains,  près  Péglise  Saint-Denis, 
de  Lillebonne.  —  M.  Brianchon  donne  ensuite  lecture 
d^une  notice  sur  la  chapelle  Saint-Martin-du-Vivier,  à 
Bolbec,  et  d'amulettes  de  M.  Duval  constatant  la  décou- 
verte de  deux  cercueils  de  pierre  dans  le  cimetière  de 
Saint-Denis,  de  Lillebonne. 

LA  CHAPELLE   SAINT-MARTIN-DU- VIVIER,    A   BOLBEC 

Le  plus  ancien  monument  de  Bolbec,  remontant  au 
xi«  siècle,  a  été  démoli  le  mois  dernier.  Je  veux  parler  de 
la  chapelle  romane  de  Saint-Martin-du-Vivier.  Qu'il  me 
suffise  de  rappeler  ici  ce  qu'en  ont  dit  deux  ou  trois 
auteurs,  pour  lui  servir  d'oraison  funèbre. 

Dans  sa  note  sur  Bolbec,  dom  Duplessis  ne  manque  pas 


de  mentionner,  au  château  de  Fontaine- Martel,  la  cha- 
pelle Saint-Martin.  C'est,  remarque  le  savant  bénédictin, 
le  fief  de  Fontaines,  demi-fief  de  haubert,  relevant  du 
comté  de  Lillebonne,  qui  a  droit  de  présenter  à  cette 
chapelle  (i).  Selon  un  aveu  du  comte  de  Maulévrier,  du 
i5  février  lôyS,  le  fief  ou  fiefferme  de  Fontaine-Martel, 
près  de  Bolbec,  relève  du  comté  de  Maulévrier. 

D'après  un  aveu  du  i«r  avril  i6S5,  le  fief  de  Fontaines 
s'appelait  anciennement  le  fief  de  la  Marche  (2). 

Le  seul  débris  qui  reste  de  ce  château,  —  le  château  de 
Fontaine-Martel,  —  dit  à  son  tour  Guilmeth,  en  i838, 
est  sa  vieille  chapelle,  dédiée  à  saint  Martin,  laquelle,  en 
vertu  d'une  convention  passée  à  Lillebonne  en  présence 
de  Guillaume-le-Conquérant  et  d'un  grand  nombre  de 
personnages  illustres,  par  Hugues  de  Bolbec,  et  ratifiée 
par  Gautier  Giffard,  comte  de  Longueville  et  de  Buckin- 
gham,  avait  été  cédée  en  1078,  avec  le  prieuré  de  Saint- 
Michel,  à  l'abbaye  de  Bernay.  Dans  les  derniers  siècles, 
c'étaient  les  seigneurs  de  Bolbec  qui  nommaient  les  des- 
servants de  cette  chapelle.  Elle  fut  pillée  et  dévastée  par 
les  révolutionnaires  en  1794  (3). 

M.  Collen-Castaigne,  qui  publiait^  un  an  plus  tard, 
c'est-à-dire  en  1839,  un  Essai  historique  sur  Bolbec,  s'ex- 
prime à  peu  près  (p.  2 1)  comme  son  devancier  : 

«  On  voit  encore,  dit-il,  la  vieille  chapelle  du  château  de 
Fontaine-Martel,  dédiée  à  saint  Martin,  et  qui  fut  dévastée 
et  privée  pour  jamais  de  sa  petite  cloche  en  1794  (4).  » 

(i)  Cf.  Archives  de  la  Chambre  des  Comptes  de  Rouen. 

(2)  Dom  T.  Duplessis.  Description  de  la  Haute-Normandie, 
1740, 1,  353. 

(3)  Aug.  Guilmeth.  Description  géographique,  historique^  mo- 
numentale et  statistique  des  arrondissements  du  Havre,  Yvetot 
et  Neufchdtel,  suivie  de  V Histoire  communale  des  environs  de 
Dieppe  (ire  partie),  arrondissement  du  Havre,  canton  de  Bol- 
bec, 6,  7  et  24.  Paris,  i838. 

(4)  Archives  de  la  mairie  de  Bolbec. 


Enfin,  entre  le  château  de  Fontaine-Martel  et  le  cime- 
tière romain  se  voit  encore,  écrivait  en  1871  l'abbé  Cochet, 
près  d'un  ancien  vivier  rebouché,  une  chapelle  de  Saint- 
Martin,  construite  en  tuf  au  xi^  siècle  (i). 

Ce  tuf  sortait  de  la  vallée  même,  comme  on  a  pu  s*en 
convaincre  lors  des  travaux  de  rectification  du  chemin  de 
grande  communication  n^  3o,  de  Bolbec  à  Caudebec,  exé- 
cutés en  octobre  1871  (2). 

C'est  grâce  à  la  sollicitude  archéologique  de  M.  Georges 
Castaigne,  parent  de  Thistorien  de  ce  nom  (3),  que  deux 
statuettes  en  pierres  coloriées  et  mutilées,  dont  Tune  est 
une  Mater  dolorosa,  ont  été  réservées  par  MM.  Hcrtel  et 
Glachant,  entrepreneurs,  et  mises  à  notre  disposition  par 
les  propriétaires,  MM.  Léon  Lemaître  et  René  Desgené- 
tais,  pour  être  offertes  à  quelque  musée.  Les  fouilles  qui 
ont  eu  lieu  à  cette  occasion  ont  révélé  la  présence  d'orne- 
ments en  assez  grand  nombre. 

Un  plan  géométrique  de  la  chapelle  Saint-Martin-du- 
Vivier,  telle  qu'elle  existait  au  moment  de  sa  démolition, 
^  été  dressé  par  les  soins  de  M.  Duveau,  ingénieur  civil, 
et  témoignera  de  la  dernière  pierre  du  vieux  Bolbec  dis- 
paru aux  archives  de  la  Commission. 

(i)  L'abbé  Cochet.  La  Seine^Jnférieure  historique  et  archéo^ 
logique  y  1864»  p.  224.  —  Répertoire  archéologique  du  départe- 
ment de  la  Seine-Inférieure^  1 871,  col.  93. 

(2)  C'est  à  la  base  de  la  couche  tuffeuse  de  la  vallée  de  Fon- 
taine, observe,  dans  son  Histoire  de  Bolbec,  M.  Mauconduit,  que 
fut  trouvée,  par  M.  Alfred  Lacaille,  avec  plusieurs  autres  fos- 
siles, la  magnifique  urne  de  bos  primigenius,  qui  forme  aujour- 
d'hui l'un  des  plus  curieux  objets  de  sa  collection. 

(3)  CoUen-Castaigne.  Essai  historique  et  statistique  sur  la 
ville  de  Bolbec,  Rouen,  18^0 


'^1 


COPIE  D  UNE  LETTRE  DE  M.  DUVAL  A  M.  BRIANCHON 
DATÉE  DE  LILLEBONNE,  26  AVRIL  1882 


Cher  Monsieur, 

Je  viens  de  découvrir,  en  faisant  fouir  le  gazon  de  mon 
jardin  pour  le  renouveler,  deux  cercueils  francs,  en  forme 
d'auge,  près  de  l'endroit  où  j'en  avais  déjà  retiré  deux, 
dont  l'un  d'une  seule  pierre,  et  tout  près  de  deux  autres 
tombeaux  en  pierre,  que  M.  Tabbé  Cochet  a  visités  avec 
M.  Paul  Baudry.  Ils  sont  restés  en  place  et  se  trouvent 
sous  mon  wellingtonia.  Ils  avaient  déjà  été  fouillés,  mais 
ils  sont  entiers.  Ceux  que  je  viens  de  découvrir  ont  été 
non  seulement  violés,  mais  les  rebords  ont  été  en  partie 
enlevés.  Ils  sont  formés,  comme  la  plupart  des  auges  en 
pierre,  de  deux  morceaux.  Celui  dont  la  partie  des  pieds 
manque  à  un  mètre  soixante  de  longueur,  sur  une  largeur 
presque  égale  aux  deux  extrémités,  soixante-sept  centi- 
mètres sur  cinquante-sept  mesurée  extérieurement. 

La  largeur  aux  pieds  de  l'autre,  mesurée  aussi  extérieu- 
rement, est  de  trente-huit  centimètres.  Seulement,  le  reste 
manque. 

Tout  à  côté  existe  un  petit  massif  de  maçonnerie  ro- 
maine en  pierre  de  petit  appareil,  recouvert  de  briques  de 
trente-six  centimètres  sur  vingt-neuf,  sur  lesquelles  ne  se 
trouve  pas  le  petit  empâtement  que  nous  avons  remarqué 
aux  briques  d'Alincourt  et  du  théâtre.  On  y  avait  pratiqué 
une  entaille  pour  faire  entrer  l'angle  d'une  des  auges.  Il 
repose  sur  un  mur  qui  paraît  se  prolonger. 

Ces  sépultures  se  trouvent  devant  le  porche  de  l'église, 
vers  l'endroit  où  était  placée  la  croix  du  cimetière. 

Veuillez  agréer,  etc. 

Rouen  :  notice  sur  Vancien  hôpital  Saint  -  Vivien. 
—  M.  de  Beaurepaire  communique  une  notice  sur 


Tancien  hôpital  Saint-Vivien  ;  elle  est  ainsi  connue  : 

NOTICE  SUR   l'hôpital   SAINT-VIVIEN,    A    ROUEN 

Il  existe  à  Rouen,  près  de  l'église  Saint- Vivien,  une  an- 
cienne maison  dont  la  destination,  généralement  oubliée, 
nous  paraît  mériter  d*être  rappelée.  Cétait  un  de  ces  éta- 
blissements, comme  il  y  en  avait  tant  au  moyen-âge,  à  une 
époque  où  les  hôtelleries  étaient  rares,  où  Thospitalitc 
envers  les  pauvres  passants  était  réputée  Tune  des  princi- 
pales œuvres  de  miséricorde  ;  comme  il  n'en  restait  pres- 
que plus  au  dernier  siècle,  et  comme  il  serait  peut-être 
à  propos  d'en  fonder  de  nouveau  aujourd'hui.  Je  veux 
parler  de  l'hôpital  Saint- Vivien  qui  fut  établi  vers  le  mi- 
lieu du  xiv«  siècle,  et  dont  la  durée  s'est  prolongée  jusqu'à 
la  Révolution. 

Cet  hôpital  dut  sa  fondation  à  un  bourgeois  de  notre 
ville,  nommé  Jean  Le  Fèvre,  lequel  y  fit  placer  treize  lits 
fournis,  ut  pauperes,  claudi  et  débiles j  honeste  recipi  valu- 
rent, cubari  et  recolligi.  Ce  nombre  treize  n'avait  pas,  sans 
doute,  été  pris  au  hasard.  C'est  le  nombre  des  apôtres,  en 
y  comprenant  leur  maître. 

On  a  conservé  les  lettres  du  duc  de  Normandie,  par  les- 
quelles il  ordonne  au  bailli  de  Rouen  de  procéder  à  une 
enquête  sur  le  point  de  savoir  si  l'utilité  publique  était  in- 
téressée à  ce  que  l'amortissement,  sollicité  pour  cette 
maison,  lui  fût  accordé. 

Ces  lettres  sont  ainsi  conçues  : 

«  Jehan,  ainsné  fils  du  Roy  de  France,  duc  de  Norman- 
die et  de  Guyenne,  conte  de  Poitou,  d'Anjou  et  du  Maine, 
au  bailly  de  Rouen  ou  à  son  lieutenant,  salut.  Comme 
Jehan  Le  Fèvre,  bourgois  de  Rouen,  nous  ait  supplié  que 
une  pièce  de  terre,  contenant  en  lonc  et  en  lé  six  perches 
et  quatre  piez  ou  environ,  en  laquelle  il  a  commencé  à 
ordener  un  hospital  en  la  parroisse  Saint- Vivien  et  y 
mettre  treize  Hz  pour  recevoir  et  coucher  les  povres  et  y 
faire  une  chapelle  en  laquelle  ait  deux  prestres  qui  dores- 


74 

enavant  facent  le  dyvin  office,  nous,  en  regart  de  pitié,  et 
pour  estre  participanz  es  bien&iz  et  oroisons  que  Ten  fera 
ou  dit  hospital  et  en  la  dicte  chapelle,  li  voulsissions 
admortir  à  Feuvre  dessus  dicte  ;  weillanz  estre  sur  ce  cer- 
tiffîez  plus  à  plain^  vous  mandons  que,  appelé  notre  pro- 
cureur et  ceulz  à  qui  il  appartendra,  vous  vous  enfourmiez 
diligemment  se,  sans  préjudice  et  dommage  de  nous  et 
d'autruy,  nous  li  poions  octroier  ledit  admortissement,  et, 
se  aulcun  préjudice  ou  dommage  nous  ou  autre  y  poions 
avoir,  quel  il  soit,  et  l'information  que  vous  en  ferez  nous 
renvoiez  stablement  encloze  sous  votre  seel,  ou  aus  gens 
de  notre  Conseil  à  Paris,  afin  que,  ycelle  veue,  nous  ou 
nos  dictes  gens  en  puissions  plus  à  plain  ordonner  ce  que 
bon  nous  semblera.  Donné  à  Saint-Leu  de  Serens  (i),  le 
xx^  jour  de  juillet  Tan  de  grâce  mil  ccc  quarante  et  nuef, 
sous  le  seel  ordené  pour  Teschiquier  en  Tabsence  du  grant. 
Par  vous,  Mons^  Symon  de  Bucy  (2).  »  Signé  :  Symon. 

Bien  que  le  texte  ne  nous  en  soit  pas  parvenu,  il  ne  nous 
paraît  pas  douteux  que  les  lettres  d'amortissement  furent 
accordées.  On  voit,  en  effet,  que  dès  ce  temps  là  on  con- 
sidérait rhôpital  comme  régulièrement  fondé.  Le  lundi 
après  la  saint  Martin  d'hiver  i35o  (3),  il  était  approuvé 
par  lettres  des  vicaires  généraux  (4),  agissant  au  nom  de 

(i)  Saint-Leu-d'Essérent  (Oise),  arrondissement  de  Senlis,  can- 
ton de  Creil. 

(2)  Simon  de  Bucy,  premier  président  du  Parlement  de  Paris, 
mort  en  1369. 

(3)  II  novembre. 

(4)  Ces  lettres  commencent  par  ce  préambule  :  «  Cum  dilectus 
noster  Johannes  Fabri,  burgensis  Rothomagensis,  salutem  ani- 
me suCf  parentum ,  amicorum  et  benefactorum  suorum  deside- 
rans,  ac  etiam  eonsiderans  quod  qui  celestis  vite  dulcedinemy  in 
quantum  possibilitas  admittit,  perfecte  cognoverity  que  amat  in 
terris  libenter  pro  amore  Jhesu  Christi  relinquit,  cum  in  compas 
rations  ejus  vilescant  omnia,  deserit  habita,  congregata  disper- 
gitf  et  in  celestibus  animus  inardescit,  n 


-5 

l  archevêque,  pour  lors  absent  de  son  diocèse.  On  apprend 
par  ce  document  que  Jean  Le  Fèvre  avait  préposé  un 
concierge  à  la  garde  et  à  la  surveillance  de  cette  maison  ; 
qu'il  y  avait  affecté  une  rente  de  lo  1.  à  percevoir  par  les 
mains  des  trésoriers  de  Téglise  Saint- Vivien,  auxquels  il 
remettait  le  soin  de  nommer  à  l'avenir  le  concierge,  de  le 
salarier,  et  de  le  congédier,  à  l'occasion  ;  qu'il  y  avait,  en 
outre,  établi  deux  chapelains  perpétuels,  qui  devaient  cé- 
lébrer en  l'église  de  Saint-Vivien,  à  un  autel  par  lui  fondé 
ou  à  fonder  (i),  dix  messes  chaque  semaine,  h  savoir:  six 
messes  à  VEsquelle  de  Notre-Dame  ad  scalam  Beute 
Marie  (2),  les  autres  à  l'heure  de  prime,  sans  pouvoir 
cependant  administrer  les  sacrements,  sinon  avec  le  con- 
sentement du  curé.  Les  deux  premiers  chapelains  avaient 
été  présentés  par  lui  à  Tarchevêque. .  Mais  il  consentait 
qu'à  Tavenir  la  présentation  fût  faite  par  le  curé  et  par 
quatre  trésoriers  de  la  paroisse,  lesquels  devaient  s'ad- 
joindre, pour  le  choix  à  faire,  sept  personnes  suffisantes  de 
la  paroisse;  le  choix  devait  porter  sur  l'un  des  quatre  clercs 
matriculiers  de  l'église  paroissiale,  ou,  si  cela  ne  pouvait 
avoir  lieu,  sur  un  clerc  domicilié  en  la  paroisse,  et  qui  en 
fût  originaire.  La  fondation  paraît  avoir  eu  dès  lors  un 
double  but  :  la  charité  à  l'égard  des  pauvres,  l'accroissement 
du  culte  divin  en  l'église  paroissiale.  Ce  second  objet  fut  sans 
doute  proposé,  sinon  même  exigé,  par  le  curé,  Nicolas  de 

(i)  Les  lettres  des  vicaires  parlent  de  la  chapelle  en  des  termes 
qui  font  supposer  qu'elle  était  érigée,  et  celles  du  curé,  en  des 
termes  qui  font  supposer  qu'elle  était  à  ériger.  C'était  la  chapelle 
Sainte-Quitaire  ou  Sainte-Aquitaire  (Ste  Quiterie,  dont  la  fête  se 
célèbre  le  a  a  mai).  On  la  cite  comme  ayant  été  fondée  par  Jean 
Le  Fèvre,  dans  un  acte  du  tabellionage  de  Rouen,  R.  i3,  f^  56. 

(2)  VEsquelle  de  Notre-Dame,  l'une  des  cloches  de  la  cathé- 
drale. Les  sonneries  de  la  cathédrale  servaient  de  règle  aux  di- 
verses églisss  de  la  ville.  Nous  avons  eu  déjà  l'occasion  de  faire 
cette  remarque  à  propos  de  la  collégiale  du  Sépulcre.  V»  Ducange, 
au  mot  skella,  skillay  squilla. 


-6 

Veris,  chanoine  de  Rouen,  que  l'on  voit  approuver,  à  son 
tour,  cette  fondation,  le  17  novembre  i35i. 

Plus  tard,  Jean  Le  Fèvre  laissa  par  testament  une  assez 
forte  somme  d'argent,  dont  une  partie  (80  florins  d'or  à  Técu 
du  coin  du  roi  Jean)  servit,  le  jeudi  après  la  fête  de  Notre- 
Dame,  en  septembre  i359,  au  rachat  d'une  rente  de  10  1. 
pour  laquelle  un  nommé  Guillaume  Ybert  avait  fleffé  h 
Jean  Le  Fèvre  le  terrain  qui  avait  servi  d'emplacement  à 
cet  hôpital.  Dans  l'acte  qui  fut  rédigé  à  cette  occasion,  le 
fondateur  est  appelé  5ire  Jean  Le  Fèvre  (f).  Ce  titre  de 
sire,  réservé  à  ceux  qui  avaient  été  honorés  de  charges 
municipales,  donne  lieu  de  croire  que  le  personnage  en 
question  n'était  autre  que  ce  Jean  Le  Fèvre  qui  fut  nommé 
deux  fois  maire  de  Rouen,  une  première  fois  en  i343,  une 
seconde  fois,  dix  ans  après. 

Il  avait  dû  mourir  peu  de  temps  avant  le  mois  de 
février  i359,  à  en  juger  par  les  lettres  d'amortissement 
qui  furent  obtenues  de  Charles,  fils  aîné  du  roi  de  France, 
régent  du  royaume,  duc  de  Normandie  et  Dauphin  de 
Vienne,  par  un  nommé  Guillaume  du  Bec,  bourgeois  de 
Rouen  (Louvre  lès-Paris,  février  i359).  L'amortissement 
comprenait  Thôpital  Saint- Vivien  fondé  par  feu  Jean  Le 
Fèvre,  ainsi  qu'une  vide  pièce  donnée  par  le  même  Guil- 
laume du  Bec.  Cette  faveur  avait  été  sollicitée  au  nom  des 
exécuteurs  testamentaires  de  Jean  Le  Fèvre.  Elle  fut  ac- 
cordée par  le  Dauphin,  comme  duc  de  Normandie,  en 
considération  des  obligations  que  lui  et  le  roi,  son  père, 
avaient  au  requérant,  ainsi  qu'il  est  consigné  expressément 

(  I  )  «  Satie  veniens  ad  nos  carissimus  noster  Johannes  Fabri, 
civis  RothomagensiSf  nobis,  cum  incensa  cordis  affectione  sup- 
pîicavit  ut,  cum  ipse  cupiens  diem  messionis  extrême  operibus 
misericordie  prevenire  et  talia  seminare  in  terris^  que,  Deo  pro- 
picio,  post  hujus  vite  ergastulum,  cum  multiplicato  fructu  recol- 
ligere  valent  in  celis,  quoddam  hospitale  ad  usum  et  opus  Christi 
pauperum  in  quibus  dominus  noster  Jhesus  Christus  se  pasci  et 
reflci  in  Euvangelio  profitetur,  in  dicta  parrochia  erexerit,  » 


77 

dans  les  lettres  de  concession  :  «  Le  dit  Guillaume  du  Bec, 
auquel  nostre  très  chier  seigneur  et  père  et  nous  sommes 
tenus  pour  certaines  causes  justes  et  raisonnables,  dont  il 
n'ont  oncques  recompensacion,  et  encore  est  prest  de  nous 
servir  de  son  corps  et  de  ses  biens  et  de  vivre  et  mourir 
pour  nous  et  notre  droit  et  honneur  garder  à  son  povoir.  » 
U  Hôpital  de  Saint- Vivien,  aux  termes  de  ces  lettres,  fut, 
en  même  temps  qu'amorti,  exempté  de  toute  juridiction 
temporelle  (i). 

Vers  1430,  un  pieux  bourgeois  de  Rouen,  Jean  Moni- 
cault,  donna  aux  pauvres  de  cet  hôpital  une  rente  de  5o  I., 
et  peu  de  temps  après  (14  janvier  1466),  une  maison  adja- 
cente à  leur  enclos.  Le  curé  et  les  trésoriers  de  la  paroisse 
furent  constitués  les  administrateurs  de  cette  dotation  nou- 
velle, ainsi  quMl  était  naturel,  puisqu'ils  étaient  par  les  titres 
de  fondation  les  administrateurs  de  Thôpital.  Pour  se  con- 
former à  la  volonté  du  donateur,  les  paroissiens  dési- 
gnaient deux  trésorières  qui  étaient  chargées  de  percevoir 
les  rentes  constituées  sur  des  maisons  à  l'intérieur  de 
Rouen  et  qui  devaient  acheter,  sur  les  fonds  par  lui  don- 
nés, pour  7  livres  de  bois  par  an,  à  savoir  :  dix  mesures 
de  bûche  de  hêtre  prise  sur  le  quai,  du  prix  de  5  sols  la 
mesure  ;  un  quarteron  de  gloe  de  hêtre,  du  prix  de  i5  de- 
niers la  care  ;  deux  milliers  et  demi  de  fagots  de  Préaux, 
avec  deux  cents  de  bonnes  bourrées.  La  distribution  de- 
vait s'en  faire  par  leurs  mains,  aux  pauvres  de  Thôpital,  à 
raison  par  nuit  de  deux  bûches,  quatre  gloes,  un  fagot  et 
une  bourrée,  suivant  le  temps  et  le  froid. 

Le  même  Monicault  avait  fondé  en  Téglise  Saint-Vivien, 

(i)  Cest  probablement  ce  Guillaume  du  Bec  dont  il  est  ques- 
tion dans  un  mandement  de  Charles  V,  du  19  mars  1364,  par  le- 
quel il  ordonne  aux  vicomtes  de  Rouen  et  de  Montivilliers  de 
faire  une  enquête  pour  savoir  si  Guillaume  du  Bec,  père  de  Ro- 
billart  du  Bec,  clerc,  écolier  à  Paris,  «  estoit  noble  et  estrait  de 
noble  lignée.  »  V,  M.  Léopold  Delisle,  Mandements  et  actes  di- 
vers de  Charles  V,  1874,  no  202. 


78 

à  son  intention,  et  à  celle  de  sa  femme  et  de  ses  amis,  des 
services  religieux  qui  devaient  être  célébrés  par  les  frères 
de  Notre- Dame-du-Carme,  auxquels  il  était  enjoint  d'u- 
ser des  ornements  de  velours  pers  qu'il  leur  avait  donnés. 
Ces  services  étaient  annoncés  par  la  sonnerie  d'une  cloche 
qu'on  nommait  encore,  au  xviii«  siècle,  la  Mounicaude, 

Louis  XI,  pendant  son  séjour  à  Rouen  en  1467,  permit 
aux  trésoriers  de  la  paroisse  de  donner  à  Thôpital  Saint- 
Vivien  c  de  40  à  5o  l.  de  rente  amortie  et  à  Dieu  dédiée 
hors  fief  noble,  »  à  charge  de  payer  au  trésor  royal  100  écus 
d'or  à  titre  de  dédommagement.  Dans  les  lettres  d'amor- 
tissement octroyées  par  le  Roi,  les  trésoriers  et  les  parois- 
siens sont  désignes  comme  ayant  fait  construire  et  édifier 
eux-mêmes  cette  maison  dans  le  but  t  d'y  recueillir  et  d*y 
héberger  les  povres  de  Notre-Seigneur,  tant  ceulx  de  la 
ville  qui  n'ont  de  quoy  vivre  comme  les  forains  passant 
païs.  »  On  y  mentionne  c  qu'en  icelui  hospital  ils  avoient 
pourveu  de  ornemens  d'église  pour  y  faire  le  service  dyvin, 
et  aussi  de  litz  et  autres  utensilles  pour  le  recueil  et  service 
desdits  povres,  et  telement  qu'ilz  y  estoient  bien  et  honnes- 
tement  recueilliz,  servis  et  pourveuz  de  leurs  nécessitez, 
et  y  estoit  chacun  jour  fait  et  continué  le  service  divin 
bien  et  notablement,  et  avoient  entencion  de  continuer  de 
bien  en  mieulz.  »  On  voit  qu'ils  avaient  encore  déclaré 
«  que  ledit  hospital  et  hostel  Dieu  estoit  grand  et  spacieux 
et  que  les  ornemens  d'église,  lits  et  utensilles  et  autres 
choses  nécessaires  pour  le  service  des  povres  estoient  de 
grand  entretènement.  »  Comme  dans  cet  acte,  pas  plus 
que  dans  ceux  que  nous  avons  précédemment  cités,  il 
n'est  question  de  frais  de  nourriture,  nous  sommes  très 
porté  à  supposer  qu'on  se  bornait,  dans  Thôpital  Saint- 
Vivien,  à  fournir  aux  pauvres  le  logement,  le  chauffage, 
et  tout  au  plus  quelques  secours  en  pain.  Autrement  un 
seul  concierge  n'eût  pas  suffi. 

On  sait  que  le  xvi«  siècle  fut  une  époque  de  décadence 
pour  tous  les  établissements  hospitaliers.  Tous  souffrirent, 


/VJ 


la  plupart  furent  ruinés,  beaucoup  disparurent,  et  jamais 
pourtant  il  n'y  eut  plus  de  misères  à  soulager.  L'hôpital 
Saint- Vivien  n'échappa  pas  à  l'influence  funeste  qui  se 
Élisait  partout  sentir.  Ses  revenus  modiques  furent  nota- 
blement réduits  par  la  dépréciation  que  subirent  toutes  les 
rentes  en  numéraire  à  la  suite  de  la  découverte  des  mines 
d'or  de  l'Amérique  ;  plusieurs  maisons  furent  successive- 
ment aliénées;  la  chapelle  fut  supprimée,  et  à  la  fin  il  ne 
resta  plus  de  l'œuvre  du  bon  maire  de  Rouen,  Jean  Le 
Fèvre,  qu'une  maison,  où  l'on  offrait  gratis  le  logis  aux 
pauvres  passants,  et  une  autre  où  résidaient  les  deux  cha- 
pelains de  la  chapelle  Sainte-Qui taire. 

L'administration  de  cet  hôpital  ainsi  réduit  était  oné« 
reuse  aux  trésoriers.  Il  leur  fallut  cependant,  pour  la  con- 
server, lutter  contre  le  Bureau  des  pauvres  valides,  qui 
voulait  s'en  emparer  ;  ils  transigèrent  :  ils  abandonnèrent 
aux  administrateurs  du  Bureau  une  partie  des  biens,  no- 
tamment une  maison,  située  rue  des  Carmes,  d'un  loyer 
de  25o  1.,  qui  avait  été  donnée  aux  pauvres,  en  1670,  par 
Laurent  le  Cornu,  sieur  d'Igoville,  et  par  son  frère  le 
chanoine.  On  leur  laissa  la  maison  à  usage  d'hôpital,  par 
cette  considération  qu'elle  était  affectée  au  logement  des 
ecclésiastiques  qui  desservaient  la  paroisse  Saint-Vivien 
(1686). 

A  leur  tour,  au  siècle  suivant,  les  trésoriers  sollicitèrent 
la  suppression  de  l'hôpital.  Ils  prétendaient  que  c'était  un 
établissement  dangereux,  onéreux  à  la  paroisse,  contraire 
aux  intentions  du  gouvernement,  à  la  volonté  du  Roi,  qui 
mettait  alors  tout  en  usage  pour  s'opposer  aux  courses 
des  pauvres  vagabonds.  C'était,  à  les  en  croire,  exciter  les 
mendiants  à  quitter  leur  pays  que  de  leur  promettre  hors 
du  bourg,  du  village  qu'ils  habitaient,  un  asile  où  pendant 
deux  jours  ils  étaient  logés,  couchés,  chauffés  gratuite- 
ment. Que  serait-ce,  disaient-ils,  si,  dans  chaque  ville,  il 
se  trouvait  de  pareils  hospices  ?  c  Tous  les  pauvres  des 
différentes  paroisses  ne  seroient-ils  pas  continuellement 


8o 

errants,  assures  de  trouver  partout  des  hôtelleries  chari- 
tables, où  ils  seroient  reçus,  accueillis  sans  frais  ni  dé- 
penses? >  On  n'écouta  pas  leurs  plaintes;  et  Thôpital  fut 
maintenu  avec  la  charge  d'admettre  les  passants  qui  se 
présenteraient,  de  les  loger  pendant  deux  nuits  et  de 
leur  fournir  à  chacun  deux  fagots,  depuis  la  saint  Michel 
jusqu'à  Pâques. 

Le  nombre  de  ces  passants  (étrangers,  soldats,  ouvriers 
en  quête  de  travail  ou  disant  leur  tour  de  France),  était 
assez  considérable.  II  s'éleva  souvent  ù  plus  de  quinze 
cents  par  an. 

Au  xvii«  siècle,  il  y  avait,  h  l'hôpital  Saint- Vivien,  deux 
dortoirs,  l'un  pour  les  hommes,  avec  neuf  lits,  l'autre  pour 
les  femmes,  avec  quatre  lits.  Au  xviiic  siècle,  il  n'y  avait 
plus  qu'un  dortoir,  où  les  hommes  seuls  étaient  admis.  On 
mettait  à  la  disposition  des  passants  un  réfectoire  dont  le 
mobilier  se  réduisait  à  quelques  objets  indispensables,  tels 
c  qu'une  grosse  table,  deux  grands  sièges,  deux  pièces  de 
bois  à  seoir  les  pauvres,  une  cramillée  à  trois  cramillons, 
deux  grands  landiers  ;  >  la  pièce  était  ornée  d'une  image 
de  la  sainte  Vierge. 

L'hôpital  subsistait  encore  en  1792.  Le  8  octobre  de 
cette  année,  l'architecte  Louis  Gilbert,  à  la  réquisition 
des  administrateurs  du  Directoire  du  district  de  Rouen, 
procéda  à  la  visite  et  à  l'estimation  de  la  maison.  Il  cons- 
tata qu'elle  consistait  en  deux  corps  de  logis,  bornés,  vers 
le  nord  par  la  rue  Saint- Vivien,  vers  le  midi  par  divers 
bâtiments  appartenant  au  trésor  de  la  paroisse,  et  par  une 
allée  conduisant  à  Teau  de  Robec  ;  que  le  bâtiment  sur  la 
rue  Saint-Vivien,  servant  d'hôpital,  présentait  quarante 
pieds  de  façade  sur  dix-huit  de  largeur  dans  œuvre,  qu'il 
contenait  neuf  lits  pour  les  pauvres  voyageurs,  avec  quatre 
petites  salles,  dont  une,  ayant  neuf  pieds  de  long  sur  huit 
de  large,  leur  servait  de  chauffoir.  Le  même  hôpital  con- 
tenait deux  chambres  pour  le  logement  du  chapelain  et 
du  clerc  de  la  paroisse,  une  autre  pour  le  logement  du 


8i 

concierge,  une  salle  pour  les  assemblées  du  trésor  de 
Saint- Vivien,  sans  compter  quelques  portions  de  maison 
baillées  à  loyer. 

L*hôpital  Sàint-Vivien,  portant  alors  le  n»  1 1 2  de  la  rue, 
fut  vendu,  comme  bien  national,  le  22  octobre  1793,  à 
Pierre- Adrien -Emmanuel  Bonjour,  pour  le  prix  de 
25,000  livres. 

On  peut  s*étonner  que  les  Administrateurs  du  district 
de  Rouen  n'aient  point  respecté  l'hôpital  Saint- Vivien,  à 
raison  de  son  but  populaire  et  philanthropique,  pour  ne 
pas  dire  charitable. 

Mais  si  une  chose  doit  surprendre,  c'est  qu'il  eût  sub- 
sisté jusqu'à  eux.  Il  avait,  en  efïet,  survécu,  pendant  de 
longues  années,  à  tous  les  établissements  hospitaliers  du 
même  genre. 

Je  me  bornerai  à  en  citer  quelques-uns  :  je  n'irai  pas 
les  chercher  bien  loin . 

A  Arques,  l'hôpital  Saint- Julien  pour  l'hospitalité  re- 
montait à  une  haute  antiquité  :  il  fut  réuni  à  l'hôpital  de 
Dieppe  par  un  arrêt  du  Conseil  du  22  décembre  1674,  et 
par  lettres  patentes  du  mois  de  novembre  1695. 

L'hôpital  de  Sainte-Foi-de-Longueville,  établi  dans  le 
même  but,  fut  réuni  à  l'hôpital  de  Dieppe  à  la  même 
époque. 

L'hôpital  de  Vaudreville,  administré  par  un  hospitalier, 
pris  parmi  les  religieux  de  Longueville^  avait  aussi  pour 
objet  l'hospitalité.  Il  en  est  question  dans  une  charte  de 
II 80,  conservée  dans  le  Fonds  du  prieuré  de  Longue- 
ville  (1). 

A  Aumale,  il  y  avait  un  hôpital  pour  les  pauvres  passants. 
Ils  pouvaient  y  loger  une  nuit.  Il  était  sous  l'invocation 
de  S.  Nicolas.  Il  en  est  question  dans  des  pièces  du 
xvi®  siècle  (2). 

(i)  Arch.  de  la  S.-Infér.,  F.  de  Tlntendance  et  de  Longueville. 
(2)  Arcli.  de  la  S.-Inf.,  v.  V Histoire  d'Aumale,  de  M.  Semichon. 

6 


82 

A  Caudebec,  l'hôpital  de  Saint-Julien  était  originaire- 
ment affecté  au  soulagement  des  pauvres  étrangers  et  pas- 
sants (i). 

A  Écouis,  Enguerran  de  Marigny  avait  fondé  un  hôpital 
sous  l'invocation  de  S.  Jean- Baptiste,  où  Ton  recevait  les 
passants  de  Tun  et  de  l'autre  sexe  dans  deux  corps  de  logis 
séparés  (2). 

A  Envermeu,  en  1277,  un  nommé  Michel  Taupin  et 
Emmeline,  sa  femme,  confrères  des  religieux  de  l'abbaye 
du  Bec-Helouin,  attestent  avoir  fait  construire,  dans  le 
fief  du  prieuré  dépendant  de  ce  monastère,  un  hospice 
pour  les  infirmes  et  les  voyageurs  et  avoir  affecté  à  son 
entretien  une  rente  annuelle  de  1 5  livres  tournois  amor- 
tie (3). 

L'hôpital  de  Gaillefontaine,  fondé,  ou  tout  au  moins 
doté,  par  Mahaut  de  Saint-Paul,  fut  uni,  en  1 369,  à  l'abbaye 
de  Bival,  à  charge  d'y  exercer  l'hospitalité  envers  les  pau- 
vres passants,  ce  qui  donne  lieu  de  croire  que  tel  avait  été 
l'objet  primitif  de  la  fondation  (4). 

A  Gournay,  sur  la  paroisse  de  S.  Hildevert,  du  côté  de 
la  Picardie,  un  hôpital  avait  été  fondé,  en  1634,  pour  y  re- 
cevoir uniquement  les  passants  et  les  voyageurs  (5). 

A  la  fin  du  xiii<'  siècle,  Laurent  le  Chambellan,  cheva- 
lier, dont  on  conserve  la  tombe  en  l'église  du  Mont-aux- 
Malades,  avait  fondé  un  hôpital,  sous  l'invocation  de  la 
Madeleine,  au  Port-Saint-Ouen  «  pour  cause  de  herbegicr 
y  chascune  nuit  dis  et  huit  poures.  >  Il  en  confia  la  garde 


(i)  Arch.  delà  S.-Infér.,  F.  de  l'Intendance. 

(2)  Dom  Touss.  Duplessis,  Description  de  la  Haute  Norman- 
die,  II,  33g. 

(3)  Arch.  de  la  S.-Infér.,  F.  du  prieuré  d'Envermeu. 

(4)  Ibid.^  F.  de  l'Intendance.  Duplessis,    Description   de    la 
Haute'Normandie,  1,  118. 

(5)  Ibid.,  I,  29. 


83 

aux  religieux  de  Bonport,  qui  devaient  y  faire  dire  la  messe 
trois  fois  par  semaine  (i). 

Enfin,  le  5  janvier  1 398,  nous  voyons  Raoul  Daniel  et 
Emmeline,  sa  femme,  donner  à  l'évèque  de  Lisieux  et  a 
ses  successeurs  une  masure  près  du  chemin  du  Roi  et  du 
presbytère,  au  Petit-Couronne  (2),  pour  y  c  establir  et 
édifïier  une  maison-Dieu  ou  ospital,  ouquel  seroient  receus 
et  herbegiez  les  poures  pèlerins  et  autres  poures  passans 
par  le  païs  (3).  »  . 

Tous  ces  hôpitaux  n'étaient  plus  connus  au  xvin«  siècle  : 
à  vrai  dire,  ils  n*é talent  plus  aussi  nécessaires;  les  routes 
étaient  sûres,  les  auberges  très  communes,  et  les  pèleri- 
nages n'étaient  plus  guère  en  honneur. 

(i)  Arch.  de  la  S.-Infér.,  F.  de  Tarchevéché,  lettres  patentes 
données  à  Vincennes,  20  décembre  1327. 

.Cet  hâpital  ayant  été  démoli,  des  indulgences  furent  accordées 
par  les  vicaires  généraux  du  cardinal  d'Estouteville  à  ceux  qui 
contribueraient  de  leurs  aumônes  à  sa  reconstruction.  «  Cum 
igitur,  sicut  accepimus,  hospitale  ssu  domus  Dei  beatorum  An- 
thonii,  Remigii,  Graciani,  Celerini  et  Béate  Marie  Magdalenes 
Portus  Sancti  Audoeni,  decanatus  de  Piris,  Rothomagensis  dio- 
cesis,  ubi  Christi  pauperes,  ibidem  ex  diversis  mundi  partibus 
affiuentes,  recolligi  et  hospitari  et  in  suis  necessitatibus  refici,  et 
opéra  misericordie  adimpleri  non  possunt,  nisi  Christi  fidelium 
eleemosinis  mediantibus,  existât  quamplurime  demolitum,  inten- 
ditque  magister  sive  administrator  illius  reedifficari  ac  procurare 
refici,  etc,  »  enjoint  aux  curés  de  recevoir  les  envoyés  de  l'hô- 
pital,  de  les  laisser  prêcher  leurs  indulgences  qui  étaient  de 
quarante  jours,  16  mars  J477. 

(2)  Cette  paroisse  faisait  partie  de  l'exemption  de  Lisieux. 

(3)  Raoul  Daniel  promettait,  par  le  même  contrat,  «  des  bi'?ns 
que  Dieu  lui  presteroit  et  des  aumosnes  que  les  bonnes  gens 
lui  vouldroient  pour  ce  donner,  de  parfaire  au  plus  tost  une 
Maison-Dieu.  »  U  en  retenait  «  l'administration  et  gouvernement 
sa  vie  durant  tant  seulement,  et  par  ce  renonçoit  à  la  propriété 
et  treffons  dudit  héritage  pour  lui  et  pour  ses  hoirs  sans  jamais 
y  demander  ou  réclamer  aucune  chose  ;  et  à  ce  consenti  sa  dicte 
femme.  »  Tabellionage  de  Rouen. 


84 

Vase  gallo-romain  trouvé  à  Envermeu,  —  M.  le 
Président  a  été  informé  par  M.  Partiot  qu'un  vase  ro- 
main en  terre  avait  été  trouvé  à  Envermeu,  dans  les 
fouilles  exécutées  pour  rétablissement  du  chemin  de 
fer  d'Eu  à  Dieppe.  Ce  vase  sera  offert  à  M.  le  Préfet 
pour  le  musée  départemental. 

M.  d'Estaintot  estime  que  la  découverte  de  ce  vase 
doit  indiquer  la  présence  d'un  cimetière  gallo-romain  ; 
qu'il  y  aurait  utilité  à  signaler  ce  fait  à  M.  le  Conser- 
vateur du  Musée  des  antiquités,  en  l'invitant  à  appli- 
quer à  des  fouilles,  dont  les  résultats  paraissent  devoir 
être  féconds,  une  partie  des  crédits  prévus  pour  cet 
objet  par  le  budget  départemental. 

Cette  observation  est  appuyée  par  M.  Bouctot  et 
plusieurs  autres  membres  de  la  Commission. 

Cachet  en  jade.  —  M.  Brianchon  fait  passer  sous 
les  yeux  de  la  Commission  un  petit  talisman  ou  cachet 
en  jade  ou  chiste  vert,  long  de  o,o35,  large  de  0,0 1 3, 
épais  de  0,007,  présentant  à  l'une  de  ses  extrémités  un 
oiseau,  à  l'autre  un  ornement  en  forme  d'entrelacs,  et 
sur  des  tranches  latérales  des  lignes  d'inscriptions  dans 
le  genre  de  celles  des  cachets  d'oculistes,  mais  qui  sont 
trop  effacées  par  le  frottement  pour  que  la  lecture  en 
soit  possible. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

Le  Secrétaire  y 
Vicomte  R.  d'EsxAiNTOT. 


85 


SEANCE  DU  10  JUIN  1882 

La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence 
de  M.  de  Beaurepaîre,  vice-président. 

Présents  :  MM.  P.  Baudry,  Biiliard,  Bouquet, 
Brianchon,  Gouellain,  Le  Breton,  Maillet  du  BouUay, 
Rœssier  et  le  vicomte  d^Estaintot,  secrétaire. 

Excusés  •'MM.  Pelay,  Sauvageot  et  Simon. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  i«r  mai  est  lu  et 
adopté. 

La  correspondance  imprimée  comprend  : 
Mémoires  de  la  Société  nationale  des  Antiquaires 
de  France,  t.  XIII,  188©  ;  —  Mémoires  de  la  Société 
archéologique  de  Langres,  t.  III,  1882  ;  — Mémoires 
de  la  Société  académique  d'Agriculture  des  Sciences, 
Belles-Lettres  et  Arts  du  département    de  V Aube  y 
t.  XVIII,  3«  série,   1881;  --' Bulletin  de  la  Société 
des  Antiquaires  de  l'Ouest,  i^'  trim.,  1882  ;  —  Bul- 
letin de  la  Société  des  Amis  des  Sciences  naturelles 
de  Rouen,  année  1881  ;  —  Bulletin  archéologique 
et  historique  de  la   Société  de  Tarn-et- Garonne, 
t.  IX,  1881,  4«  trimestre. 

M.  le  Secrétaire  de  la  Société  royale  des  Antiquaires 
de  Londres^  par  lettre  du  1 5  mai  1 88 1 ,  accuse  récep- 
tion de  la  2«  livraison  du  t.  V  du  Bulletin. 

Monuments  historiques.  —  Demande  d'allocation 
pour  le  clocher  de  Gainneville,  —  Avis  favorable  de 
la  Commission,  —  M.  le  Président  a  reçu  de  M.  le 
Préfet  de  la  Seine-Inférieure  un  dossier  relatif  à  une 
demande  d'allocation  présentée  par  la  commune  de 
Gainneville^  et  applicable  à  la  restauration  du  clocher 


86 

de  Tégiise  dudit  lieu,  classé  au  nombre  des  monuments 
historiques. 

La  Commission,  après  avoir  pris  connaissance  des 
pièces  du  dossier,  croit  devoir  recommander  cette  de- 
mande à  M.  le  Préfet  de  la  Seine-Inférieure  et  à  la 
Commission  départementale  comme  digne  du  plus  vif 
intérêt. 

Église  Saint-Jean  d'Abtot,  —  Urgenc^  de  répara- 
tions, — M.  Brianchon  signale  l'abandon  dans  lequel  se 
trouve  cette  intéressante  église,  et  Turgence  de  complé- 
ter les  réparations  déjà  faites. 

La  Commission  le  charge,  avec  M.  Rœssler,  de 
demander  à  un  vitrier  et  à  un  plombier  le  devis  des 
travaux  à  faire  pour  remédier  à  Tétat  de  choses  signalé 
par  lui. 

M.  d^Estaintot  profite  de  la  présence  de  M.  le 
Conservateur  du  Musée  pour  insister  sur  le  vœu  ex- 
primé par  la  Commission  à  la  dernière  séance,  de  ten- 
ter quelques  fouilles  au  point  révélé  par  la  découverte 
de  vases  gallo-romains  dans  la  traverse  d'Envermeu. 

Fouilles  de  Lillebonne.  —  M.  Maillet  du  BouUay 
signale  les  résultats  obtenus  par  les  fouilles  exécutées 
à  Lillebonne. 

Les  objets  trouvés  dans  les  fouilles  exécutées  à  Lille- 
bonne,  à  Tendroit  dit  le  Manoir-d'AlIaincourt,  peuvent  se 
diviser  en  objets  romains  et  en  objets  mérovingiens. 

Dans  les  premiers  se  trouvent  principalement  des  débris 
de  marbres  de  différentes  couleurs  et  provenances.  Presque 
tous  sont  des  morceaux  de  moulures  de  profils  variés.  Un 
des  plus  importants  représente  la  base  d'un  pilastre 
sculpté. 

Environ  quatre-vingts  de  ces  morceaux  sont  classés  et 


87 

placés  dans  une  des  cheminées  de  la  salle  de  la  mosaïque 
du  musée,  par  les  soins  de  M.  Billiard,  aide-conservateur. 

Il  reste  en  réserve  une  certaine  quantité  de  fragments 
provenant  de  dallages  ou  de  revêtements,  de  crépis  en 
plâtre  ou  en  ciment  de  différentes  couleurs.  Ces  derniers 
sont  en  mauvais  état. 

J'ajouterai  à  cette  nomenclature  : 

Un  petit  vase  en  terre  grise  assez  fine; 

Une  partie  de  vase  en  terre  rouge,  malheureusement 
cassé,  orné  de  personnages  drapés  d'un  très  beau  style; 

Un  fragment  de  coupe  en  verre  blanc,  avec  une  partie 
d'inscription  gravée  au  pointillé. 

Dans  les  objets  mérovingiens  se  trouvent  : 

Une  hache; 

Deux  sabres; 

Un  long  couteau; 

Un  autre  de  forme  triangulaire  avec  son  manche; 

Un  fauchard; 

Un  harpon; 

Quatre  vases  en  terre  noire; 

Deux  vases  en  terre  jaune. 

Il  est  regrettable  que,  dans  les  conditions  où  ces  fouilles 
ont  été  faites,  le  monument  entier  n'ait  pas  pu  être  con- 
servé. Malheureusement  le  terrain  avait  été  acquis  par 
spéculation  pour  ouvrir  une  nouvelle  voie  bordée  de 
constructions  modernes.  J'ai  dû  me  contenter  d'obtenir, 
avec  les  débris  dont  je  viens  de  &ire  la  description,  le  plan 
très  exact  du  monument  tel  qu*il  existait  avant  sa  destruc- 
tion. Lorsque  ce  plan,  promis  depuis  longtemps  par 
M.  Denize,  ingénieur,  conducteur  des  travaux,  me  sera 
parvenu,  je  m'empresserai  de  le  mettre  sous  les  yeux  de 
la  Commission. 

J'adresse  ici  mes  remerciements  bien  sincères  à  notre 
honorable  collègue,  M.  Brianchon,  et  à  M.  Duval,  rece- 
veur municipal  à  Lillebonne,  pour  leur  intelligent  con- 
cours et  pour  les  peines  et  soins  qu'ils  ont  bien  voulu 


88 

prendre  en  recueillant  chez  eux  et  en  surveillant  l'expédi- 
tion des  objets  destinés  au  Musée  départemental. 

Maison  en  bois  sculpté  de  la  rue  de  la  Grosse-^ 
Horloge.  —  M.  Maillet  du  Boullay  rend  compte  des 
démarches  faites  près  de  la  municipalité  pour  sauver  les 
restes  de  l'ancienne  maison  en  bois  sculpté  delà  rue  de 
la  Grosse -Horloge,  déposés  dans  les  combles  du  corps 
de  garde  de  Saint-Sever,  et  la  solution  obtenue,  dans  la 
séance  du  Conseil  municipal  du  19  mai^  en  vertu  de 
laquelle  ces  boiseries  sont  abandonnées  au  Musée  dé- 
partemental. 

M.  Maillet  du  Boullay  en  a  été  informé  officielle- 
ment par  une  lettre  de  M.  le  Maire,  en  date  du  2  juin. 

Voici  les  détails  des  fragments,  qui  sont  de  ce  chef 
entrés  au  musée: 

Un  panneau  avec  médaillon  de  personnages  en  quatre 
morceaux  ; 

Dix-sept  fragments  de  moulures; 

Cinq  fragments  de  colonnes  avec  personnages  et  chapi- 
teaux de  la  plus  grande  beauté  ; 

Onze  colonnes  sculptées  de  riches  dessins; 

Deux  colonnes  gothiques  ne  faisant  pas  partie  du  même 
monument. 

Il  espère  avoir  une  solution  aussi  favorable  en  ré- 
ponse à  la  demande  quUl  a  adressée  pour  les  parties 
sculptées  de  la  charpente  si  curieuse  de  la  maison  (rue 
Malpalu,  n®  92)  du  xvi«  siècle. 

La  Commission  remercie  M.  du  Boullay  de  ces  ren- 
seignements et  ces  heureux  résultats. 

M.  Pelay  promet  de  communiquer  prochainement 
les  dessins  des  découvertes  de  la  rue  Tabouret. 

M.  Rœssler  recommande  à  la  Commission  la  publi- 
cation relative  au   Havre,  en  ce  moment  en  cours 


89 

d'impression,  et  fait  appel  aux  connaissances  spéciales 
des  Membres  de  la  G)mmission  pour  lui  révéler  tous 
les  documents  qui  seraient  à  leur  connaissance. 

M.  Le  Breton  signale  une  épreuve  rarissime  d'un 
plan  du  Havre,  actuellement  en  la  possession  de 
M.  Poupel,  conservateur-adjoint  du  Musée  Carna- 
valet. 

Ermenouville,  —  Dalles  tumulaires  du  xiu^  siècle. 

—  M.  d'Estaintot  fait  part  de  la  découverte,  à  Er- 
menouville, d'une  pierre  tombale  qui,  déplacée  et 
renversée,  a  longtemps  servi  de  dalle  extérieure  à  l'en- 
trée de  réglise  démolie,  et  sur  laquelle,  en  la  retour- 
nant, on  aurait  découvert  les  traces  d'une  inscription 
constatant  que  celui  dont  elle  recouvrait  les  restes  au- 
rait accompagné  le  roi  saint  Louis  à  Tunis. 

Il  espère  en  avoir  bientôt  la  légende  exacte,  et  Ta 
spécialement  recommandée  à  M.  le  curé  d'Ermenon- 
ville. 

Le  château  (Tlmbleville  et  ses  anciens  seigneurs. 

—  Le  même  Membre  lit  une  notice  sur  le  château 
d'Imbleville  et  ses  anciens  seigneurs. 

Bigot,  dans  son  manuscrit  sur  les  paroisses  du  bailliage 
de  Caux;  Farin,  dans  son  histoire  de  Rouen,  nous  ont 
conservé  le  souvenir  d'une  inscription  qui  décorait  jadis 
la  façade  d'un  château  élevé  à  Imbleville,  sur  les  rives  de 
la  Saâne,  par  Xavier  de  Dampierre,  seigneur  de  Biville- 
la-Baignard  et  du  Vivier. 

Cette  inscription,  aujourd'hui  perdue,  était  ainsi  conçue  : 

L'an  de  grâce  1491^  noble  homme  messire  Zanon  de 
Dampierre,  chevalier,  sieur  de  Biville  la  Baignard 
et  autres  seigneuries,  fit  édifier  cette  maison  et  etoit 
pour  lors  sa  femme,  noble  dame  Marie  de  Gouvys  ;  leurs 
hoirs  feront  leur  devoir  de  prier  pour  eux. 


90 

Au-dessous  étaient  sculptées  leurs  armes;  celles  des 
Dampierre  :  d'argent  à  trois  carreaux  de  sable  ;  celles  des 
Gouvis  :  yairé  d'argent  et  d'azur. 

Nous  avons  cherché  à  reproduire  par  la  photographie, 
dont  nous  faisons  hommage  à  la  Commission,  la  physio- 
nomie ancienne  du  château,  qui  n'a  été  conservé  que  du 
côté  de  la  rivière,  et  que  des  additions  modernes  ont  pas- 
sablement altéré;  il  est  cependant  facile  de  la  recons- 
tituer. 

La  façade  est  baignée  dans  un  vivier  communiquant 
avec  la  Saâne  ;  elle  est  flanquée,  au  centre,  d'une  tourelle 
hexagonale;  à  chaque  angle,  d'une  tourelle  cylindrique. 

Les  ailes  élevées  au  delà  de  la  tourelle  sont  une  addition 
moderne.  L'ancien  château  finissait  à  la  tourelle  et  sa 
façade  ouest  était  mouvementée  par  trois  tourelles,  au- 
jourd'hui démolies,  semblables  à  celles  qui  décorent  sa 
face  est. 

Les  bâtiments  de  dépendances  étaient  contenus  dans 
une  cour  affectant  la  forme  d'un  carré  long,  entourée  de 
murs  et  défendus  par  des  fossés  pleins  d'eau,  alimentés 
par  la  rivière;  ils  communiquaient  avec  la  vallée  par  un 
pont-levis,  aboutissant  à  une  porte  flanquée  de  tourelles, 
qui  était,  dit-on,  à  l'angle  nord  du  parallélogramme;  une 
chapelle,  élevée  à  l'angle  est,  et  qui  est  aujourd'hui  trans- 
formée en  bibliothèque,  faisait  pendant  au  massif  de  la 
porte  d'entrée. 

Nous  avons  fait  quelques  recherches  sur  le  fief,  dont  ce 
château  constituait  le  chef-mois,  et  sur  les  familles  qui  l'ont 
successivement  possédé. 

Il  y  avait  à  Imbleville  deux  fiefe,  tous  deux  relevant  de 
la  châtellenie  de  Bacqueville;  cependant  l'état  des  fiefs 
de  i5o3  n'en  mentionne  qu*un  seul;  il  était  alors  possédé 
par  le  sieur  de  Hermanville,  de  la  maison  de  Masquerel. 

Cette  famille  en  jouissait  encore  en  i586,  car  j'ai 
retrouvé  dans  les  minutes  du  notariat  de  Longueville,  à 
la  date  du  19  mai  1 586,  un  acte  d'échange  où  figure  noble 


9' 

et  puissant  seigneur  Charles  de  Masquerel,  seigneur  d*ïm- 
bleville,  Urville,  Thiédeville,  le  Mesnil-Mascarel  et 
'  Bréauté,  demeurant  audit  lieu  de  Bréautc,  paroisse  de  la 
Chapelle-su  r-Torc  y. 

Elle  figure,  d'ailleurs,  des  1493,  sur  les  comptes  des 
receveurs  du  comté  de  Longueville  pour  3o  sous  de  gré- 
verie,  dus  à  cause  de  ce  fief  d'Imbleville. 

Leur  dernier  descendant  possesseur  d'Imbleville  dut 
être  Charles  de  Mascarel,  qui,  le  20  août  1601,  vendit  ses 
fiefs  d'Imbleville,  Thiédeville  et  Eurville  à  Charles  Bau- 
dry,  avocat  au  Parlement. 

Si  Ton  étudie  la  généalogie  des  Masquerel,  l'une  des 
plus  anciennes  familles  du  pays  de  Caux,  on  trouve  pré- 
cisément une  alliance  qui  explique  la  transmission  de  ces 
seigneuries,  celle  de  Jean  H,  seigneur  de  Herman ville, 
allié  à  dame  Philippe  de  Lindebeuf,  dame  d'Imbleville  et 
de  Thiédeville.  Cette  alliance  remonte  au  commencement 
du  xv*  siècle. 

Leur  fils,  Guillaume,  que  la  généalogie  fait  vivre 
vers  1396,  fut  également  seigneur  de  Hermanville  et 
d'Imbleville;  il  épousa  Catherine  de  la  Heude,  dame  de 
Bailleul  et  de  la  baronnie  du  Coudrai,  au  comté  d'Eu. 

Leur  fils,  Jean  III,  épousa  successivement  Isabeau  de 
Boessay,  dont  il  n'eut  enfants,  et  Jacqueline  de  Longroy, 
dame  du  lieu. 

Et  c'est  de  lui  que  sortait  Antoine  de  Masquerel,  sei- 
gneur de  Hermanville  et  de  Bailleul,  dont  parle  l'état  des 
fiefs  de  i5o3,  et  qui  épousa  Jeanne  de  Dreux,  dame  de 
Morainville. 

Philippe  de  Lindebeuf,  la  femme  de  Jean  Masquerel,  se 
rattachait  évidemment  aux  deux  Lindebeuf  dont  les  ins- 
criptions tumulaires  sont  citées  dans  Farin  (t.  II,  p.  396), 
et  qui,  par  une  assez  heureuse  exception,  sont  demeurées 
respectées  dans  le  chœur  d'Imbleville,  sur  les  caveaux  où 
dorment,  encore  inviolés,  les  restes  de  ceux  dont  elles 
indiquent  les  noms.  Farin  les  rapporte  ainsi  : 


92 

CY  GI8T  Madame  Philippes  de  Lindbbeuf 

Q.UI  FUT  FEMME   DE  M.   JeaN   DE   LiNDEBBUF 
QUI  TRESPASSA    l'aN   DE  GRACE    I SQO. 

Dieu  ait  son  ame 

CI  GiST  M.  Jean  de  Lindebeuf,  chevalier 

(^ui  trespassa  l*an  de  grace  l304. 

Dieu  ayt  son  ame 

Ce  qui  apparaît  encore  des  deux  légendes,  à  moitié 
engagées  sous  les  bancs  du  chœur,  permet  de  rectifier 
l'orthographe  de  Farin;  mais  les  deux  dalles,  celle  de  la 
femme  surtout,  offrent  un  spécimen,  admirablement  con- 
servé, du  costume  de  la  fin  du  xiii^  siècle. 

L'église  d'Imbleville  a  conservé  des  traces  visibles  de  la 
domination  des  Masquerel.  Sur  Tune  des  ouvertures  laté- 
rales du  massif  clocher  de  grès  élevé  au  bas  de  la  nef,  celle 
du  nord,  se  voient  placés  sur  la  même  ligne,  près  Tun  de 
l'autre,  les  deux  écussons  des  Masquerel  et  des  Dampierre. 
Celui  des  Masquerel  :  à  la  fasce  de  diapré^  accompagnée 
de  trois  roses  de  gueules  posées  2  et  i  ;  celui  des  Dam- 
pierre :  d'azur  à  trois  losanges  de  sable  brisé  d'un  lambel 
de...  pour  indiquer  la  branche  cadette. 

C'est  en  effet  une  branche  cadette  des  Dampierre  qui 
possédait  l'autre  fief  d'Imbleville,  appelé  le  fief  du  Vivier^ 
à  cause  sans  doute  de  sa  situation  près  de  la  rivière  et  qui 
provenait  d'un  démembrement  par  parage  du  plein  fief 
d'Imbleville. 

Toutefois,  la  généalogie  des  Dampierre  ne  fournit  pas 
de  renseignements  précis  sur  l'époque  et  les  conditions  dans 
lesquelles  le  fief  du  Vivier  entra  dans  cette  famille  (i). 

(i)  Le  fief  du  Vivier  fit  évidemment  partie  de  la  succession  de 
Jean  de  Lindebeuf.  Il  fiit  compris,  en  i3o5,  dans  le  partage  de 
la  succession  de  Regnaut  ou  Reginald  de  Lindebeuf,  et  tomba, 
avec  la  terre  de  Lindebeuf,  dans  le  lot  de  Taînée  de  ses  deux 
filles,  mariée  à  Jean  de  Beuseville. 

Guillaume  de  Lindebeuf,  leur  descendant,  vendit  Lindebeuf 
en  1372.  (V.  M.  Hellot,  les  Martel  de  Basqueville,  note  248.) 
Les  Lindebeuf  portant  de  gueules  à  trois  marteaux  d*or. 


93 


Celle  qui  est  déposée  à  la  bibliothèque  de  Rouen,  — 


aa. 


p.  2  5,  feit  descendre  au  7^  degré  Zanon  de  Dampierre,  le 
constructeur  du  château  du  Vivier,  de  Guy  de  Dampierre, 
comte  de  Flandres.  Elle  lui  donne  comme  père  Guillaume, 
sieur  de  Biville-la-Baignard,  qu'elle  qualifie  lieutenant 
général  en  Normandie,  et  dont  elle  n'indique  pas  lalliance, 
frère  puiné  d'Hector  de  Dampierre,  conseiller  et  maître 
d'hôtel  du  roi,  et  fils  de  Jourdain  de  Dampierre,  panetier 
de  France,  capitaine  de  Moullineaux  et  mari  de  Jeanne  de 
Villiers. 

Ce  Jourdain,  petit-fils  de  Robert  de  Dampierre  ou  de 
Flandres,  aurait  été  apanage  près  d'Arqués  et  aurait 
épousé  Marie  de  Luxembourg,  de  la  branche  de  Ligny. 

Cette  descendance  des  comtes  de  Flandres  me  paraît 
assez  problématique. 

Un  arrêt  de  l'échiquier  de  Saint-Michel,  1448»  relatif  au 
partage  de  la  succession  du  père  de  Guillaume  de  Dam- 
pierre et  de  Jeanne  de  Dampierre,  sa  tante,  entre  ledit 
Guillaume  et  Thomas  Mulso,  escuier,  donataire  de  la 
confiscation  d'Hector  de  Dampierre,  frère  aîné  de  Guil- 
laume, confirme  cependant  les  certains  de  la  généalogie. 

On  y  voit  que  Guillaume  de  Dampierre  avait  été  avan- 
tagé, par  son  père,  de  la  tierce  partie  des  héritages  qu'il 
avait  et  possédait  au  temps  de  son  trespas,  et  ce  par  acte 
du  i3  septembre  141 5;  que,  par  suite,  il  avait  droit  aux 
acquisitions  faites  depuis  le  décès  de  leur  père  par  les 
tuteurs  des  deux  mineurs,  et  que,  suivant  partage  du 
24  octobre  1448,  reçu  par  les  tabellions  de  la  vicomte  de 
Rouen,  Thomas  Mulso  eut,  pour  la  part  d'Hector  de 
Dampierre,  les  fiefs  de  Dampierre,  de  Freulleville,  de 
MouUineaulx  sur  Longueville,  et  d'autres  fiefs  à  Sauque- 
ville  ,  Fontaines  -  le  -  Dun  ,  au  Fresnoy  et  à  Fulletot  ; 
Guillaume  de  Dampierre  eut  ceux  de  Biville  la  Baignard, 
le  Mesnil-Betas  et  Saint- Léonard  du  Fresne,  et  trois  por- 
tions de  fiefs  à  Tôtes,  à  Crosville  et  à  Sévis, 


94 

Seulement  ce  partage  ne  fait  point  mention  du  fief  du 
Vivier. 

On  voit  toutefois,  par  Testimation  du  comté  de  Longue- 
ville,  en  1485,  que,  dès  cette  époque,  le  seigneur  de  Biville- 
la-Baignard  était  seigneur  du  Vivier,  et  qu'il  paya  20  sous 
de  grcverie  au  receveur  du  comté. 

La  généalogie  des  Dampierre  donne  pour  fils  à  2^non 
et  Marie  de  Gouvis,  Philippe  de  Dampierre,  allié  à  Gillette 
Paisnel,  fille  du  seigneur  d'Angerville  le  Martel  et  de  Jac- 
queline Martel,  dont  la  sœur,  Marguerite  Paisnel,  porta  la 
seigneurie  d'Angerville  à  Guillaume  Le  Roux,  son  mari, 
seigneur  d'Ouville-la-Rivière. 

Pour  petit-fils,  Anthoine  de  Dampierre,  seigneur  de 
Biville,  allié  à  Masquarel,  dans  la  descendance  desquels  cette 
branche  prit  fin  :  leurs  deux  fils,  Thomas  et  Christophe, 
«  venus  eunuques  au  monde,  1  n'eurent  pas  de  descendants. 

Une  de  leurs  sœurs,  Charlotte  de  Dampierre,  épousa 
messire  Jacques  de  Godeffroy,  sieur  d'Aunou  et  Clerville, 
chevalier  de  Tordre  du  Roi,  et  son  fils  figura  au  contrat 
de  vente  de  la  terre  et  du  château  du  Vivier,  consenti  les 
5  et  6  décembre  iSgj,  par  Christophe  de  Dampierre,  au 
profit  de  Nicolas  Baudry,  avocat  au  parlement  de  Rouen, 
qui,  quelques  années  plus  tard,  se  trouvait,  par  l'acquisi- 
tion faite  des  Masquerel,  possesseur  de  la  totalité  de  la 
terre  d'Imbleville. 

Ses  descendants  la  possèdent  encore  aujourd'hui. 

On  trouve  successivement  : 

Charles  Baudry,  conseiller  au  parlement  en  1607,  ^^^*^ 
à  Madeleine  Dambray; 

Nicolas  Baudry,  mari  de  Charlotte  Joas  ; 

Charles  Baudry,  mort  en  1721,  qui  de  Marie  Deshom- 
mets  eut  Nicolas-Charles  Baudry,  né  en  1686,  marié  le 
29    juin    17 14  à  Marie    Couture  de   Chamacourt,   mort 

m 

en  1744  sans  enfants,  et  Marie-Anne  Baudry,  mariée,  le 
22  novembre  1722,  h  François-Alphonse  de  Civille,  sei- 
gneur de  Rames. 


95 

De  cette  union  sortit  entr*autres  une  fille,  Marie-Angé- 
lique de  Civîlle,  née  le  i3  novembre  1727,  épouse  de 
Pierre-Eustache  le  Vigner,  baron,  haut  justicier  de  Dam- 
pierre. 

Une  de  ses  filles,  Geneviève-Charlotte,  épousa  Alexandre 
Marie- François  Le  Hayer,  baron  de  Bimorel,  conseiller 
au  Parlement,  mort  en  1 83 1 .  Leur  fils,  Pierre-François  Le 
Hayer,  baron  de  Bimorel,  eut,  de  son  mariage  avec 
M»e  Antoinette-Sophie  de  Perier,  une  fille  unique,  Corinne- 
Félicie  Le  Hayer  de  Bimorel,  mariée,  le  3  février  1841,  à 
M.  de  Folleville,  aujourd'hui  propriétaire  du  château 
d'Imbleville. 

Saint" Victor^r Abbaye.  —  Les  imagiaires  Lour- 
det  et  Ma\eline,  —  Inscriptions  du  xvie  siècle,  — 
M.  de  Beaurepaire  signale  une  inscription  à  Textérieur 
de  Péglise  de  Saint -Victor -P Abbaye  :  elle  est  du 
commencement  du  xvi»  siècle  et  entoure  un  écusson  : 
Manet  virtus  post  fanera.  W  donne  lecture  d'une 
notice  sur  les  sculpteurs  Lourdet  et  Mazeline,  et  d*un 
document  constatant  que  les  femmes  étaient  séparées 
d'avec  les  hommes  dans  les  églises  au  moyen-âge. 

NOTES  SUR  LKS  SCULPTEURS  MICHEL  LOURDET  ET  MAZELINE 

Parmi  les  sculpteurs  qui  se  firent  un  nom  à  Rouen,  au 
xvue  siècle,  il  faut  citer  Michel  Lourdet  (i). 

Cet  artiste  a  déjà  été  mentionné,  dans  les  travaux  de 
notre  Commission,  par  notre  collègue  M.  Stéphano  de 
Merval. 

Michel  Lourdet  est  signalé,  comme  sculpteur,  dans  les 
Comptes  de  la  cathédrale  de  Rouen,  de  1603-1604.  Le 
chapitre  le  charge,   en   1612,  du   travail  des  châsses  de 

(1)  Un  Michel  Lourdet  avait  été  lauréat  pour  le  rondeau,  au 
Puy  de  Dieppe,  en  iSyS.  Antiquités  de  Dieppe,  d*Asselinne,  pu- 
bliées par  M.  Mich.  Hardy,  p.  i8g. 


96 

l'église  métropolitaine,  notamment  du  reliquaire  de  Saint- 
Sever.  En  1629,  il  traite  avec  lui  pour  la  peinture  et  pour 
la  dorure  du  plafond  de  la  châsse  de  Notre-Dame. 

En  iSpg,  Lourdet  fait,  pour  36o  1.,  une  contretable 
avec  figures  en  bosse  ronde  qui  lui  est  commandée  par  la 
fabrique  de  Notre-Dame-de-la- Ronde. 

En  1609,  il  exécute,  pour  l'église  Saint-Maclou  de  Rouen, 
un  tabernacle  et  ciboire,  enrichi  de  tableaux  de  peinture 
plate  en  bosse,  pour  la  décoration  du  grand  autel  du  chœur. 
Ce  travail,  spécifié  dans  un  marché  du  9  septembre  1609, 
fut  payé  5oo  1.  à  l'aide  des  deniers  de  la  confrérie  du  Saint- 
Sacrement. 

En  161 1,  la  confrérie  de  Saint- Louis  et  Saint-Marcouf, 
établie  pour  les  merciers  grossiers  en  Téglise  de  Saint-Jean 
de  Rouen,  lui  paya  54 1.,  c  pour  avoir  taillé  en  bois  de  chêne 
l'image  de  mons.  S.  Marcouf,  avec  le  petit  priant,  ensemble 
tant  pour  la  dorure  et  Tentrepié  que  pour  le  poser  au 
chœur  de  lad.  église.  • 

Le  14  juin  1620,  Lourdet  s'oblige  envers  le  curé  et 
les  trésoriers  de  Saint-Cande-le- Jeune,  •  à  dresser  et  faire 
mettre  en  leur  église  un  grand  corps  de  tableau  en  bois  de 
chêne,  large  de  sept  pieds  sur  la  première  base,  et  de  neuf 
pieds  environ  sur  quinze  à  seize  de  hauteur,  et  de  &ire 
construire  ledit  ouvrage  des  figures  et  estofFes  savoir  : 
Parchitecture  et  menuiserie  conformes  au  modèle  en  papier 
présenté  par  led.  Lourdet.  Au  bas  dudit  ouvrage  y  devoit 
avoir  une  forme  de  tabernacle,  l'armoire  non  saillante  sur 
l'autel,  avec  les  tailles,  enrichissements  et  figures  des  anges 
aux  deux  costés,  trois  testes  de  chérubins,  les  figures  de 
S.  Cande  et  de  S.  Victor,  deux  anges  aux  deux  costés  des 
colonnes,  ces  anges  portant  le  nom  de  Jésus  et  la  figure  de 
la  Résurrection  de  N.-S.,  laquelle  seroit  posée  au  taber- 
nacle en  haut  et  feroit  le  couronnement  de  l'œuvre.  » 
Lourdet  devait  «  faire  peindre  et  vernir,  en  couleur  de 
bois  brun,  toute  l'architecture  de  l'œuvre,  dorer  et  enrichir 
d'or  par  filets  toutes  les  moulures,  dorer  tout  à  plain  d'or 


97 

les  chapiteaux  de  hautes  et  basses  colonnes,  les  vases,  tailles, 
têtes  de  chérubins  et  figures,  pour  estre  en  représentation 
de  bronze  doré,  le  tout  le  plus  subtilement  et  curieu- 
sement qu*ii  pourroit  adviser.  •  Il  était  aussi  tenu  de  faire 
et  apprêter  les  panneaux  et  table  de  bois  pour  mettre  les 
tableaux  en  plate  peinture,  que  devaient  faire  faire  les  tré- 
soriers, aux  dépens  du  trésor,  tels  que  :  la  figure  de  N.-S., 
de  la  Vierge  et  celle  de  la  Passion,  et  de  placer  cet  ouvrage, 
à  ses  frais,  au  grand  autel  de  Saint-Cande,  le  tout  prêt 
pour  Pâques  1621,  moyennant  400  livres. 

Le  dernier  septembre  i63i,  on  le  voit  encore  donner 
quittance  à  Claude  Fournier,  écuyer,  fils  et  héritier  de 
Claude  Fournier,  docteur  es -droits,  d*une  somme  de 
3oo  l.  pour  Touvrage  qu'il  avait  exécuté  conformément 
aux  termes  d'un  marché  conclu  le  28  janvier  précédent, 
et  qui  servit  à  la  décoration  de  la  chapelle  des  Fournier, 
dans  réglise  des  Carmes  de  Rouen  (i). 

La  réputation  de  cet  artiste  s'était  répandue  assez  loin. 
On  en  trouve  la  preuve  dans  un  autre  contrat  passé,  le 
12  février  1616,  entre  lui  et  les  Cordeliers  de  Valognes, 
pour  la  construction  d'un  grand  corps  en  contretable  d'au- 
tel moyennant  un  prix  de  i,5oo  l.  (2). 

Lourdet  se  qualifiait  maître-peintre  et  sculpteur  à  Rouen. 
Il  était  domicilié  sur  la  paroisse  Saint-Martin-du-Pont. 
'  Son  fils  Pierre,  comme  lui  peintre  et  sculpteur,  fit,  en 
réglise  de  l'abbaye  du  Mont-Saint-Michel,  en  1645,  le 
grand  crucifix,  au-dessus  de  l'autel  Saint-Michel,  et  les  fi- 
gures de  S.  Benoît,  de  St«  Scholastique,  avec  deux  anges 
de  bois  doré.  Il  est  à  croire  qu'il  ne  fit  pas  plus  fortune 
que  son  père,  que  nous  voyons  mourir  dans  la  misère,  à 
l'âge  de  quatre-vingt-dix  ans,  et  qui  fut  enterré  par  charité 
dans  le  cimetière  de  Saint-Godard,  le  4  mars  1676  (3). 

(i)  Tabellion,  de  Rouen. 

(2)  Tabellion,  de  Rouen. 

(3)  Actes  de  l'État  civil. 


98 

Michel  Lourdet  s'était  appliqué  tout  spécialement  à  la 
confection  de  riches  contretables  suivant  la  mode  du 
temps. 

Il  n'est  pas,  sans  doute,  à  désirer  que  cette  mode  re- 
vienne, mais  il  n'est  pas  sans  intérêt  de  conserver  les  con- 
tretables qui  nous  restent,  quand  elles  sont  d'un  bon  goût, 
et  qu'elles  ne  masquent  pas  d'élégantes  fenêtres. 

Afin  d'aider  les  archéologues  à  dater,  avec  quelque 
sûreté,  ce  genre  de  construction,  qui  n*est  point  étranger 
à  Tobjet  de  l'archéologie,  j'ai  copié  deux  devis  de  contre - 
tables,  l'un  de  Lourdet,  l'autre  de  Robert  Mazeline  (i).  Je 
pourrais  en  rapporter  beaucoup  d'autres,  si  je  ne  craignais 
d'occuper  trop  longtemps  votre  bienveillante  attention. 

DEVIS  DE  LA  CONTRETABLB   DE    SAINT-HERBLAND 

l6l  I 

c  Déclaration  de  chozes  quy  convient  faire  pour  Téglise 
et  parroisse  de  Saint- Erblanc  de  Rouen,  et  que  a  entrepris 
et  s'est  obligé  vers  Messieurs  les  curé,  thésauriez  et  parois- 
siens de  la  dicte  églize  Michel  Lourdet,  maître  peintre  et 
sculpteur  en  ceste  mesme  ville,  de  leur  faire,  et  ce  pour  la 
feste  de  Pasques  prochain,  les  chozes  contenues  en  ce  pré- 
sent escript. 

c  En  premier  lieu  y  convient  faire  un  tabernacle  de 
bon  bois  de  chesne,  et  ce  de  la  mesme  structure  et  pro- 
portion en  son  architecture,  sculptures,  tailles  et  enri- 
chissements, ainsy  qu'il  estdémonstré  au  pourtraict  dressé 
et  trassé  par  ledict  Lourdet,  la  mesure  et  grandeur  duquel 
puist  estre  aizément  recongnue  par  une  ligne  ou  eschelle 
marquée  au  bas  d'icelluy  desseing,  où  sont  marquez  les 
piedz,  demi-piedz  et  poulces,  quy  faict  que  l'on  recon- 
gnoist  par   icelle  que  ledit   tabernacle   aura,  estant  tout 

(i)  Je  ne  sais  ce  qu'il  était  à  Pierre  Ma2:line,  né  à  Rouen  en 
i633,  mort  en  1708,  dont  quelques  œuvres  ornent  encore  la 
galerie  de  Versailles. 


99 

monte,  en  sa  plus  grande  haulteur  six  piedz  et  demy  ou 
environ,  et  de  largeur  et  profondeur,  suivant  la  propor- 
tion et  structure  du  plan  dudit  modelle,  marqué  au-dessoubz 
d*icelluy  desseing,  par  lequel  Ton  peult  recongnoistre  quy 
convient  y  avoir  des  figures  en  bosse  jusques  au  nombre  de 
neuf  ou  dix,  savoir  :  la  figure  de  Nosire-Seigneur  sur 
rhuisset  du  mitan,  et  sur  chacun  des  huissetz  des  costez 
une,  à  savoir  telles  que  Ton  me  dira  ;  et  dedans  les  petits 
pavillons  ou  lanternes  des  costez  sera,  en  Tun,  la  figure 
de  Melchîsédec,  et,  en  Tautre,  celle  de  S.  Paul  et,  au 
bas  et  segond  estage  de  l'œuvre,  seront  les  quatre  évangé- 
listes,  et,  en  la  lanterne  de  tout  hault^  sera  la  figure  de 
Nostre-Seigneur  ressuscité  ou  en  son  Assention,  touttes  les 
autres  menues  œuvrages,  comme  anges,  testes  de  chérubin 
et  aultres  enrichissements,  se  peuvent  assez  recongnoistre 
par  icelluy  pourtaict  et  dessein,  estant  icelle  pièce,  d'œuvre 
peinte,  dorée  et  estoffée  de  la  mesme  sorte  que  le  taber- 
nacle des  Cordeliers  ou  Carmellistes  de  Rouen,  ou  mieulx 
et  plus  riche,  sy  le  fait  faire  ledict  Lourdet,  lequel  nous  a 
promis  et  promet  rendre  icelle  œuvre  preste  comme  des- 
sus, acomplye  de  touttes  chozesgénérallement  quelconques, 
tant  de  menuiserye,  sculpture,  dorure,  peinture,  ferrure  et 
doublure,  estant  entendu  que  Testoffe  de  ladicte  doublure 
soit  veloux,  soit  satin,  sera  par  les  ditz  paroissiens  fourni 
et  baillé  audit  Lourdet,  lequel  a  encor,  oultre  ce  que 
dessus,  promis  par  mesme  moyen  et  s'y  est  obligé  de  des- 
seoir, rehausser  et  raccommoder,  et  ce  de  piastre,  l'histoire 
du  Jardin  d'Ollivet,  qui  est  de  présent  en  la  place  où  se 
mettra  ledit  tabernacle,  accommodant  le  mieulx  quy  pourra 
l'architecture  de  l'ornement  du  tableau  d'icelluy  autel, 
lequel  ornement  de  piastre,  après  avoir  été  raccommodé 
en  ses  ruptures,  sera  reblanchy  ou  peint  de  coulleur  de 
bois  brun  à  huille  et  doré  par  filietz  aux  endroitz  que 
ledit  Lourdet  jugera  y  convenir;  et  ont  lesditz  thcsauriez 
d'icelle  cglize  promis  par  semblable,  pour  le  sallaire  de 
touttes  ses  chozes,  payer  audit  Lourdet  la  somme  de  trois 


4 .  •• 


too 

centz  livres  et  deux  escus,  pour  le  vin  de  ses  aydes  et  corn- 
paignons,  lesquels  leur  seront  donnez  à  la  fin  et  livraison 
et  accomplissement  dudict  œuvre,  de  laquelle  somme  de 
trois  cents  livres  en  a  esté  paie,  et  ce  par  advance,  pour  luy 
aider  aux  fraitz  d*icelle  œuvrage  la  somme  de  cent  livres 
tournois,  et  le  reste,  montant  à  la  somme  de  deux  cents 
livres  t.,  â  la  fin,  livraizon  ou  huit  jours  après  l'accomplis- 
sement dudict  œuvrage  ;  lequel  œuvrage  sera  faict  sous 
bonne  et  deue  Visitation.  Faict  et  arresté  à  Tissue  de  la 
grande  messe  paroichial  d'icelle  parroisse,  présence  des 
sieurs  curé  et  trésoriers  anciens  et  modernes  dudict  lieu,  le 
dimenche  quatriesme  jour  de  décembre  mil  vi^  onze. 

c  Signé  :  Michel  Lourdet  (i).  * 

DEVIS  DE  LA  CONTRETADLE  DE    SAINT-MICHEL 

1617 

C  J'ay  soubsignc  Robert  Mazeline,  sculpteur  à  Rouen, 
confesse  avoir  faict  marche,  avec  Monsieur  le  curé  et  Mes- 
sieurs les  trésoriers  de  la  paroisse  de  Saint-Michel,  de  faire 
un  tabernacle  en  ladicte  paroisse,  proporcionné  à  la  place, 
sçavoir  deux  gradins  dont  la  frise  doit  estre  enrichie  de 
sculpture  et  un  petit  cors  de  tabernaque  qui  doit  estre  de 
mesme  auteur,  pour  mettre  le  Saint-Siboire,  enrichi  d'or- 
nemens  selon  le  modèle,  et  au  dessous  des  dits  gradins 
sera  faict  deux  anges  qui  doive  tenir  une  façon  d'urne 
enrichie  de  feulle  tout  autour  et  profonde  pour  servir  de 
custode  à  esposer  le  Saint-Sacrement,  à  laquelle  doit  estre 
une  porte  qui  doit  se  démonter,  quant  on  voudra,  qui  sera 
ornée  d'une  figure  de  bas-relief;  et,  pour  terminer  la  fin, 
sera  faict  une  fleur  façon  d^mpérialle,  et  derrière  le  tout 
sera  faict  un  fons  façon  de  broderie  pour  cacher  se  qui  se 
trouvera  de  vide  derrière,  le  tout  bien  travaillé,  tant  de 
menuiserie  que  de  sculpture,  de  bon  bois  de  chesne  bien 

(i)  Arch.  de  la  S.  Inf.,  F.  de  la  fabrique  de  Saint-Herbland  de 
Rouen. 


lOl 

sec.  Au  regarde  ladoreure,  elle  doit  estre  dorce  par  le 
mesme  ouvrier  qui  a  doré  la  niche  des  Jacobins  et  de 
mesme  ort,  le  tout  selon  le  modelle  présenté  auxd.  Mes- 
sieurs et  acquesepté  et  que  a  acordé  aud.  entrepreneur 
pour  le  prix  et  somme  de  quatre  cens  livres  et  un  louis 
d'ort  pour  le  vin  du  marché.  Faict  ce  premier  novembre 
mil  vic  soixante  dix  sept. 

c  Signé  :  Robert  Mazelinb. 

c  Pour  les  augmentations  feictes  audit  tabernacle  a  esté 
accordé  la  somme  de  22  livres,  le  26  oct.  1678. 

c  Signature  et  quittance  de  Robert  Mazeline  pour  une 
somme  de  533  livres,  28  nov.  1678. 

«  Signé  :  Robert  Mazelinb.  1 

DOCUMENT  RELATIF  A  LA  PAROISSE  SAINT-GERVAIS  DE  ROUEN 

On  sait  que  dans  bien  des  paroisses  de  la  campagne,  du 
moins  en  Basse-Normandie  et  en  Bretagne,  les  hommes 
occupent,  dans  les  églises,  des  places  distinctes  de  celles 
qui  sont  réservées  aux  femmes. 

Il  en  était  ainsi  à  Rouen  autrefois.  On  en  trouve  la 
preuve  dans  une  sentence  de  Tofficialité,  déposée  aux 
archives  départementales,  F.  de  Tofficialité  de  Fécamp,  et 
relative  à  des  travaux  de  réparation  et  de  reconstruction 
en  l'église  de  Saint-Gervais. 

«  Propositum  fuerat  contra  ipsos  parrochianos  quod  in 
qualibet  parrochiali  ecclesia^  maxime  civitatis  et  diocesis 
Rothomagensis^  Christi  fidèles  audiendo  servicium  fieri  et 
celebrari,  clerici  in  principali  et  digniore^  videlicet  in  can^ 
cello^  laici  et  bigami  in  mediocriy  et  mulieres  in  in/eriori, 
videlicet  in  navi  partibus  sedere  et  se  habere  debebant  et 
consueveranty  quodque  in  loco  predicto  S.  Gervasii  erat 
solum  pars  superior,  per  modum  cancelli^  que  non  suffis 
ciebat  aut  sufficere  poterat  pro  divino  servicio  fiendo.  »  On 
reconnut  qu'il  était  nécessaire  de  construire  une  nef  en 


I02 

remplacement  de  celle  qui  avait  existé  autrefois  et  qui 
vraisemblablement  avait  été  détruite  dans  le  temps  du 
siège  de  Rouen.  La  charte  en  question  est  de  Tannée  1428. 

M.  Le  Breton  appelle  Tattention  de  la  Commission 
sur  une  tombe  circulaire  d'enfant  à  Ambourville,  près 
Duclair  ;  il  insiste  sur  la  rareté  de  ce  monument,  quMl 
se  propose  de  décrire  dans  une  des  prochaines  séances. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


Le  Secrétaire, 
Vicomte  R.  d'EsTAiNTOx. 


io3 


SEANCE  DU  26  JUILLET  1882 

La  séance  ouvre  à  deux  heures  et  demie,  sous  la 
présidence  de  M.  Hendlé,  préfet  de  la  Seine-Infé- 
rieure. 

Sont  présents  :  MM.  de  Beaurepaire,  vice-président; 
Adeline,  P.  Baudry,  Biliiard,  Félix,  Gouellain,  Le 
Breton,  Lefort,  Maillet  du  BouUay,  de  Merval,  Pelay, 
Tabbé  Robert,  l'abbé  Tougard  et  de  Vesly. 

M.  le  Préfet  exprime  la  satisfaction  qu^il  éprouve 
d'avoir  pu  donner  une  preuve  de  ses  sympathies  pour 
la  Commission,  en  comblant  les  vides  qui  se  sont  faits 
dans  son  sein,  par  la  nomination  de  MM.  le  Conseiller 
Félix  et  Adeline  ;  il  est  convaincu  que  leur  présence 
sera  favorablement  accueillie  par  leurs  nouveaux  col- 
lègues, et  il  est  heureux  de  venir  les  installer  lui- 
même  dans  leurs  nouvelles  fonctions. 

Il  se  félicite,  en  même  temps,  de  pouvoir  faire,  avec 
les  Membres  de  la  Commission,  connaissance  com- 
plète, en  présidant  la  première  séance  réunie  depuis 
qu'il  a  l'honneur  d'être  appelé  à  l'administration  du 
département.  M.  le  Préfet  ajoute,  en  terminant: 
«  Toutes  les  fois  que  M.  le  Vice-Président  appellera 
mon  attention  sur  un  point  intéressant^  mon  concours 
est  acquis  aux  désirs  de  la  Commission.  » 

M.  le  Préfet  regrette  que  ses  occupations  ne  lui  per- 
mettent pas  d'assister  au  reste  de  la  séance,  et  laisse  à 
M.  le  Vice-Président  le  soin  de  diriger  la  suite  de  la 
discussion. 

Le  dépouillement  de  la  correspondance  imprimée 
comprend  : 

Mémoires  de  la  Société  académique  de  Boulogne^ 


I04 

sur 'Mer  f  t.  X,  XI,  et  XII;  — Mémoires  de  la  Société 
savoisienne,  t.  XX  ;  —  Bulletin  de  la  Société  des  An- 
tiquaires de  Normandie,  t.  IX  et  X  ;  —  Bulletin 
historique  de  la  Société  des  Antiquaires  de  la  Mori^ 
nie  y  i2i«  livraison;  —  Bulletin  de  la  Société  archéo- 
logique  et  historique  deVOrléanaiSy  n^  1 12,  i«f  trim., 
1882;  —  La  Manufacture  de  Sèvres,  d'après  un 
mémoire  inédit  du  xvui®  siècle,  par  G.  Le  Breton  ;  — 
Notice  sur  la  Société  des  Antiquaires  de  la  Mori^ 
nie,  par  M.  E.  Dramard  ;  —  Board  of  régents^  of 
the  Smithsonian  institution /or  theyeaer,  1880. 

Arrêté  de  nomination  de  MM,  Félix  et  Adeline, 
—  La  correspondance  manuscrite  comprend  Parrété  de 
nomination  de  MM.  Félix  et  Adeline,  pris  par  M.  le 
Préfet  de  la  Seine-Inférieure,  à  la  date  du  12  juin 
dernier,  lequel  est  ainsi  conçu  : 

Le  Préfet  de  la  Seine-Inférieure, 

Vu  les  arrêtés  préfectoraux  des  21  février,  i8  mars  et 
21  novembre  1881, 

Sur  la  proposition  de  M.  le  Secrétaire  général, 
Arrête  : 

Art.  ler.  —  M.  Félix,  conseiller  à  la  Cour  d'appel  de 
Rouen,  et  M.  Jules  Adeline  sont  nommés  Membres  de  la 
Commission  départementale  des  antiquités  de  la  Seine- 
Inférieure. 

Art.  2.  —  Expédition  du  présent  arrêté  sera  transmis 
aux  intéressés  pour  leur  servir  de  titre. 

Saint'Martin^le-Gaillard,  —  Demande  de  clas- 
sèment.  —  M.  de  Beaurepaire  présente  à  l'examen  de 
la  Commission  une  demande  du  Conseil  municipal 
de  la  commune  de  Saint-Martin-le-Gaillard»  tendant 
au  classement,  comme  monument  historique,  de  Té- 
glise  de  cette  commune. 


io5 

On  lit  dans  la  délibération  le  passage  suivant  : 

Considérant  qu'à  part  la  beauté  de  son  architecture  et 
de  ses  dimensions,  qui  en  font  un  édifice  remarquable  et  à 
conserver,  l'église  de  Saint-Martin,  bâtie  dans  le  style  et 
sur  les  plans  des  églises  ogivales  primitives,  mais  modifié  au 
xvi^  siècle,  rappelle  qu'à  l'époque  de  l'invasion  anglaise,  sous 
Charles  VI  et  Charles  VII,  où  la  patrie  n'éprouvait  partout 
ailleurs  que  défaites  et  humiliations,  une  poignée  de  Français 
força  les  Anglais  à  lever  le  siège  du  château  de  Saint-Mar- 
tin, et  en  brûla  un  certain  nombre,  réfugiés  dans  le  chœur 
de  la  grande  église  y  reconstruit  ensuite  tel  qu'il  est  avec 
une  partie  du  produit  de  la  conquête  des  Canaries,  que 
consacra  à  ce  travail  le  conquérant  et  roi  de  ces  îles,  Jean 
de  Bethencourt,  seigneur  de  Saint-Martin-Ie-Gaillard  ; 

Que,  sur  quelques  chapiteaux  des  colonnes  de  la  nef  sont 
sculptées  des  scènes  ou  allusions  à  la  conquête  des  Cana- 
ries, ce  grand  fait  du  commencement  de  notre  histoire 
maritime,  qui  confirme  en  faveur  des  Français  cet  autre 
grand  fait  d'armes. 

Le  Conseil  demande,  en  outre,  que  le  département 
prenne  à  sa  charge  la  réfection  du  grand  ponail. 

A  l'unanimité,  la  Commission,  sans  avoir  à  se  pro- 
noncer sur  Futilité  du  classement  qui  résulte  de  déci- 
sions antérieures,  estime  qu'il  y  a  lieu,  préalablement 
à  toute  décision,  de  demander  un  devis  détaillé  des 
travaux  à  exécuter. 

Acte  de  cette  délibération  sera  transmis  à  l'autorité 
préfectorale. 

Rouen,  Maison  en  bois  sculpté;  —  Musée  des  an- 
tiquités, —  M.  du  Boullay  fait  part  à  la  Commission 
que  M.  le  Maire  de  Rouen,  par  une  lettre  en  date  du 
22  juillet  1882,  Ta  informé  d'une  délibération  prise 
par  le  Conseil  municipal,  à  la  date  du  4  juillet  précé- 
dent, et  autorisant  la  remise,  au  Musée  départemental 


io6 

des  antiquités,  de  la  façade  des  maisons  rue  Malpalu, 
no*  90  et  92. 

Notre  collègue  fait  passer  sous  les  yeux  de  la  Com- 
mission une  photographie  qu^il  a  fait  exécuter  de  ces 
maisons  dans  Tétat  actuel. 

Fouilles  (TAlincourt.  Vase  en  terre  de  Samos,  — 
M.  Billiard  fait  passer  sous  les  yeux  de  la  Commission 
la  restitution,  opérée  par  ses  soins,  d'un  très  beau  vase 
fragmenté,  en  terre  dite  de  Samos,  provenant  du  ma- 
noir d'Alincourt  à  Lillebonne. 

M.  Le  Breton  fait  observer  que  cette  appellation  : 
terre  de  Samos,  est  inexacte,  et  s^applique,  dans  Tes- 
pèce,  à  unvased^une  fabrication  inférieure  à  celle  des 
vases  méritant  exactement  cette  dénomination,  et  dont 
le  centre  de  fabrication,  au  n*  ou  iii«  siècle,  paraît 
avoir  été  Lezou,  dans  le  Puy-de-Dôme, 

M.  d'Estaintot  observe  que  le  vase  restitué  par 
M.  Billiard  présente  la  plus  grande  analogie  avec  le 
vase  des  Dominicains  du  Havre,  acheté  Tannée  der- 
nière par  le  Musée. 

Notice  sur  Pierre  des  Aubeaux.  —  M.  de  Vesly  lit 
une  notice  intéressante  sur  Pierre  des  Aubeaux,  sculp- 
teur rouennais,  tirée  des  archives  de  l'église  de  Gisors. 

Elle  est  ainsi  conçue  : 

PIERRE   DES   AUBEAUX 

La  chapelle  de  TAssomption ,  même  après  l'agrandis- 
sement de  la  fin  du  xv^  siècle,  ne  comprenait  que  trois 
travées  et  s*arrétait  par  un  mur  droit  en  face  du  sanctuaire 
de  Péglise.  Mais  quand  les  travaux  eurent  renversé  le  mur 
des  sous-ailes  du  chœur,  fait  les  absidioles,  puis  le  reves- 
tiaire, la  confrérie  résolut  de  reculer  le  sanctuaire  de  sa 


lOJ 

chapelle  dans  la  rue  jusqu'au  niveau  des  nouvelles  con- 
structions, et  de  rendre  sa  chapelle  digne  des  c  grants  et 
somptueux  ouvrages  i  qu'ordonnait  la  fabrique.  Elle  en- 
voya Tun  des  pairs  à  Rouen  pour  traiter  avec  Pierre  des 
Aubeaux. 

i5io-i5ii.  —  f  Paie  à  Jehan  Huet  la  despence  faicte 

pour  messieurs  les  gouverneurs  avecq  raaistre  Pierre  des 

.Aubeaux,  tailleur  de  pierre,  la  somme  de  douze  livres 

parisis  comme  apert  par  l'ordonnance  de  mesdits  sieurs 

cy  rendue,  cy xu  l.  » 

On  met  les  maçons  de  l'église  à  l'œuvre  : 

i5!2-i3.  —  €  Paie  à  maistre  Robert  Jumel,  Jacques 
Jumel,  Colin  Cocart,  Jehan  Chinard,  Robin  Revel  et  Jeh. 
Ooulle,  tous  massons,  la  somme  de  soisante-onze  livres 
ung  sol  huit  deniers  parisis,  pour  par  lesdits  massons  avoir 
besongné  pour  la  confrarie  les  mois  de  mars,  avril,  raay, 
juin  et  juillet  au  précèdent  du  moyes  d'aoust  vcc  et  traize, 
comme  apert  par  lesdits  mois  et  jours  escripts  en  une 
feuille  de  papier,  signée  desusdits,  cy  rendues,  pour 
ce  cy Lxxi  1.  i  s.  viii  d.  » 

Les  charpentiers  couvrent  la  nouvelle  église  : 

c  Paie  à  Jehan  Boutery,  charpentier,  la  somme  de 
XXII  1.  t.  pour  par  ly  avoir  esté  faict  ung  pavillon  à  deux 
montans,  et  quérir  toutes  choses,  lequel  pavillon  a  esté 
mis  et  assis  sur  la  chappelle  de  la  dite  confrarie  comme 
plus  à  plain  peult  a  paroi r  par  le  marché,  t 

On  commence  les  paiements  à  Pierre  des  Aubeaux  : 

c  Paie  à  maistre  Pierre  des  Aubeaux,  tailleur  d'yniages, 
demeurant  à  Rouen,  suivant  entantemans  du  marché  fsdct 
avec  luy  par  messieurs  les  gouverneurs,  la  somme  de  sept 
vings  dix  huit  livres  dix  sept  sols  deux  deniers  parisis, 
comme  il  apert  par  les  quittances  dudit  des  Aubeaux  cy 
rendues  et  la  dite  somme  de  vu»  xviii  1.  xvii  s.  ii  d. 
parisis,  paies  audit  des  Aubeaux  au  précèdent  de  la  my 
aoust  vcc  et  traize,  pour  ce  cy.   .     vu»  xvin  1.  xvn  s.  ii  d. 

t  Payé  à  Artus  Gaucourd  xii  s.  x  d.  parisis,  pour  le  com- 


io8 

mandement  de  messieurs  les  gouverneurs  pour  par  ledit 
Gaucoufd  avoir  esté,  le  jour  Sa int-Jehan- Baptiste  vcc  et 
traize,  à  Rouen  porter  des  lettres  et  xx  I.  audit  des 
Aubeaux,  pour  ce  cy xii  s.  x  d.  > 

Aux  amortissements  nous  trouvons  une  note  curieuse  : 

c  Jehan  Barat  a  donc,  pour  les  amortisses  de  luy  et  de 
Jehane  sa  femme,  la  somme  de  lxxvi  s.  parisis  et  x  aulnes 
de  serviettes,  lesquelles  ont  estes  baillés  à  la  femme  Pierre 
des  Aubeaux  pour  son  service,  pour  cecy  lxxvi  s.  argent 
et  lesdites  serviettes.  » 

En  note  il  y  a  :  «  Led.  procureur  retire  lesd.  serviettes 
et  en  rendra  compte.  » 

Colette  Le  Brun  d' Heudicourt  ayant  donné  xxviii  s.  en 
argent^  une  nappe  de  toile  de  deux  aulnes  et  demi^  etc.  ; 
pour  son  amortissement^  une  note  nous  dit  :  *  Lad.  nappe 
baillée  au  tailleur  d'ymages,  t  le  reste  est  aux  mains  du 
procureur. 

Les  ouvriers  de  Pierre  des  Aubeaux  viennent  travailler 
de  leur  métier  et  établir  les  fameuses  images  du  Trépas- 
sement  : 

•  Paie  à  Pierre  Monnier  dit  Fleurent,  serviteur  dudit 
des  Aubeaux,  la  somme  de  vingt  livres  parisis,  pour  par 
ledit  Monnier,  Jehan  de  Rouen  et  Mathurin  de  Lourme 
avoir  besongné  par  cinquante  jours  aux  anges  du...  et 
mis  sobz  les  figures  assises  en  la  chapelle  de  ladite  con- 
frarie,  comme  apert  par  la  quittance  dudit  cy  rendue  pour 
ce  cy XX  1. 

f  Paie  par  le  commandement  de  mons.  le  lieut.,  mons. 
le  recev.  et  mons.  Tesleu,  Gassot,  Dupré,  Jehan  Labbé  et 
aultres  frères,  xvn  s.  parisis  aux  varlets  dudit  des  Aubeaux, 
pour  leur  vin  de  ce  qu'il  ont  commencé  à  asseoir  les 
ymages,  pour  ce  cy xvn  s. 

c  Paie  audit  Monnier  nii  s.  parisis,  pour  les  couleurs 
mises  autour  des  figures,  pour  ce  cy un  s. 

c  Paie  à  Mathieu  le  Cousturier,  charon,  seize  s.  parisis, 
pour  par  ledit  avoir  fait  ung  camion  tout  neuf  pour  porter 


109 

les  pierres  et  ymages,  comme  apert  par  la  quittance  dudit, 
cy  réduit  par  ce  cy xvi  s.  » 

Jehan  Thibault^  procureur,  mourut  sans  avoir  c  baille 
à  maytre  Pierre  des  Aubeaux  »  la  somme  entière  de  xx  1. 
qu'il  devait  lui  donner,  il  devait  encore  nii  1. 

Enfin,  aux  deniers  comptés  et  non  reçus  nous  trouvons 
la  mention  suivante  : 

«  De  Pierre  des  Aubeaux,  maistre  tailleur  d'ymages,  de- 
meurant à  Rouen,  duquel  est  iaict  recepte  au  chapitre  des 
amortisses  à  moytiers  conte  de  la  somme  de  sept  livres 
dix  *sols  parisis  pour  les  amortisses  de  luy,  Robine,  sa 
femme,  et  Loys  Hébert,  son  varlet  et  serviteur,  n'a  este 
aucune  chose  receu,  pour  ce  qui  par  le  marché  que  ledit 
des  Aubeaux  à  avec  messieurs  les  gouverneurs,  il  doit 
estre  amorti,  sa  femme  et  sondit  serviteur  en  ladite  con- 
frarie,  pour  ce  cy vu  1.  x  s.  » 

Là  s'arrêtent  les  extraits  de  nos  archives  sur  Pierre  des 
Aubeaux. 

Mais  Pierre  Monnier,  dit  Fleurent,  semble  s'être  fixé  à 
Gisors,  car,  aux  comptes  de  1 5 20,  il  travaille  à  l'église  que 
construit  Robert  Grappin  : 

t  Du  5e  jour  de  may  v^c  xxi  a  esté  paie  à  maistre  Pierre 
Fleurent,  pour  avoir  fait  quatre  anges  sur  le  portail  de 
devant  la  ruelle  Nicoll  Thomas,  dont  en  a  esté  paie  la 
somme  de  lx  s.  t.  > 

Son  atelier  était  adossé  à  l'église  : 

1529.  —  €  Le  7e  jour  de  janvier  fut  compté  par  mess, 
le  trésorier  à  Pierre  Fleurent,  ymaginier,  pour  opération 
de  son  mestier,  lequel  il  avoit  opéré  à  l'église,  et  pour 
icelle  opération  fut  appoincté  que  ce  seroit  pour  les  arrest 
qu'il  pouvoit  devoyr  à  cause  de  ses  ouvrouères  assis 
contre  l'église  eschus  au  terme  saint  Remy  v«  xxvni,  les- 
quels arrest  se  montoient  à xxv  s.  t.  » 

Aux  comptes  de  1 537,  il  est  mort,  caria  t  v*  Pierre  Mon- 
nier, dit  Fleurent,  ymaginier  »,  paie  le  loyer  de  son  «  ou- 
vrouère  •. 


I  lO 

Note  sur  la  commanderie  de  Villedieu-la^Mon- 
tagne.  —  M.  de  Merval  communique  une  étude  sur  la 
commanderie  de  Villedieu-Ia-Montagne. 

Aux  confins  de  la  Normandie  et  de  la  Picardie,  sur  le 
territoire  de  la  commune  d'Haucourt,  dans  le  hameau  de 
Villedieu-la-Montagne,  qui  était  autrefois  une  petite  pa- 
roisse de  Tarchidiaconéd'Eu,  et  du  doyenné  de  Neufchâtel, 
on  voit  auprès  d'une  église  du  xii^  ou  du  xiii^  siècle,  qui  a 
été  classée  il  y  a  plusieurs  années,  comme  monument  his- 
torique, quelques  bâtiments  en  brique  et  pierre  dont  un  de 
forme  hexagone  qui  a  conservé  dans  le  pays  le  nom  de  salle 
des  chevaliers  ;  c'est  tout  ce  qui  reste  de  l'importante  com- 
manderie de  Villedieu-en-M  on  tagne,  appelée  hôpital  dans 
le  pouillé  d'Eudes  Rigaud,  dont  l'église  paroissiale  était 
une  dépendance  c  hospitalarii  habent  in  manu  sua.  * 

Cette  commanderie  de  Tordre  de  Saint-Jean  de  Jérusa- 
lem, l'une  des  deux,  en  Normandie,  qui  furent  fondées  en 
sa  faveur  et  n'appartinrent  pas  aux  Templiers  avant  de  lui 
revenir,  avait  des  propriétés  considérables,  non  seulement 
dans  la  province,  mais  encore  en  Picardie,  et  était  la  seule 
du  grand  prieuré  de  France  qui  relevât  d'un  seigneur  par- 
ticulier, son  fondateur  s'étant  réservé  ce  privilège  pour 
lui  et  ses  descendants. 

Elle  devait  sa  fondation  à  Hugues  de  Haucourt,  cheva- 
lier, qui  conjointement  avec  Gaudefroid  des  Pois,  avait 
déclaré  en  présence  de  Rotrou,  archevêque  de  Rouen,  par 
conséquent  entre  1 164  et  11 84,  et  de  Tabbé  de  Beaubec, 
faire  donation,  fratribus  hospitalis  ville  Dei  supers  Gors 
montent  et  infrà  villam  (i),  d'une  maison  pour  les  loger 
avec  un  jardin  et  la  terre  d'une  charrue,  puis  de  deux 
cents  mesures  de  terre  pour  leurs  hommes,  à  la  condition 
que  chacun  d'eux  devra  payer  aux  dits  seigneurs   Hugues 

(i)Un  traducteur  de   cette    charte  traduit   Gorsniontem   par 
Gaillemont,  c'est  probablement  Gaillofoniaine. 


1 1 1 

et  Gaudefroid,  un  cens  de  douze  deniers  et  de  deux  cha- 
pons par  an. 

Cette  charte  conservée  aux  Archives  nationales,  série 
5i5o,  suppl.  no  2,  est  suivie  d'une  charte  communale  oc- 
troyée par  Guillaume  de  Haucourt,  seigneur  de  Haucourt, 
fils  d'Hugues,  approuvée  par  les  frères  de  Thôpital,  dans 
laquelle  on  voit  que  les  hommes  de  Villedieu  auront  le 
droit  quand  ils  construiront  une  maison  de  la  vendre  ou 
de  la  donner,  de  marier  à  leur  gré  leurs  fils  et  leurs  filles, 
et  en  cas  de  vente  de  leur  terre  devront  un  dîner  au  sei- 
gneur qui  aura  le  droit  de  retenir  la  terre  en  donnant  la 
treizième  partie  de  sa  valeur. 

Que  chaque  habitant  aurait  Tusage  du  bois  d' Haucourt 
et  de  Genetel  (hameau  situé  à  1/4  de  lieue  sud  d'Hau- 
court)  pour  raccommoder  ses  charrues. 

Que  défense  leur  était  faite  de  quitter  leurs  terres  pour 
en  prendre  d'autres  en  dehors  de  la  seigneurie. 

Et  que  si  le  seigneur  leur  donnait  des  terres  à  Pierre- 
mont  (autre  hameau  d'Haucourt),  ils  auraient  le  droit  de 
les  cultiver  aux  mêmes  conditions  que  celles  de  Villedieu; 
enfin,  que  si  le  seigneur  d^Haucourt  avait  à  se  plaindre 
d'un  homme  de  Villedieu,  il  devait  l'assigner  devant  la 
cour  de  l'hôpital,  les  hospitaliers  par  privilège  royal  jouis- 
sant dans  toutes  leurs  possessions  de  la  haute,  moyenne 
et  basse  justice. 

Par  cette  même  charte,  Guillaume  de  Haucourt  affran- 
chissait la  terre  de  Villedieu  de  toutes  tailles  et  corvées^ 
moyennant  que  les  frères  hospitaliers  lui  payassent  à  lui 
et  à  ses  héritiers  trente  et  une  livres  beauvoisis  chaque 
année,  à  la  Saint-André. 

La  donation  de  la  terre  de  Villedieu  fut  confirmée  par 
Richard-Cœur-de-Lion  qui,  par  sa  charte  du  5  janv.  1 104, 
accorda  en  outre  aux  frères  de  l'hôpital  toutes  franchises  et 
immunités,  voulant  encore  que  si  un  de  leurs  hommes 
était  condamné  pour  délit  envers  le  Roi,  l'amende  ou  les 
biens  saisis  fussent  remis  à  l'hôpital. 


I  12 

La  même  charte  exemptait  les  frères  de  toute  autre  ju- 
ridiction que  de  celle  de  Tordre. 

Le  commandeur  de  Villedieu  était  patron  et  collateur 
de  la  cure,  jouissant  de  toutes  les  dîmes  de  la  paroisse, 
ainsi  que  le  constate  le  procès-verbal  de  la  visite  prieurale 
de  1495  (ces  visites  avaient  lieu  tous  les  vingt-cinq  ans 
pour  renouveler  les  terriers,  bien  établir  les  droits  et  les 
charges  des  commanderies),  dans  lequel  on  lit  : 

f  Audict  lieu  de  Villedieu,  a  uneesglise  parochiale  fon- 
dée de  S.  Jehan  de  TOspital,  auprès  de  l'esglise  est  la 
maison  du  commandeur  qui  a  esté  faicte  toute  neufve  tant 
par  frère  Jehan  de  FiefFes,  ci-devant  commandeur,  comme 
par  le  frère  Nicole  de  Montmirel,  présent  commandeur. 

c  Audict  lieu,  le  villaige  de  Villedieu  à  xxx  ou  xl  habi- 
tans,  hommes  de  la  religion,  a  toute  juridicion,  prison  et 
justice. 

Les  membres  de  la  commanderie  étaient  : 

I  o  La  terre  et  seigneurie  de  Frettencourt,  située  sur  la 
paroisse  de  Criquiers,  à  environ  lieue  et  demie  du  chef- 
lieu  dont  le  commandeur  était  seigneur  temporel  et  spiri- 
tuel, comme  on  le  voit  dans  le  procès-verbal  que  je  citais 
tout-à-rheure  t  il  y  a,  dit-il,  ferme  au  villaige  de  Fretten- 
court ;  ledit  villaige  de  xv  à  xvi  feus,  hommes  de  la  reli- 
gion a  toute  juridicion  au  ressort  de  Villedieu,  audict  lieu 
réglise  est  fondée  de  Saint- Pierre  qui  est  parochiale,  dont 
est  curé  à  présent  frère  Loiseau,  à  charge  des  paroissiens 
et  du  commandeur  comme  celle  de  Villedieu,  au  dict  lieu 
a  des  terres  labourables  lx  acres  bailles  à  ferme. 

f  Plus  y  a  le  villaige  du  Mesnil-David  (paroisse  d'Illois), 
où  a  X  habitans,  hommes  de  la  commanderie,  où  a  le  tiers 
des  dismes.  > 

La  maison  de  Frettencourt  était  située  sur  le  chemin  du 
Chevalier,  allant  de  Frettencourt  à  Gaillefontaine,  et  avaif 
des  cens  et  parties  de  dîmes  à  Gaillefontaine,  Nullemont, 
Ronchoy  et  Ormesnil. 

2°  Fourcigny,  dont  le  commandeur  était  seigneur,   pa- 


ii3 

tron  et  collateur  de  la  cure  et  jouissait  d'une  partie  des 
dîmes. 

On  lit  dans  le  procès-verbal  déjà  cité  : 

c  Forcenyes,  membre  de  la  commanderie,  auquel  a 
esglize  parochiale  de  la  religion,  fondée  de  TOspital  Saint- 
Jehan,  auprès  d'icelle  est  la  maison  manable  pour  le  fer- 
mier et  granges  et  estables  et  y  a  viron  cent  acres  de  terre 
labourables  baillez  à  ferme  audict  villaige  de  Forcenyes  a 
XXX  ou  XXXV  habitans,  hommes  de  la  religion,  a  toute  juri- 
dicion  et  justice  levée  et  du  dict  villaige  dépendent  aultres 
petis  villaiges  sur  lesquels  le  commandeur  prent  de  menuz 
cens.  » 

Ces  petits  villages  étaient  Escles  et  Courcelles,  mainte- 
nant dans  rOise,  Morvillers- Saint-Saturnin,  Charny, 
Digeon,  Gauville  et  Nesle- L'hôpital,  dans  la  Somme;  Fla- 
manville,  Tocqueville,  Touffreville  Hodenc-au-Bpsc  et 
la  Boissière,  dans  la  Seine-Inférieure. 

Le  commandeur  avait  en  outre  le  tiers  des  dîmes  à 
Escles,  â  Hodenc-au-Bosc  et  à  la  Boissière,  et  nommait  à 
ces  trois  cures. 

Les  commandeurs  de  Villedieu,  lorsqu'ils  allaient  visi- 
ter les  biens  de  la  commanderie  situés  dans  le  pays  de  Caux, 
s'arrêtaient  à  Âumale,  dans  un  hôtel  à  Tangle  des  rues 
Colleau  et  la  Poterie,  qui  leur  appartenait,  mais  en  1 589, 
il  était  en  si  mauvais  état  que  le  commandeur  d'alors,  le 
chevalier  Jehan  de  Meaux  de  Marly,  l'amodia;  depuis  il  fut 
converti  en  grange,  et  lors  de  la  visite  de  1727  il  était  loué 
26  livres  par  an. 

Ces  biens  avaient  été  donnés  à  Tordre,  au  mois  de  dé- 
cembre 1209,  par  Pierre  de  Cantelou,  chevalier,  qui  lui 
avait  donné  tout  ce  qu'il  possédait  en  justice,  rentes  et 
domaines  à  Fontaine-le-Dun,  c  apud  fontes  de  Dum.  » 
(Arch.  nat.,  s.  52o6,  sap.  n<*  3.) 

La  seigneurie  de  Fontaine-le-Dun  consistait  principa- 
lement en  cens  et  en  rentes  foncières  à  Neuville-lès- 
Dieppe,  Luné'ray,  La  Houssaye-Bérenger,  Saint-Denys, 

8 


IÎ4 

Saint- Vigor,  la  Gaillarde,  Drosay,  Lamerville,  Veulles, 
Grainville-la-Teinturière,  Blanc-Mesnil,  Rozay,  Buchy, 
Les  Authieux  et  Beaunay. 

Le  chef-lieu  de  la  seigneurie  était  une  tour  de  pierre, 
dite  la  tour  du  Temple^  sise  au  Pollet,  faubourg  de  Dieppe, 
bâtie  sur  une  demie-vergée  de  terre  au  bord  du  chemin 
descendant  de  Neuville  à  la  rivière  d'Arqués,  où  le  com- 
mandeur de  Villedieu  faisait  tenir  les  plaids. 

Deux  fiefs  en  relevaient,  le  fief  de  Vatrival,  paroisse  de 
Sainte-Marguerite,  et  le  fief  noble  de  Saint-Etienne-du- 
Haut-Prieur,  paroisse  d'Arqués,  qui  appartenait,  en  i65o, 
à  Pierre  de  Brinon,  seigneur  de  Meulers. 

Lorsque  le  concile  de  Vienne,  en  1 3 1 1 ,  eut  accordé  les 
biens  de  Tordre  du  Temple  aux  chevaliers  de  Thôpital  de 
Saint-Jean  de  Jérusalem,  ces  biens,  que  le  roi  de  France 
avait  mis  squs  le  séquestre,  leur  furent  dévolus,  mais  ils 
n'en  entrèrent  en  possession  qu'après  bien  des  négociations. 
Parmi  eux  était  la  petite  commanderie  de  Repentigny,  à 
une  lieue  de  Gournay,  sur  la  paroisse  de  Mont-Rôti,  dont 
le  revenu  était  si  peu  considérable,  qu'elle  fut,  une  cin- 
quantaine d'années  après  l'époque  de  sa  dévolution  à 
l'ordre,  réunie  à  la  commanderie  de  Villedieu. 

Elle  se  composait  d'une  habitation  seigneuriale  avec  cha- 
pelle, et  d'une  ferme  de  180  acres  de  terre,  plus  de  quel- 
ques rentes  sur  des  maisons  de  Gournay  ;  un  seul  fief  en 
relevait  :  le  fief  de  la  Perruque,  autrement  dit  du  petit 
Temple,  scis  paroisse  de  la  Haye  de  Neuf-Marché,  qui 
appartenait,  en  i65o,  à  Damien  Le  Vaillant,  seigneur  de 
Rouge-Fossé,  et  avait  été  avant  à  Jean  de  Maries,  che- 
valier, sieur  d'Omécourt,  et  était  chargé  d'une  rente  de 
sept  livres  au  profit  de  la  commanderie. 

Au  xvi«  siècle,  la  maison  du  Temple  de  Campeaux,  près 
Formerie,  fut  détachée  de  la  commanderie  d'Ivry-le- 
Temple  et  réunie  à  celle  de  Villedieu,  98  mines  de  terre 
en  dépendaient. 

Le  commandeur  avait  le  patronage  et  la  collation  de  la 


ii5 

cure  avec  la  dîme  de  la  paroisse,  haute,  moyenne  et  basse 
justice,  mais  il  fut  évincé  de  la  seigneurie  par  arrêt  du 
Parlement  de  Paris,  du  27  mars  1748. 

Cette  maison  était  un  don  de  Constance,  sœur  du  Roi 
Louis  VII,  qui  par  ses  lettres,  datées  de  Tan  11 72  (Arch. 
nat.,  s.  5,1 55,  sup.  n»  5),  en  avait  £ait  donation  aux  cheva- 
liers du  Temple  pour  le  salut  de  son  âme,  de  celles  de  ses 
père  et  mère  et  du  feu  roi  son  frère. 

Le  revenu  de  la  commanderiede  Villedieu-la-Montagne 
était,  en  1495,  de 498  livres  16  sols;  en  1 583, de  1,9001.; 
en  1757  de  9,221  livres  et  en  1783  de  i5,io5  livres. 

Voici  maintenant  la  liste,  que  je  crois  à  peu  près  com- 
plète, des  titulaires  de  la  commanderie,  depuis  la  lin  du 
XI v«  siècle  ;  plusieurs  ont  porté  des  noms  illustres,  mais 
tous  étaient  de  bonne  noblesse,  puisque,  pour  entrer  dans 
Tordre  des  hospitaliers  de  Saint-Jean  de  Jérusalem^  il  fal- 
lait faire  des  preuves  remontant  au  moins  à  deux  cents 
ans,  sans  annoblissement  avant  la  naissance  du  postulant. 

Pour  être  nommé  commandeur,  le  chevalier  devait 
avoir,  résidé  au  moins  cinq  ans  à  Rhodes  ou  à  Malte  et 
avoir  fait  trois  caravanes,  c'est-à-dire  trois  campagnes  sur 
les  galères  et  vaisseaux  de  la  religion,  et  le  grand  maître 
de  l'ordre  ne  disposait  de  cette  grâce  qu'en  faveur  des 
frères  à  qui  leurs  blessures,  leur  âge  ou  leurs  infirmités 
ne  permettaient  plus  de  se  livrer  aux  exercices  de  la  guerre; 
c'était  une  sorte  de  retraite  peu  lucrative  du  reste,  chaque 
commanderie  étant  taxée,  envers  le  trésor  de  Tordre,  sui- 
vant son  importance,  d'une  contribution  annuelle  appe- 
lée Responcion,  s'élevant  au  cinquième,  au  quart  ou  au 
tiers  de  ses  revenus,  et  le  commandeur  ayant  à  sa  charge 
toutes  les  réparations  des  hôtels,  chapelles  et  bâtiments 
ruraux. 

Liste  des  commandeurs  de  Villedieu-la- Montagne  : 

i356.  Frère  Mathieu  de  TAbbaye. 
1 364.  F.  Michel  de  Tournay. 
1374.  F.Guillaume  FoUebarbe. 


ii6 

1406.  F.  Noël  Lentequin. 

141 5.  F.  Guillaume  Lecocq. 

I4a3.  F.  Simon  de  Thiennes. 

1470.  F.  Jehan  de  Fieffés,  allias  de  Fives. 

1493.  F.  Nicole  de  Montmirel. 

1 5oo.  F.  Jehan  de  Courcery, 

ibij.  F.  Bertrand   de  Rouvroy,  de  la  famille  des  ducs  de 
Saint-Simon. 

i528.  F.  Jacques  de  Bourbon,  depuis  grand  prieur  de  France. 

i533.  F.  Jacquet  de  Vignacourt,  d'une  maison  qui  a  fourni 
deux  grands  maîtres  à  l'ordre. 

1537.  F.  Bertrand  Le  Grand. 

1573.  F.  Berton  des  Pretz. 

i58i.  F.  Jehan  de  Meaux  de  Marly,  dont  la  famille  a  fourni  un 
grand  prieur  de  France. 

1604.  F.  Antoine  de  Mornay  de  Villarceau. 

161 3.  F.  Georges  de  Sailly. 

i636.  F.  Jean  de  Monceaux -la-Houssaye. 

1641.  F.  Adrien  de  Sarcus,  dont  un  grand  oncle  avait  été  grand 
prieur  de  France. 

1 644.  F.  Philippe  de  Meaux-Rocourt-Survillierv,  depuis  grand 
trésorier  de  l'ordre. 

i65g.  F.  Jacques  de  Carrel-Mercey. 

1 676.  F.  Etienne  Texier  de  Hautefeuille,  lieutenant-général  des 
armées  du  Roi,  depuis  bailly,  Grand-Croix  et  am- 
btssadeur  de  l'ordre  près  la  Cour  de  France. 

1682.  F.  François  de  Villiersde  la  Noue. 

i685.  F.  Louis  Feydeau  de  Vaugien,  depuis  bailly  de  Morée. 

1 69 1 .  F.  Alexandre-César  d'O. 

1700.  F.  Guillaume  Ribier. 

1705.  F.  Eustache  de  Bernard  d'Averne  de  la  Châtellenie,  de- 
venu grand  prieur  de  Champagne. 

1729.  F.  Antoine  Costart  delà  Motte-Hotot. 

1735.  F.  Constantin-Louis  d'Estourmel,  chef  d'escadre  des  ar- 
mées navales  du  Roi,  depuis  grand  hospitalier  à 
Malte. 

1742.  F.  Pierre-François  de  Palastron. 

1756.  F.  Louis 'François  de  Paule  Lefebvre  d'Ormesson,  bri- 
gadier des  armées  du  Roi,  depuis  grand  trésorier 
de  l'ordre. 


«'7 

1774-  F"-  Pierre  de  Mauléon  de  SavoUian. 
1783.  F.  Charles-François  de  Galonné  d'Avesne. 

Église  de  Saint-Jean^d'Abtot.  —  M.  Brianchon  a 
adressé  la  note  suivante  sur  la  situation  de  Saint-Jean- 
d'Abtot  : 

L'église  de  Saint- Jean-d*Abbetot,  spécimen  si  curieux 
et  si  rare,  de  Tarchitecture  du  xi^  siècle,  dans  nos  contrées, 
se  trouve  dans  un  état  de  délabrement  navrant.  Pour  por- 
ter remède,  et  un  remède  efficace,  à  cet  état  de  choses,  je 
n'ai  eu  qu'à  m'inspirer  de  la  pensée  même  exprimée  par 
un  antiquaire,  que  nous  vénérons  tous,  dans  son  rapport  à 
M.  le  Préfet  de  la  Seine- Inférieure,  du  i3  février  i836,  lu 
à  la  séance  de  la  Commission  des  antiquités,  le  5  mars 
suivant  :  €  Réparer  et  successivement  entretenir  la  toiture 
de  l'église  de  Saint-Jean-d'Abbetot,  disait  M.  Deville, 
telle  serait  la  seule  dépense  à  feire  pour  lui  assurer  plu- 
sieurs siècles  encore  d'existence.  »  Idée  éminemment  pra- 
tique que  celle  de  M.  Deville,  et  au  bout  de  quarante-six 
ans,  la  première  à  suivre  encore.  Seulement,  elle  n'est  pas 
complète.  Il  faut  y  ajouter  :  remise  en  état  des  verrières, 
avec  leur  protection  assurée  par  des  grillages  en  fil  gal- 
vanisé. 

Pénétré  de  l'importance  de  ce  double  but,  et  pour  ré- 
pondre au  vœu  de  la  Commission,  je  me  suis  rendu,  le 
12  juillet  courant,  à  Saint-Jean-d'Abbetot ,  où  deux 
hommes  spéciaux  ,  aussi  experts  que  consciencieux , 
M.  Laporte,  entrepreneur  de  serrurerie  au  Havre,  et 
M.  Toutain,  entrepreneur  de  peinture  et  de  verrerie  à 
Saint-Romain-de-Colbosc,  ont  procédé  simultanément, 
sous  mes  yeux,  au  relevé  exact  des  travaux  afférents  à 
chacun  d'eux.  Ensuite  j'ai  prié  M.  Héquet,  maire  de  la 
Cerlangue,  de  s'adresser  à  un  ouvrier  pour  le  devis  des  ré- 
parations du  toit. 

C'est  le  résulsat  de  ces  trois  opérations  que  j'ai  l'honneur 
de  transmettre  à  la  Commission. 


ii8 

En  voici  le  résumé  : 

Travaux  de  couverture 265  fr.  y  5 

Travaux  de  vitrerie 352        90 

Travaux  de  grillage 600  > 

1 .218  fr.  65 
Somme  à  laquelle  on  pourrait  ajouter 

pour  frais  imprévus 281        35 

Total 1 .5oo  fr.     » 

On  lit,  dans  le  procès-verbal  de  la  Commission  des 
antiquités,  faisant  suite  au  rapport  de  M.  Deville,  que  la 
Commission,  à  l'unanimité,  insiste,  dès  à  présent,  de  la 
manière  la  plus  formelle  sur  la  nécessité  de  la  conser- 
vation de  Péglise  d'Abbetot,  comme  étant  un  des  types 
devenus  aujourd'ui  si  rares  de  notre  architecture  du 
xie  siècle. 

L'avocat  a  change,  mais  la  cause  est  restée  la  même, 
sinon  plus  intéressante  encore. 

En  raison  des  sacrifices  antérieurs  faits  par  la  commune 
de  la  Cerlangue  pour  le  monument,  annexe  dont  il  s'agit, 
et  vu  l'insuffisance  des  ressources  communales,  peut-être 
la  Commission  départementale  estimera-t-elle  qu'il  y 
aurait  lieu  d'exonérer,  dans  l'espèce  et  par  exception,  la 
commune  de  la  Cerlangue  de  toute  participation  aux  tra- 
vaux projetés  pour  la  conservation  de  l'église  de  Saint- 
Jean-d'Abbetot. 

Après  avoir  pris  connaissance  de  ces  lettres  et  des 
devis  annexés,  la  Commission  est  d'avis  de  solliciter 
de  M.  le  Préfet  une  allocation  de  i,5oo  fr.,  à  prélever 
sur  le  crédit  affecté  aux  monuments  historiques,  et 
applicable  à  l'église  de  Saint-Jean-d'Abtot. 

Notice  sur  Cosme  et  Daniel  Dumoustier.  —  M.  de 
Beaurepaire  lit  une  notice  sur  deux  artistes  rouennais, 
Cosme  et  Daniel  Dumoustier. 


119 

NOTES  SUR  COSME  ET  DANIEL  DU  MOUSTIER 

Au  premier  rang  des  peintres  français  qui  se  sont  fait 
un  nom  sous  le  règne  de  Henri  IV,  on  cite  Cosme  Du 
Moustier  et  son  fils  Daniel,  dit  parfois  Du  Moustier 
crayon^  et  qui  passait,  au  rapport  du  P.  de  Saint- 
Romuald,  pour  le  plus  excellent  crayonneur  de  TEurope. 
Mais  VAbecedario  de  Manette,  édité  par  MM.  de  Chen- 
nevières  et  de  Montaiglon,  et  même  VHistoire  des 
peintres,  publiée  plus  récemment  par  M.  Ch.  Blanc,  ne 
fournissent  que  des  renseignements  fort  insuffisants  sur 
ces  deux  artistes,  dont  le  mérite  ne  saurait  être  contesté  et 
dont  les  productions  sont  encore  très  recherchées.  C'est 
ce  qui  m'engage  à  consigner  dans  nos  procès-verbaux 
certains  documents  qui  les  concernent,,  documents  authen- 
tiques, que  le  hasard  m'a  fait  découvrir  dans  les  registres 
du  tabellionage,  et  qui  ont,  pour  nous,  cet  intérêt  parti- 
culier d'établir  que,  Tun  et  Tautre,  ils  ont  habité  cette  ville, 
soit  qu'ils  y  soient  venus  pour  y  pratiquer  leur  art,  comme 
portraitistes,  soit,  ce  qui  me  paraît  beaucoup  plus  vrai- 
semblable, qu'ils  y  aient  été  attirés  ou  retenus  par  des 
relations  de  famille  ou  des  intérêts  de  propriété,  sur  les- 
quels nous  ne  sommes  pas  présentement  éclairés. 

Il  résulte  de  ces  documents  que  Cosme  Du  Moustier 
avait  épousé  une  nommée  Charlotte  Berrier,  et  que  c'est 
de  son  mariage  avec  elle  qu'était  né  Daniel  ;  —  que  Cosme 
était,  dès  1 598,  varlet  de  chambre  du  Roi,  titre  qui  ne 
l'obligeait  à  rien,  et  où  il  ne  faut  voir  autre  chose  qu'un 
prétexte  à  l'attribution  d'un  traitement  et  d'une  position 
privilégiée  à  la  cour;  —  que  le  même  peintre  dut  à  la  £siveur 
de  Henri  IV  le  don  d'une  pension  sur  l'abbaye  de  Bon- 
port,  dont  était  abbé  commendataire  le  célèbre  Phi- 
lippe Desportes;  enfin  que  cette  pension  donna  lieu  à 
quelques  difficultés  qui  finirent  par  une  transaction  inter- 
venue, le  25  juillet  1598,  entre  le  poète  abbé  et  le  peintre 
pensionnaire.  Cette  pension  n'était  pas  à  dédaigner.  Elle 


I20 

fut  réglée  par  la  transaction  à  400  1.  par  an,  somme  con- 
sidérable pour  le  temps,  et  dont  Timportance  est  une 
marque  non  équivoque  du  crédit  dont  jouissait  Cosme 
Du  Moustier. 

On  sait  que  Philippe  Desportes,  fort  en  faveur  sous 
Henri  III,  pour  des  œuvres  poétiques  dont  l'objet  n'était 
ni  la  i^ligîon  ni  la  piété,  avait  été  nommé  par  lui  à  Tab- 
baye  de  Bonport;  —  qu'à  la  mort  de  ce  prince  il  prit 
parti  pour  la  Ligue  et  pour  les  Guise.  On  sait  aussi  que 
Henri  IV,  avant  sa  conversion,  affecta,  sans  le  moindre 
scrupule,  les  revenus  des  bénéfices  ecclésiastiques  à  la 
rénumération  des  services  qui  lui  avaient  été  rendus. 

Nous  sommes  porté  à  supposer  que  cette  pension,  qui 
fut  matière  à  discussion  entre  Desportes  et  Du  Moustier^ 
avait  été  attribuée  à  ce  dernier  dans  l'intervalle  de  temps 
qui  s'écoula  entre  la  saisie  que  fit  Henri  IV  de  l'abbaye 
de  Bonport,  comme  occupée  par  un  prélat  rebelle  a  son 
autorité,  et  la  restitution  qu'en  obtint  Desportes,  après  la 
pacification  du  royaume.  Il  fallut  bien  accorder  tant  bien 
que  mal  la  donation  et  la  restitution. 

Quoi  qu'il  en  soit  et  pour  ne  point  trop  étendre  ce 
préambule,  voici  l'analyse  des  documents  auxquels  nous 
venons  de  feire  allusion. 

c  2  juillet  1 598.  Mention,  dans  un  contrat  de  Daniel  Du 
Moustier,  fils  de  noble  homme  Cosme  Du  Moustier,  var- 
let  de  chambre  ordinaire  du  Roi  et  de  Charlotte  Berrier. 

c  7  septembre  même  année.  Honorable  homme  Cosme 
Du  Moustier,  peintre  et  varlet  de  chambre  du  Roi,  de- 
meurant en  cette  ville  de  Rouen,  confesse  avoir  reçu 
comptant  de  Philippe  Desportes,  conseiller  et  aumônier  du 
Roi,  abbé  de  Bonport,  200  écus  sol,  restant  de  la  somme 
de  3oo,  que  ledit  Desportes  lui  devait  aux  termes  d'une 
transaction  passée  entre  eux  à  Paris,  devant  les  notaires  du 
Châtelet,  le  25  juillet  iSgS.  Signé  :  Du  Moustier.  > 

«  i3  octobre  1601.  Noble  homme  Cosme  Du  Moustier, 
peintre  et  vârlet  de  chambre  du  Roi,  demeurant  à  Rouen, 


121 

confesse  avoir  reçu  de  Philippe  Desportes,  conseiller  du 
Roi  en  son  conseil  d'Etat  et  privé,  abbé  de  Thiron,  loo  1. 
pour  un  quartier  de  sa  pension,  i 

c  9  mai  1602.  Noble  homme  Cosme  Du  Moustier,  donne 
procuration  à  Jacques  Halle,  maître  en  la  Chambre  des 
Comptes  à  Paris,  pour  le  représenter  au  traité  de  mariage 
qui  devait  être  passé,  à  Paris,  entre  son  fils  Daniel  Du 
Moustier,  qualifié  comme  lui  peintre  et  varlet  de  chambre 
du  Roi,  et  Geneviève  BoUiffre,  fille  de  noble  homme 
Claude  Bolliffre,  maître  des  enfants  de  musique  de  la 
Chambre  du  Roi.  La  procuration  fut  passée  devant  Lam- 
bert etTherouldc,  tabellions  à  Rouen.  Le  traité  de  mariage 
a  été  publié,  par  M.  Boilly,  dans  les  Archives  de  l'art 
français  y  t.  III,  p.  307.  • 

c  Mardi  4  octobre  i6o5.  Noble  homme  Cosme  Du 
Moustier,  peintre  et  varlet  de  chambre  du  Roi,  demeurant 
en  la  paroisse  Saint- Vivien  de  Rouen,  a  confessé  avoir  reçu 
comptant  de  messire  Philippe  Desportes,  par  les  mains  de 
Me  Jeh.  Morin,  son  maistre  d'hostel,  la  somme  de  100  1. 1. 
pour  ung  quartier  escheu  le  dernier  jour  de  septembre 
dernier  passé,  an  présent,  d'arrérages  de  400l.de  pension 
par  an,  que  ledit  Du  Moustier  a  à  prendre  sur  le  revenu 
de  lad.  abbaye  de  Bonport,  pour  les  causes  contenues  en 
la  transaction  de  ce  faîcte  et  portée  entre  luy  et  ledit  sieur 
Desportes,  précédent  ce  jourd*huy.  Signé  Du  Moustier.  » 

Les  registres  du  tabellionage  de  Rouen  mentionnent, 
à  la  date  du  12  octobre  iSgS,  Philippe  Du  Moustier,  mar- 
chand bourgeois  de  Rouen.  Je  ne  saurais  dire  s'il  était  de 
la  Camille  de  nos  peintres,  pas  plus  que  des  Du  Moustier, 
enlumineurs,  domiciliés,  au  xvi^  siècle,  près  de  la  cathé- 
drale, que  je  vois  cités  dans  les  archives  du  chapitre  ;  un 
Pierre  Du  Moustier,  maître  charpentier  à  Rouen,  cité  à  la 
date  du  12  février  161 3  (Tabellionage  de  Rouen),  expert 
choisi  par  la  ville  pour  visiter  le  pont  de  bateaux,  3  juin  1 625 
(Délibérations  de  THôtel-de- Ville  de  Rouen). 

A  propos  de  peintres  valets  de   chambre  du  Roi,  je 


122 

signalerai,  à  cause  de  leur  attache  avec  ce  pays,  Marin  Le 
Bourgeois,  de  Lisieux,  auquel  Henri  IV  fit  don,  le  der- 
nier mai  1601,  des  fruits  et  revenus  des  biens  provenant  de 
la  confiscation  du  nommé  Claude  Pouseau,  condamné  à 
mort  (B.  20,  f»  75)  ;  —  Jean  Bouhon,  que  l'on  voit  domi- 
cilié à  l'archevêché  de  Rouen,  1029  juillet  i633.  —  Jean  de 
Vos;  valet  de  chambre  de  la  sœur  unique  du  Roi,  cité  dans 
un  contrat  du  tabellionage  de  1 598,  pourrait  bien  avoir  été 
peintre  et  se  rattacher  à  la  famille  des  peintres  de  ce  nom. 

M.  Le  Breton  soupçonne  Dumoustierd^étre  Fauteur 
du  dessin  des  carrelages  des  châteaux  d^Évreux,  de 
Madrid  et  de  la  Bastie.  Il  croit  que  c^est  à  lui  que  se 
réfère  Tindication  portée  au  tableau  des  notables  de 
Rouen,  en  1547. 

M.  Tabbé  Tougard  fait  ensuite  les  communications 
suivantes  : 

M.  BARTHÉLÉMY    ET    l'aRT  OGIVAL 

M.  Tabbé  Tougard,  à  l'occasion  du  décès  de  notre 
regretté  confrère,  explique  les  circonstances  qui  détermi- 
nèrent M.  Barthélémy  à  étudier  et  à  remettre  en  honneur 
les  constructions  de  style  ogival. 

Le  projet  primitif  de  reconstruction  de  Péglise  de  Bon- 
secours  ne  comportait  qu*une  sorte  de  temple  grec,  ce  qui 
était  déjà  un  progrès  sur  les  chefs-d'œuvre  de  style  fila- 
ture (le  mot  est  de  l'abbé  Coipel)  que  les  années  précé- 
dentes avaient  élevés  aux  applaudissements  des  contem- 
porains, et  qui  se  nommaient  les  anciennes  églises  de 
Saint-Paul  et  de  Saint-Hilaire  de  Rouen,  de  Forges  et  de 
Sainte-Marie  du  Havre. 

Mais  quelques  séminaristes,  entre  autres  celui  qui  fut 
depuis  l'abbé  Alliaume,  lisaient  au  presbytère  de  Bonse- 
cours  la  Vie  de  sainte  Elisabeth^  par  Montalembert.  Ces 
jeunes  gens  communiquèrent  à  M.  Godefroy  les  idées, 
nouvelles  alors,  de  l'Introduction.  Le  curé  n'y  vit  d'abord 


123 

que  l'enthousiasme  de  novices  littérateurs.  Sur  leur  insis- 
tance, il  lut  lui-même,  réfléchit,  et  fut  entraîné. 

En  conséquence,  ce  fut  le  plan  d'une  église  ogivale  qu'il 
demanda  à  M.  Barthélémy.  Mais  le  maître  de  Tœuvre, 
qui  n'en  était  plus  à  ses  débuts,  déclara  qu'on  le  lançait 
dans  rinconnu  et  qu'il  était  absolument  étranger  aux  pro- 
cédés et  à  la  manière  du  moyen-âge.  Il  demanda  donc  du 
temps,  lut  et  voyagea.  Deux  ans  plus  tard,  il  prit  ses 
crayons  et  vit  à  Bonsecours  au  mois  de  juin  1840,  le  P. 
Arthur  Martin,  l'illustre  auteur  des  Vitraux  de  Bourges, 
et  l'un  des  premiers  tenants  de  la  réhabilitation  du  moyen- 
âge.  C'en  était  fait  :  désormais  les  saines  traditions  sur 
l'architecture  religieuse  étaient  de  nouveau  en  vigueur  dans 
le  département. 

MAISON  DE  CORNEILLE  AU  PETIT-COURONNE.  INSCRIPTION 

Le  même  membre  s'étonne  que  l'inscription  placée 
près  de  la  porte  de  la  maison  de  campagne  du  grand 
Corneille,  au  Petit- Couronne,  en  fixe  l'acquisition  par  le 
département  à  l'année  1874.  Il'croit  utile  de  constater  que 
l'initiative  de  cette  mesure  si  louable,  fut  prise  dès  1868 
par  Ig  baron  E.  Le  Roy,  négociée  par  F.  Deschamps  et 
votée  par  le  Conseil  général,  dans  sa  séance  du  28  août  de 
la  même  année,  sur  le  rapport  conforme  présenté  par 
M.  le  sénateur  Ancel. 

M.  le  Président  remarque  qu'il  eût  été  difficile  d'a- 
dopter la  première  date,  puisque  Tachât  n'a  été  ac- 
compli qu'en  1874. 

TORCY-LE-PETIT 

La  curieuse  arcade  de  crucifix,  signalée  l'an  dernier  à  la 
Commission  par  le  même  membre,  existe  toujours  dans 
ce  village,  mais  y  court  plus  que  jamais  le  danger  d'être 
vendue.  Y  a-t-il  quelque  moyen  administratif  de  s'opposer 
à  cet  acte  de  vandalisme  ?  ou  l'un  de  nos  collègues  pour- 


124 

rait-il  en  procurer  Tacquisition  par  quelque  église  où  on 
la  rétablirait  avec  honneur  ? 

M.  Gaston  Le  Breton  promet  d'intervenir  et  de 
négocier  la  réintégration  de  cette  pièce. 

VAL-DE-LA-HAYE 

Des  plantations  opérées  à  la  fin  de  Thiver  dernier  sur 
remplacement  de  la  chapelle  de  Sainte- Vaubourg  ont 
ramené  sur  le  sol  des  fragments  de  pavés  vernissés  qui 
formaient  le  dallage  de  cet  intéressant  monument.  L'un 
de  ces  carreaux,  de  soixante-trois  millimètres  de  côté, 
représente  une  fleur  de  lis.  L^aspect  général  de  ces  débris 
est  celui  de  certains  carrelages  modernes.  Il  faut  se  féliciter 
de  voir  la  céramique  rentrer  dans  les  bonnes  traditions 
des  âges  précédents,  et  souhaiter  en  même  temps  qu'elle 
en  imite  non-seulement  les  formes,  mais  aussi  le  soin 
consciencieux  apporté  à  la  bonne  exécution  des  produits. 

CLOCHER  DE   COTTÉVRARD 

M.  Tabbé  Levacher,  professeur  au  Petit  -  Séminaire , 
appelle  l'attention  de  la  Commission  sur  l'état  assez  pré- 
caire de  ce  clocher.  Ce  fut  sans  doute  une  heureuse  idée 
que  de  transporter  dans  ce  village  la  flèche  de  ^'église 
Saint-Nicolas  de  Rouen,  qui,  sans  cela,  eût  disparu.  Mais 
ce  riche  présent  ne  laisse  pas  d'être  embarrassant  pour  une 
^brique  et  une  commune  peu  fortunées.  M.  le  curé  se 
préoccupe  avec  raison  de  sa  restauration.  La  Commission 
voudra  Vy  encourager  par  l'intérêt  qu'elle  lui  témoignera. 

Plusieurs  membres  objectent  que  la  question  du  classe- 
ment de  ce  clocher  a  été  antérieurement  débattue  dans  la 
Commission  et  résolue  négativement.  Il  n'y  a  donc  lieu 
qu'à  une  demande  de  secours  adressée  à  la  Préfecture 
selon  les  formes  ordinaires. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

Le  Secrétaire, 
Vicomte  R.  d*EsTAiNT0T. 


125 


SÉANCE  DU   i8  AOUT  1882 

La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence 
de  M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Sont  présents  :  MM.  Adeltne,  Billiard,  Bouctot, 
Le  Filleul  des  Guerrots,  de  Girancourt,  Gouellain, 
Tabbé  Tougard  et  le  vicomte  d^Estaintot^  secrétaire. 

Excusés  :  MM.  P.  Baudry,  Brianchon,  Du  BouUay 
et  Lefort. 

Les  volumes  suivants  sont  déposés  sur  le  bureau  : 

Bulletin  historique  de  la  Société  des  Antiquaires 
de  la  Moriniey  i22«  liv.;  —  Société  des  sciences  de 
Semur,  17*  année,  1880;  —  Société  industrielle 
d'Elbeuf,  no  i,  1882;  —  Société  archéologique  de 
Nantes,  t.  XX,  1881. 

Le  programme  du  Congrès  des  Sociétés  savantes  en 
i883,  envoyé  par  M.  le  Ministre  de  Tlnstruction 
publique,  est  lu  par  M.  le  Vice-Président,  et  mis  à  la 
disposition  des  Membres  qui  voudraient  prendre  part 
aux  séances. 

M.  le  Vice-Président  communique  un  dossier  re- 
latif aux  vitraux  de  Vatteville.  M.  le  Préfet  saisit  la 
Commission  de  la  question  de  savoir  sMl  y  a  lieu  de 
remplacer  le  vitrail  principal,  absolument  détruit. 

La  dépense  est  évaluée  à  i,5oo  fr.  La  fabrique  et  la 
commune  votent  chacune  5oo  fr.,  et  sollicitent  un 
secours  d^égale  importance. 

Du  moment  qu^il  s^agit  de  remplacer  un  ancien 
vitrail,  le  sentiment  de  la  Commission  se  prononce 
contre  le  projet  ;  elle  ne  peut  proposer  d^allouer  de 
fonds  pour  une  œuvre  moderne,  et  préférerait  en 
accorder  pour  la  restauration  du  vitrail  ancien. 


126 

La  Commission  délègue  M.  Brianchon  pour  aller 
voir  sur  place  Tétat  de  Tancien  vitrail,  et  vérifier  s'il 
peut  être  ou  non  restauré  et  conservé. 

M.  de  Beaurepaire  communique  un  extrait  du  re- 
gistre des  délibérations  du  Conseil  de  fabrique  de 
Téglise  Saint-Maclou,  de  Rouen,  soumis  par  M.  le 
Préfet  à  Texamen  de  la  Commission. 

La  fabrique  expose  que  les  perrons  et  deux  piliers 
de  la  lanterne  sont  dans  un  état  de  dégradation  com- 
plète. Le  devis,  dressé  par  M.  Barthélémy  pour  ces 
travaux,  s'élève  à  10,648  fr.  60.  La  fabrique  a  voté 
i,5oo  fr.  et  demande  le  concours  du  dépanement. 

Le  travail  de  réfection  des  perrons  ne  semble  pas 
absolument  utile,  et,  de  plus,  est  sans  intérêt  historique 
ou  archéologique. 

Celui  des  piliers  paraît  rentrer  davantage  dans  le 
cadre  des  dépenses  que  la  Commission  peut  autoriser. 
Ce  sentiment,  exprimé  par  M.  le  vicomte  d^Estaintot, 
a  prévalu,  et  la  Commission,  consultée,  décide  à 
l'unanimité  de  contribuer  pour  2,5oo  fr.  dans  la 
réparation  des  piliers  et  contrefaits  de  la  lanterne. 

M.  le  vicomte  d'Estaintot  prend  place  à  la  séance, 
et  donne  lecture  du  procès -verbal  de  la  dernière 
séance,  qui  est  adopté  sans  observation. 

M.  le  Secrétaire  propose  de  rétablir  dans  Téglise  de 
Néville  une  inscription  relative  à  J.  de  Bréauté;  il 
est  prié  de  fournir  le  devis  de  la  dépense  à  laquelle  ce 
travail  donnerait  lieu. 

M.  Pelay  dépose  des  plans  de  Rouen,  relevés  par 
M.  Roëssler,  à  Londres,  et  faits  pour  le  siège  de  cette 
ville,  en  i562;  d'autres  représentent  le  fort  Sainte- 
Catherine,  en  iSqi;  une  Estacade  sur  la  Seine 
en  iSgi,  etc. 


127 

M.  Pelay  communique  un  dessin  qu'il  a  fisiit  exé- 
cuter, représentant  des  sépultures  tout  récemment 
découvertes  à  Tangle  de  la  rue  Tabouret. 

M.  de  Beaurepaire  lit  la  notice  suivante,  relative  à 
Téglise  de  Notre- Dame-de-la-Ronde. 

L'église  de  Notre-Dame-de-la-Ronde,  Tune  des  plus 
notables  de  la  ville  de  Rouen  avant  1789,  a  disparu  com- 
plètement. Il  n'en  reste  plus  qu'un  vague  souvenir.  Elle 
longeait  la  rue  de  la  Grosse*  Horloge,  dite  autrefois  la  rue 
de  la  Corvoiserie.  Supprimée  à  Tépoque  de  la  Révolution, 
elle  fut  vendue,  avec  toutes  ses  dépendances,  comme  do- 
maine national,  à  Valentin  Chéron,  le  3  juin  1796,  pour 
le  prix  de  io8,320  1.  Quelques  années  après,  elle  était 
démolie  pour  donner  passage  à  une  nouvelle  rue,  la  rue 
Thouret,  dont  l'ouverture  avait  été  projetée  antérieure- 
ment à  la  vente. 

On  s'est  perdu  en  conjectures  sur  Torigine  de  cette 
église.  Les  uns  ont  voulu  y  voir  une  ancienne  synagogue, 
à  cause  de  son  voisinage  de  la  rue  aux  Juifs  ;  d'autres, 
une  chapelle  de  l'Hôtel-de-Ville  primitif.  Ces  conjectures 
ne  nous  paraissent  pas  avoir  le  moindre  fondement. 
Lorsque  les  juifs  perdirent  la  possession  de  leur  clos, 
sorte  de  quartier  qui  leur  avait  été  réservé,  il  y  avait 
longtemps  déjà  que  l'église  de  N ot re- Dam e-de- la- Ronde 
était  connue  (i).  Quant  à  la  commune  de  Rouen,  qui  ne 
sait  maintenant  qu'elle  est  d'institution  relativement  ré- 
cente ?  Elle  se  montra,  d'ailleurs,  à  ses  débuts,  trop  hos- 
tile au  clergé,  pour  qu'on  puisse  supposer  qu'elle  ait  affecté 

(i)  On  lit  dans  une  ancienne  Chronique «  Mil  mcxviii, 

les  Juys  qui  tenoient  à  Rouen  beaucoup  d'éritages  es  provendes 
(lisons  paroisses)  de  Saint-Erblant,  Notre-Dame  la  Roonde  et  à 
Saint-Lô,  et  avoient  une  rue  appellée  la  rue  aux  Juys  (et  encore 
est  appellée,  et  estoit  leur  moustier  en  une  place  de  présent  ap- 
pellée le  Qos-as-Juys)  furent  boutez  hors  de  lad.  ville,  et  leur 
héritages  confissiez  au  Roy.  » 


128 

ses  ressources  à  la  construction  d^une  chapelle  assez  im- 
portante pour  devenir,  presque  aussitôt  après  son  érec- 
tion^ église  de  paroisse  (i). 

Prenons  donc  notre  parti  des  t(^nèbres  qui  nous  ca- 
chent les  commencements  de  cette  église.  Après  tout, 
combien  en  compterait-on  sur  lesquelles  on  en  sache  plus 
long  ?  Si  quelque  présomption  est  permise,  c'est  que 
toutes  remontaient  à  une  très  haute  antiquité.  Les  men- 
tions qu'on  en  rencontre  sont  plus  ou  moins  anciennes. 
Il  n'en  est  aucune  qui  puisse  équivaloir  à  un  acte  de 
fondation. 

Au  point  de  vue  du  culte,  Notre-Dame-de-la- Ronde 
présentait  cette  singularité  d'être  et  d'avoir  toujours  été, 
autant,  du  moins,  qu'on  peut  en  juger  par  les  documents 
conservés,  à  \a  fois  collégiale  et  paroissiale. 

On  s'accordait  à  citer,  comme  le  plus  ancien  document 
où  il  en  fût  question,  une  charte  de  réformation  de  Tar- 
chevêque  Eudes  Rigaud,  des  derniers  jours  de  mars  i232. 

Nous  sommes  heureux  de  pouvoir  reculer  de  quelques 
années  la  constatation  authentique  de  l'existence  de  cette 
église. 

11  est  fait  mention,  dans  une  charte  du  prieuré  de 
Bonne-Nouvelle,  1216,  d'un  Roger,  chapelain  de  La 
Ronde,  Rogero^  capelîano  de  Rotunda  (2)  ;  —  dans  une 
charte  de  l'abbaye  du  Valasse,  1226,  d'un  Roger  (le  même 
vraisemblablement  que  le  précédent),  prêtre  de  Sainte- 
Marie-la- Ronde,  Rogero^  presbytero  de  Sancta-Maria- 
Rotunda  ;  —  dans  une  charte  du  Chapitre  de  la  cathé- 
drale, 1227,  de  l'église  Sainte-Marie-la-Ronde,  in  Corve- 

(i)  Cependant  il  est  certain  qu'il  y  eut  plus  tard  une  chapelle 
à  THôtel-de- Ville.  (V.  la  Notice  de  M.  E.  De  la  Quérière  sur 
Tancien  Hôtel-de- Ville  de  Rouen.) 

(2)  On  disait  La  Ronde  aussi  souvent  que  Notre-Dame-<le- 
I  i-Ronde.  Item  xx  solidos  super  domum  Salehadin  ante  Rotufi" 
dam,  (Obituaire  de  la  cathédrale  de  Rouen,  p.  189,  aux  Arch. 
de  la  S.  Inf.) 


t29 

séria,  ab  oppositis  ecclesie  Sancte  Marie  Roîunde;  —  dans 
une  autre  du  même  fonds,  1249,  du  cimetière  de  Notre- 
Dame -la-Ronde. 

Jusque  vers  le  milieu  du  xiiia  siècle,  il  y  avait  eu  dans 
cette  église  trois  chanoines  en  possession  de  trois  grosses 
prébendes,  dont  la  collation,  de  temps  immémorial,  ap- 
partenait au  roi,  sans  doute,  en  sa  qualité  de  successeur 
des  ducs  de  Normandie.  Il  paraît  que  ces  chanoines  n'é- 
taient pas  astreints  par  leur  institution  à  la  résidence. 
Aussi  s'en  dispensaient- ils  sans  scrupule  ;  ils  se  conten- 
taient de  toucher  leurs  revenus. 

Aux  termes  de  la  charte  de  réformation  d'Eudes  Ri- 
gaud^  il  fut  décidé  qu'il  y  aurait,  à  l'avenir,  en  l'église  de 
Notre- Dame-de-la-Ronde,  quatre  chanoines,  dont  Tun 
aurait  le  titre  de  doyen,  trois  vicaires  nommés,  chacun 
par  un  des  chanoines,  et  un  curé  pour  le  ministère  pa- 
roissial, indépendant  du  doyen,  tous  obligés  à  une  rési- 
dence dont  les  conditions  et  les  rétributions  furent  alors 
strictement  déterminées.  La  collation  du  curé  et  des 
chanoines  fut  réservée  au  roi.  Cette  ordonnance,  renou- 
velée et  complétée  par  une  autre  du  même  archevêque 
(mars  i255),  fut  confirmée  par  des  lettres  de  saint  Louis, 
datées  de  Falaise,  26  avril  i256  (i). 

On  peut  remarquer  combien  on  poussait  loin,  en  ce 
temps-là,  le  respect  des  droits  acquis.  Bien  qu'arrêtée  en 
principe,  la  réformation  ne  fut  appliquée  que  progressi- 
vement, à  mesure  que  les  prébendes  vinrent  à  vaquer  (2). 
Il  est  encore  à  observer  que  ce  fut  saint  Louis  qui  sollicita 
cette  mesure,  comme  ayant  droit  de  présenter  aux  cha- 
noinies,  et  que  la  seconde  ordonnance  archiépiscopale  fut 
rendue  pendant  le  séjour  de  ce  prince  à  Rouen  (3). 

(i)  M.  Léopold  Delisle,  Cartulaire  normand,  io3. 

(2)  Regestrum  Visitationum,  de  l'archevêque  Eudes  Rigaud, 
795. 

(3)  M.  Léopold  Delisle,  Cartulaire  normand,  99.  Etant  à 
Rouen  au  mois  de  mars  i255,  saint  Louis  confirma  une  charte  de 

9 


i3o 

Cest  ce  qui  donna  lieu,  après  la  canonisation  de  saint 
Louis,  de  le  considérer  comme  le  fondateur  de  la  collé- 
giale de  Notre- Dame-de-ia-Ronde,  où  sa  fête  fut  toujours 
célébrée  d'une  manière  très  solennelle  (i). 

On  a  rapporte  la  traduction  de  cette  ordonnance  dans 
V Histoire  de  RoueUy  édition  de  lySi.  • 

Une  quatrième  vicairie  fut  fondée  par  un  nommé  Jean 
Le  Villain  en  i365  (2).  Celle-là  fut  mise  à  la  présentation 
du  roi. 

Enfin  la  cure  fut  unie  au  doyenné  en  faveur  de  Guil- 
laume Mesard,  licencié  en  décret,  secrétaire,  puis  vicaire- 
général  du  cardinal  d'Estouteville,  archevêque  de  Rouen, 
par  bulle  du  pape  Calixte  III,  du  6  des  nones  d'oc- 
tobre 1455,  et  par  lettres  de  l'archevêque,  du  21  octobre 
de  Tannée  suivante  (3). 

Mesard  obtint  du  chapitre  de  la  cathédrale,  le  19  février 
Î459,  la  permission  de  porter,  en  Téglise  de  Notre- Dame- 
de-la-Ronde  et  ailleurs,  hormis  dans  l'église  métropoli- 
taine, l'a u musse  grise  et  le  camail.  Les  chanoines  eurent 
égard,  en  cette  occasion,  aux  recommandations  du  car- 
dinal d'Estouteville,  auquel  ils  avaient  les  plus  grandes 
obligations  (4). 

la  reine  Blanche  en  fiveur  des  Frères  Mineurs  de  Rouen,  1248,  et 
la  vente  faite  par  Guillaume  Bellet,  chevalier,  à  Tabbaye  du 
Valasse,  d'un  emplacement  situé  rue  Froiderue,  à  Fécamp,  où 
les  religieux  de  ce  monastère  s'étaient  fait  construire  un  hôtel. 
(Arch.  de  li  S.-Inf.,  F.  des  Frères  Mineurs,  et  F.  de  Tabbaye  de 
Fécamp.) 

(1)  Louis  XI,  dans  des  lettres  patentes,  dont  nous  ferons  plus 
loin  connaître  Tobjet,  déclarait  que  cette  église  «  fut  ancien- 
nement fondée  par  le  très  glorieux  saint  Monsieur  saint  Louis. 

(2)  Cette  date  est  celle  des  lettres  d'amortissement  qui  furent 
obtenues  en  conséquence  de  cette  fondation.  (Arch.  de  la  S.- 
Inf.,  F.  de  Notre-Dame-de-la-Ronde.) 

(3)  Ibidem, 

(4)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  G.  21 35. 


î3i 

Grâce  au  même  appui ,  Mesard  fit  reconnaître  par 
Louis  XI  (Plessis-du-Parc,  novembre  148a),  non  seule- 
ment pour  lui,  mais  pour  les  chanoines,  ses  confrères,  le 
droit  de  porter  à  Notre- Dame-de-la-Ronde,  et  dans  toutes 
les  autres  églises  de  la  ville,  tant  pendant  la  célébration 
de  Toffice  divin,  qu'siux  processions,  Taumusse  de  gris  four- 
rée de  menu  vair  (i).  Il  faut  croire  que  c'était  là  un  privi- 
lège bien  contraire  aux  usages  reçus  et  dont  la  concession 
ne  paraissait  pas  rentrer  dans  les  attributions  de  l'autorité 
royale,  puisque  les  chanoines  de  la  cathédrale  en  contes- 
tèrent la  légitimité  et  soutinrent,  à  ce  sujet,  un  long 
procès  devant  le  bailli,  et,  devant  le  sénéchal  de  la 
province,  en  1483  et  i486  (2).  Si  plus  tard  ils  trouvèrent 
bon  que  le  successeur  de  Mesard  portât  ces  ornements,  il 
semble,  d'après  leurs  délibérations,  que  ce  ne  fut  qu'une 
gracieuse  tolérance  de  leur  part. 

La  lettre  suivante,  adressée  par  le  cardinal  d'Amboise 
aux  chanoines  de  la  cathédrale  vient  à  Tappui  de  ce  senti- 
ment. Elle  vaut  la  peine  d'être  citée. 

«  Messieurs,  je  me  recommande  à  vous  tant  que  je 
puis.  J'ay  donné  charge,  quand  je  partis,  à  mon  procu- 
reur, de  parler  à  vous  pour  appointer  le  différent  qui  est 
entre  le  chapitre  et  le  doïen  de  La  Ronde,  h  cause  des 
aulmusses,  et  me  semble  qu'il  n'y  aura  que  bien  à  Ten 
laisser  user  ainsi  que  faisoit  son  prédécesseur,  messire 
Guillaume  Mesard,  à  qui  Dieu  pardoint  !  vous  priant  que 
ainsi  le  vueillez  faire,  et  à  Dieu,  qui  vous  ayt  en  sa  saincte 
guarde.  Elscript  à  Gaillon,  le  vii«  jour  d'avril  (1499),  votre 
frère  G.,  cardinal  d'Amboyse.  »  Pour  suscription  :  t  A 
mes  très  chers  frères  les  doïen,  chanoynes  et  chapitre  de 
Rouen,  i 

Plus  d'un  siècle  après,  en  i636,  les  débats  recommen- 
çaient entre  les  chanoines  de  la  cathédrale  et  ceux  de  Notre- 

(i)  Arch.  delà  S.-Inf.,  F.  de  Notre-Dame -de-la-Ronde. 
(2)  Ibidem,  G.  366 1. 


l32 

Dame-de-la- Ronde,  parce  que  ces  derniers  s'étaient  pré- 
sentés revêtus  d'aumusses  devant  la  porte  de  l'hôtel  du 
président  de  Fumechon,  aux  obsèques  de  ce  magistrat  (i). 

Plus  tard,  il  y  a  lieu  de  supposer  que  la  question  fut 
jugée,  sur  un  nouvel  incident,  en  faveur  des  chanoines  de 
Notre- Dame-de-la-Ronde,  ou  bien  que,  sans  décision 
judiciaire,  les  chanoines  de  la  cathédrale  fermèrent  les 
yeux  sur  une  usurpation  à  laquelle  ils  n'attachaient  plus 
la  même  importance,  puisqu'ils  laissèrent,  sans  protesta- 
tion, leurs  rivaux  faire  insérer  dans  VHistoire  de  Rouen , 
de  1731,  les  lettres  de  Louis  XI,  auxquelles,  pendant  si 
longtemps,  il  leur  en  avait  coûté  de  se  soumettre. 

Malgré  son  titre,  qui  indiquait  une  sorte  de  supériorité, 
le  doyen  était  astreint  à  la  même  règle  que  les  chanoines 
de  la  collégiale.  On  en  a  une  preuve  très  positive  dans  la 
permission  qu'ils  accordèrent,  en  chapitre,  à  Mesard,  de 
ne  point  venir  à  matines,  d'entrer  au  chœur  sans  chape, 
et  d'en  sortir  quand  il  lui  plairait,  en  considération  des 
services  signalés  qu'il  avait  rendus  à  Téglise,  et  aussi  de 
sa  vieillesse  et  de  ses  infirmités,  16  mars  1497  (2). 

De  nouveaux  règlements  furent  donnés  au  chapitre  de 
Notre- Dame-de-la- Ronde  en  1648  et  en  1660.  Comme  ils 
sont  pour  nous  sans  intérêt,  nous  éviterons  d'en  parler, 
ainsi  que  des  débats  qui  s'élevèrent  entre  les  chanoines  et 
les  vicaires  perpétuels,  au  sujet  de  la  résidence,  des  offices, 
de  la  jouissance  des  maisons  appartenant  à  la  collégiale, 
ainsi  encore  que  des  contestations  qui  survinrent  entre  le 
chapitre  et  les  paroissiens  au  sujet  du  cimetière,  du  droit 

(i)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  G.  366 1. 

(2)  «  Etsi  decanus  ecclesie  coHegiate  Béate  Marie  Rotonde 
RothomagensiSf  pro  tempore  existens,  teneatur  in  ea  continuant 
facere  residentiam,  nec,  nisi  petita  licencia,  more  canonicOy  de~ 
beat  chorum  exire,  »  Ce  ne  fut  qu'au  xyiii*  siècle,  en  vertu 
d'une  ordonnance  de  Mgr  de  Saulx-Tavannes  que  le  doyen  fut 
dispensé  d'assister  aux  offices  du  chœur,  en  considération  des 
fonctions  curiales  dont  il  était  chargé. 


i33 

de  sépulture,  de  la  fourniture  des  ornements  et  des  livres 
liturgiques,  ou  des  réparations  de  l'église  (i). 

11  suffira  de  constater  que  le  chapitre  et  la  paroisse  for- 
mèrent toujours  des  communautés  distinctes,  ayant  leurs 
propriétés  particulières,  les  unes  administrées  par  les  cha- 
noines, les  autres  par  la  fabrique,  ayant  aussi  leurs  sceaux 
particuliers.  Les  armes  du  chapitre  étaient  une  sainte 
Vierge  debout,  tenant  Teniant  Jésus,  le  tout  d'or,  sur  un 
fond  d'azur  semé  de  fleurs  de  lys  d'or. 

Du  temps  de  Le  Brun  des  Marettes,  c  dans  les  grandes 
fêtes  et  dans  de  certains  dimanches  privilégiés,  il  n*y  avait 
qu'une  grand'messe  célébrée  par  le  doyen,  tant  pour  les 
paroissiens  que  pour  MM.  du  chapitre  qui  y  assistaient.  » 

La  séparation  était  complète  au  xviii«  siècle.  Des  règle- 
ments de  Mgr  de  Saulx-Tavannes,  du  7  août  1741,  por- 
taient que  tous  les  jours  de  l'année,  même  les  fêtes  so- 
lennelles, MM.  du  chapitre  commenceraient  leur  grand' 
messe  capitulaire  à  huit  heures  et  demie  et  les  vêpres  à 
une  heure  et  demie,  en  sorte  que  le  curé  pût  commencer 
l'office  de  la  paroisse  à  l'heure  réglée  pour  les  paroisses  du 
diocèse  et  de  la  ville,  i 

Pendant  longtemps  les  chanoines  conservèrent  l'usage 
de  tenir  leur  chapitre  tous  les  lundis  derrière  le  grand 
autel  du  chœur.  Ce  ne  fut  que  dans  la  seconde  moitié  du 
xv^  siècle  que  Mesard  fit  construire,  à  ses  dépens,  un  re- 
vestiaire  pour  servir  tant  aux  réunions  des  chanoines 
qu'à  celles  des  trésoriers  de  la  fabrique. 

(i)  Sentence  de  Tofficialité  (jeudi  après  l'Exaltation  de  la 
Sainte-Croix,  1438),  sur  un  procès  entre  le  chapitre  de  Notre- 
Dame-de-la-Ronde  et  les  trésoriers.  Ceux-ci  avaient  fait  enlever 
du  chœur  la  tombe  de  Gautier  le  Sage,  ancien  clerc  de  la  com- 
mune de  Rouen,  du  doyen  Gautier  le  Sage  (vraisemblable- 
ment fils  du  précédent)^  et  d'Emmeline,  sœur  de  ce  doyen.  Les 
doyens  étaient  enterrés  dans  le  chœur  sous  la  tombe  de  Mesard, 
et  les  chanoines,  dans  la  même  enceinte,  sous  la  tombe  du  cha- 
noine Bacqueler. 


Lorsqu'en  1477,  ces  derniers  curent  fait  construire  la 
chapelle  Saint-Eutrope,  auprès  du  chœur,  sur  remplace- 
ment de  deux  maisonnettes  comprises  dans  le  cimetière, 
on  se  trouva  dans  la  nécessité  d'abattre  ce  revestiaire.  La 
fabrique  dut  en  faire  construire  un  autre,  «  pareil  en  lar- 
geur et  en  longueur,  assouvy  de  toutes  choses  9  au  bout 
de  la  chapelle  Saint-Julien,  de  l'autre  côte  de  Téglise.  La 
chapelle  Saint- Julien  ayant  été,  a  son  tour,  démolie, 
en  i5i3,  pour  être  reconstruite  avec  plus  d'étendue  et 
d'élégance,  le  revestiaire  fut  reporté  au  bout  de  la  cha- 
pelle Saint-Eutrope.  Ce  ne  fut  pas  son  dernier  déplace- 
ment. Nous  le  voyons,  au  xviiie  siècle,  situé  au  bas  de  la 
nef,  près  du  portail  latéral. 

L'obi  tuaire  du  chapitre  de  Notre- Dame -de-la -Ronde 
fournit  les  noms  de  quelques-uns  des  bienfeiteurs  de  cette 
communauté. 

Janvier,  3,  obit  de  M«  Marc  Le  Loquetier,  ancien 
doyen  et  commémoration  de  l'archevêque  Jean  de  Ma- 
rigny;  8,  obit  de  Richard  Marin,  ancien  curé  de  La 
Ronde;  12,  commémoration  de  Guillaume  Le  Sage,  an- 
cien doyen,  et  de  Me  Robert  d'Andeli,  chanoine;  17,  obit 
de  l'archevêque  Eudes  Rigaud.  —  Avril,  8,  commémora- 
tion de  l'archidiacre  du  Mans.  —  Juin,  8  des  calendes  de 
juillet,  obit  de  Charles  V.  —  Juillet,  5  des  calendes 
d'août ,  obit  de  Gautier  de  Tours ,  qualifié  troisième 
doyen. 

Cet  obi  tuaire  fait  mention  de  la  dédicace  de  Notre - 
Dame-de-la-Ronde  au  ler  juin,  et  de  la  fête  de  S.  Eutrope, 
martyr,  au  mois  d'avril. 

Il  contient,  à  ses  premiers  feuillets,  le  texte  des  ser- 
ments que  devaient  prêter  le  doyen  et  les  chanoines  à 
leur  prise  de  possession. 

Voici  le  texte  du  serment  du  doyen  : 

Ego  N.y  Decanus  hujus  ecclesie  Béate  Marie  Rothonde 
Rothomagen.^  juro,  ad  Sancta  Dei  Evangelia^  quod  sum, 


i35 

prout  nuptie  demonstrant,  de  légitima  matrimonio  pro- 
creatus.  Item  juro  quod  capitule  hujus  ecclesie^  in  his  que 
ad  ipsos  spectant^  humiliter  obediam.  Item  juro  quod  sta^ 
tuta  et  consuetudines  hujus  ecclesie  approbatas  observabo 
fideliter.  Item  juro  quod  jura,  privilégia^  libertates  et pos- 
sessiones  hujus  ecclesie  pro  posse  deffendam.  Item  juro 
quod  sécréta  capituli  nemini  revelabo.  Item  juro  quod 
fidèle  consilium  et  auxilium  competens  in  omni  honestate 
et  utilitate  ipsius  ecclesie  rectum  ac  justum^  secundum 
conscientiam  meam,  dum  tempus  postulaverit^  sine  fraude 
et  personarum  acceptione,  prestabo^  precipue  requisitus. 
Item  juro  quoi  in  hac  ecclesia  faciam  continuam  residen^ 
tiam  personalem^  interessendo  matutinis  et  singulis  horis 
dieij  prout  in  statutis  et  reformacione  hujus  ecclesie  con- 
tinetur. 

On  doit  signaler  dans  ce  document  un  témoignage  re- 
marquable de  rimportance  que  Ton  attachait  aux  offices 
qui  se  célébraient  à  la  cathédrale. 

iVa  quod  diebus  in  quibus  fit  processio  generalis  in 
ecclesia  Rothomagensi  et  celebratur  sancta  synodus,  finita 
prima f  dicuntur  misse  de  Beata  et  obitus. 

Ordinatum  est  capitulariter  quod  in  ecclesia  Rotonde 
prima  et  ultima  Adventus  et  eciam  ixx^,  xl^  et  medie  xl^, 
videlicet  Letare^  dominicis  quibus  fit  sermo  ad  populum 
in  ecclesia  cathedrali,  necnon  diebus  Dedicacionis  et  Reli' 
quiarum  dicte  ecclesie  cathedralis  atque  sanctorum  Mel^ 
loni,  Romaniy  Audoeni,  Firmini,  Fromundiy  Marcialis^ 
matutine  incipientur  hora  quinta  cum  dimidia^ predictisque 
dominicis,  intuitu  sermonum  hujusmodi^  continuabitur 
servicium. 

On  peut  citer  parmi  les  anciens  doyens  de  Notre-Damc- 
de-la-Ronde,  au  xv«  siècle,  Jean  Guérin,  1419-1422  (i);  — 
Laurent  Butot,  i438-)445  (2);  —  parmi  les  curés,  Hélie 

(i)  Arch.  delà  S.  Inf.,  G.  352 1. 
(2)  Ibidem,  G.  1910. 


i36 

Fouache,  1 368- 1376  (1)  ;  —  Jean  Pajot,  chanoine  de  Notre- 
Dame  de  Beauvais  et  de  Notre-Dame  de  Rouen,  ancien 
curé  de  Saint- Laurent-en-Caux,  mentionne,  en  1438, 
comme  curé  de  Nptre- Dame-de-la- Ronde,  titre  qu'il 
prenait  encore  à  Tcpoque  de  son  décès,  ce  qui  prouve 
que,  bien  que  décidée  en  146 5,  l'union  de  la  cure  au 
doyenné  ne  fut  réalisée  que  plusieurs  années  après.  Le 
testament  de  Pajot,  daté  du  11  février  1461,  est  remar- 
quable par  le  grand  nombre  de  legs  qu'il  contient.  Ceux 
qui  concernent  ses  livres  seraient  intéressants  à  relever  (2). 

Après  Pajot,  tous  les  doyens  furent,  en  même  temps, 
curés  de  la  paroisse.  Le  premier  qui  cumula  les  deux  fonc- 
tions fut  Guillaume  Mesard,  dont  nous  avons  déjà  parlé, 
qui  jouit  d'un  grand  crédit  pendant  l'épiscopat  du  cardinal 
d'Elstouteville,  et  fut  un  des  principaux  bienfaiteurs  de 
Notre- Dame-de-la- Ronde.  Sa  tombe  se  trouvait  au  milieu 
du  chœur.  L'Histoire  de  Rouen,  de  1731,  nous  en  fait  con- 
naître l'inscription. 

Hicjacet  venerabilis  magister  Guilleîmus  Mesard^  in- 
signis  quondam  vicarius  generalis  et  officialis  Rothoma- 
gcnsis^  justitiœ  pius  amator  et  in  judicio  integri  atque 
impolluti  animi,  qui  ohiit  anno  DD.  i4go^  die  veneris 
9  februarii.  Orate  pro  eo,  Mesard  était  représenté  sur 
cette  tombe,  revêtu  de  ses  habits  ecclésiastiques,  vraisem- 
blablement de  cette  aumusse  qui  mit  le  chapitre  de  la 
cathédrale  en  conflit  avec  l'autorité  royale.  Cette  inscrip- 
tion a  été  mal  lue  :  la  date  doit  être  rectifiée.  Mesard,  en 
effet,  vivait  certainement  encore  en  1497.  Nous  pensons 
qu'il  dut  mourir  le  9  février  1498. 

Il  eut  pour  successeur  Robert  de  Coquebourne,  écos- 
sais de  naissance,  qui  fut  présenté  par  le  roi  Louis  XII, 
et  nommé  par  Tarchevèque,  le  29  juillet  1498  (3). 

(1)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  G.  3421,  352o. 

(2)  Ibidem^  G,  3439. 

(3)  A  la  mort  de  Mesard,  il  y  eut  procès  pour  la  cure.  Jean 


'3; 

Bernardin  de  Vauldrey  obtint  ce  bénéfice  sur  la  rési- 
gnation de  Robert  de  Coquebourne,  le  7  septembre  1 5o8, 
et  le  possédait  encore  en  1 5 1 9.  Il  le  résigna,  pour  cause  de 
permutation,  en  faveur  de  May  Du  Breuil,  docteur  en 
théologie,  qui  lui  abandonna  la  cure  de  Saint-Pierre  de 
Louvigny^  au  diocèse  de  Meaux.  Les  lettres  de  collation 
sont  du  10  avril  1519.  May  Du  Breuil  fut  chanoine  de 
Rouen  et  pénitencier  de  la  cathédrale.  Il  mourut  peu  de 
temps  après  avoir  été  nommé  doyen  de  La  Ronde. 

Enguerran  Du  Breuil,  licencie  en  l'un  et  l'autre  droit, 
fut  nommé  doyen  de  La  Ronde,  le  1 3  août  1 5 1 9,  en  rem- 
placement de  May  Du  Breuil.  Il  mourut  en  1 53o,  et  fut 
remplacé,  le  14  février  de  cette  année,  par  Jean  Heutru, 
clerc  d*Avranches,  qui  résigna,  peu  de  temps  après,  en 
faveur  de  Robert  Le  Marchant,  prêtre  du  même  diocèse, 
lequel  fut  pourvu  dès  le  3o  mars  suivant.  Après  lui,  Jean 
Rome,  chanoine  de  Rouen,  obtint  le  doyenne  de  La 
Ronde.  11  le  résigna  en  faveur  de  Robert  Bordel,  qui  lui 
abandonna  la  cure  de  Roumare.  Bordel  fut  nomme  au 
doyenné  le  21  août  i545.  II  le  résigna  peu  de  mois  après 
en  faveur  de  Durand  Durand,  qui  lui  abandonna  ses  cures 
de  Sainte-Croix  de  Montivilliers   et  de  Saint-Mards   de 

De  Lintot  et  Jean  Favé,  chanoines  de  Rouen,  prétendant,  l'un  et 
Tautre,  agir  en  vertu  de  la  procuration  du  roi,  avaient  nommé, 
dès  le  1 1  février,  le  premier,  Guillaume  Gueuret,  le  second, 
Pierre  Le  Franchois;  mais  Louis  XII  présenta  directement  Co- 
quebourne. CoUatio  decanatus  Rotunde  Rothomagensis,  cum 
cura  eidem  annexa,  vacantis  per  decessum  domini  ac  magistri 
GuUlelmi  Mesardi,  fada  magistro  Roberto  Coquebounte,  post 
dectsionem  brevii  levaii  per  procuratorem  regium  et  pro  eo 
flniti  contra  alium  se  gerentem  pro  vicario  domini  Régis,  xxixa 
juin.  (Arch.  du  secrétariat  de  l'Archevêché.)  —  Dès  le  14  fé- 
vrier 1499*  le  chapitre  de  la  cathédrale  nommait  une  commis- 
sion pour  examiner  ce  qu'il  y  avait  à  faire  à  l'égard  de  l'écossais, 
doyen  de  Notre-Dame-de-la-Ronde,  que  Ton  avait  vu  revêtu  de 
l'aumusse. 


i38 

Vcricourt,  au  diocèse  de  Reims.  Durand  Durand,  nommé 
le  II  octobre  1546,  mourut  en  1 55 1,  et  fut  remplacé,  le 
2  mai  i55j,  par  Jacques  Chapperon ,  du  diocèse  de 
Saintes. 

Jean  Chapperon  fut  reçu  doyen  le  4  mai  i55i,  et  paya 
à  la  fabrique,  pour  sa  réception,  19  1.  12  s.  Il  décéda 
en  i555,  et  fut  remplacé,  sur  la  présentation  du  roi 
François  I«^  par  Angélus  Vergitius,  originaire  de  Tîle  de 
Crète  (i).  Il  fut  reçu  par  procureur,  le  9  juin  i555,  et 
paya  ce  jour-là,  à  la  fabrique,  pour   sa    réception,  20  1. 

Mais  peu  de  temps  après  Pierre  Galland  était  présenté 
au  même  bénéfice  par  le  même  roi,  et  il  n*est  pas  douteux 
qu'il  en  ait  joui  paisiblement  puisque   ce  bénéfice  est 

(i)  Arch.  du  secrétariat  de  Tarchevêché.  —  Ange  Vergèrc, 
célèbre  calligraphe,  né  en  Crète  au  commencement  du  xvie  siècle, 
se  fît  connaître  d*abord  en  Italie,  d'où  il  passa  en  France.  Son 
écriture  grecque  était  admirable.  «  Elle  senrit  d'original,  dit 
Bayle,  à  ceux  qui  gravèrent  les  caractères  de  cette  langue  pour 
les  impressions  royales,  sous  François  I^r.  »  Vergère  resta  attaché 
à  la  cour  des  Valois  jusque  sous  Charles  IX,  ainsi  que  le  témoi- 
gnent ces  vers  de  Baîf,  adressés  à  ce  dernier  roi  dans  l'épître 
dédicatoire  de  ses  poésies  : 

Sage  Vergère  grec  à  U  gentil  main , 
Pour  récriture  greque  écrivain  ordinere , 
De  vos  granpére  et  père  et  le  vostre  ut  salere , 
Pour  à  l'accent  des  Grecs  nui  parole  dresser 
Et  ma  main  sur  le  trac  de  sa  lettre  adresser. 

Parmi  les  œuvres  calligraphiques  de  Vergère,  on  cite  le  Cata- 
logue des  manuscrits  de  la  bibliothèque  de  François  U'  et  la 
copie  du  Cynegiticotij  d'Oppien,  que  Henri  II  lui  commanda  pour 
la  duchesse  de  Valentinois.  Au  talent  de  calligraphe  il  unissait 
la  connaissance  des  lettres  anciennes,  et  il  a  traduit  en  latin  le 
traité  de  Fluviorum  et  Montium  nominibus  (Paris,  i556).  On  a 
dit  que  le  proverbe  «  écrire  comme  un  ange  »  datait  d*Ange 
Vergère  ;  mais  autant  que  nous  pouvons  en  juger,  il  ne  paraît 
pas  remonter  si  haut.  ^  Nicolas  Vergère,  fils  du  précédent,  né 
en  Crète,  passa  en  France  vers   1 546.  Il  fut  lié  avec  Balf  et 


i39 

signalé  comme  devenu  vacant^  par  le  décès  dudit  Galland, 
dans  de  nouvelles  lettres  de  présentation,  obtenues  du 
Roi,  et  dans  de  nouvelles  lettres  de  collation,  obtenues 
du  vicaire  général  de  Tarchevèque,  par  Angélus  Vergitius, 
24  septembre  i558.  Celui-ci  prit  possession,  par  Nicolas 
Mérille,  son  procureur. 

Après  lui  viennent  :  Jean  Mérille,  chanoine  de  Rouen, 
reçu  au  doyenné  de  La  Ronde,  4  mai  i563-i573.  —  Guil- 
laume Pynel,  ancien  chanoine  de  Saint-Hildevert  de 
Gournay,  reçu  au  doyenne  de  La  Ronde  le  12  sepv 
tembre  1 573-1 579.  —  Etienne  Le  Paincteur,  receveur- 
général  de  la  fabrique  de  la  cathédrale,  plus  tard  chanoine 
de  Rouen,  doyen  de  La  Ronde,  iSSi-iSSg.  —  Jean 
Harel,  1589-16  avril  1596. —  Claude  Sacquespée,  1597- 
1598.  —  Pierre  Le  Blond,  1598-1639,  année  de  son  décès. 
Il  fit  une  fondation  en  l'honneur  du  Saint- Sacrement.  Il 
y  eut  procès  au  sujet  de  son  épitaphe.  —  Henri  Lebrun, 
maître  ès-arts  en  TUniversité  de  Paris,  14  mars  1639- 
i65[.  Après  avoir  résigné  son  bénéfice,  il  demanda  aux 
chanoines,  la  permission  de  continuer  à  porter,  comme 
honoraire,  Thabit  de  leur  église,  ce  qui  lui  fut  accordé.  Il 
est  connu  comme  auteur  de  quelques  traités  (i).—  François 
de  la  Force,  docteur  en  théologie,  chanoine  et  pénitencier 
de  la  cathédrale,  nommé  en  remplacement  du  précédent. 
Reçu   au  doyenné  le  28  avril  i65i-i662  (2).  —   Louis 

Turnelle.  (Voir  Haefer,  Nouvelle  Biographie.)  —  Je  suis  porté  à 
voir,  dans  le  concurrent  de  Vergère,  Pierre  Galland,  érudit 
français,  né  à  Aire  en  1 5 10  et  mort  en  i559;  lié  aussi  avec 
Turnelle  et  Budé.  —  Cs.  sur  Vergère  et  Galland,  M.  Léopold 
Delisle,  cabinet  des  mss.  de  la  Bibliothèque  nationale;  sur 
Vergère,  Bayle,  au  mot  Vergère,  Tamizey  de  Larroque  Revue 
critique f  '872,  p.  159,  Le  Play,  Anleactes,  p.  245. 

(i)  Il  devint  chanoine  de  la  cathédrale. 

(2)  Il  fut  prieur  de  Saint-Michel  du  Mont-Gargan.  Il  décéda 
en  1689  et  fut  enterré  en  l'église  Saint-Jean  de  Rouen.  (Arch. 
de  la  S.-Inf.,  G.  2097.) 


140 

NozereaU)  nommé  le  2  août  1662,  en  remplacement  de 
François  de  la  Force,  qui  avait  résigne  en  sa  faveur  ; 
reçu  le  19  septembre  1662-1688.  Il  donna  à  la  fabrique 
de  très  belles  pièces  de  marbre  d'un  prix  considérable 
et  200  1.  pour  être  employées  à  la  contretable  du  chœur. 
Il  était,  en  même  temps  que  doyen  de  La  Ronde,  cha- 
noine de  Rouen  (1).  —  Thomas  Horcholle,  docteur  de 
Sorbonne,  i«r  juin  1688-4  juillet  1716,  date  de  son  décès. 

—  Louis  Horcholle,  docteur  de  Sorbonne,  frère  du  pré- 
cédent, 17 16-14  novembre  1728,  date  de  sa  résignation. 

—  Jean-François  Vattier,  bachelier  en  théologie,  con- 
seiller au  parlement,  1728-26  juin  1748,  date  de  son 
décès  (2).  —  Alexis  Pain  des  Essarts,  ancien  curé  de 
Saint- Vigor  de  Rouen,  29  septembre  1748-22  mars  1789, 
date  de  son  décès. 

On  cite  parmi  les  chanoines  de  Notre- Darae-de-la- 
Ronde  Claude  Chappuys,  bibliothécaire  du  roi,  chantre 
de  la  cathédrale  de  Rouen,  1544-1545  ;  —  Denis  de  Brè- 
vedent,  abbé  de  la  Trappe,  en  1 562  ;  —  vers  le  milieu 
du  XVII*  siècle,  Thomas  (Filz-Simon),  natif  de  Trédach, 
en  Irlande,  docteur  en  théologie  de  l'Université  de  Caen, 
prieur  du  prieuré  de  Dalytz.  ;  —  Robert  Prévost,  cha- 
noine de  Chartres,  prédicateur  du  roi,  dont  les  sermons 
ont  été  imprimés  en  1786  (3). 

Des  fondations  avaient  été  faites  en  cette  église , 
en  i325,  pour  Pierre  de  Gamaches,  chevecier  de  La 
Ronde  (4)  ;  —  le  26  juillet  1 441,  pour  Nicolas  Burguet, 

(i)  11  résigna  en  faveur  de  Thomas  Horcholle  pour  cause  de 
permutation  contre  la  chapelle  de  la  Trinité  en  la  cathédrale,  et 
moyennant  une  pension  de  5 00  livres.  Il  devint  chanoine  de  la 
cathédrale. 

(2)  Fondation  pour  lui  après  son  décès,  17  février  1672. 

(3)  Dictionnaire  portatif  des  Prédicateurs  français,  Lyon,  1 757. 

(4)  Testament  de  Richard  de  Droitecourt,  pénitencier  de  la 
cathédrale^  mercredi  après  l'Epiphanie,  i325.  (V.  S.,  F.  du  Cha- 
pitre.) 


14! 

prêtre,  maître  ès-arts  et  en  médecine,  qui  y  fut  enterré 
dans  cette  église  (i)  ;  —  en  1469,  pour  Jean  Le  Vieil, 
avocat  en  cour  d'église,  lequel  y  fut  pareillement  en- 
terré (2)  ;  le  16  juillet  i5o2,  pour  Jeanne  Le  Picard,  dame 
de  POuraille  ;  —  le  27  février  i5i9,  pour  Daniel  de  la 
Place,  sieur  de  Fumechon  (3). 

On  voit  par  un  règlement  de  M.  de  Fieux,  vicaire- 
général,  du  20  octobre  1689,  qu'il  y  avait  alors,  en  Téglise 
Notre- Dame-de-la-Ronde,  outre  le  curé-doyen  et  les  cha- 
noines, 10  prêtres  habitués,  du  nombre  desquels  3  vicaires 
perpétuels,  ayant  qualité  de  premiers  chantres;  1  vicaire 
et  I  clerc  ayant  qualité  de  seconds  chantres,  tous  consi- 
dérés comme  suppôts  du  chapitre.  En  1 720,  on  comptait,  à 
Notre-Darae-de-la-Ronde,  3  chanoines,  3  vicaires  perpé- 
tuels, 3  aides  de  chœur,  le  vicaire  de  la  paroisse,  le 
sacriste,  6  ou  7  prêtres  habitués  de  1,000  à  1,200  com- 
muniants (4). 

Les  principaux  hôtels  qui  en  dépendaient  étaient  THô- 
tel-de-Ville,  et  l'hôtel  du  Lion-d'Or,  où  est  aujourd'hui  le 
passage  d'Étancourt,  qui  servit  de  logis,  en  décembre  140 1, 
au  duc  de  Charolois,  depuis  duc  de  Bourgogne. 

Notre- Dame-de-la-Ronde  était  le  siège  de  trois  confré- 
ries :  Tune  de  Saint- Eutrope,  l'autre  des  Trépassés,  plus 
tard  transférée  à  Saint- André  de  la  Porte-  aux-Fèvres  ;  la 
troisième  de  Saint-Louis,  pour  les  merciers,  dont  le 
siège  fut  depuis  établi  à  Saint-Jean. 

Le  Brun  des  Marettes,  dans  ses  Voyages  liturgiqueSy 
nous  apprend  que,  d'abord,  en   cette  église,  le  saint  Sa- 

(i)  Arch.  delà  S.-Inf.,  F.  de  Notre-Dame-de-la-Ronde. 

(2)  Ibidem, 

(3)  Ibidem. 

(4)  Ibidem.  Le  Brun  des  Marettes,  dans  ses  Voyages  litur^ 
giques,  publiés  sous  le  nom  du  sieur  de  Moléon,  dit  :  «  Il  y  a 
encore  10  ou  12  prêtres  de  la  paroisse  qui  se  joignent  aux  cha- 
noines pour  chanter  l'office.  »  Dans  toutes  les  églises  de  Rouen 
on  remarquait  un  nombreux  clergé. 


14^ 

crcment  était  gardé,  pour  le  viatique  des  mourants, 
dans  une  petite  armoire  pratiquée  dans  un  pilier,  du  côté 
de  l'Evangile,  sous  une  image  de  la  Vierge  ;  que  depuis 
on  le  mit  tout  au  haut  de  la  contretable  dans  une  lan- 
terne de  verre  et  de  menuiserie  ;  que  ce  ne  fut  que  dans 
les  derniers  temps,  lorsque  Ton  n'eut  plus  dégoût  pour  l'an- 
tiquité, qu'on  le  mit  dans  un  tabernacle  sur  l'autel.  »  A 
l'appui  de  la  remarque  de  ce  liturgiste  je  note,  dans  le 
contrat  de  la  fondation  d'un  vicaire  du  nom  de  Michel 
Le  Roy,  de  Tannée  141 1,  une  clause  portant  que,  pendant 
la  messe  d«s  obits,  on  mettrait  deux  cierges  aux  deux  côtés 
du  tabernacle  t  où  est  et  seroit  mis  le  corps  de  Notre- 
Seigneur  en  l'église,  et  Tautre  sur  l'autel  >,  ce  qui  établit 
clairement  que  le  tabernacle  n'était  pas  encore  sur 
l'autel. 

Nous  nous  en  tiendrons  à  ces  renseignements  sur  l'his- 
toire de  cette  paroisse.  Bien  qu'il  ne  subsiste  plus  rien  de 
son  église,  nous  croyons  intéressant,  au  point  de  vue  ar- 
chéologique, de  dire  quelques  mots  de  son  architecture  et 
de  son  ornementation. 

Notre- Dame-de-la-Ronde,  d'après  une  description  d'ar- 
chitecte de  1731,  contenait  un  chœur,  une  nef  principale, 
deux  ailes  ou  deux  nefs  latérales  terminées  chacune  par 
une  chapelle,  l'une,  au  nord,  dédiée  à  la  Vierge,  et  précé- 
demment à  S.  Julien  et  h  S.  Jean;  Tautre,  au  midi,  dédiée 
à  S.  Eutrope. 

Les  voûtes,  tant  celles  du  chœur  que  de  la  nef,  étaient 
portées  sur  des  piliers  de  pierre  de  carré  d'architecture, 
d'où  partaient  les  arcades  fermées  en  ogives .  Les  ailes,  ou 
nefs  latérales,  étaient  fermées  par  des  murs  avec  pieds 
droits  sur  lesquels  étaient  assises  les  arcades  de  leurs 
voûtes.  Ces  murs,  à  l'extérieur,  étaient  appuyés  par  des 
buttants. 

Ces  piliers  appartenaient  au  style  de  Tarchitecture  de 
la  fin  du  xv®  siècle ,  comme  ceux  de  Saint- Vivien  et  de 
Saint-Godard;  on  n'y  voyait  aucune  trace  de  chapiteaux. 


•43 

La  tour  était  posée  à  rentrée  du  chœur,  suivant  un 
usage  qui  paraît  avoir  été  général  autrefois,  aussi  bien 
dans  les  églises  de  ville  que  dans  celles  de  la  campagne. 

Vers  1464,  on  fit  construire,  au  côté  droit  du  chœur,  la 
chapelle  de  Saint- Eu trope.  On  s'adressa,  alors,  aux  conseil- 
lers de  la  ville  pour  obtenir  d'eux  c  aide  à  parachever  et 
parfaire  cette  chapelle  t.  Le  29  décembre  de  cette  année, 
ils  promirent  que,  dès  qu'elle  serait  en  état,  ils  y  feraient 
feire  f  une  belle  et  notable  fourme  de  pierre  et  de 
verre  (i).  i  En  i5i3,  on  fît  construire  à  nouveau,  du  côté 
gauche,  la  chapelle  dite  de  Saint-Julien. 

L'église  se  terminait,  au  couchant,  par  un  pignon 
plein. 

La  porte  qui  donnait  accès  aux  paroissiens  avait  été 
pratiquée  dans  le  flanc  de  la  nef  à  la  dernière  travée.  Elle 
s'ouvrait  sur  une  place  dite  VAttre  de  La  Ronde ,  et  était 
ornée  de  bas-reliefs  représentant  le  Trépas  de  la  Vierge  et 
son  Assomption  dans  le  ciel.  «La  Vierge  était  représentée 
entourée  d*anges.  On  lisait  en  lettres  gothiques  de  fer  doré  : 
Tôt  a  pulchra  es,  arnica  mea.  Le  Brun  des  Marettes  signa- 
lait cette  vierge  comme  une  œuvre  d'art  remarquable, 
c  estimée,  dit-il,  des  sculpteurs  qui  ne  manquent  pas  de 
la  faire  voir  aux  étrangers,  tant  pour  la  beauté  que  pour 
la  grandeur  de  la  pierre,  ne  faisant  qu'un  corps  avec  le 
pilier.  >  Au-dessus  régnait  une  galerie  assez  étroite  con- 
struite en  maçonnerie  avec  appui  décoré  d^architecture  à 
jour.  Suivant  ï Histoire  de  Rouen^  édition  de  lySi,  ce 
portail  aurait  été  construit,  en  1490,  aux  frais  de  Mesard. 

On  accédait  dans  le  cimetière  par  un  autre  portail  situé 
derrière  la  chapelle  Saint-Eutrope.  €  Ce  portail,  parfaite- 
ment bien  travaillé,  si  Ton  en  croit  la  même  histoire,  était 
décoré  d'une  image  de  la  Vierge,  d'une  architecture  go- 
thique. •  Il  aurait  été  commencé  en  i532  et  achevé, 
en  1537,  ^^^  ^**^*^  ^^  Trésor. 

(i)  Délibérations  de  rHôtel-de-Villc. 


144 

Les  cchevins  avaient  une  entrée  particulière  dans  cette 
église  par  une  galerie  qui  mettait  en  communication  THô- 
tel-de- Ville  avec  le  bas  de  la  nef. 

Même  après  qu'ils  eurent,  dans  Tenceinte  même  de 
l'Hôtel-de- Ville,  une  chapelle  spécialement  à  leur  usage, 
Notre-Dame-de-la-Ronde  resta  leur  église  de  prédilection, 
et  Ton  voit  que  parfois  ils  y  firent  célébrer  des  services 
religieux. 

C'était  dans  Paître  de  La  Ronde,  séparé  de  la  rue  de  la 
Grosse -Horloge  par  un  petit  mur^  dit  le  muret  de  la 
Ronde^  qu'ils  allumaient  leurs  feux  de  joie. 

On  sait  que,  dans  les  circonstances  solennelles,  c'était  à 
eux  à  fournir  le  bois  nécessaire  pour  les  feux  de  joie 
qu'on  allumait  au  parvis  de  la  cathédrale.  Mais  là  ces  feux 
étaient  allumés,  suivant  un  cérémonial  invariable.,  par  le 
gouverneur  de  la  province,  et,  en  son  absence,  par  le  pre- 
mier président  du  parlement.  Le  rôle  du  Conseil  de 
ville  se  bornait  à  payer  la  note  de  la  dépense  et  à  flaire 
présenter  les  torches  par  le  maître  de  ses  ouvrages. 

Mais  à  Taître  de  la  Ronde,  le  Conseil  de  ville  était  chez 
lui,  et  personne  n'eût  pu  songer  à  lui  disputer  l'honneur 
de  mettre  le  feu  aux  bûchers  qui  étaient  préparés  pour  les 
cérémonies  publiques.  Là  encore,  au  coin  du  muret  de  la 
Ronde^  par  les  soins  des  échevins,  étaient  mises  en  perce 
les  barriques  de  vin  t  qui  servaient  à  faire  boire  le  peuple 
à  la  santé  du  roi  (i)  >. 

(  i)  Publication  de  la  paix  de  Cateau-Cambrésis,  lo  avril  i  SSg  : 
«  Pour  exercer  libéralité,  on  distribuera  2  poinssons  de  vin  fre- 
laté à  tous  passans,  et  pour  éviter  à  la  confusion  du  peuple, 
seront  dressez  deux  tables  au  coing  du  muret  de  La  Ronde.  »  — 
Feu  de  joie  devant  Notre-Dame-de-la-Ronde,  25  juillet  i585.  — 
Feu  de  joie  en  Taître  de  Notre-Dame-de-la-Ronde,  près  la  croix, 
allumé  par  le  premier  échevin  ;  «  2  ponsons  de  vin  défoncez  au 
muret  de  l'église  de  La  Ronde,  pour  les  donner  au  peuple  en 
signe  de  joie  »  (à  l'occasion  de  la  publication  de  la  paix  avec  l'Es- 
pagne), 7  juin  1598.  —  A  Taître  de  Notre-Dame-de-la-Ronde,  feu 


.45 

Cet  aître  otaic  bâti  cl*échoppes  dont  trois  furent  démo- 
lies, en  1617,  lors  de  la  venue  du  roi  Louis  XIII.  Quel- 
ques-unes de  ces  échoppes  furent  pendant  longtemps 
occupées  par  des  libraires. 

La  décoration  intérieure  de  Notre-Dame-de-la-Ronde 
a  varié,  comme  celle  de  toutes  les  églises  de  la  ville. 

Entre  la  nef  et  le  chœur  se  trouvait,  à  Torigine,  un  jubé 
surmonté  d'un  crucifix  et  accompagné  de  deux  autels, 
dont  Tun  était  dédié  â  Notre-Dame.  Cet  autel  est  cité 
dans  une  sentence  de  Tofficial  de  1438,  à  laquelle  nous 
avons  fait  ci-dessus  allusion. 

Le  passage  suivant,  emprunté  à  VHistoire  de  Rouen, 
nous  donne  la  description  d'un  autel  à  la  romaine  cons- 
truit dans  le  chœur,  et  que  Ton  admirait  encore  cent  ans 
après.  €  En  1688,  Ton  commença  d'élever  dans  le  chœur 
un  grand  autel  isolé  en  forme  de  colonade  avec  quatre 
colomnes  de  marbre  de  Brèche  d'Italie  et  leurs  piédestaux 
de  marbre  blanc,  enrichis  dans  les  quatre  faces  de  plaques 
de  marbre  pareilles  aux  colomnes,  qui  composent  un  ordre 
corinthien,  enrichi  de  tous  les  ornements  dépendant  dudit 
ordre,  tant  en  l'architrave,  frize,  corniche  et  entable- 
mens  dudit  ouvrage ,  au-dessus  duquel  sont  placées  des 
courbes  qui  soutiennent  une  couronne  terminée  d'un 
globe  qui  porte  une  croix,  le  tout  enrichi  d'ornemens  de 
sculpture.  A  la  place  de  la  muraille  qui  étoit  ancienne- 
ment derrière,  il  en  a  été  fait  une  autre,  qui  forme  une 
espèce  de  cul  de  four,  dans  la  place  du  cimetière,  décorée 
d^architecture  en  dedans  de  l'église  en  forme  d*autel,  en- 
richi de  quatre  pilastres  de  marbre,  piédestaux  revêtus  de 
marbre,  base,  chapiteaux,  architraves,  frise  de  marbre, 
corniche  et  un  entablement  cintré  dans  le  milieu  pour  y 
mettre  un  tableau,  le  tout  de  Tordre  corinthien,  et  de 

de  joie,  a6  av.  i6ai. —  «  Ponson  de  vin  défoncé  devant  la  Ronde 
pour  faire  boire  le  peuple  à  la  santé  du  roi,  >  6  nov.  1628.  Fon- 
taine de  vin  coulant  pendant  la  nuit,  5  août  i658,  20  fév.  1660, 
etc. 

10 


146 

même  hauteur  que  te  même  ordre  dont  est  composée  la 
colonadedu  grand  autel....  Le  tout  a  été  exécuté  et  achevé 
l'an  1708  par  les  sieurs  Milet  des  Ruisseaux,  excellent 
architecte,  et  Poultier  le  jeune,  très  habile  menuisier  de 
cette  ville,  et  achevé  de  dorer  par  le  sieur  Bachelet, 
maître  doreur  de  cette  ville,  au  mois  d'août  de  la  même 
année.  Le  tout  des  dons  de  Messieurs  de  la  Fosse  et 
Nozereau,  chanoines  de  la  cathédrale,  ci -devant  doyens 
de  La  Ronde,  et  Monsieur  HorchoUe,  à  présent  doyen  ;  de 
Messieurs  les  échevins  de  la  ville  et  de  plusieurs  parois- 
siens. > 

Le  même  goût  présida  à  la  reconstruction  de  Tau  tel 
Saint-Jean. 

M.  Du  Moustier,  en  son  vivant,  lieutenant  criminel  au 
bailliage  de  Rouen,  légua  à  l'église,  par  testament,  la 
somme  de  5oo  livres^  qui  fut  employée  par  le  curé  à  ce 
travail. 

Le  ic""  octobre  1697,  sa  veuve  offrit  d'y  faire  mettre  un 
tableau  où  saint  Pierre,  patron  de  son  mari,  serait  repré- 
senté. Elle  choisit^  comme  sujet  c  le  miracle  fait  en  faveur 
d^un  pauvre  boiteux,  par  saint  Pierre,  à  la  porte  du  temple.  » 
Elle  mit  à  sa  libéralité  cette  condition  qu'on  conservât 
récusson  de  ses  armes,  tel  qu'il  était,  mi-parti  des  armes 
de  son  mari  et  des  siennes.  L'offre  fut  acceptée.  L'artiste 
auquel  elle  s'adressa  fit  une  copie  d'un  tableau  de  Poussin, 
copie  assez  bien  faite  pour  avoir  figuré,  pendant  quelque 
temps,  au  musée  du  département.  Elle  est  signalée  dans 
le  Catalogue  de  Le  Carpentier^  sous  le  n»  334. 

L'autel  Saint- Eutrope,  achevé  en  1703,  aux  frais  de  la 
ville,  reçut  sa  décoration  d'une  main  plus  habile.  Le 
tableau  de  la  contretable  fut  fait  par  Jouvenet  (i),  dont  on 
a  conservé  cette  quittance  :  «  J'ai  receu  de  Monsieur  le 
doyen  de  la  Ronde  la  somme  de  quatre  ving  livres  pour 
le  tableau  que  j'ay  fait  en  la  chapelle  de  Saint-Eutrope. 

(i)  Ce  peintre  était  de  la  famille  du  célèbre  Jouvenet. 


H7 

Faict  ce  vingt  quatre  de  juillet  mil  sept  cens  trois.  — • 
Jouvenet.  • 

Le  Brun  des  Marettes  et  le  Tableau  de  Rouen  de  1777 
citent,  comme  dignes  de  remarque,  en  Téglise  Notre- 
Dame-de- la-Ronde,  <  au  milieu  du  chœur,  un  ange  de 
cuivre  de  hauteur  humaine,  qui  estoit  le  mieux  travaillé 
qu'on  pût  voir,  et  qui  servoit  de  double  lutrin  devant  et 
derrière.  >  Cet  ange  avait  été  donne  par  le  sieur  Louis 
Bedenne,  marchand  de  Rouen,  et  feit  par  Michel  Le 
Marié,  maître  fondeur  de  la  même  ville,  en  Tan  1659(1). 

Mais  ce  qu'il  y  avait  de  plus  remarquable  à  Notre-Dame- 
de-la -Ronde,  et  ce  qui  doit  surtout  attirer  notre  attention, 
c'était  la  tour,  tour  ronde,  surmontée  d'un  cône  sphcrîque 
en  pierre. 

Il  est  probable  que  le  nom  de  La  Ronde  venait  de  la 
forme  de  cette  tour.  On  a  prétendu,  cependant,  que  cette 
forme  était  aussi  celle  de  tout  le  corps  de  l'édifice,  abs- 
traction faite  des  chapelles  et  du  bas  de  la  nef,  qui  n'ap- 
partenaient pas  au  plan  primitif,  la  nef  ayant  été  cons- 
truite pendant  le  décanatde  Mesard,  et  les  chapelles  entre 
1470  et  i53o. 

M.  de  Jolimont,  dans  son  ouvrage  intitulé  :  t  Les 
principaux  Édifices  de  la  ville  de  Rouen  en  /525,  »  p  77, 
signale,  en  cette  tour,  un  reste  de  la  primitive  ou  d'une 

(i)  A  la  cathédrale  n'était-ce  pas  aussi  un  lutrin,  cet  angs  de 
cuivre  dont  il  est  question  dans  les  comptes  de  la  fabrique 
de  1415  et  de  1427  :  «  Johanni  Queval  pro  mundando  et  clarifî- 
cando  sex  victbus  angelum  chori  in  isto  anno  cum  candelabro 
de  cupro,  xl  d.  —  Joh.  Caval,  dynand,  pro  mundacione  angeli 
chori  et  candelabri  de  cupro,  xx  s.  »  (Arch.  de  la  S.-lnf.,  G.  2484,^ 
2484).  Cependant  Charles  VI  fit  don  à  la  cathédrale  d*une 
assez  forte  somme  d'argent  «  pour  faire  un  aigle  en  façon  de 
lestrin  comme  celui  de  Paris.  »  L%  8  octobre  1648,  on  voit 
poser,  dans  le  chœur  de  la  cathédrale,  un  aigle  servant  à  dire 
hs  leçons,  exécuté  par  Mathieu  Touzé,  fondeur  de  Rouen,  d'a- 
près le  modèle  du  sculpteur  Racine.  Ibidenif  G.  2818. 


148 

des  primitives  églises,  et  nous  dit  qu^elle  était  «  de  style 
roman  en  appareil  carre  à  plein  cintre.  • 

L*auteur  de  l'Histoire  de  Rouen  croyait  aussi  à  l'anti- 
quité de  cette  construction,  puisqu'il  attribuait  à  sa  forme 
ce  nom  de  la  Ronde,  connu  dès  les  premières  années  du 
xiii«  siècle.  €  On  peut  remarquer,  dit-il,  la  tour,  qui  est 
d'une  figure  pyramidale,  composée  de  petites  pierres,  par- 
faitement bien  cimentées  les  unes  sur  les  autres,  soute- 
nues de  plusieurs  petites  colomnes  ensemble  d'espace  en 
espace,  entre  lesquelles  se  forment  des  espèces  d'arcades 
que  Ton  a  été  obligé  de  remplir  de  pierre  et  de  moellon 
pour  soutenir  la  pesanteur  de  la  tour  qui  menaçoit  ruine. 
Elle  est  soutenue  dans  l'église  de  quatre  gros  piliers  qui 
rendent  ce  temple  un  peu  obscur  et  matériel.  • 

On  voit,  par  cette  citation,  que  dès  ijSi,  et  même 
avant,  la  tour  de  Notre- Dame-de-la-Ronde  avait  donné 
lieu  à  de  sérieuses  inquiétudes. 

En  1 75 1,  les  alarmes  devinrent  plus  vives,  et  l'on  en 
vint  à  redouter  pour  les  paroissiens  un  malheur  sem- 
blable à  celui  qui  était  arrive,  le  i5  septembre  1739,  en 
l'église  de  Sa int-Thomas-du- Louvre,  à  Paris. 

On  s^adressa  à  M.  de  la  Bourdonna ye,  Intendant  de  la 
généralité.  Il  fit  visiter  l'église  par  Jean-Nicolas  De 
Montjay,  «  architecte  expert-juré  des  bâtiments,  arpen- 
teur du  roi  pour  le  bailliage,  généralité  de  Rouen  et  res- 
sort du  parlement  de  Normandie.  » 

Le  rapport,  rédigé  à  la  suite  de  cette  visite,  ne  fut  rien 
moins  que  rassurant.  Il  concluait,  sans  hésitation,  à  la 
démolition  immédiate  du  clocher,  qui  pouvait  s'écrouler 
d'un  moment  à  Tautre. 

•  Cette  démolition  fut  décidée  en  principe.  Mais  il  fallut 
du  temps  pour  examiner  les  projets  de  démolition  et  de 
reconstruction  qui  furent  §lors  proposés  par  divers  archi- 
tectes, MM.  De  Montjay,  Thibault  et  Le  Brument. 

Plusieurs  années  s'écoulèrent  :  la  situation  ne  s'aggrava 
pas;  on  reprit  confiance,  et  l'on  s'enhardit  même  à  faire 


149 

sonner  de  nouveau  les  cloches  que,  pendant  quelque 
temps,  on  n'avait  pas  osé  mettre  en  branle  dans  la  crainte 
d'ébranler  le  clocher. 

M.  de  Belbeuf,  procureur  général  au  parlement,  nomma, 
à  son  tour,  en  1 766,  un  architecte,  Pierre-Amand  Quinel, 
qui  rassura  complètement  les  trésoriers  et  le  public,  en 
démontrant  que  le  défaut  d'aplomb  et  les  lézardes  que 
Ton  avait  signalés,  remontaient  à  Tépoque  même  où  la 
construction  avait  dû  prendre  son  assiette. 

La  fabrique  s'en  rapporta  à  son  avis  qui  lui  épargnait 
une  lourde  dépense  à  laquelle  elle  n'eût  su  comment  pour- 
voir, parce  que  les  ressources  sur  lesquelles  elle  avait 
compté  lui  avaient  échappé.  Elle  ne  trouva  à  redire  que 
sur  le  chiffre  des  honoraires,  que  l'architecte  ne  put  se  ré- 
signer à  réduire  qu'à  la  suite  deiongues  discussions  (1770). 

Le  rapport  de  De  Montjay,  auquel  il  ne  fut  donné  aucune 
suite,  nous  offre,  du  moins,  cet  avantage  de  nous  faire 
connaître  assez  exactement  la  structure  de  la  tour  de 
Notre- Dame-de-la-Ronde. 

D'après  le  procès-verbal  qu'il  dressa  en  1752,  t  le  clo- 
cher était  porté  sur  quatre  piliers,  deux  de  la  dépendance 
du  chœur  et  en  formant  l'entrée,  les  deux  autres  dans  la 
nef.  La  distance  entre  les  deux  piliers  du  chœur  était  de 
16  pieds  I  pouce;  entre  les  deux  autres,  de  i5  pieds 
7  pouces  seulement. 

f  La  hauteur  de  la  voûte,  prise  au  milieu  des  quatre 
piliers,  à  l'endroit  où  se  trouvait  le  passage  des  cloches, 
était  de  36  pieds. 

<  De  la  naissance  du  clocher  à  la  pointe  on  comptait 
84  pieds  sur  17  pieds  7  pouces  de  diamètre  au-dessus  de  la 
voûte  et  dans  œuvre.  • 

€  Ce  clocher  était  construit,  dans  toute  sa  hauteur,  de 
maçonnerie  de  carreau  de  bloc,  dirigé,  à  l'extérieur,  d'un 
plan  rond,  à  l'intérieur,  d'un  plan  octogone.  La  tour,  de 
la  voûte  à  la  naissance  de  la  flèche,  avait  1 7  pieds  de  hau- 
teur. » 


i5o 

Bien  que  cette  tour  nous  paraisse  indubitablement  une 
construction  antérieure  à  Tépoque  gothique,  nous  devons 
faire  remarquer  que  les  piliers,  a  en  juger  par  un  plan  que 
nous  avons  sous  les  yeux,  étaient  taillés  dans  le  genre  de 
ceux  de  la  nef  :  ils  présentaient  des  nervures  prismatiques 
qui  annoncent  clairement  la  fin  du  nw^  siècle  ou  le  siècle 
suivant.  Il  faut  supposer,  à  notre  avis,  qu'ils  avaient  été 
remaniés  et  que  la  masse  en  avait  été  dégrossie  lorsqu'on 
construisit  la  nef  du  temps  de  Mésard. 

Nous  compléterons  cette  notice  en  y  ajoutant  quelques 
extraits  des  comptes  de  la  fabrique  et  la  copie  de  quelques 
documents.  Si  nous  ne  nous  trompons,  on  y  trouvera 
quelques  éclaircissements  sur  des  artistes  rouennais  et 
sur  d'anciens  usages,  en  général  peu  connus. 

ENTRA  ITS   DES  COMPTES  DE  NOTRE-DAMK-DE-LA-RONDE 

Pâques  1541  Pâques  1542  :  —  «  Mise  pour  les  orgues  : 
A  Jeh.  Quonyam,  masson,  pour  avoir  faict  les  cartouches 
pour  les  orgues,  xlv  s.  —  Pour  la  parpaye  desd.  cartou- 
ches, IV  1.  X  s.  —  A  Me  Jeh.  Gougeon,  pour  avoir  faict  les 
cartouches,  le  chapiteau  de  la  coulonne  et  les  ars-boutans 
ou  arpiez,  jouxte  le  marchié  faict  avec  luy,  la  somme  de 
xLix  1.  X  s.  —Audit  M«  Jeh.  Gougeon,  pour  avoir  vaqué  par 
dix  moys,  à  solliciter  les  huchers  et  les  corriger  de  leurs 
faultes,  la  somme  de  xv  l.  xv  s.  —  A  Thierry  Du  Bosc, 
hucher,  pour  boys  et  peine  d'avoir  assis  lesd.  ars-boutans 
au  fust  des  orgues,  xx  s.  —  Paie  à  N"  Quesnel,  tailleur 
d'ymages,  pour  avoir  Êiict  six  images  à  mettre  aux  orgues, 
Lxii  1.  X  s.  —  Pour  le  vin  de  la  Saint-Martin,  aux  servi- 
teurs des  compositeurs  d'orgues,  x  s.  viu  d.  —  Ausd.  com- 
positeurs, pour  ung  disner  de  la  Saint-Martin,  xlv  s.  — 
A  un  nommé  Jeh.  Duchesne,  pour  avoir  faict  le  devys 
des  orgues  et  du  fust  et  ung  vittre,  xxv  l.  —  A  Robert 
Lecourt,  vitrier  et  peintre,  pour  avoir  faict  troys  pour- 
traictz  pour  le  feict  des  bans,  xlvii  s.   —  A  M«s   Robert 


Becquet  (i),  Jeh.  Gougeon  et  Jeh.  Duchesne,  pour  dire 
leur  opinion  de  l'ordonnance  de  deux  anges  et  ungloureur 
et  deux  autres  anges  avec  une  y  mage  Nostre  Dame,  paie 
xxxn  s.  —  A  M«  Anthoine  Josseline  et  Guilbert  Coquerel, 
compositeurs  desd.  orgues,  cl.  —  A  Ch.  Barate  (2), 
peintre,  pour  avoir  peint  les  orgues  et  ymages  iic  xvii  I.  x  s. 
—  Aud.  Barate,  pour  avoir  fleurdelisé  le  pendant  de  de- 
vant les  orgues,  v  1.  »  Mention,  dans  le  même  compte,  de 
Tautel  Saint- Julien  et  du  paiement  fait  à  Téglise  d'une 
somme  de  100  1.  par  Guill.  Bigot,  maître  de  la  confrérie 
de  Saint-Eutrope. 

1 542-1 543.  —  «  A  XII  organistes,  pour  avoir  visité  et 
fait  jouer  les  orgues,  x  1.  vu  s.  x  d.  •  —  Mention  <  de  la 
voirrière  Saint-Julien  >;  de  Tautel  Saint-Julien;  de  Ma- 
thieu Le  Roux,  orfèvre. 

1 543-1 544.  —  Mention  d'Antoine  Josseline,  facteur 
d'orgues. 

1544-1545.  —  Vente  du  fût  des  vieilles  orgues,  8  1.— 
Mention  €  du  benestier  de  l'autel  Saint-Sébastien.  » 

1547- 1548.  "~  Gages  de  l'organiste,  35  1.  t  Pour  vi  gal- 
lons de  vin,  lesquels  ont  esté  délivrez  à  M«  Toussains  et 
Le  Page,  clerc  de  lad.  église,  pour  son  bancquet  qu'il  a 
faict  comme  maistre  de  la  Sainte-Cécile,  xxiv  s.  —  Pour 
une  fourme  à  mestre  soubz  les  orgues  à  se  asseoir  pour 
cueillir  aux  reliques,  xviii  s.  »  Suivant  un  usage  gé- 
néral, les  aumônes,  à  certains  jours,  étaient  provoquées 
par  l'exposition  des  reliquaires. 

1548- 1549.  "~  *  Pour  avoir  raccoutré  les  anges  de  l'é- 
glise, au  paintre,  xxxv  s.  A  ung  masson,  pour  foire  les 
troux  des  voultes,  pour  pendre  lesd.  anges,  vi  1.  viii  s.  » 

(i)  Ailleurs,  le  même,  avec  Jeh.  De  la  Rue,  maçon,  et  Olivier 
Delacour,  est  chargé  de  visiter  Téglise. 

(2)  Ce  peintre  mourut  en  i553,  comme  le  prouve  cet  article 
inscrit  dans  le  compte  de  cette  année-là  :  «  Receu  pour  la  sépul- 
ture de  Ch.  Barate,  peintre,  xxn  s.  » 


l52 

—  8  aunes  de  corde  pour  tendre  le  voile  du  chœur.  —  «  A 
Pierre  Le  Febvre,  fondeur,  pour  ung  candélabre  à  mettre 
au  chœur,  xxxv  1.  >  Ce  candélabre  était  pendu  à  la  voûte 
par  des  verges  de  fer.  —  <  Pour  plomber  le  bénestier,  à 
rentrée  de  l'église,  xxxiii  livres  de  plomb  a  vi  d.  la  livre.  » 

1564.  —  On  paye  à  Christophe  Bellenger,  imaginier, 
demeurant  à  Saint-Pierre-de-Manneville,  38  1.  «  pour 
reste  et  parpaye  de  ce  qui  lui  étoit  dû  pour  avoir  fait  le 
crucifix  de  Téglise  et  les  2  images  >  (probablement  la  sainte 
Vierge  et  saint  Jean).  —  t  A  Georges  Le  Pilleur,  peintre, 
pour  les  avoir  peint  et  la  boise  (poutre  ou  arc  triomphal) 
portant  le  crucifix,  un"  v  1.  • 

1 582-1 583.  —  Construction  d'une  croix  devant  l'église, 
par  Thomas  Brière.  On  fit  venir  la  pierre  de  Vernon. 
Cette  croix  était  ornée  de  quatre  images  ou  statues.  Brière 
est  encore  cité  dans  le  compte  de  1607. 

Compte  de  i588.  —  Nouvelles  orgues  confectionnées  par 
un  nommé  Nicolas  Barbier,  dont  le  nom  se  retrouve  dans 
les  comptes  de  1590  et  de  i6o3.  Elles  furent  visitées  par 
Jean  Titelouze,  organiste  de  Notre-Dame,  et  par  Corneille, 
organiste  de  Saint-Michel.  La  même  année,  on  eut  recours 
à  Jérémie  Le  Pilleur,  peintre,  pour  redorer  la  couronne 
de  rimage  saint  Louis  (3i  1.  10  s.),  et  à  Timaginier  Jean 
de  Rouen,  pour  retailler  ladite  image. 

1589.  —  Travaux  de  verrerie  par  Philibert  Du  Mesnil. 

1591.  —  Paiement  de  60  1.  pour  travaux  exécutés  par 
le  peintre  Fernande  Du  Hay. 

1 599.  —  Contretable  feiite  par  Michel  Lourdet.  On  paye 
au  menuisier  Rouland  Sebeult,  174  1.,  c  pour  avoir  livré, 
devant  le  grand  autel,  les  carolles  avec  les  2  coulonnes  et 
les  2  anges  sur  icelles  coulonnes  ;  et  5o  s.  pour  2  lieu- 
trins  faicts  par  lui,  attachez  ausd.  carolles  et  coulonnes 
pour  dire  les  epistres  et  évangiles  >,  sans  compter  quel- 
ques gratifications  qu'on  lui  donna  sous  le  nom  d'honnes- 
tetéSy  et  8  livres  a\i  maçon  qui  avait  fait  les  bases  des  pié- 
destaux desd.  colonnes. 


i53 

1600.  —  Mention  des  verriers  Jean  Gaillard  et  Etienne 
Pinchon.  Ce  dernier  refit  une  vitre  qui  avait  été  en/on- 
drée  par  les  voleurs. 

1604.  —  Lourdet  reparaît.  On  lui  paye  21 3  1.  pour  tra- 
vaux de  dorure  au  grand  autel,  qu'on  déplace  pour  le  mettre 
plus  autour. 

1609.  —  Paiement  de  106  1.  à  Jean  Besoche  pour  tra- 
vaux de  verrerie. 

1612.  —  Mention  de  Jacques  Bernard,  facteur  d'orgues, 
et  de  Guillaume  Varenger,  menuisier,  qui  mit  des  balustres 
aux  orgues. 

16 14.  —  Mention  de  la  visite  faite  de  Tcglise  Notre- 
Dame-de-la-Ronde  par  le  coadjuteur. 

1616.  —  On  paie  5  1.  2  s.  6  d.  à  Philippe  Liégeard, 
menuisier,  pour  une  longue  forme  ou  table  pour  servir  à 
communier. 

1617.  —  Au  mois  d'août,  construction  d'un  oratoire 
pour  le  jubilé  des  40  heures.  On  fit  nettoyer  le  portail 
lorsque  le  roi  arriva  en  cette  ville. 

En  i653,  mention  du  tapis  qui  se  mettait  tous  les  jours 
à  la  chaire.  On  Tacheta  18  1.  (i). 

En  1736,  Tarchitecte  De  France  est  chargé  de  la  déco- 
ration du  choeur.  Un  nouveau  pavage  en  marbre  et  en 
terre  cuite  est  substitué  à  l'ancien.  Une  des  conséquences 
de  ce  travail  fut  la  destruction  des  tombes,  notamment  de 
celles  de  Mesard  et  de  Bacqueler.  La  chose  allait  telle- 
ment de  soi,  dans  la  pensée  du  Chapitre,  des  paroissiens 
et  de  l'architecte,  que,  dans  le  devis,  on  se  contente  de  les 
indiquer  en  termes  généraux  et  comme  de  simples  maté- 
riaux qu'il  ne  fallait  pas  laisser  perdre  :  «  Il  convient  faire 
scier  en  deux  une  grande  tombe  de  marbre  noir  qui  est 
de  présent  au  bas  du  chœur,  plus  une  autre  tombe  qui  est 
cassée  en  deux,  une  autre  plus  petite  qui  est  au  milieu 


(i)  Une  nouvelle  chaire  fut  faite  par  Mouard,   menuisier,  vers 
le  milieu  du  xviiie  siècle. 


134 

des  deux  grandes  cy-dcssus,  etc.,  le  tout  étant  de  marbre 
noir,  qui  serviront  de  tombes  et  bandes  au  pavage  tant 
devant  la  marche  du  sanctuaire  qu'aux  bouts  et  costes  des 
stalles,  lesd.  tombes  et  bandes  seront  bien  et  deuement 
ocarries  pour  y  faire  des  coupes  à  plat.  »  Ce  fût  avec  le 
même  sans-façon  qu'en  1738,  on  fit  disparaître  la  croix  de 
pierre  du  cimetière  et  que  Ton  supprima  l'ancien  portail 
avec  sa  vierge  et  ses  ornements  gothiques;  le  tout  pour 
la  construction  d'échoppes. 

DÉLIBÉRATION    AU    SUJET    DES   TAPISSERIES 

Le  mardi  xiii  d'avril  mil  vc  un"  dix-neuf,  feste  de  Pas- 
ques,  en  procédant  à  la  clausion  du  compte  rendu  par  le 
sr  Guill.  Du  Buse,  trésorier,  il  a  esté  proposé,  entre  aultres 
choses,  que  la  tente  généralle  qui  se  ÙLict  en  ceste  église 
le  jour  de  Pasques,  de  diverses  pièces  de  tapisseries,  ciels 
et  tapis,  n'étoit  point  nécessaire,  ny  bonne  de  continuer  à 
l'advenir,  d'aultant  que  la  plus  grande  partie  desd.  pièces 
(de  tapisserie)  se  voit  ordinairement  n'estre  que  des  his- 
toyres  et  représentations  prophanes  et  déshonnestes  qui 
n'aportent  nulle  révérance  ny  dévotion  en  l'honneur  de 
Dieu  ny  de  son  ecclise,  mais  seullement  une  curiosité  qui 
tend  à  volupté  par  le  regard  de  la  beauté  desd.  pièces, 
et  par  ainsy  l'intention  première  de  nos  anciens,  qui  n'a 
esté  que  pour  honnorer  Dieu  et  son  ecclise,  seroit  dé- 
laissée et  mesprisée.  Davantage  que  c'est  une  trop  grande 
peyne  au  trésorier  de  rechercher  par  tant  d'endroicts  la 
quantité  desd.  tapisseries  qu'il  luy  convient  avoir  en  telle 
occasion,  dont  souvent  il  advient  des  inimitiez  entre 
plusieurs  personnes,  à  cause  du  refus  qui  se  faict  de 
prester  aucunes  d'icelles  pièces,  joint  les  avaries  extraor- 
dinaires qu'il  y  a  en  l'exécution  de  lad.  tente  généralle, 
faicte  en  des  jours  qui  ne  sont  point  particulièrement  sol- 
lempnisez,  pour  ceste  paroisse,  et  partant  qu'il  estoit  bon 
d'en  résouldre  pour  l'advenir,  mesmes  en  considération 
que  Messieurs  les  grands  vicayres  et  archidiacre  de  Mgr 


i55 

l'archevêque  de  ceste  ville  ont,  par  plusieurs  foys,  aux 
cours  de  leurs  visites,  exhorté  les  curez  des  parroisses  de 
ceste  d.  ville  de  ne  permettre  tendre  en  leurs  ecclises 
telles  superfluitez  de  tapisseries  ;  ce  qui  a  esté  ainsy  dict 
et  raporté  par  mondit  le  doyen  et  curé  de  ceste  ecclise  ; 

Arresté  que,  pour  les  raisons  susdites,  il  ne  se  fera,  de 
ce  jour  et  à  Tadvenir,  aucune  tente  de  tapisserie  en  ceste 
d.  ecclise,  pour  ledict  jour  de  Pasques  ou  pour  les  autres 
festes  de  l'année,  sinon  que  ce  qu'il  conviendra  de  ciels 
et  tapis  pour  mettre  seullement  dans  le  chœur  et  dessoubz 
le  crucifix  d'icelle,  et  non  aultre  part,  parce  que  lesdits 
ciel  et  tapis  ne  seront  que  en  £aissons  de  fruicts  et  non 
à  personnages,  pour  éviter  l'interprétation  de  la  représen- 
tation d'iceulx  personnages,  et  ce  en  attendant  qu'il  y  ait 
moyen  de  faire  flaire  et  avoir,  aux  dépens  du  Trésor, 
telles  pièces  qui  sera  lors  advisé  pour  le  mieux  pour  la  dé- 
coration et  ornement  de  lad.  ecclise  ;  et  pour  ayder  à  faire 
fonds  audit  Trésor  pour  tel  effect,  il  a  esté  aussy  arresté 
que  chacun  trésorier,  pour  l'advenir,  donnera  audit  Trésor, 
en  la  dernière  année  de  sa  charge,  la  somme  de  douze 
escus  ou  autre  plus  grande  somme,  sy  sa  dévotion  l'incite 
à  ce  fayre,  et  que  la  présente  résolution  sera  suivie  et 
entretenue  d'ores  en  avant  et  pour  les  années  à  venir.  • 

LETTRE  DE  M.  DE  BELBEUF,  PROCUREUR  GÉNÉRAL,  AU  SUJET 
DU  CLOCHER  DE  NOTRE-DAME-DE-LA-RONDE 

c  RouCn^  ce  ii  avril  1770. 
c  Messieurs, 

•<  Vous  avés  eu  connaissance  que,  dans  les  années  1 766 
et  1767,  on  agita  pendant  longtemps  le  point  de  sçavoir 
si  le  clocher  de  vostre  église  menaçoit  ou  non  une  ruine 
prochaine,  capable  d'entraisner  dans  sa  chute  la  partie  de 
réglise  sur  laquelle  il  tomberoit  ;  les  maisons  de  plusieurs 
propriétaires  voisins  étoient  menacés  du  même  danger; 


i56 

la  perte  de  la  vie  et  de  la  fortune  de  ceux  qui  se  trouve- 
roient  sous  ces  ruines  ajoutoient  rhorreur  d'un  spectacle 
effrayant  au  malheur  général  dont  la  paroisse  craignoit 
le  moment.  Il  étoit  cet  instant  annoncé  comme  très  pro- 
chain ;  différents  proceds  verbaux  d*architectes  avoient 
jette  une  allarme  universelle  ;  vous  vous  rapellerés  encore 
que  pour  prévenir  tous  ces  maux,  il  fut  question  d'un 
emprunt  considérable  sur  la  paroisse  ;  qu'il  y  eut  même 
des  engagements  pris  par  la  fabrique  pour  la  somme  de 
1 5,000  1.  Vous  me  fîtes  part  de  vos  craintes  et  de  Teffroy 
public  qui  constcrnoit  vos  paroissiens  ;  nous  crûmes  ce- 
pendant qu'il  étoit  sage,  avant  que  de  se  livrer  à  une  dé- 
molition très  coûteuse  et  à  des  emprunts  très  onéreux,  et 
qu'il  convenoit  de  se  bien  assurer  des  dangers  comme  de 
ne  rien  épargner  pour  chercher  les  ressources  au  mal.  On 
sçait  bien  lorsqu'on  commence  un  ouvrage  de  cette  es- 
pèce le  prix  qui  est  annoncé  qu'il  doit  coûter,  mais  on 
ignore  toujours  ce  qu'il  coûtera.  Soyez  sur  que  votre 
église  auroit  été  culbutée  en  totalité  et  que  la  réédifîca- 
tion  auroit  été  généralle.  Il  n'y  a  plus  de  bornes  alors  aux 
dépenses;  elles  tiercent  sur  celles  des  particuliers  quand 
elles  regardent  des  corps  ou  des  administrations.  Je  peux 
dire,  Messieurs,  qu'un  œil  de  sang  froid  sur  vos  dangers 
prétendus  vous  a  sauvés,  soit  à  titre  de  trésoriers  ou  de 
propriétaires,  cette  dépense  accablante.  Votre  trésor  s'en 
seroit  senti  longtemps,  et  les  propriétaires  suporteroient 
aujourd'huy  une  lourde  somme,  chacun  pour  sa  contribu- 
tion; différentes  ordonnances  que  je  rendis  arrêtèrent  les 
pas  qu'on  vous  engageoit  de  précipiter.  Le  sieur  Quinel, 
architecte,  fut  par  moy  nommé  pour  vérifier  la  cause  des 
lézardes  qu'on  croyoit  apercevoir  pour  la  première  fois  au 
lever  d'un  beau  soleil  qui  les  éclaira.  Je  luy  fis  remettre 
les  anciens  proceds  verbaux  de  ces  lézardes  antiques  ainsi 
que  des  inclinaisons  des  murs  des  pilliers  du  clocher  ;  il 
aperçut,  après  un  travail  sage,  sans  prétentions  que  le  vice 
qu*on  disoit   nouveau  étoit  aussi  ancien  que  le  moment 


•57 

premier  ou  après  la  construction  du  clocher  le  bâtiment, 
ayant  reçu  ce  poids,  avoit  cherché  de  lui-même  son  aplomb 
et  qu'en  se  roidissant  contre  le  fardeau  qu'on  venoit  de 
luy  donner  il  avoit  feit  des  efforts  pour  établir  Tapuy  né- 
cessaire de  toutes  les  forces  qui  en  dévoient  soutenir  la 
masse,  que  ces  efforts  avoient  donné  lieu  aux  lézardes,  et 
qu'ainsy  il  ne  falloit  point  faire  de  constructions  nou- 
velles ny  de  démolition  du  clocher,  mais  seulement  répa- 
rer et  rétablir  en  neuf  certaines  parties  qui  avoient  été 
mal  faites  dans  le  principe  ;  dépense  médiocre  en  compa- 
raison de  celle  qu'on  vous  présentoit  à  faire  et  dont  vous 
ne  connoîtriez  peut-être  pas  encore  le  capital. 

«  Il  l'échafauda,  il  dressa  desproceds  verbaux;  ces  actes 
donnèrent  lieu  h  une  discussion  littéraire  entre  luy  et  les 
architectes  qui  condamnoient  votre  église  à  une  chute 
prochaine.  Il  prit  en  main  vos  intérests  et  il  les  défendit 
si  bien  et  si  publiquement  que  M.  l'Intendant  jugea  à 
propos,  à  la  lecture  de  ces  écrits  respectifs,  de  faire  faire 
une  visitte  d'office  par  deu»  ingénieurs  qui  trouvèrent 
qu'il  n'y  avoit  point  de  danger  à  craindre  du  clocher  ny  de 
nécessité  de  démolir  aucunes  parties  de  l'église,  mais  qu'il 
suffisoit  de  faire  des  réparations  ;  cela  est  constant  par 
leur  proceds  verbal  du  6  febvrier  1767. 

«  Le  sieur  Quinel  est  donc  l'homme  qui  vous  a  servi 
utilement.  Son  assurance  et  sa  fermeté  à  soutenir  un 
point  de  fait  aussi  intéressant  pour  vous  a  donc  sauvé  à 
votre  fabrique  et  à  tous  les  propriétaires  une  dépense 
énorme  et  accablante  ;  vous  jouisses  tous  aujourd'huy  de 
ses  peines,  puisqu'au  moyen  d'une  dépense  modique  vous 
avés  l'avantage  d'avoir  conservé  un  monument  ancien 
dans  cette  ville,  une  église  suffisante  à  votre  paroisse,  et 
vos  revenus  sans  cotisation  lourde  et  fort  chères  dans  des 
années  surtout  où  le  pauvre  suffit  à  peine  à  ses  besoins 
et  où  le  riche  est  trop  heureux  d'avoir  du  superflu  pour 
le  répandre  chés  l'indigent.  Il  est  juste  que  le  sieur 
Quinel    soit   payé  ;    il    s'est   adressé  à   moy   pour  vous 


i58 

présenter  sa  prière.   Je  m'en  suis  d'autant  plus  volontiers 
chargé  que  j'ai  connu  ses   vu^s,   que  j'ai  réglé  ses  dé- 
marches et  que  je  suis  persuade  que  vous  m'en  avés  de  la 
reconnaissance. 
«  Jay  rhonneur  d'être,  Messieurs,  votre  très  humble  et 

très  obéissant  serviteur, 

c  Belbeuf.  » 

Ce  qui  attire  le  plus  Tattention  dans  les  documents 
cités  à  la  suite  de  cette  notice  c^est  Tindication  d'un 
travail  dont  fut  chargé  Jean  Gougeon. 

On  ne  saurait  affirmer  qu'il  s'agisse  du  fameux 
sculpteur;  ce  n'est  pas  cependant  invraisemblable, 
puisque  cet  artiste  passe  pour  avoir  séjourné  et  tra- 
vaillé à  Rouen  vers  cette  époque. 

M .  le  Président  fait  observer  que  les  mêmes  prénoms 
se  transmettaient  dans  les  familles,  et  que  Ton  ne  peut 
induire  de  cette  communication  rien  de  précis  à  Tégard 
du  célèbre  artiste. 

PETIT-QUEVILLY. 

M.  Tabbc  Tougard  rappelle  que,  à  la  fin  du  mois  der- 
nier, la  presse  locale  et  même  la  presse  parisienne  ont 
signalé  des  inscriptions  plus  ou  moins  patriotiques,  fraî- 
chement apposées  sur  la  chapelle  Saint-Julien  ;  en  s'éton- 
nant  que  la  Commission  des  antiquités  n*ait  pas  protesté 
h  ce  sujet. 

La  Commission  estime  qu*il  n'y  a  pas  lieu  d'introduire 
ce  débat. 

La  séance  est  levée  à  trois  heures  et  demie. 

G.    GOUELLAIN. 


iSg 


SÉANCE  DU   i6  DÉCEMBRE  1882. 


La  séance  ouvre  à  deux  heures  à  la  Préfecture,  dans 
la  salle  des  adjudications,  sous  la  présidence  de  M.  de 
Beaurepaire,  vice-président. 

Présents  :  MM.  Adeline,  Paul  Baudry,  Billiard, 
Bouquet,  Tabbé  Lx)th,  Maillet  du  Boullay,  de  Merval, 
Pelay,  Tabbé  Tougard,  de  Vesly. 

Excusés  :  MM.  Brianchon  et  de  Girancourt. 

En  Tabsence  de  MM.  d'Estaintot  et  Brianchon, 
Tabbé  Tougard  est  chargé  des  fonctions  de  secrétaire. 

La  correspondance  imprimée  comprend  : 

CompteS'-rendus  de  la  Société  des  Antiquaires  de 
Saint-Pétersbourg,  i"  fascicule  gr.  in-40  et  atlas 
gr.  in-fol.  ;  —  Bulletin  de  la  Société  des  Antiquaires 
de  rOuesty  2«  et  3«  trimestre  de  1882  ;  —  Commission 
des  Antiquités  et  des  Arts  de  Seine-et-Oise,  2«  fasci- 
cule de  1882  ;  —  Mémoires  de  la  Société  d'Agricul- 
ture   d'Orléans,  4*  trimestre  de  1*882  ;  —  Bulle- 
tin de  la  Société  historique  et  archéologique  de 
LangreSy  t.  II,  mai  1882  ;  —  Recueil  des  Publica- 
tions de  la  Société  havraise  d'Études  diverses, 
46*^  année,  1879  ;  —  Procès-verbaux  des  séances  de 
la  Société  des  Lettres ,  Sciences  et  Arts  de  VAvey- 
ron,  juillet  1878-mars  1880;  —  Mémoires  de  la  5o- 
ciété  de  statistique,  Sciences  et  Arts  des  Deux- 
Sèvres,  2«  série,  vol.  XIX  (pour  1881)  ;  —  Bulletins 
de  la  Société  de  statistique,  Sciences  et  Arts  des 
Deux-Sèvres,  n^*  7-12,  2  fascicules  ;  —  Bulletin  de 
la  Société  d'Histoire,  d'Archéologie  et  de  Littéra- 
ture de  l'arrondissement  de  Beaune,  1881  ;  —  Bul- 
letin  de  la  Société  des  Antiquaires  de  Picardie,  1882, 


i6o 

n°  2  ;  — Bulletin  de  la  Société  des  Amis  des  Sciences 
naturelles  de  Rouen,  1882,  i*^  semestre; — Mémoires 
de  la  Société  historique  du  Cher,  3«  série,  t.  II, 
3«  livraison  ;  —  Board  of  régents^  of  the  Smith- 
sonian  institution  for  the  geer,  Washington,  1882. 

La  correspondance  manuscrite  comprend  une  lettre 
de  M.  le  Préfet,  qui  annonce  le  renouvellement  du 
crédit  de  1,000  fr.,  voté  par  le  Conseil  général,  et  ré- 
clame le  dépôt  dans  les  bureaux  du  Bulletin  de  la 
Commission,  qui  doit  être  mis  sous  les  yeux  de  ras- 
semblée départementale. 

Armes  et  autres  objets  antiques,  —  M.  de  Vesly  a 
la  parole  pour  Timportante  communication  qu'il  a 
résumée  lui-même  dans  les  termes  suivants  : 

Le  service  des  ponts  et  chaussées  a  fait  exécuter,  depuis 
une  année,  entre  Elheuf  et  Orival,  des  dragages  dont  la 
dépense  a  dépassé  1 85, 000  francs.  C'est  dire  que  plus  de 
16,000  mètres  cubes  de  sable  ont  été  extraits  du  lit  du 

fleuve.  Un  tel  travail  devait  nécessairement  amener  des 

« 

découvertes  archéologiques.  Aussi  MM.  de  Lagrené  et 
G.  Lechalas,  ingénieurs  des  ponts  et  chaussées,  sous  les 
ordres  desquels  les  dragages  s'exécutaient,  ont-ils  tenu 
rigoureusement  à  l'accomplissement  de  la  clause  du  cahier 
des  charges  mentionnant  la  remise  des  objets  trouvés  à 
l'administration  des  ponts  et  chaussées. 

C'est  donc  grâce  à  la  vigilance  des  agents  chargés  de  la 
surveillance  des  dragues  que  notre  collègue,  M.  Léon  de 
Vesly,  a  pu  dresser  l'inventaire  des  objets  recueillis. 

OBJETS   d'époques   DÉTERMINÉES. 

lo  Belle  épée  de  l'âge  de  bronze;  20  Lance  gauloise; 
3*»  Épée  gallo-romaine;  4°  Fragments  gallo-romains; 
30  Fer  de  lance  gallo-romaine  ;  60  trois  fers  de  lances 
mérovingiennes;  70  quatre  scramasaxes;  8°  une  francisque; 


i6i 

90  un  couteau  carlovingien  incrusté  d'or;  100  une  lame 
de  couteau;  iio  Fragments  d'épée;  12°  Ecuelle  d'étain, 
xiie  siècle,  avec  marque;  i3o  Poignard  du  xv«;  14»  Fer 
de  hallebarde  du  xv«  ;  1 5o  Chandelier  du  xv«  ; 

OBJETS  d'époques  INDéTERMlNÉES. 

160  Faucille;  170  Lame  de  fleuret;  180  Baïonnette; 
190  Canon  de  fusil. 

DÉBRIS  DE  LA  FAUNE. 

Ossements  de  mammouth,  de  bos  primigenius^  de  cerf, 
de  cheval  et  plusieurs  ossements  qui  n'ont  pu  être  déter- 
minés. 

Sur  la  demande  de  M.  Tabbé  Tougard,  M.  de  Vesly  avait 
été  prié  de  faire  connaître  la  profondeur  du  gisement  où 
les  objets  avaient  été  trouvés.  Ce  travail  n*a  pas  été  pos- 
sible :  car  les  états  d'attachement  mentionnent  le  profil, 
c'est-à-dire  l'endroit  de  la  rivière  d'où  les  objets  ont  été 
extraits;  mais  il  faudrait  une  vérification  de  la  profondeur 
atteinte  par  la  drague  au  moment  de  la  découverte,  et  il  y 
a  là  des  impossibilités  d'un  ordre  matériel. 

M.  le  Président  prie  M.  de  Vesly  de  faire  une  épure 
des  pièces  les  plus  intéressantes  qu'il  vient  de  présen- 
ter à  la  Commission,  et  il  fait  voter  des  remercîments 
à  M.  Léchalas  et  à  M.  de  Vesly. 

M.  Pelay  demande  à  notre  confrère  s'il  a  pu  sur- 
veiller également  les  dragages  exécutés  dans  le  port  de 
Rouen^  et  qui  ont  dû  retirer  des  eaux  de  curieuses 
pièces.  M.  de  Vesly  répond  que  les  ouvriers  ont 
fait  main  basse  sur  ce  qu'ils  ont  jugé  à  leur  conve- 
nance :  il  ne  peut  signaler  qu'un  chandelier  et  une 
marmite  de  bronze,  trouvés  ensemble,  et  qui  sont  au- 
jourd'hui en  vente  chez  un  brocanteur. 

Anciennes  maisons  de  Rouen.  —   M.   Maillet  du 

II 


l62 

Boullay  offre  à  la  Commission  la  photographie  de  deux 
maisons  de  Rouen,  Tune  du  quartier  Saint-Sever,  et 
Tautre  à  Tangle  de  la  rue  Tuvache  et  de  la  rue  Mal- 
palu. 

Cette  dernière  lui  fournit  Toccasion  de  rectifier  une 
note  publiée,  il  y  a  trois  jours,  par  le  Journal  de 
Rouen,  L'auteur  de  cette  note  affirmait  qu^on  la  voyait 
V  disparaître  avec  regret;  >  tandis  que,  grâce  aux  soins 
de  notre  collègue,  elle  ne  disparaîtra  pas  du  tout.  Il  Ta 
visitée  avant  que  les  ouvriers  aient  commencé  à  l'atta- 
quer; et  Tadministration  municipale  ayant  corres- 
pondu avec  bienveillance  à  ses  désirs,  il  en  a  recueilli 
dans  le  musée  départemental  les  remarquables  épaves, 
entre  autres  des  pilastres  les  plus  beaux  qui  se  puissent 
voir  à  Rouen.  Il  avisera  ensuite  à  restituer  cette  mai- 
son à  rinstar  de  celles  qu'on  a  déjà  restaurées. 

Ses  efforts  ont  été  moins  heureux  quant  à  une  mai- 
son de  Saint-Sever,  dont  M.  P.  Baudry  possède  heu- 
reusement plusieurs  dessins.  Car  les  fragments  sont 
loin  d'être  au  complet,  et,  pour  Torigine  de  ces  dispa- 
ritions, il  faut  remonter  avant  la  guerre,  et  en  attribuer 
la  responsabilité  à  des  hommes  qui  n'y  avaient  vu 
qu'un  vulgaire  moyen  de  chauffage. 

Découverte  d'un  trésor  à  Blévilie.  —  Le  même 
membre  a  reçu,  en  date  du  5  courant,  une  lettre  de 
M.  le  Préfet,  lui  demandant  son  avis  sur  une  autori- 
sation de  vente  formulée,  le  1 1  novembre  dernier,  par 
le  Conseil  municipal  de  Bléville,  au  sujet  d'un  trésor 
ou  cachette  trouvée  dans  l'ancien  cimetière,  et  se  com- 
posant de  1 3o  pièces  d'or  des  xiii«,  xïv«  et  xv^  siècles. 
L'intention  de  la  municipalité  est  de  provoquer  une 
vente  publique,  au  Havre,  après  l'avoir  annoncée  avec 
toute  la  publicité  possible. 


i63 

La  première  pensée  de  M.  Maillet  du  Boullay  avait 
été  de  prier  M.  le  Préfet  d'y  mettre  opposition.  Il  se 
fondait  sur  ce  que  Tautorisation  réclamée  impliquait 
que  la  commune  n'avait  pas  un  droit  absolu  de  vendre. 
Sur  quoi  M.  de  Beaurepaire  fait  remarquer  que  Tau- 
torisation  n'est  qu'une  pure  formalité  résultant  de  la 
tutelle  administrative. 

Aussi^  réflexion  faite,  et  la  loi  accordant  moitié  de 
la  trouvaille  à  Touvrier,  et  moitié  à  la  commune,  M.  le 
Conservateur  du  musée  s'est  borné  à  répondre  au 
Préfet  qu'il  serait  grandement  désirable  qu'il  ne  fût 
pas  procédé  à  la  vente  publique,  avant  qu'on  ait  pu 
constater  quelles  sont  les  pièces  de  ce  trésor  qui  man- 
quent à  la  collection  départementale,  de  façon  à  ce 
qu'elles  pussent  être  acquises  de  gré  à  gré,  sur  estima- 
tion contradictoire  à  dire  d'experts.  L'une  de  ces  pièces 
a  été  offerte  à  la  personne  qui  a  été  chargée  de  colla- 
tionner  et  d'estimer  provisoirement  ce  trésor. 

Antiquités  diverses.  —  M.  le  Président  rappelle 
qu'il  est  resté  dépositaire  de  divers  objets  qui  doivent 
être  déposés  au  musée,  et  dont  quelques-uns  mérite- 
raient les  honneurs  de  la  gravure,  par  exemple,  ce  dé- 
bris de  vase  qui  portait  l'inscription  :  Pense  à  la  mort, 
poure  sot. 

Fragments  de  vitraux.  —  Il  signale,  en  outre, 
parmi  eux,  les  restes  de  deux  vitraux  de  Saint-Gervais, 
décrits  par  M.  Thieury  dans  son  ouvrage  sur  cette 
église.  Ils  avaient  été  déplacés  lors  de  la  restauration 
du  monument;  mais  leur  nouvel  emplacement  les  ex- 
posa bien  davantage  aux  intempéries  de  l'air,  et  une 
bourrasque  les  a  crevés,  en  rendant  impossible  toute 
reconstitution. 

M.  Maillet  du  Boullay  explique  qu'il  a  recueilli  de 


t64 

semblables  fragments  à  Saint-Maclou,  et  que  le  rem- 
placement des  anciens  vitraux  de  cette  église  lui  fera 
peut-être  courir  le  risque  dMtre  encombré  de  ces  frag- 
ments. 

On  objecte  que  si  le  Musée  départemental  vient  à 
être  transféré  dans  Téglise  Saint-Laurent,  ces  débris 
pourront  devenir  un  utile  auxiliaire  de  cette  installa- 
tion nouvelle. 

Cathédrale.  —  Tour  de  Beurre.  —  M.  Tabbé  Loth 
demande  à  la  Commission  de  formuler  un  vœu  dont 
il  n^aura  aucune  peine  à  lui  faire  sentir  Timportance. 

Tous  nos  confrères  savent,  en  effet,  que,  cette  se- 
maine même^  une  gargouille  s*est  détachée  de  la  Tour 
de  Beurre,  et  a  causé  le  plus  juste  émoi  dans  le  voisi- 
nage :  car  le  fracas  de  sa  chute  a  fait  croire  à  une  ex- 
plosion. 

M.  Loth  a  visité  la  tour  à  la  suite  de  l'événement, 
et  il  a  été  frappé  de  son  état  de  délabrement.  Depuis 
longues  années  elle  n'est  Tobjet  d'aucune  surveillance, 
mais  livrée  à  un  entier  abandon.  Les  vents  et  les 
pluies  ont  emporté  les  mortiers  et  descellé  d'énormes 
pierres  ;  en  sorte  que  de  nouveaux  accidents  sont  à 
craindre. 

M.  Bouquet  confirme  les  paroles  du  dernier  histo- 
rien de  la  cathédrale  par  l'effroi  qu'il  a  éprouvé  lui- 
même,  il  y  a  déjà  plusieurs  années,  en  visitant  la 
tour.  Il  signale  spécialement,  au  passage  qui  donne 
accès  dans  la  tour,  une  trentaine  d'éclats  de  pierre 
qu'une  bourrasque  pourrait  fort  bien  lancer  sur  la  voie 
publique,  et  demande  que  ces  pierres  soient  enlevées. 

Il  se  demande  même  comment  on  osait  sonner  Té- 
norme  Georges  d'^Amboise.  M.  de  Beaurepaire  répond 
qu'il  n'était  sonné  que  rarement,  et  non  sans  appré- 


i65 

hension,  à  cause,  disent  les  registres  capitulaires,  de 
rétonnement delà  tour. 

M.  l^abbé  Loth  constate  que  la  restauration  de  la 
cathédrale  se  poursuit  sans  relâche,  grâce  aux  alloca- 
tions généreusement  accordées  par  le  Gouvernement. 
Les  sommes  dépensées  sont  considérables,  sans  doute, 
mais  ne  répondent  pas  à  Timportance  de  Tédifice.  Des 
basiliques  beaucoup  moins  vastes,  celles  de  Séez  et  de 
Coutances,  par  exemple,  sont  mieux  partagées.  Notre 
collègue  voudrait  donc  que,  après  un  examen  compé- 
tent de  la  situation,  on  fît  auprès  de  M.  le  Préfet  une 
respectueuse  instance  pour  qu'il  voulût  bien  stimuler 
la  bienveillance  du  comité  supérieur  des  architectes  de 
Paris. 

La  Commission  décide  que  deux  de  ses  membres, 
MM.  les  architectes  de  Vesly  et  Simon,  se  joindront  à 
M.  l'abbé  Loth  pour  visiter,  jeudi,  la  Tour  de  Beurre, 
et  que  le  résultat  de  leurs  observations  sera  consigne, 
par  écrit,  et  transmis  immédiatement  au  Préfet. 

—  M.  P.  Baudry  lit  les  deux  notes  suivantes  : 

GAILLON.    —   DÉCOUVERTES   ARCHéOLOGIQUES 

M.  le  docteur  Hurel,  de  Gaillon,  dont  vous  avez  bien 
voulu  consigner  déjà  quelques  découvertes  archéolo- 
giques (t.  IV,  p.  342  du  Bulletin  de  la  Commission),  m'a 
fait  part,  cette  année,  de  ce  qui,  depuis  cette  époque,  a 
été  trouve  dans  la  région  qu'il  habite  et  en  grande  partie 
recueilli  par  lui. 

Je  citerai  entre  autres,  dans  les  travaux  faits  pour 
l'écluse  de  Notre-Dame-de-la- Garenne,  commune  de 
Saint-Pierre-la-Garenne,  deux  hachettes  en  pierre,  une 
dent  qu'il  croit  être  d'éléphant,  et  des  ossements  ;  à  Saint- 
Aubin,  un  fragment  de  hachette;  au  hameau  de  Chante- 
loup,   deux  percuteurs,  une  hachette  et  des  flèches  en 


i66 

pierre;  à  Autheuil,  une  hachette;  à  Noire-Dame-de-la- 
Garenne,  quatre  tombeaux  en  plâtre. 

ANCIENNES  CHAIRES.   —  NOTES  DE  RAYMOND  BORDEAUX 

Le  Bulletin  de  la  Commission  des  antiquités  constate 
(t.  III,  p.  335)  que  j'ai  offert  à  cette  Société  le  calque  d'un 
dessin,  fait  par  M.  d'Arras,  architecte,  de  l'ancienne 
chaire  en  bois  de  Notre-Dame. 

Pour  venir  tardivement,  quelques  notes  relatives  à  cet 
ancien  monument  ne  seront  peut-être  pas  sans  intérêt, 
d'autant  que  je  les  lire,  en  grande  partie,  d'une  corres- 
pondance qui  m'avait  été  adressée  en  1874,  sur  le  même 
sujet,  par  M.  Raymond  Bordeaux,  de  regrettable 
mémoire. 

Notre  savant  confrère  considérait  cette  chaire  comme 
très  curieuse  et  comme  étant  peut-être  la  seule  chaire 
épiscopale,  à  roulettes,  conforme  aux  rites,  qui  eût  sur- 
vécu aux  transformations  modernes.  Les  chaires  fixes, 
nous  écrivait-il,  convenaient  aux  paroisses  remplies  de 
bancs  fixes.  Les  chaires  roulantes  étaient  celles  des  cathé- 
drales, où  il  n*y  avait  autrefois  ni  sièges  ni  bancs  d*œuvre. 

La  chaire  de  Notre-Dame,  d'après  le  même  archéo- 
logue, était  une  tribune  à  barreaux,  analogue  au  barreau 
des  anciens  tribunaux.  On  plaçait  sur  son  vaste  plancher 
la  chaise,  le  fauteuil,  cathedra^  de  l'archevêque,  qui  s'as- 
seyait là,  entouré  de  son  cortège.  Les  barreaux  ne  devaient 
pas  être  primitivement  garnis  d'un  lambris,  mais  d'une 
tenture,  et  pouvaient  laisser  voir  le  fauteuil.  Il  y  avait,  il 
y  a  peut-être  encore  à  Rugles,  à  Verneuil,  des  chaires  en 
fer  et  à  jour  comme  des  balcons. 

Les  anciennes  chaires,  dit  encore  M.  Raymond  Bor- 
deaux, étaient  peu  élevées  et  beaucoup  moins  que  les 
jubés.  Le  tact  de  nos  pères  leur  eût  fait  trouver  inconve- 
nant d'obliger  un  évêque,  un  prêtre  âgé,  de  monter  un 
long  escalier,  quand  un  degré  de  quatre  ou  cinq  marches 
suffisait   pour   le   placer  au-dessus  de   l'auditoire.    Des 


16; 

transformations^  relativement  modernes,  avaient  dû  en 
effet  exhausser  le  plancher  et  l'appui-main  de  la  chaire  de 
Notre-Dame  et  donner  plus  de  développement  à  Tescalier. 
Un  article  de  la  Semaine  religieuse  (1881,  p.  1004)  cons- 
tate même  que  la  chaire  aurait  été  surélevée  de  la  hauteur 
de  la  petite  galerie  qu'on  remarquait  à  sa  base. 

L*abat-voix,  toujours  d'après  M.  Raymond  Bordeaux, 
était  étranger  aux  usages  anciens  et  ne  prenait  jamais 
l'apparence  d'un  dais  ou  d'un  baldaquin,  couronnement 
autrefois  réserve  aux  autels  et  au  Saint-Sacrement.  Notre 
savant  confrère  citait,  à  l'appui  de  cette  assertion,  une 
chaire  roulante  de  la  cathédrale  de  Troyes,  chaire  du 
xvi^  siècle,  connue  sous  le  nom  de  chaire  de  Saint-Ber- 
nard. Elle  n'a  pas  d'abat-voix,  disait-il,  non  plus  qu'une 
autre  chaire  roulante,  reléguée  dans  un  coin  de  la  collé- 
giale de  Saint- Quiriace,  à  Provins. 

Les  premiers  abat-voix  étaient  en  forme  de  carène, 
continue  notre  correspondant,  comme  celui  de  l'église 
Saint-Cyr  d'Issoudun,  dont  la  chaire  date  de  161 8;  c'était 
un  petit  toit  garni  de  deux  crochets  potences,  en  fer,  qui 
ont  dû  servir  à  tendre  un  voile  ou  une  tapisserie.  Mais  la 
plupart  des  abat-voix  primitifs  affectaient  la  forme  d'un 
plafond  plat,  comme  celui  de  Coutances  et  comme  ceux 
que  l'on  voit  représentés  dans  les  intérieurs  d'églises 
peints  par  Peters-Neefs.  Le  large  châssis,  l'immense  et 
lourde  visière  supportant  une  sorte  de  bonnet  carré,  cou- 
vert d'une  toile  insignifiante,  qui  dominait  l'ancienne 
chaire  de  Notre-Dame,  offrait  une  réminiscence,  très  mal 
reproduite  à  une  époque  moderne,  d'un  ancien  couron- 
nement en  carène. 

Construite  en  juillet  1 599  par  un  menuisier  de  Rouen 
du  nom  de  Nicolas  Guillebert,  ainsi  que  le  rapporte  l'ar- 
ticle de  la  Semaine  religieuse  déjà  cité,  la  chaire  de  Notre- 
Dame  a  servi,  pendant  deux  cent  soixante-dix-huit  ans, 
de  tribune  sacrée  à  d'éminents  orateurs,  au  R.  P.  Galle- 
mant,  en  1614;  au  P.  Le  Jeune,  à  Bourdaloue,  et,  de  nos 


i68 

jours,  à  M.  Fayet,  au  P.  de  Ravignan,  au  P.  Félix,  au 
P.  Montsabré  et  à  tant  d'autres. 

A  cause  des  différents  souvenirs  qui  s*y  rattachaient,  il 
nous  a  paru  juste  de  consacrer  une  courte  mention  à  cet 
ancien  spécimen  d'ameublement  ecclésiologique  qui, 
comme  on  le  sait,  a  été  remplacé  en  1877. 

M.  de  Beaurepaire  rectifie  ropinion  de  M.  P.  Bau- 
dry,  relativement  aux  chaires  roulantes.  Elles  ne  furent 
pas  exclusivement  épiscopales.  Car  en  plein  xvrii®  siè- 
cle, la  fabrique  de  l'église  Saint-Michel,  à  Rouen, 
commanda  une  chaire  mobile.  Et  de  même  la  chaire 
de  Saint-Ouen  servit  souvent  pour  les  prédications 
faites  dans  le  cimetière  de  Saint-Nicaise.  La  nécessité 
souvent  imposée  de  parler  en  plein  air,  vu  Taffluence 
des  auditeurs,  eût  suffi  pour  multiplier  les  chaires 
roulantes. 

Quant  aux  abat-voix,  ils  étaient  inconnus  en  France, 
et  nous  vinrent  d'Italie.  En  iSiy,  un  religieux  pié- 
montais  nommé  François  Ceva,  prêchant  à  la  cathé- 
drale, demanda  que,  suivant  Pusage  de  son  pays,  un 
appentis  fut  établi  au-dessus  de  la  chaire  ad  rétention 
nem  vocis.  —  M.  Bouquet  ajoute  qu'on  ne  voit  point 
d'abat-voix  dans  les  miniatures  du  Roman  du  Renard, 

—  M.  le  Président  communique  alors  le  mémoire 
qui  suit  : 

Si  Ton  jette  les  yeux  sur  un  ancien  plan  de  Rouen,  on 
y  verra  figuré,  au  milieu  d'une  place  fort  étroite,  vers 
l'extrémité  de  la  rue  de  la  Grosse -Bouteille,  un  bâtiment 
en  forme  de  colombier,  sous  la  désignation  de  la  Cour  du 
Tôt.  Au  chapitre  xvuie,  intitulé  :  Hotels  les  plus  célèbres 
de  Rouen ^  le  continuateur  de  Farin  n'a  pas  oublié  d'en 
faire  mention,  et,  à  vrai  dire,  cet  hôtel  avait  droit,  sinon 
à  la  célébrité,  du  moins  à  l'attention  :  par  les  privilèges 


169 

dont  il  prétendait  jouir,  il  présentait  quelque  chose  de 
singulier  au  sein  d'une  bourgeoisie  absolument  étrangère 
depuis  longtemps  au  régime  féodal.  Le  passage  de  VHis- 
toire  de  Rouen  auquel  je  fsiis  allusion  étant  fort  court,  il  ne 
me  coûtera  guère  de  le  reproduire,  ni  à  vous,  Messieurs, 
d^en  entendre  la  lecture.  Voici  ce  passage  : 

c  Hôtel  du  Tôt.  Cet  hôtel  est  maintenant  nommé  la 
Cour  du  Toty  dans  laquelle  on  voit  un  colombier  et  des 
maisons  où  demeurent  plusieurs  particuliers.  C'est  un  fief 
de  haubert,  qu'on  appelle  vulgairement  le  fief  du  Tôt,  dont 
le  seigneur  jouit  de  plusieurs  beaux  privilèges,  savoir  :  du 
droit  de  foire,  de  colombier,  de  pêche  dans  la  rivière  de 
Seine,  de  chasse,  de  chauffage  dans  les  quatre  forêts  de  la 
vicomte  de  Rouen,  et  de  plusieurs  autres  droits  qu'il 
seroit  trop  long  de  détailler  ;  et  il  est  d'autant  plus  consi- 
dérable qu'il  est  unique  en  son  espèce  et  au  milieu  d*une 
grande  ville.  Les  lettres  de  ce  fief  portent  qu'il  est  assis 
dans  risle  de  Notre-Dame,  parce  que  ce  quartier  de  la 
ville  jusqu'à  la  porte  Martain ville  s'appeloit  autrefois  Tlsle 
de  Notre-Dame;  peut-être  à  cause  que  la  petite  rivière 
d'Aubette  semble  faire  une  isle,  eu  égard  à  la  rivière  de 
Seine,  et  que  la  plupart  des  maisons  doit  quelque  rente 
au  chapitre  de  Notre-Dame.  Jacques  Frontin,  écuyer, 
étoit,  en  1668,  le  seigneur  de  ce  fief  du  Tôt,  et,  en  cette 
qualité,  étoit  le  premier  paroissien  de  Saint- Maclou.  Il 
portoit  pour  armes  d'argent  à  un  chevron  de  gueules  à 
trois  branches  de  houx.  » 

Disons-le  en  passant,  l'Ile  Notre-Dame  ne  paraît  pas 
avoir  eu  une  si  grande  étendue  que  celle  qui  lui  est  attri- 
buée dans  cette  citation.  Ce  qui  est  certain,  c'est  que  cette 
désignation  s'appliquait  à  un  terrain  que  le  Chapitre  avait 
fieffé,  en  1377,  à  Jean  Le  Gras,  terrain  qui  appartenait, 
en  i53o,  à  un  nommé  Nicolas  de  la  Chesnaye  (i),  et  qui 

(i)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  G.  4405.  —  Il  est  question  de  ce 
terrain  dans  une  délibération  du  Chapitre  de  la  cathédrale  du 


I  JO 

était  limité  par  TAu bette  et  par  le  canal  de  la  Seine.  Les 
échevins  et  le  Chapitre  de  Rouen,  contestaient,  en  1 53o,  a 
ce  propriétaire,  le  droit  d*élever  des  maisons  du  côté  de  la 
rivière  et  des  murailles  de  la  ville,  ce  qui  nous  donne  lieu 
de  supposer  que  Tlle  Notre-Dame  était  encore  considérée, 
à  cette  époque,  comme  située  en  dehors  de  Tenceinte  de 
Rouen. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  fief  du  Tôt  était  possédé,  en  1 586, 
par  Charles  Quesnel,  bourgeois  de  Rouen,  lequel  ne  pre* 
nait  aucun  titre  nobiliaire;  même  à  une  époque  anté- 
rieure, il  n'en  eût  point  eu  besoin  pour  posséder  très  léga- 
lement un  fief  noble,  et  cela  en  vertu  d'un  privilège 
reconnu  officiellement  aux  bourgeois  de  Rouen  depuis 
Louis  XL  Ce  fief  devint,  en  1617,  la  propriété  de  Cathe* 
rine  Quesnel,  veuve  de  Soupplix  Le  Plastrier,  fille  et  héri- 
tière de  Charles  Quesnel.  Il  appartenait,  en  i632,  à 
Jacques  Frontin,  sieur  de  la  Hauteville,  conseiller  du  Roi, 
auditeur  de  ses  Comptes  en  Normandie;  et,  en  1710,  à 
Jacques- Joseph  Frontin,  sieur  de  Beaumont.  On  conserve 
les  Aveux  que  ces  divers  propriétaires  rendirent  au  Roi, 
pour  ce  fief,  aux  années  que  nous  venons  d'indiquer,  et  il 
est  à  remarquer  que  les  derniers  mentionnent  plus  de  pri- 
vilèges que  les  premiers,  soit  par  le  fait  d'une  usurpation 
qui  aurait  été  tolérée  parce  qu'elle  était  sans  conséquence 
bien  sérieuse,  soit  par  suite  de  recherches  nouvelles, 
entreprises  par  des  seigneurs  avisés  et  jaloux  de  leurs 
droits  (i). 

Dans  son  Aveu  de  1 586,  Claude  Quesnel  avoue  tenir  du 
Roi  un  quart  de  fief  de  haubert,  nommé  le  fief  du  Tôt,  au- 

1er  juin  i486  :  «  De  Insula  Béate  Marie,  dudum  est,  data  in 
emphiteosim,  cujus  redditus  diminutus  est  occasione  immu- 
nitionis  et  porcionis  ipsius  Insuie,  adaptate  in  compositione 
fossati  aquosi  juxta  muros  ad  piscariam  appropriati,  cujus  utili- 
tatem  et  usufructum  percipit  villa  Rothomagensis.  »  Le  Chapitre 
songeait  à  en  réclamer  la  restitution. 
(2)  Ârch.  delà  S.-Inf.,  B.  2o5,  211. 


171 

trement  dit  Aubette,  assis  à  Saint-Maclou,  avec  extension 
sur  Saint- Vivien,  t  consistant,  ainsi  que  de  ce  il  apperoit, 
par  les  anciens  vestiges  et  apparences  d'icellui,  en  certain 
manoir,  avec  plusieurs  maisons  et  édifices,  entre  lesquels  il 
y  avoit  coUombier,  basty  de  pied  droit,  portant  six  pans  le 
long  de  la  rivière  de  Seine.  >  A  raison  de  ce  fief,  il  déclare 
avoir  droit  de  chauffage  en  l'une  des  forêts,  sans  pourtant 
spécifier  laquelle.  Il  rappelle  que  ses  prédécesseurs  étaient 
tenus  au  ban  et  à  Tarricre-ban,  mais  que  lui  présentement 
en  était  exempt,  ainsi  que  des  droits  de  relief  et  de  trei- 
zième,  en  sa  qualité  de  bourgeois  de  Rouen,  <  possesseur  de 
chose  assise  en  cette  ville.  »  L'Aveu  est  court  ;  Claude 
Quesnel  regrette  de  n'en  pouvoir  dire  davantage,  et  s'en 
prend,  suivant  l'usage,  «  sl^l  grands  troubles,  divisions  et 
anciennes  guerres,  lesquelles  avoient  régné  en  ce  pays, 
mesme  à  l'inconvénient  de  feu  advenu  en  la  Chambre  des 
Comptes  de  Paris,  »  oîi  les  Aveux  des  fiefs  de  Normandie 
étaient  reçus  antérieurement  à  i58o,  année  de  l'établis- 
sement à  Rouen  d'une  Chambre  des  Comptes  particulière 
à  la  Normandie. 

Pour  lui  tout  se  réduisait  donc,  en  fiaiit  de  privilège 
quelque  peu  utile,  à  la  jouissance  d'un  droit  de  colombier. 

Catherine  Quesnel,  dans  l'Aveu  de  1619,  ne  prétendait 
encore  à  rien  de  plus.  Elle  rappelait  pourtant  qu'un  mou- 
lin avait  autrefois  existé  dans  l'étendue  de  son  fief. 

En  février  1628,  Jacques  Frontîn  obtient  la  propriété 
du  fief  du  Tôt,  par  un  décret  de  justice,  passé  devant  le 
bailli  de  Rouen  ;  il  en  rend  Aveu  à  la  Chambre  des 
Comptes,  et  trouve  le  moyen  d'en  amplifier  la  dignité  ;  il 
en  vante  les  extensions  à  Saint-Vivien,  à  Sotteville  et* 
à  Quatremares;  le  droit  de  cour,  usage,  juridiction, 
plaids  et  gage-piège;  tout  ce  qui  signalait  une  tenure 
noble  et  la  distinguait  d'une  simple  roture,  si  tant  est 
qu'il  put  être  question  de  roture  dans  l'enceinte  d'un 
franc  bourgage.  A  la  suite  du  colombier  à  six  pans,  tou- 
jours subsistant,  et  du   moulin,  démoli,  il  mentionne. 


172 

comme  dépendant  de  son  fîef,  une  maison  située  sur  la 
paroisse  Saint-Maclou  et  possédée  par  Pierre  Bourré, 
commis  au  greffe  criminel  du  parlement,  ainsi  qu'une  autre, 
située  en  la  rue  Vatier-Blondel.  Il  n'oublie  pas  de  décrire 
ce  manoir,  accompagné  de  plusieurs  tènements  de  maisons 
et  édifices,  à  l'entrée  duquel  manoir  était  encore  une  grande 
porte  de  pierre  de  taille,  au  frontispice  de  laquelle  étaient 
élevées  et  taillées  en  bosse  les  armoiries  timbrées  des  pré- 
décesseurs seigneurs  du  fief  du  Tôt.  Il  revendique  le  droit 
de  pèche  dans  les  rivières  de  Seine  et  d'Aubette,  le  droit  de 
chasse  dans  les  forêts  de  la  Vicomte  de  Rouen,  le  droit  de 
faire  tenir  un  marché  une  fois  la  semaine,  le  cours  duquel 
marché  avait  été  discontinué  depuis  les  troubles,  et  enfin, 
ce  que  n'avait  osé  indiquer  clairement  le  continuateur  de 
Farin,  t  le  droict  de  la  première  et  plus  éminente  place  du 
costé  des  laiz,  dans  le  chœur  de  Téglise  Saint-Maclou, 
avec  obligation,  au  curé  ou  vicaire  de  cette  église,  d*en  - 
voyer  frapper  à  la  porte  du  manoir,  les  jours  de  festes  et 
dimanches,  pour  advertir  le  seigneur  d'aller  entendre  et 
assister  aux  grandes  messes  paroissiales,  avant  que  de  les 
commencer.  > 

Un  point  qui  ne  laissait  prise  à  aucun  doute,  c'est  que 
des  armoiries  ornaient  autrefois  la  grande  porte  de  T  Hôtel 
du  Tôt.  Elles  avaient  été,  il  est  vrai,  €  souillées  et  gastées 
par  quelques  voisins  envieux  de  cette  marque  de  dignitç  de 
fief.  >  Mais  bientôt,  elles  avaient  été,  tout  à  nouveau, 
repeintes  et  remises  à  leurs  dépens  au  premier  état,  par 
arrêt  du  parlement,  rendu,  le  19  juin  i6o3,  sur  la  requête 
de  Soupplix  Le  Plastrier.  Jacques  Frontin  se  fonda  sur 
cet  arrêt  pour  substituer,  à  cet  ancien  blason,  le  sien 
propre,  en  sa  qualité  de  propriétaire  actuel  de  l'Hôtel  du 
Tôt.  C'était  attacher  bien  de  l'importance  à  une  circon- 
stance assez  indifférente,  puisque  nombre  de  maisons,  à 
l'intérieur  de  Rouen,  portaient  également,  à  leur  porte 
principale,  les  armoiries  de  leur  propriétaire,  sans  qu'on 
pût  songer  à  y  voir  des  marques  de  fief 


173 

A  Jacques  Frontin,  sieur  de  la  Hauteville,  succéda 
Jacques  Frontin,  sieur  de  Beaumont,  maître  en  la  Chambre 
des  Comptes ,  et,  à  ce  dernier,  Jacques- Joseph  Frontin, 
lequel,  dans  un  Aveu  de  1 710,  n'oublie  pas  de  parler  de  la 
porte  cochère  de  pierres  de  taille,  ornée  des  armoiries  dé 
son  père,  en  bosse,  du  colombier  et  surtout  du  droit 
d'avoir  la  première  et  la  plus  cminente  place  dans  le  chœur 
de  l'église  Saint-Maclou,  au  lieu  où  se  mettaient  les  laïques, 
toujours  avec  obligation  au  curé  ou  au  vicaire  d'envoyer 
frapper  à  la  porte  de  l'Hôtel  du  Tôt  avant  de  commencer 
la  grand'messe  (i). 

Je  dois  déclarer  que  je  n'ai  pu  trouver  aucune  mention 
ancienne  ni  du  droit  de  chauffage  réclamé  par  le  seigneur 
du  Tôt  dans  les  forêts  de  la  vicomte  de  Rouen,  ni  de  ce 
privilège  de  premier  paroissien  de  Saint-Maclou,  et  je 
doute  fort  que  ces  droits  aient  jamais  été  reconnus  par  les 
officiers  des  maîtrises  ni  par  le  curé. 

Quant  à  la  qualité  de  fief,  on  ne  peut  raisonnablement 
songer  à  la  contester,  et  ce  qui,  à  première  vue,  paraît 
une  singularité,  s'explique  assez  naturellement,  quand  on 
songe  que,  pendant  très  longtemps,  les  paroisses  de  Saint- 
Vivien,  de  Saint-Nicaise  et  de  Saint-Maclou  étaient  en 
dehors  de  la  ville  de  Rouen,  et  qu'en  i53o  encore,  l'Ile 
Notre-Dame  était  vraisemblablement,  comme  nous  l'avons 
dit,  située  en  dehors  de  l'enceinte  fortifiée. 

Maïs  à  cette  question  particulière  au  fief  du  Tot^  on 
peut  en  rattacher  une  autre  plus  intéressante,  et  sur  la- 
quelle. Messieurs,  j'appelle  votre  attention,  celle  de  savoir 
comment  s'étaient  formés,  et  comment  avaient  disparu  ces 
fiefs,  très  nombreux,  qui  existaient  en  dedans  de  la  ville, 
et  quelle  signification  nous  devons  donner  à  ce  mol  fief. 

En  parcourant  les  chartes  desxii«  et  xiii®  siècles,  concer- 
nant des  maisons  ou  des  rentes  à  l'intérieur  de  Rouen, 

(i)  En  1769,  le  iief  du  Tôt  appartenait  à  Jacques   Frontin, 
sieur  de  Caudecote,  héritier  de  Claude  Frontin,  son  oncle. 


1/4 

chartes  rédigées  ou  reconnues  devant  le  maire  de  la  com- 
mune, on  voit  mentionnes  un  grand  nombre  de  fiefs. 

Ce  sont  :  le  fief  du  Roi  en  la  paroisse  Saint- I^urent,  1295; 
celui  de  la  Monnaie,  comprenant  une  maison  sise  en  la 
rue  Ganterie,  fin  du  xn^  siècle;  celui  du  maire  ou  de 
la  mairie,  1295  (i);  ceux  du  Chapitre  ou  de  Notre-Dame 
dans  les  paroisses  de  Saint-Denis  et  de  Saint-Étienne  des 
Tonneliers,  fin  du  xn"  siècle  et  xiii«  siècle;  celui  de  Fabbé 
de  Cerisy,  commencement  du  xiii*;  celui  du  Mont-aux- 
Malades,  en  la  rue  Cauchoise,  1226;  celui  de  Tabbaye  de 
Saint-Ouen,  sur  Robec,  xii«  et  xin^  siècle;  celui  de  la 
même  abbaye,  dit  le  fief  au  Moutardier  (2),  sur  la  paroisse 
Sai nt- Vivien  ;  celui  de  Tévêque  de  Bayeux;  celui  d'É- 
tienne  Blondel;  celui  de  Robert  du  Bosc-le-Hard,  en  la 
paroisse  Saint- Godard  ;  celui  du  chambellan  de  Tancar- 
ville,  qui  n'était  autre  que  l'ancien  donjon  des  ducs  de 
Normandie,  abandonné  depuis  la  construction  du  palais 
de  la  Basse  Vieille-Tour;  celui  des  seigneurs  d'Esneval, 
en  la  paroisse  Saint-Amand  ;  celui  de  la  Heuse,  à  Saint- 
Maclou  ;  celui  de  Pierre  de  TEspinay,  chevalier,  en  la  rue 
de  l'Arquet,  près  du  pont  de  TArquet,  i2i3;  celui  de 
Thomas,  fils  de  Robert  l'Écuyer,  1208;  celui  du  comte 
de  Leicester,  près  de  la  rue  Massacre;  celui  de  Roger  de 
Meulan,  en  la  rue  Vaske,  fin  du   xn^  siècle  ;  ceux  de 

(1)  «  Le  fieu  au  maire.  »  Tabellion,  de  Rouen,  Reg.  3,  T.  307. 
—  Infeodo  majorie  extra  muros,  1295.  F.  des  Hospices. 

(2}  Le  fief  au  Moutardier  à  Saint-Vivien,prèsdu  Ruissel,  appar- 
tenait à  Tabbaye  de  Saint-Ouen  et  comprenait  plus  de  vingt 
maisons  ou  héritages.  Il  avait  appartenu,  au  xiiie  siècle,  à  Lam- 
bert Lé  Moutardier,  lequel  Tavait  acheté  de  Raoul  de  Cotevrart. 
Il  était  tenu  de  Jean,  fils  de  Maurice.  Une  partie  de  remplace- 
ment de  ce  fief  était  encore  en  marais.  Dans  la  charte  de  Robert 
Le  Moutardier,  on  lit  que,  si  le  vivier  était  mis  à  sec  et  que 
Lambert  pût  posséder  en  entier  la  terre  que  Teau  couvrait  encore, 
celui-ci,  aurait  à  payer  au  seigneur  5  s.  chaque  année,  en  plus  de 
4  s.  6  d.,  formant  la  rente  ordinaire. 


175 

Préaux,  1 295  ;  de  Sakespée,  près  la  porte  Beauvoisine, 
120  5;  de  Geoffroy  Salcnan,  en  la  rue  Etoupée;  de  la 
Vaupalière,  en  la  paroisse  Saint-Maciou,  1296;  de  Henri 
Waspal,  à  Saint-Hilaire  de  Rouen,  12 17  (i). 

A  propos  de  ces  maisons  ou  terrains  qualifiés  de  feoda^ 
il  est  question  de  seigneurs  (domini  feodorum),  distincts 
des  possesseurs  ou  détenteurs  de  ces  maisons  ou  terrains. 
Il  est  question  du  consentement  obtenu  de  ces  seigneurs 
pour  les  ventes  faites  par  ces  possesseurs  ou  détenteurs, 
soit  moyennant  une  rente  annuelle,  soit  pour  un  prix 
d^argent.  Il  est  question  de  droits  seigneuriaux, yura  domi- 
nica.  Il  est  question  d'hommage  et  de  serment  àc  fidélité. 
Et  pourtant  il  n*est  pas  rare  de  voir  ces  fiefs  possédés  par 
de  simples  bourgeois,  dépendant  eux-mêmes  de  soi-disant 
seigneurs  de  ces  biens  qualifiés  feoda. 

Les  exemples  qu'on  en  pourrait  citer  seraient  innom- 
brables. En  voici  quelques-uns  : 

En  1 164,  Simon  I^nglois  prend  en  gage  de  Richard  de 
Herburvilla^  pour  Tespace  de  huit  années  et  moyennant 
une  somme  de  70  sous  d'angevins  qu'il  lui  paie,  la  maison 
du  dit  d'Herbou ville,  sise  près  de  l'altre  de  Saint-Amand. 
Cet  acte  a  pour  témoin  Guillaume  de  Malpalu,  seigneur 
dudit  Simon  (2). 

Vers  la  fin  du  xii^  siècle,  Robert  du  Bosc-le-Hard  parle 
d'un  fief,  à  lui  appartenant,  sis  en  la  paroisse  Saint- 
Godard,  et  d'un  autre  fief  que  tenait  de  lui,  en  la  même 
parroisse,  Enguerran  de  Kersonaria  (Charte  passée  devant 
Jean  Fessart,  maire  de  Rouen)  (3). 

Mention  du  fief  tenu   de   Louis,  fils  de  Guillaume,  par 

(i)  Henri  II  confirme  aux  religieux  de  Saint-Lô  les  dîmes  du 
fief  de  Tévéque  de  Bayeux,  sis  à  Rouen.  A  raison  de  la  concession 
du  prince,  ils  avaient  droit  de  prendre  unum  cervum  et  vi  solides 
in  Moneta  ;  unum  aprum  in  festivitate  S.  Rumpharii. 

(2)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  F.  de  l*abbaye  de  Saint-Amand 

(3)  Jbid.,  F.  du  Chapitre. 


176 

Robert  de  Vileis,  en  la  rue  Veauiricrc,  du  temps  de  Ma- 
thieu Le  Gros,  maire  de  Rouen  ;  d'un  fief  tenu  du  môme, 
par  Garnier  de  Bapaumes,  en  la  rue  de  la  Renelle  (i). 

En  1208,  M«  Roger  de  Frontebosc  donne  pour  le  salut 
de  son  âme,  en  pure  et  perpétuelle  aumône,  aux  moines 
de  Sainte-Foy  de  Longueville,  une  masure  en  la  paroisse 
de  Saint-Nicolas.  Il  déclare  que  cette  masure  était  tenue 
de  Thomas  qui  fut  fils  de  Robert  TÉcuyer,  par  une  rente 
annuelle  de  6  sous,  rente  que  les  religieux  prirent  l'enga- 
gement de  payer  à  sa  décharge  (2). 

En  12 14,  Robert  d'Esneval,  chevalier,  donne  à  Téglise 
de  Saint-Amand  10  sous  de  rente  sur  tout  le  tènement 
que  tenait  de  lui  Jean,  fils  de  Maurice,  devant  le  cimetière 
de  Saint-Amand  ;  cette  rente  était  affectée  aux  frais  du  lu- 
minaire du  chapitre  de  Tabbaye  de  Saint-Amand,  où  i'ab- 
besse  Mathilde  avait  été  inhumée,  in  quo  Matillidis^  quon- 
dam  abbatissa^  ancillamen,  humata  requiescit  (3). 

En  août  i23i,  Laurent  du  Donjon  vend  le  donjon  à 
Robert  du  Châtel  pour  5  1.  de  rente  et  moyennant  aussi 
une  once  de  poivre  à  payer  chaque  année  au  seigneur  de 
ce  tènement,  le  chambellan  de  Tancarville,  sans  compter 
le  droit  d'hôtage  que  ce  seigneur  s^  était  réserve  (4). 

La  même  année,  Robert  Le  Marchand  vend  à  Robert 
Fils  Alain,  pour  un  capital  de  100  sous,  une  rente  annuelle 
de  10  sous  sur  un  tènement  qu'il  tenait  de  Geoffroi  Sal- 
men,  qualifié  seigneur  du  fief,  ledit  tènement  situé  en  la 
rue  Étoupée,  m  vico  stoupato  extra  portam  (5). 

Quant  au  fait  du  consentement  donné  parle  seigneur  du 
fief  à  la  vente  faite  par  les  sous-tenants,  je  me  bornerai  à 
trois  citations. 


(i)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  F.  du  Mont-aux-Malades. 

(2)  Ibid.,  F.  du  prieuré  de  Longueville. 

(3)  /Wrf.,  F.  de  Tabbaye  de  Saint-Amand. 

(4)  Jbid.f  F.  des  Cordeliers. 

(5)  Ibid.y  F.  du  Chapitre. 


177 

Cette  formalité  est  mentionnée  dans  la  vente  faite  par 
l'archevêque  d*York,  à  Hélie  de  Warwick,  chapelain  du 
Roi,  moyennant  7  1.  d'angevins,  d'un  fief  situé  rue  Saint- 
Denis,  relevant  du  chapitre  de  Rouen,  moyennant  une 
rente  annuelle,  ce  qui  n'empêcha  pas  l'archevêque  dTork 
de  devenir  seigneur  immédiat  de  ce  fief,  par  le  paiement 
qu'il  stipulait,  à  son  profit,  d'une  autre  rente  sur  le  même 
fief(i). 

Quelques  années  après,  sous  le  maire  Mathieu  Le  Gros, 
un  particulier  vend  à  Tabbaye  de  Saint-Georges-de-Bos- 
cherville  une  terre  située  en  la  paroisse  de  Saint-Pierre- 
le-Portier.  11  obtient  le  consentement  de  Henri  de  la 
Heuse,  qui  était  alors  seigneur  de  cette  terre  pour  les  trois 
quarts.  Hanc  venditionem  bénigne  fieri  concessit^  salvo 
redditu  suo  de  octo  solidis  (2). 

En  1221,  Auberée  de  Gaugi,  vend,  pour  i3  1. 1.,  un  tène- 
ment  situé  en  la  rue  Saint-Cande-sur-Rive  (Saint-Cande- 
le- Vieux),  qu'elle  tenait  d'Etienne  Blondel.  Celui-ci  donne 
son  consentement  à  la  vente,  et  l'on  ajoute  au  bas  de 
l'acte  :  t  Actumfuit  hoc  de  assensu  dicti  Stéphanie  domini 
illius  tenementi,  salvis  tamen  sibi  et  suis  heredibus  jure 
et  redditu  suo  videlicet  x  soi  usualis  monete  (3). 

L'hommage  est  formellement  indiqué  dans  une  charte 
passée  devant  Raoul  de  Cotevrart,  maire  de  Rouen,  par 
laquelle  Robert,  prieur  du  Mont-aux-Malades,  vend  à 
Raoul  de  Cailli  un  tènement  de  maisons  et  de  masures 
dans  les  rues  de  Burnenc  et  Brasière  (actuellement  la  rue 
de  Fontenelle),  tènement  que  Jean  Pigache  avait  donné  en 

(i)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  F.  du  Chapitre.  Charte  de  la  fin  du 
XI le  siècle,  du  temps  de  GeofTroi,  doyen  de  la  cathédrale,  et  de 
Barthélémy  Fergaut,  maire  de  Rouen. 

(2)  Charte  de  Willelmus  filius  Audulfi  et  d'Aeiesia  de  Bella- 
fossa,  sa  femme.  La  terre  vendue  était  située  en  la  rue  Kestiere 
in  parrochia  S.  Petri-Poterii,  Ibid.j  F.  de  Saint-Georges-de-Bos- 
cherville. 

(3)  Ibid.,  F.  du  Chapitre 

12 


.78 

pure  et  perpétuelle  aumône  à  ce  couvent,  quand  il  y  prit 
Thabit.  Le  prix  était  de  5o  l.  d'angevins,  une  fois  payées, 
à  quoi  il  Êillait  joindre  une  pitance  par  an.  Les  religieux 
du  Mont-aux-Malades  prennent  l'engagement  d^acquitter 
Tacquéreur  de  tout  cens  moyennant  une  rente  annuelle  de 
12  s.  dont  ledit  tènement  ou  fief  resterait  grev^  à  leur 
profit.  Raoul  de  Caili  leur  prêta  serment  de  fidélité  à 
raison  de  cette  concession,  de  hac  siquidem  terra  et  de  hoc 
hepreditagio  fecit  ipse  Radulfus  nobis fidelitatem  (i). 

En  1208,  Hugues  Grognet,  concède  à  Robert  Lavenier 
un  tènement  devant  Taître  de  Notre-Dame  ou  de  la  cathé- 
drale, à  tenir  de  lui  et  de  ses  héritiers  par  1 5  sous  de  rente. 
Aux  termes  du  contrat,  lacquéiKur  en  pouvait  disposer  à 
sa  volonté,  salvo,  ajoute  Hugues  Grognet,  predicto  redditu 
et  jure  dominico.  Et  de  hoc  tenemento  devenit  idem  Ro- 
bertus  homo  meus.  (Charte  passée  devant  le  maire  de 
Rouen.)  (2) 

Vers  le  même  temps,  Mathieu  Le  Gros,  en  concédant  à 
Robert  Le  Juif  une  terre  située  sur  la  Renelle,  en  la  paroisse 
Saint-Laurent,  retient  que  Tacquéreur  et  ses  héritiers  au- 
ront à  lui  payer  une  rente  annuelle  de  10  s.,  sauf  le  droit 
seigneurial  dû  au  propriétaire  primitif,  ce  qui  n'empêche 
pas  que  Robert  Le  Juif  dut  faire  hommage  à  Mathieu  Le 
Gros  et  lui  donner  deux  besans  d'or  de  recognitione  (3). 

Si  Ton  s'embarrasse  des  notions  que  Ton  donne  d'ordi- 
naire sur  la  féodalité,  on  ne  comprendra  rien  aux  condi- 
tions exprimées  dans  les  actes  que  nous  venons  de  relater. 
Et  pourtant  tout  s'explique,  et  de  la  manière  la  plus  simple. 

Aux  xii^  et  xiiic  siècles,  la  fieffé  appelée /eo^u m  était  le 
contrat  le  plus  ordinaire,  le  seul  même  qui  fût  habituelle- 
ment possible,  comme  transmission  de  propriété,  dans  un 
temps  où  le  numéraire  était  peu  abondant. 

(i)  Arch.  delà  S.-Inf.,  F  du  Mont-aux-Malades. 

(2)  Ibid.,  F.  du  Chapitre. 

(3)  Ibid.,  F.  du  Chapitre. 


179 

Le  premier  bailleur  d'une  maison  ou  d'une  terre  h  titre 
de  fîeffe  en  restait  le  seigneur  ;  la  rente  constituée  à  son 
profit  était  son  droit  seigneurial;  pour  l'acquittement 
duquel  il  pouvait  se  faire  faire  justice  sur  le  bien  fîeffe. 
Son  consentement  était  nécessaire  pour  que  le  fieffa taire 
pût,  à  son  tour,  fieffer,  en  tout  ou  en  partie,  le  bien  qu'il 
tenait  de  son  seigneur  primitif,  dont  il  n'eût  pas  été  juste 
qu'il  diminuât  la  garantie.  Mais,  ce  consentement  obtenu, 
non  parfois  sans  gratification,  il  devenait  lui-même  sei- 
gneur, par  rapport  au  troisième  acquéreur  ou  fîeffataire. 
sans  préjudice  du  droit  du  seigneur  primitif,  qualifié  domi- 
nus  capitalis  ou  chevetaigne  seigneur. 

En  envisageant  les  choses  de  la  sorte,  les  mots  fief ^  sei^ 
gneur^  hommage^  n'on^lus  rien  qui  rappelle  ce  que  nous 
nous  représentons  par  ces  mots  de  fief  et  de  féodalité. 

Mais  pourquoi  les  a-t-on  employés  si  habituellement 
dans  les  actes  qui  concernent  des  maisons  situées  à  Tinté- 
rieur  de  Rouen  ?  Ne  serait-ce  pas  que  la  constitution  des 
fiefs  tient  plutôt  à  un  système  économique  qu'à  un  système 
politique  et  ne  mérite  pas  les  jugements  que  l'on  en  a  portés? 
ou  bien  l'emploi  de  ces  termes  tiendrait-il  à  une  préten- 
tion des  bourgeois  de  Rouen,  qui  auraient  voulu  assimiler 
les  biens  tenus  en  bourgage,  aux  terres  nobles,  par  le 
même  sentiment  qui  les  faisait,  plus  tard,  se  considérer  eux- 
mêmes  comme  nobles,  et  réclamer  pour  leur  député,  dans 
les  assemblées  d'États,  place  avec  la  noblesse  et  au-dessus 
des  représentants  du  Tiers- Etat. 

M.  Fabbé  Loth  expose  que  les  Frontin  du  Tôt  éle- 
vèrent les  mêmes  prétentions  à  Dieppe,  et  engagèrent 
même  de  ce  chef,  avec  la  fabrique  de  Saint-Jacques,  un 
procès  dont  les  conséquences  furent  déplorables,  car 
il  amena  la  démolition  de  la  clôture  d'une  chapelle. 

A  propos  de  la  posture  des  fidèles  dans  les  églises  au 
moyen  âge,  M.  Tabbé  Tougard  fait  remarquer  qu'en 
Orient,  un  passage  de  saint  Chrysostôme  indique  clai- 


j 


i8o 

rement  qu'on  s'y  asseyait  :  «  Voyez  le  riche,  s'écrie  le 
saint  orateur,  avec  quel  faste  il  s'asseoit!  » 

Enfin,  M.  l'abbé  Tougard  termine  les  communica- 
tions par  l'exposé  des  faits  suivants  : 

CLOCHER  DE  LILLEBONNE 

Il  rappelle  que,  dans  sa  séance  du  3i  août  dernier,  le 
Conseil  général  a  émis  un  vœu  pour  la  restauration  du 
clocher  de  Lillebonne,  sur  lequel  il  a  appelé  toute  l'atten- 
tion de  M.  le  Préfet. 

Notre  confrère  s'associe  aux  vues  de  rassemblée  dépar- 
tementale. Le  clocher  de  Liilebonne  est  une  des  flèches 
les  plus  admirées  de  notre  pay%  Et,  toutefois,  depuis  plu- 
sieurs années  déjà,  son  état  inspire  des  inquiétudes  telles 
que  l'administration  a  cru  devoir  interdire  l'emploi  des 
belles  cloches  qu'on  y  a  montées.  Cet  état  de  choses  est 
intolérable  et  intéresse  la  sécurité  des  habitants  et  la 
conservation  d'une  église  qui  est  une  des  plus  belles  cons- 
tructions modernes  du  département.  M.  Tougard  propose 
à  la  Commission  d'appuyer  énergiquement  auprès  du 
Préfet  la  restauration  de  ce  clocher. 

ÉGLISE  DE  SAINT-MARTIN-LE-GAILLARD 

Dans  sa  séance  du  26  juillet  dernier,  la  Commission 
s'est  occupée  avec  intérêt  de  cette  belle  église.  M.  le  curé 
de  cette  paroisse  en  témoigne  à  nos  collègues  toute  sa 
reconnaissance.  De  plus,  sa  lettre  du  1 1  octobre  dernier 
atteste  que  la  sollicitude  de  la  Commission  était  bien  jus- 
tifiée. 

€  Tout  le  corps  de  l'église  est  solide,  écrit-il  ;  mais  le 
pignon  (car  je  ne  puis  pas  dire  le  portail)  est  dans  un 
grand  délabrement.  Il  y  a  plus  de  cent  ans  qu'on  parle  d'y 
travailler,  et  il  y  a  environ  quatre-vingts  ans  qu'on  y  a 
fait  une  porte  et  restauré  la  croisée  au-dessus. 

c  11  nous  est  arrivé  une  rafale  vers  la  fin  de  mars  et  une 


i8i 

autre  quinze  jours  après^  telles  que  la  muraille  en  était 
ébranlée,  qu'il  en  était  tombé  de  petites  pierres  et  qu'une 
partie  du  mur  intérieur  menaçait  ruine.  > 

Un  tel  état  de  choses  a  obligé  d'y  mettre  des  ouvriers, 
qui  ont  refait  une  partie  de  cette  muraille  sur  une  hauteur 
de  plus  de  2  met.  5o  cent.,  et  sur  i  met.  5o  cent,  au 
moins  de  largeur. 

f  Maintenant,  conclut  M.  le  curé,  tout  cela  est  conso- 
lidé, et  il  n'y  a  plus  de  danger;  seulement  la  muraille  est 
vieille.  » 

MONT-AUX-MALADES.  —  MONNAIES 

La  canalisation  d'une  conduite  d*eau  a  procuré  au  Mont- 
aux-Malades  la  découverte  de  plusieurs  monnaies.  Le 
secrétaire  de  la  mairie  a  recueilli  un  double  tournois  de 
Louis  XIII. 

Ce  travail  a  donné  une  nouvelle  démonstration  du  soin 
avec  lequel  les  Romains  établissaient  leurs  voies.  I^  tran- 
chée, en  effet,  a  dû  être  creusée  au  milieu  de  ces  énormes 
silex  qui  formaient  en  partie  l'empierrement  de  ces  routes 
jusqu'à  une  profondeur  d'environ  80  centimètres. 

CRUCIFIX  DU  PONT  DE  BATEAUX  DE  ROUEN 

Les  ateliers  de  M.  Vasse,  le  maître  de  forge  bien  connu, 
conservent  le  crucifix  qui  décorait  jadis  le  pont  de  bateaux 
de  Rouen.  Le  christ  est  en  plomb  et  est  repeint  chaque 
année  par  le  personnel  de  l'atelier.  Le  contre-maître  qui 
a  fourni  ces  détails  croit  que  M.  Vasse  céderait  volontiers 
au  Musée  ce  dernier  débris  du  pont  que  nos  pères  ont 
admiré. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

Le  Secrétaire  par  intérim ^ 

A.  TOUGARD. 


Rouen.  —  Imp.  E.  Cagiiiak,p,  mes  Jcannc-Darc,  88,  et  des  Basnage,  %. 


PROCÈS-VERBAUX 

DE   LA 

COMMISSION    DES    ANTIQUITÉS 

DE  LA  SEINE-INFÉRIEUKE 

PENDANT   L'ANNÉE  i883 


—%     fi   l»! 


SÉANCE  DU  7  FÉVRIER  i883 

La  séance  ouvre  à  deux  heures  sous  la  présidence  de 
M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Sont  présents  :  MM.  Adeline,  Paul  Baudry, 
Billiard,  Maillet  du  BouUay,  Bouquet,  Félix,  de  Glan- 
ville,  Gouellain,  Le  Breton,  Lefort,  de  Merval,  Pelay 
et  Brianchon,  secrétaire-adjoint. 

—  La  correspondance  imprimée  comprend  : 

Annual  reports  ofthe  bureau  of  Ethnology  to  the 
Secretarjr  of  the  Smithsonian  institution,  1879- 
1 880  ;  —  Société  archéologique  de  Bordeaux^  t.  V 1 1, 
1880;  —  Société  industrielle  d'Elbeuf,  1882;  — 
Bulletin  de  la  Société  archéologique  et  historique  de 
r Orléanais,  t.  VII,  2«  trimestre  de  1882;  —  Bulletin 
historique  de  la  Société  des  antiquaires  de  la  Mo- 
rinie,  Bi*  année,  124e  livr.,  1882;  —  Bulletin  de  la 
Société  des  antiquaires  de  Picardie,  1882  ;  —  Bi//- 
letin  du  Comité  des  travaux  historiques  y  1882. 

—  M.  le  Président  donne  lecture  d'une  circulaire  de 


i86 

M.  le  Ministre  de  Tlnstruction  publique  et  des  Cultes, 
en  date  du  3  février  dernier,  relative  à  la  21^  réunion 
des  Sociétés  savantes;  —  d'une  lettre  de  M.  le  Préfet, 
en  date  du  16  janvier  188 3,  dont  M.  le  Président 
donne  également  lecture,  il  résulte  que,  sur  la  propo- 
sition de  M.  le  Préfet,  la  Commission  départementale 
vient  d^accorder^  à  la  commune  de  la  Cerl^ngue,  un 
secours  de  i,5oo  francs  destiné  à  «  payer  diverses  ré- 
parations qu^il  est  urgent  d'exécuter  à  Téglise  de  Saint- 
Jean-d'Abbetot.  » 

A  propos  de  cette  subvention,  M.  le  Président  fait 
observer  qu'il  doit  exister  un  reliquat  de  compte,  con- 
cernant des  travaux  exécutés  antérieurement  à  Téglise 
de  Saint-Jean-d'Abbetot,  et  demande  au  secrétaire-ad- 
joint s^il  n'aurait  pas  quelques  renseignements  à. 
fournir  à  la  Commission.  M.  Brianchon  répond  que, 
en  effet,  ayant  dû  récemment  s'entendre  avec  M.  Hé- 
quet,  maire  de  la  Cerlangue,  dont  relève  l'église  de 
Saint-Jean-d'Abbetot,  pour  les  nouveaux  travaux  «  à 
exécuter  d'urgence  et  par  voie  d'économie  »  à  cette 
église,  aux  termes  d'une  lettre  de  M.  le  Sous-Préfet  du 
Havre,  en  date  du  17  janvier  i883;  quant  aux  travaux 
anciens,  remontant  au  mois  de  juillet  1880,  et  jugés 
très  satisfaisants,  mais  restés  inachevés,  voici  ce  qu'il  a 
appris  :  le  total  des  travaux  s'est  élevé  à  la  somme  de 
3.002  fr.  85  c,  y  compris  les  honoraires  de  l'archi- 
tecte, qui  est  notre  confrère,  M.  Simon.  Les  comptes 
n'étant  pas  revenus  approuvés  à  la  mairie,  rien  n'a 
été  payé.  La  commune  delà  Cerlangue  tient  à  la  dis- 
position des  entrepreneurs,  une  somme  de  1,102  fr. 
72  c.  Reste  un  découvert  de  1,900  fr.  i3  c. 

Ces    explications   entendues,    la  Commission  est 
d'avis  qu'il  y  aurait  lieu,  pour  M.  le  Maire  de  la 


i87 

Cerlangue,  d'en  référer  le  plus  tôt  possible  à  M.  le 
Préfet,  qui  aviserait  au  moyen  de  combler  le  déficit  et 
pourrait  faire  délivrer,  provisoirement,  un  à  compte 
aux  entrepreneurs. 

—  M.  Paul  Baudry  donne  lecture  de  la  note  sui- 
vante : 

Une  maison,  avec  jardin,  située  au  foubourg  Saint-Sever, 
rue  aux  Chiens,  i8,  fut  acquise,  le  i6  mars  1778,  par 
Henry- Louis  Poterat,  écuyer,  sieur  de  Saint- Etienne, 
seigneur  et  patron  honoraire  de  Saint-Sever-lès- Rouen 
et  du  fief  d'Emendreville. 

Henry-Louis  Poterat,  d'une  fieimille  justement  célèbre 
dans  rindustrie  des  faïences,  demeurait  alors  en  son  ma- 
noir seigneurial  de  Sotte ville-lès- Rouen.  Après  lui,  la 
maison  de  la  rue  aux  Chiens  fut,  le  22  février  1 786,  ven- 
due par  son  frère,  François-Nicolas  Poterat  de  Saint- Sever, 
à  Marie-Madeleine-Louise  Boivinde  Saint-Etienne,  veuve 
et  créancière,  mais  non  héritière,  de  Henry-Louis  Po- 
terat. 

Le  i3  juin  1790,  Mellon- Louis  Boivin,  bourgeois  de 
Rouen,  héritier  de  Marie-Madeleine,  sa  tante,  fît  vendre 
la  maison  à  Pierre  Couvet,  maître  toilier  fabricant. 

Dans  les  titres  de  cette  propriété,  qui  appartenait,  il  y 
a  peu  d'années  encore,  à  un  honorable  descendant  de  la 
famille  Couvet,  et  qui  est  actuellement  louée  par  la 
Fabrique  de  Saint-Sever  pour  Tusage  de  plusieurs  prêtres 
de  la  paroisse,  j'ai  recueilli  quelques  détails  que  vous 
voudrez  bien,  peut-être.  Messieurs,  accueillir  avec  intérêt. 

Henry- Louis  Poterat  avait  signifié,  le  7  juillet  1775,  à 
M.  Valentin,  curé  de  Saint-Sever,  et,  le  28  novembre  1776, 
aux  trésoriers  de  la  même  paroisse,  deux  contrats  de  fon- 
dations religieuses  faits  par  sa  famille  les  21  juin  1687  et 
2  5  octobre  1699,  et  dont  il  réclamait  l'exécution. 

I^  6  décembre  1778,  à  la  requête  de  Henry-Louis 
Poterat,  demeurant  en  son  hôtel,  rue  aux  Chiens,  Marye, 


'i88 

huissier,  signifie  à  M*  Valentin  un  procès- verbal  consta- 
tant qu'il  s'est  transporté,  avec  des  témoins,  dans  Tenceinte 
de  réglise  de  Saint-Sever,  heure  de  la  grande  messe 
paroissiale,  qui  s'est  commencée  à  dix  heures  du  matin^  et 
ce  dans  la  grande  nef,  à  la  portée  de  la  chaisCy  aux  fins 
d'entendre  si  M.  le  Curé  ou  autres  prêtres  préposés  .annon- 
ceraient au  prône  la  fête  de  saint  Joseph,  pour  être  célé- 
brée, comme  fête  triple^  le  samedi  suivant,  conformément 
au  contrat  fait,  le  21  juin  1687,  par  Marie  Lequieu,  veuve 
d'Edme  Poterat,  et  par  Louis  et  Michel  Poterat  ses  fils. 
11  s'est  également  assuré  si  les  intentions  prévues  par  le 
contrat  du  25  octobre  1699  sont  remplies,  et  a  pourcela, 
ainsi  que  ses  assistants,  entendu  la  messe  paroissiale 
depuis  son  commencement  jusqu^à  sa  fin. 

Entre  autres  exploits  délivrés,  sur  la  requête  de  Henry- 
Louis  Poterat,  au  trésorier  en  charge  et  au  Curé  de  Saint- 
Sever,  celui  du  8  novembre  1782  est  particulièrement 
curieux. 

Le  sergent  royal  Bosquer  y  déclare  à  M^  Valentin  qu'il 
ne  peut  ignorer  qu'aucun  laïc,  à  l'exception  du  patron, 
n'a  le  droit  de  prendre  séance  dans  le  chœur  de  Téglise, 
pendant  l'office  divin  ;  que  c'est  un  droit  honorifique  qui 
est  réservé  au  seul  patron  et  non  à  autres,  suivant  le  sen- 
timent de  tous  les  auteurs,  et  ainsi  qu'il  a  été  décidé  par 
différents  arrêts  des  4  janvier  i658  et  9  septembre  der- 
nier; qu'il  ne  peut  pas  ignorer  davantage  que  le  Curé  est 
obligé  de  donner  l'eau  bénite  au  patron  et  à  sa  famille 
dans  son  banc,  immédiatement  après  le  clergé  et  avant 
que  de  la  distribuer  aux  autres  laïcs. 

Cependant,  ledit  sieur  Curé  fait  entrer,  et  prendre  séance 
dans  le  chœur  de  Saint-Sever,  pendant  l'office  divin, 
divers  particuliers,  même  du  commun  du  public  et  en  habit 
laïc,  et  leur  donne  l'eau  bénite  avant  de  la  donner  au  sei- 
gneur de  Saint-Etienne  et  à  sa  famille. 

Pour  quoi  M.  de  Saint-Etienne  requiert  M«  Valentin 
de  tenir  la  main  à  la  police  du  chœur  et  à  l'exécution  des 


189 

lois  qui  ne  permettent  qu'au  clergé  et  au  patron  d'y 
entrer  et  d'y  prendre  séance,  comme  aussi  de  donner 
l'eau  bénite  à  lui  et  à  sa  famille,  lorsqu'ils  seront  dans 
leur  banc,  immédiatement  après  le  clergé  et  avant  toutes 
autres  personnes. 

Ces  revendications  minutieuses,  dont  j'abrège  encore  la 
teneur,  nous  paraissent  aujourd'hui  fort  étranges.  N'ou- 
blions pas  toutefois  que  l'exercice  d'un  droit,  si  absolu 
qu'on  le  suppose,  a  sa  raison  d'être  lorsqu'il  s'appuie  sur 
des  motifs  légitimes  et  qu'on  ne  le  sépare  pas  de  l'accom- 
plissement d'un  devoir.  N'oublions  pas  non  plus  qu'une 
même  question  peut  être  interprétée  différemment  par  les 
parties  qui  y  sont  intéressées,  sans  que  cela  incrimine  la 
bonne  foi  ni  les  intentions  de  Tune  ni  de  l'autre  de  ces 
parties. 

Avant  de  quitter  Saint-Sever,  permettez-moi  encore, 
Messieurs,  de  vous  indiquer  une  date  dont  la  mention 
peut  être  bonne  à  conserver.  Je  la  tire  des  archives  dépar- 
tementales, fonds  de  l'archevêché. 

Le  mardi  25  septembre  1781,  par  ordre  du  Cardinal  de 
La  Rochefoucauld,  archevêque  de  Rouen,  une  visite  fut 
faite  au  cimetière  de  la  rue  Saint-Julien  pour  examiner  si 
ce  cimetière,  alors  non  encore  utilisé,  était  dans  les  con* 
ditions  nécessaires  pour  que  la  bénédiction  en  fût  auto- 
risée. 

Le  procès-verbal  d'examen  mentionne,  au  milieu  du 
terrain  qui  doit  être  affecté  à  l'usage  de  cimetière,  une 
grande  croix  de  fer,  de  la  hauteur  de  douze  pieds,  y  com- 
pris son  pied  en  pierre  dure,  sur  laquelle  il  y  a  un  Christ 
doré. 

C'est  cette  croix,  qui  avait  été  conservée  lors  de  la  sup- 
pression du  cimetière  en  juillet  i855  et  lors  de  l'érection 
de  l'église  Saint-Clément,  1870-1872,  dans  une  partie  du 
même  cimetière,  qui  a  été  abattue  et  brisée  dans  la  nuit 
du  3o  septembre  au  i^f  octobre  1882. 

Après  cette  communication,   M.. de  Reaurepaire 


rappelle  qu^un  débat  eut  lieu,  à  la  fin  du  xyii^  siècle, 
entre  les  religieux  de  Bonne-Nouvelle  et  la  famille 
Poterat,  à  propos  du  fief  d'Emendreville. 

Il  semble  permis  de  conclure  de  l'observation  de 
M.  le  Président,  que  les  droits  seigneuriaux  réclamés 
par  Henry-Louis  Poterat,  comme  patron  honoraire  de 
la  paroisse  de  Saint-Sever,  étaient  au  moins  contes- 
tables. 

M.  Gaston  Le  Breton  reconnaît  l'exactitude  des  faits 
allégués  par  MM.  Baudry  et  de  Beaurepaire,  etprésente 
à  Tappui  ses  observations. 

—  M.  le  Président  communique  à  la  Commissionles 
Notes  suivantes  5wr  quelques  Comptes  provenant  des 
archives  du  Comté  de  Longueville  : 

I 

Les  vicissitudes  par  lesquelles  passa  le  comté  de  Lon- 
gueville expliquent  suffisamment  la  dispersion  et  la  perte 
des  archives  de  cette  grande  seigneurie.  On  n'en  a  re- 
cueilli que  quelques  débris  dans  le  fonds  du  Domaine  du 
Roi  et  de  la  Chambre  des  Comptes  de  Normandie,  qui  font 
actuellement  partie  des  Archives  de  la  Seine- Inférieure. 

Dans  le  nombre  je  signalerai,  comme  dignes  d'intérêt, 
les  documents  suivants  : 

c  Compte  Guillaume  Delamare,  receveur  de  la  terre 
que  M™e  la  comtesse  de  Bar,  dame  de  Cassel,  a  à  Lon- 
gueville, pour  les  termes  de  Saint-Michel  i385  et  de 
Pâques  1 386,  »  compte  qui  fut  présenté  à  cette  dame  pen- 
dant le  séjour  qu'elle  fit  à  Auffay,  dans  le  cours  de  l'an- 
née i386,  avec  deux  de  ses  officiers,  M.  Henri  d'Antoing 
et  le  bailli  de  Puisaye. 

•  Compte  Guillaume  De  Paris,  vicomte  et  receveur  pour 
noble  et  puissante  dame  M™^  la  comtesse  de  Bar,  dame  de 
Cassel,  en  sa  terre  de  la  comté  de  Longueville,  pour  le 


!9I 

terme  de  Saint-Michel  i386.  i  Ce  compte  fut  présenté, 
en  la  ville  d'AUuye,  à  Jean  de  Ville-Amenou  et  à  Jean 
de  Châtillon,  le  29  juillet  1387. 

Autre  compte  du  mêrîie  pour  le  terme  Saint-Mi- 
chel 1387.  Ce  compte  fut  présenté  à  Nieppes,  à  mes- 
sire  Tercelet  de  la  Barre,  chevalier,  maître  d'hôtel  de  la 
comtesse. 

La  dame  de  Bar  dont  il  est  ici  question  s'appelait 
Yoland  de  Flandre;  elle  était  fille  de  Robert  de  Flandre, 
seigneur  de  Cassel,  et  de  Jeanne  de  Bretagne. 

Outre  Cassel,  qui,  par  lui-même,  constituait  déjà  un 
domaine  très  considérable,  elle  possédait  Dunkerque, 
Bourbourg,  Gravelines,  Alluye  et  Montmirail. 

En  i353  elle  avait  épousé  en  secondes  noces  Philippe 
de  Navarre,  et  c*était  par  ce  mariage  que  lui  était  échu  le 
comté  de  Longueville  [Anselme,  V,  3 12).  Devenue  veuve 
une  seconde  fois,  elle  ne  craignit  pas  d'entrer  en  lutte  avec 
Pautorité  royale  en  faisant  saisir,  quoiqu'il  fût  en  la  sauve- 
garde du  Roi,  Henri  de  Bar,  seigneur  de  Pierrepont,  et  en 
refusant  de  le  rendre  malgré  les  réclamations  qui  lui  furent 
adressées.  C'était  s'attaquer  à  trop  forte  partie,  comme 
l'événement  le  prouva  bientôt.  Elle  fut  en  effet  arrêtée, 
à  son  tour,  en  1 364,  en  l'un  des  châteaux  de  Robert,  son 
fils,  premier  duc  de  Bar,  amenée  à  Paris  et  renfermée  dans 
la  tour  du  Temple.  Elle  réussit  à  s'échapper;  mais  elle  fut 
appréhendée  de  nouveau  et  reconduite  en  prison,  où  elle 
resta  jusqu'au  mois  de  novembre  1374,  date  des  lettres  de 
rémission  qui  lui  furent  accordées  à  la  prière  de  son  fils. 
Elle  mourut  le  12  décembre  i395,  et  fut  enterrée  en 
l'église  de  Saint- Maxe  de  Bar,  le  2  janvier  1396,  bien  que, 
par  son  testament,  elle  eût  exprimé  la  volonté  d'être 
inhumée  en  l'église  de  Térouanne  (Anselme^  II,  736). 

L'intitulé  du  premier  des  comptes  que  nous  venons  de 
citer  nous  apprend  que  la  comtesse  de  Bar  était  à  Auffay 
le  dernier  mai  1 386. On  l'y  trouve  encore,  le  i^  juin  de  cette 
même  année,  logée  à  l'hôtel  de  la  femme  de  Ricard  Pain- 


xgi 

faitis,  à  laquelle  le  receveur  G.  Delamare  eut  à  payer  une 
somme  de  20  s. 

On  apprend  par  ces  comptes  que  le  domaine  de  Lon- 
gueville  était  divisé  en  six  sergenteries,  désignées  par  les 
noms  de  leurs  chefs-lieux  :  Longueville,  Auffay,  Brachy, 
Vascueil,  Grainville-sur-Ry  et  Bellencombre. 

On  peut  croire  que  la  dame  de  Bar  n'était  pas  étran- 
gère à  toute  instruction  puisque,  dans  le  temps  qu'elle 
était  à  Auffay,  on  la  voit  dépêcher  à  Paris  un  nommé 
Perrin  de  la  Magdalène  pour  «  solder  la  moitié  de  la  bible 
en  roumant,  qui  fu  maistre  Gaultier  de  Bourmont.  »  Une 
traduction  française  de  la  Bible  est  un  fait  à  noter.  Le 
prix  n'est  guère  moins  remarquable.  L'ouvrage  avait  coûté 
200  1.  parisis,  ce  qui  revenait  à  23o  1.  tournois.  Les  ma- 
nuscrits coûtant  si  cher,  il  n'y  a  pas  lieu  de  s'étonner  que 
les  bibliothèques  fussent,  en  général,  si  mal  fournies.  Mais 
la  privation  n'était  pas  grande  pour  le  public;  le  goût,  il 
faut  le  reconnaître,  était  ailleurs. 

Le  même  messager  reçut  l'ordre  de  porter  à  Paris  t  un 
ciel  à  chambre  et  les  dossiers,  i  qu'il  déposa  chez  Guille- 
min  Le  Broudeur,  nouvel  exemple  de  cet  usage  où  l'on 
était  alors  de  faire  transporter  ses  tapisseries  d'un  lieu 
dans  un  autre,  comme  un  simple  article  de  voyage,  à 
moins  qu*on  n'aime  mieux  supposer  que  ce  déplacement 
eut  pour  objet  un  travail  de  broderie  dont  un  ouvrier 
parisien  paraissait  plus  qu'un  autre  en  état  de  se  charger. 

Ce  n'est  pas  sans  quelque  plaisir  que  je  relève,  dans  le 
compte  de  1 386,  cette  citation  qui  établit  la  supériorité  de 
la  Basse-Normandie  sur  la  Flandre,  en  tant  que  pays 
d'élevage  pour  la  race  bovine. 

t  Pour  les  despens  de  Pierre  Litaire,  d' Auffay,  boucher, 
lequel,  par  le  commandement  et  ordenance  de  madame, 
a  la  ou  païs  d'oultre  Saine  et  ailleurs,  en  plusieurs  lieux, 
pour  acheter  xxxii  bestes  aumales,  lesquelles  ont  esté  me- 
nées à  Nieppe,  xv  s.  » 

En  1 387  la  comtesse  eut  une  difficulté  pour  une  ques- 


193 

tîon  de  patronage  ;  il  fallut  envoyer  à  Rouen  consulter  le 
pouillé  d'Eudes  Rigaud,  qui  a  été  publié  dernièrement 
dans  la  collection  des  Historiens  de  France. 

«  Pour  despens  fais  par  Ricart  Le  Petit,  procureur  de 
madame,  alant  d'Auffay  à  Rouen  devers  le  bailli  de  ma- 
dame et  devers  les  vicaires  de  Tarchevesque  pour  ce  que 
le  Baudrain  de  la  Heuse  avait  présenté  à  Téglise  des  Au- 
tieux  près  Belencombre,  disant  que  le  curé  en  estoit 
trespassé  et  que  le  droit  de  présenter  li  appartenoit,  afin 
de  savoir  que  Ten  en  feroit,  et  pour  estre  aie  devers  yceux 
vicaires  pour  savoir  au  Matreloge,  où  sont  enregistrez  les 
églises  de  Tarchevesquié,  se  ladicte  église  estoit  en  la  col- 
lacion  de  la  conté  de  Longueville,  afin  de  pourveir  ou 
demourer  et  fere  ce  qu'il  appartiendra,  xiiii  s. 

t  Pour  deniers  paies  par  ledit  vicomte  à  un  tabellion 
apostolique  pour  avoir  une  lettre  ou  instrument  de  la  vie 
dudit  curé  des  Autieux,  qui  fut  envoiée  querre  à  Paris,  et 
lequel  curé  est  encore  en  vie,  comme  appert  par  la  rela- 
cion  dudit  tabellion,  xx  s.  » 

D'autres  articles  de  dépenses  concernent  les  frais  de 
justice.  Les  plaids  du  comté  de  Longueville  se  tenaient  à 
Aufifay,  et  c'était  là  que  se  trouvaient  la  cohue  et  le  cep 
ou  prison. 

Compte  du  terme  de  Saint-Michel  1 386  : 

t  A  Guillaume  Gaillart,  charpentier,  pour  avoir  fait  un 
cep  à  Auffay,  de  xiin  pies  de  long,  mis  xiin  soleaux  pour 
renforchier  la  prison  et  plusieurs  reilles,  avoir  fait  un 
bufet  en  la  cohue,  vi  1. 

t  A  Rogier  Suzanne,  d'Aufay,  sereurier,  pour  avoir  fait 
et  assis  une  sereure  à  clef  et  un  fermant  de  fer  audit  chep, 
pour  ce  à  li  poié,  comme  appert  par  quittance,  x  s. 

€  A  Jehan  Pelichon,  pour  avoir  fait  fere  en  la  maison 
où  l'en  tient  la  juridicion  de  Belencombre  certaines 
euvres,  c'est  assavoir  la  caière  (la  chaire),  les  sièges  et  par- 
quet et  autres  ordenances  d'icelle  cohue  et  trouvé  les  es, 
une  table  où  la  majesté  de  Notre  Seigneur  est  figurée  et 


194 

les  armes   de    madame,   cleu,  late,   paine  d'ouvriers   et 
estrain  à  recouvrir  ycelle  maison lxxiii  s.  vi  d.  » 

La  cohue  où  l'on  rendait  la  justice  était  couverte  en 
chaume;  mais  la  chaire  annonçait  la  dignité  du  juge, 
l'image  du  crucifix  imposait  le  respect  aux  justiciables^  et 
les  armoiries  faisaient  connaître  la  qualité  du  seigneur 
investi  du  droit  de  haute  justice. 

Cet  article  fut  contesté.  En  marge  on  lit  cette  note  : 
«  Rayé  pour  ce  que  madame  a  une  chohue  en  la  ville,  où 
il  peust  bien  avoir  tenu  ses  plais,  i 

Il  faut  croire  que  ce  cep  et  ces  prisons  étaient  peu  sûres, 
puisque  le  même  compte  contient  l'article  suivant  : 

«  A  Estiene  Le  Fèvre,  carpentier,  pour  avoir  fait  en  une 
des  toureles  du  chastel  de  Longueville,  i.  planquié  et 
I .  huis  pour  mettre  Florens  d'Yvetot,  escuier,  lequel  estoit 
détenu  prisonnier  pour  certains  excès  et  actemptas  fais  en 
la  terre  et  juridicion  de  madame,  et  pour  le  tenir  plus 
seurement  pour  ce  que  les  autres  prisons  n'estoient  pas 
assez  fortes,  pour  ce  poié,  comme  appert  par  sa  quic- 
tance xii  s.  i 

Cette  dépense,  si  faible  qu'elle  fût,  donna  encore  lieu  à 
contestation.  Les  vérificateurs  du  compte  mirent  en 
marge  :  t  Royé  pour  ce  qu'il  nV  deust  avoir  mis  nuls 
frais  :  aussy  il  avoit  escript  qu'il  le  mettroit  à  Arques,  et 
est  le  prinsonnier  eschapé.  > 

Ils  approuvèrent  un  autre  article  de  dépense  relatif  à  des 
poursuites  contre  un  animal  homicide. 

t  Pour  les  despens  de  Guillemin  Colichon,  sous-sergent 
de  Bellencombre,  lequel  ala  de  Auffay  à  Rouen,  devers  le 
bailli  de  madame,  pour  savoir  que  l'en  feroit  de  une  truye 
qui  avoit  tué  et  murdry  i .  petit  enfant  à  Aufay.  »  La  ré- 
ponse du  bailli  ne  nous  est  pas  parvenue.  Mais,  d'après 
les  usages  judiciaires  de  l'époque,  on  peut  conjecturer 
qu'elle  ne  fut  pas  favorable  à  la  truie  et  que  cette  bcte  dut 
mourir,  non  pas  de  la  main  du  boucher,  mais  de  celle  du 
bourreau,  pratique,  du  reste,  recommandée  par  le  plus 


illustre  des  philosophes  grecs,  Platon,  à  dessein,  sans 
doute,  de  frapper  l'imagination  des  gens  du  peuple,  et 
aussi  de  punir  indirectement  le  propriétaire  peu  soigneux 
d'un  animal  malfaisant. 

Le  compte  de  i383  nous  fournit  le  détail  des  frais  d'une 
exécution  capitale  encourue  pour  un  motif  plus  ordinaire  : 

a  Pour  les  despens  d'un  appelé  Guillemin  de  Carville, 
détenu  prisonnier  à  Auffay  pour  la  mort  de  Guillaume 
Sanson  dit  Rivet,  où  il  fu  par  l'espace  de  xii  jours  avant 
ce  que  il  fust  condempnépour  ledit  cas,  pour  ce,  ii  s.  vid. 

c  Pour  autres  despens  que  il  fist  depuis  que  il  fu  jugié 
à  morir  pour  le  dit  cas,  en  3  pos  de  vin  que  il  oit  par 
chopines  en  ladicte  prison m  s.  ix  d. 

«  Item,  en  la  rue  d'Auffay,  quant  l'en  mena  à  la  justice, 
et  fu  le  xxv«  jour  de  janvier  Tan  ini»  et  sept,  en  une  cho- 
pine  de  vin  et  [ .  verre xviii  d. 

c  Pour  les  despens  de  Symonnet  Fortin,  sous-sergent 
d' Auffay,  iequel  ala  à  Dieppe  quérir  le  bourrel  pour  exé- 
cuter ledit  de  Carville,  et  pour  les  despens  dudit  bourrel, 
tant  à  Dieppe,  comme  ailleurs,  en  venant  à  Auffay,  viii  s. 

c  Pour  les  despens  dudit  bourrel  fais  à  Auffay,  quant 
il  y  fu  arrivé ii  s. 

c  Et  pour  uns  gans  que  ouït  ledit  bourrel ix  d. 

f  Pour  le  salaire  dudit  bourrel  de  avoir  exécuté  ledit 
de  Carville,  comme  appert  par  sa  quittance  rendue  à  la 
court Lxx  s.  > 

Soixante-dix  sous  représentent  le  prix  de  plus  de  soixante 
jours  de  manœuvre.  Cette  dépense,  considérable  pour  le 
temps,  prouve  qu'alors,  comme  maintenant,  les  hautes 
œuvres  n'étaient  acceptées  que  grâce  à  l'appât  d'un  très 
fort  salaire. 

Un  autre  procès  criminel  nécessita  une  dépense  de  48 1. 
7  s.  9  d.  Il  est  ainsi  indiqué  : 

c  Pour  deniers  paies  par  le  viconte,  pour  plusieurs 
mises  et  despens  fais  par  le  bailli  et  procureur  de  madame 
et  plusieurs  advocas  et  gens  notables,  tant  de  Rouen  et  de 


la  terre  de  Longueville  comme  d'ailleurs,  ledit  viconte, 
sergens  et  autres  officiers  de  ma  dicte  dame,  pour  faire 
l'exécution  d'un  nommé  Jehan  Le  Caron  dit  le  Flamenc, 
né  de  Ayre  en  pais  de  Picardie,  bani  pour  certain  murdre 
et  cas  crimineux,  jugié  et  condempné  à  morir.  » 

La  même  année,  Guy  de  Houdetot,  dit  Porquet,  avait 
aussi  été  condamné  à  mort  par  les  juges  royaux.  La  con* 
fiscation  de  ses  biens  avait  valu  à  la  comtesse  le  revenu 
d'un  fief  situé  dans  le  domaine  de  Longueville,  revenu 
qui  était  évalué  à  25  1.  par  an. 

Après  Texpulsion  des  Anglais,  le  comté  de  Longueville 
fut  possédé  par  Jean  d'Orléans,  comte  de  Dunois,  à  qui  il 
avait  été  donné,  en  1443,  par  le  roi  Charles  VII,  en 
échange  du  comté  de  Mortain. 

En  1467,  le  receveur  de  ce  domaine  était  Raoulin 
Blancbastpn.  Il  avait  sous  lui  des  receveurs  particuliers 
c  pour  ce  que  ladicte  comté  s'estendoit  en  lieux  si  loing- 
tains  l'un  de  l'autre  et  en  tant  de  diverses  parties  que  à 
peine  eust  esté  possible  que  ung  seul  recepveur  eust  peu 
entendre  à  tout  et  à  respondre  et  avoir  congnoissance  des 
parties  qui  par  la  guerre  avoient  esté  aliénées  et  estoient 
de  présent  encores  en  grant  nombre  incongneues,  parce 
que  on  n'en  avoit  aucune  déclaracion  sur  quoy  l'en  se 
peut  régler.  > 

Le  compte  que  ce  receveur  rendit  à  son  maître  pour 
l'année  comprise  entre  Pâques  1467  et  Pâques  1468  nous 
fait  connaître  que  Dunois  était  à  Longueville,  avec  son 
fils,  au  mois  de  juin  1467,  et  que  de  là  il  se  rendit  à 
Dieppe.  Ce  fut,  je  crois,  pendant  ce  voyage  que  furent 
décidés  quelques  travaux  importants  indiqués  au  compte 
de  cette  année-là. 

f  Deniers  paies  par  le  receveur  par  l'ordonnance  et  com- 
mandement de  mon  dit  seigneur  pour  le  paiement  des 
journées  de  manouvriers  qui  ont  besongné  les  moys  de 
juillet,  aoust,  septembre,  octobre,  janvier  et  février  1467 
à  oster  les  terres  pour  prendre  les  fondemens  du  boUevert 


197 

que  mondit  s^  a  voit  ordonné  estre  fiait  en  la  place  et  chas- 
tel  dudit  lieude'Longueville,  devers  la  ville,  devant  le  vieil 
portail,  et  mesmes  à  prendre  les  fondemens  d'une  tour  à 
dos  d'asne  commenchée  au  coing  de  la  vielle  tour  et  ung 
paon  de  mur  venant  dudit  dos  d'asne  audit  vieil  portail, 
rompu  aussi  de  grans  pannées  de  murailles  qui  estoient  au 
dehors  des  fossés  et  assemblé  de  matières  de  pierre  pour 
besongner  ausdits  boUevert  et  dos  d'asne.  » 

Pour  exécuter  les  travaux  qu'il  avait  projeté  de  faire  au 
château  de  Longueville,  Dunois  s'était  adressé  à  Nicolas 
Duval,  maître  des  œuvres  de  maçonnerie  du  Roi  au  bail- 
liage de  Rouen.  La  confiance  qu'il  avait  en  l'habileté  de 
cet  architecte  l'engagea  à  le  charger  de  la  construction  de 
son  château  de  Châteaudun,  sa  demeure  de  prédilection. 
Duval  fut  remplacé  à  Longueville  par  Perrin  Sautin,  au- 
quel, dans  le  cours  des  travaux,  le  receveur  eut  à  payer 
60  s.,  f  c'est  assavoir  40  s.,  le  jour  de  l'Ascension  Notre 
Seigneur,  pour  le  mouton  qu'il  est  de  coustume  de  livrer 
aux  ouvriers  de  l'astellier,  qui  se  mettent  et  assemblent 
ensemble  à  ce  jour,  pour  supporter  à  leurs  despens,  et 
20  s.  t.,  pareillement  délivrés  et  baillés  le  jour  Saint-Mi- 
chiel;  que  lesdits  ouvriers  souppent  ensemble,  pour  ce 
que  après  ledit  jour  ilz  ne  prennent  que  deux  heures  par 
jour,  et  en  précèdent  ils  en  ont  trois.  » 

Les  statues  de  Bertrand  Du  Guesclin,  de  La  Hire  et  de 
Dunois,  les  trois  plus  illustres  possesseurs  du  comté  de 
Longueville,  ornaient  je  ne  sais  quelle  partie  du  château. 
Ce  fut,  ainsi  que  je  l'ai  fait  remarquer  dans  un  travail 
publié,  il  y  a  plusieurs  années,  un  artiste  de  Rouen,  Pierre 
Le  Singnierre  (le  Cignerre),  tailleur  et  maçon,  qui  fit  à 
Rouen  les  tabernacles  ou  niches  où  durent  être  posées  ces 
statues. 

Je  noterai  la  substitution  de  l'ardoise  à  la  tuile  pour  les 
couvertures.  On  employa  cette  année,  à  Longueville,  pour 
couvrir  les  nouvelles  constructions,  de  l'ardoise  que  l'on 
fit  venir  d'Angleterre  par  le  port  de  Dieppe.  Au  xvi^  siècle 


il  n'était  plus  guère  question  que  de  Tardoise  d'Angers. 

Je  noterai  encore,  comme  honorable  pour  le  pays,  Tex- 
cellente  qualité  de  la  cervoise  qui  se  fabriquait  à  Dieppe. 
Le  comte  de  Dunois  fit  charger  en  celte  ville,  pour  être 
transporté  à  Châteaudun,  c  un  baril  de  fine  servoise  et 
une  pipe  de  servoise  ordinaire.  • 

Le  compte  auquel  sont  empruntés  ces  notes  et  ces 
extraits  fut  présenté  à  François,  comte  de  Dunois  et  de 
Longueville,  seigneur  de  Parthenay,  grand  chambellan  de 
France,  en  son  château  de  Châteaudun,  le  29  avril  1470. 
Jean  de  Dunois,  son  père,  était  mort  à  Lay,  près  Paris,  le 
24  novembre  1468. 

Le  compte,  rendu  au  même  seigneur  pour  Tannée  com- 
prise entre  Pâques  1473  et  Pâques  1474,  est  du  même 
comptable. 

Ce  document  fournit  une  preuve  irrécusable  des  ravages 
commis  par  les  Bourguignons. 

«  Il  n'a  esté  receu  des  hommes  et  tenans  de  la  dite 
comté,  qui  eurent  leurs  maisons  brûlées  par  les  Bourgui- 
gnons es  sergenteries  de  Longueville,  Belencombre,  Lon- 
gueil  et  AufFay,  ou  temps  durant  dudit  présent  compte. 

«  La  paroisse  de  Longueville  en  laquelle  tous  les 
hommes  et  tenans  de  la  fiefferme  ont  eues  leurs  maisons 
brûlées. 

<«:  Cent  sous  paies  aux  trésoriers  de  l'église  N.  D.  d'Auf- 
fay  pour  emploier  en  la  réparacion  de  Téglise  brûlée  par 
les  Bourguignons.  » 

Celte  année,  c'était  encore  Pierre  Sautin  qui  était 
chargé  des  travaux  du  château  de  Longueville. 

Je  me  contenterai  de  signaler,  parmi  les  autres  comptes 
relatifs  à  la  seigneurie  de  Longueville,  celui  qui  fut  rendu, 
pour  Tannée  commençant  à  Pâques  i5io,  par  Chariot 
Blancbaston  à  M.  le  duc  de  Longueville  (François  d'Or- 
léans II),  comte  de  Dunois,  de  Tancarville  et  de  Mont- 
gommery;  — celui  qui  fut  rendu  par  le  même,  pour  Tan- 
née i5i6,  à  la  duchesse  de  Longueville  (Jeanne  de  Hoch- 


199 

berg),  dame  de  Rothelin,  comtesse  de  Dunois,  Neufchâtel, 
Charolais,  Tancarville  et  Montgommery,  princesse  de 
Chastellaillon,  vicomtesse  d'Abbeville  et  du  Crotay,  ayant 
la  garde  de  ses  enfants  mineurs;  —  enfin,  celui  qui  fut 
rendu  par  Jean  De  la  Mare  à  la  reine  d'Ecosse,  duchesse 
douairière  de  Longuevillc,  ayant  la  garde  du  duc  de 
Longueville,  son  fils  mineur,  pour  un  an  commençant  au 
terme  Saint-Michel  1549. 

Deux  pièces,  que  j'ai  récemment  acquises  pour  les  Ar- 
chives du  Département,  nous  fournissent  le  détail  de  ce  qui 
fut  dépensé  aux  obsèques  de  Louis  d'Orléans  I»'  du  nom, 
duc  de  Longueville,  décédé  à  Beaugency  le  i^r  août  i3i6, 
et  rétat  de  la  maison  de  son  fils,  Louis  d'Orléans  II  du 
nom,  issu  de  son  mariage  avec  Jeanne  de  Hochberg,  mar- 
quise de  Rothelin,  lequel  épousa,  en  i534,  Marie  de  Lor- 
raine, qui,  devenue  veuve,  se  remaria,  en  i538,  à  Jacques, 
vice- roi  d'Ecosse. 

Je  me  contenterai  de  transcrire  ces  deux  documents, 
qui  ne  peuvent  donner  lieu  à  aucune  difficulté  d'interpré- 
tation. 

«  Parties  deues  à  Marin  Leritier,  tailleur  de  feu  M.  le 
duc  de  Longueville,  pour  i'obsèque  de  feu  mondit  s^,  en 
façons  par  moy  faictes  cy-après  déclarées. 

«  Pour  la  façon  d'une  robe  de  drap  d'or  et  une  couver- 
ture pour  mectre  sur  le  lict  de  parement  de  feu  mon 
dit  sf,  pour  ce xxxii  s.  vi  d. 

«  Pour  ung  poisle  noir  et  pour  une  grande  croix  blanche 
de  satin  doublé  de  bougran,  pour  façon,  quarante  sols, 
pour  ce XL  s.  t. 

<c  Plus  pour  le  drap  mortuaire,  de  drap  d'or,  avecques 
une  croix  de  toille  d'argent,  pour  façon,  quarante  cinq 
sols  t.,  pour  ce xlv  s.  t. 

«  Plus  pour  avoir  faict,  à  seize  chevaulx,  à  chacun  une 
housse  de  velours  noir  avec  une  croix  blanche,  de  damas 
blanc,  qui  est,  pour  fasson  à  chacun  desd.  chevaulx,  qua- 
rante sols  pièce,  qui  est  en  somme  trente  deux  livres,  pour 


200 

ce XXXII  1. 1. 

«  Pour  cinq  grans  manteaulx  et  cinq  chaperons  à 
longue  comète,  pour  ducil,  manteau,  chaperon,  pour 
façon  de  chacun,  quarante  solz  t.,  qui  est  en  somme  dix 
livres,  pour  ce x  1.  t. 

«  Plus  pour  huit  pages,  à  chacun  d'eulx  fait  robe  et  saye 
de  drap  noir,  ensemble  chaperon,  qui  est,  pour  pièce  à 
chacun  dix  solz  t.,  montent  en  somme  quatre  livres, 
pour  ce iHi  1.  t. 

«  Plus  pour  quatre  paiges,  fait  à  chacun  une  robe  de 
velours  noir,  qui  est,  pour  façon  de  chacune,  dix  solz, 
vallent  quarante  solz  t.,  pour  ce xl  s.  t. 

«  Plus  pour  deux  laquays,  pour  façon  de  pourpoint  h 
chacun  d'eulx,  fourny  de  futaine  et  toille,  vingt  sols  pièce, 
vallent  quarante  sols  t.,  pour  ce xl  s.  t.  • 


I  RooUe  des  gaiges  des  gentllzhommes,  officiers  et  servi- 
teurs domestiques  ordonnez  pour  le  service  de  notre  très 
cher  et  très  amé  nepveu  Loys,  duc  de  Longueville  et  de 
noz  enfans,  nepveuz  et  niepce,  pour  ung  an  commençant 
le  premier  jour  de  janvier  Tan  mil  cinq  cens  vingt  et 
quatre  et  finissant  le  dernier  jour  de  décembre  l'an  mil 
cinq  cens  trente  cinq. 

Et  premièrement. 

Ceulx  qui  sont  ordonne^  pour  le  service  de  notre  dit  Jilj 
et  nepveu  le  duc  de  Longueville, 

c  Messire  Olivier  de  Hocberg,  prothonotaire  du  Sainct 
Siège  appostolique,  iiic  1. 1. 

M.  du  Lude,  vic  1. 

Messire  Anthoine  de  Lamet,  vc  1. 

M.  de  Loges,  lieutenant  de  la  compaignie,  iiic  1. 

Jehan  de  Baudreul,  maistre  d'ostel,  président  des 
comptes  à  Chasteaudun,  iiic  1. 


201 

Maistre  Jehan  Vaillant^  tnaistre  des  requestes  ordinaire 
de  notre  dit  filz  et  nepveu,  ne  1. 

Yves  de  Hattes,  maistre  d'ostel,  nic  1. 

Galloys  Descheiles,  s'  de  Marmcigne,  maistre  d'os- 
tel,  nic  1. 

Antoine  Tiercelin,  escuyer  d'escuyrie  et  maistre  des 
comptes  à  Chasteaudim,  u^  1. 

Jacques  d'Avaugourt,  escuyer  trenchant,  u^  1. 

François  de  Varennes,  escuyer  d'escuyrie,  vin»  1. 

Bertrand  David  dit  Beaumur,  vi"  1. 

Claude  de  la  Chastre,  eschançon,  iic  1. 

Philippes  de  Henencourt,  xl  1. 

Janus  dfe  Thibyviller,  xl  1. 

Officiers 

Robert  Albisse,  trésorier  et  receveur  générai  des  finances 
de  la  maison,  i\^  1. 

Messire  Hector  Le  Touzé,  aumosnier,  ini"  1. 

Jehan  de  Rouvray,  secrétaire,  vi"  1. 

Philippes  Jehannault,  argentier,  ini"'  1. 

Anthoine  Vignon,  varlet  de  chambre,  lx  1. 

Jehan  Dancourt,  varlet  de  chambre,  pour  ce  quMl  a 
cheval  à  livrée,  xxx  1. 

Jehan  Somper,  varlet  de  chambre,  lx  1. 

Fleurent,  tailleur,  xxv  1. 

Archiles  Fedrich,  tabourg,  lx  1. 

Jehan  Cavellier,  fourrier,  lx  1. 

Benoist,  fourrier,  lx  1. 

Marsault  Hubeau,  sommelier,  nii"  1. 

André  Le  Maire,  sommelier,  ini»»  1. 

Geoffray  Texier,  ayde  en  eschançonnerie,  xxx  1. 

Thomas  Angot,  feulconnier,  lx  1. 

Huguet  Marion,  huissier,  lxI. 

Jehan  Vivien,  queux,  c  1. 

Claude  Chancon,  son  ayde,  xxx  1. 

Perot  Vectault,  pallefrenier  des  grans  chevaulx,  xxini  L 

'4 


202 

PVançois  Buet,  pallefrenier  de  rescuyrie,  xxiiii  1. 

Pierre  Paurlet,  son  ayde,  x  L 

Jehan  Villâte,  mulletier,  xxini  1. 

Michau  Sanyer,  mulletier,  xxiiii  1. 

Deux  aydes,  xxiiii  1. 

Julien  Roy,  portier,  xxiiii  1. 

Jehan  De  Meddes,  boucher,  xlv  1. 

Ceulx  qui  sont  ordonne:^  pour  le  service  de  notre  fil^  et 
nepveu,  est  ans  à  Vescolle  à  Paris. 

Jehan  de  la  Rinville,  gouverneur,  ne  1. 

Maistre  Estienne  Raymond,  magistri^  lxx  1. 

Maistre  Elstienne  Guimont,  chappellain,  xxx  L 

A  Targentier,  xl  L 

Loyset  Du  Jardin,  queux,  xxx  1. 

Jehan  Dreux,  sommelier,  xxx  1. 

Mathurin  de  Montdoulcet,  varlet  de  chambre,  xxx  1. 

Ceulx  qui  sont  ordonne^  pour  le  service  de  notre  fille  et 

niepce, 

Pierre  de  Saumery,  vi«  1. 

Loyse  de  Cicon,  femme  du  seigneur  de  Mesnillon,  c  1. 

Jehanne  Dupuis,  xxx  L 

Jehanne  de  Savoye,  xx  1. 

Noël  Cornilleau,  tailleur  et  varlet  de  chambre,  xxnii  1. 

Maistre  Anthoine  Bugnot,  secrétaire  et  contrerolleur 
général  des  finances  de  la  maison,  vi»  1. 

c  Robert  Albisse,  trésorier  et  receveur  général  de  nos 
finances,  nous  voulions  et  vous  mandons  que  payez,  baillez 
et  délivrez  aux  devant  nommez  au  présent  rooUe  et  estât, 
et  à  chacun  d'eulx  respectivement,  les  sommes  contenues 
par  chacun  quartier  de  Tannée,  montans  à  la  somme  de 
sept  mil  huit  cens  soixante  dix-huit  livres  tournois,  et,  en 
rapportant  avec  le  présent  rooUe  les  quittances  particu- 
lières de  chacun  d'eulx,  nous  voulions  lesd.  sommes  estre 
assises  et  allouées  en  la  despence  de  nos  comptes  de  la 


203 

présente  année  par  nos  amez  et  féaulx  conseillers  les  pré- 
sident et  gens  de  nos  comptes  à  Chateaudun,  ausquels 
mandons  ainsi  le  Êiire  sans  difficulté.  Car  tel  est  notre 
plaisir.  Donné  à  Baugency  le  dixiesme  jour  de  juing  Tan 
mil  cinq  cens  vingt-cinq.  Signé  :  J.  d'Orléans,  arche- 
vesque  de  Thoulouse,  Jehanne,  Bugnot.  » 

—  M.  le  Président  rappelle  ensuite  à  la  Commission 
la  perte  qu'elle  vient  de  faire  en  la  personne  de  M.  le 
docteur  Ernest  Guéroult,  décédé  à  Caudebec^n-Caux, 
le  24  décembre  dernier.  Nommé,  par  arrêté  préiectcral 
du  16  mars  1868,  membre  correspondant,  en  rempla- 
cement de  M.  Mathon,  M.  le  docteur  Guéroult  a 
cofhblé,  autant  que  pouvait Tespérer  M.  Pabbé  Cochet, 
le  vide  que  r homme  de  bien,  son  prédécesseur,  aussi 
modeste  que  savant,  avait  laissé  dans  les  rangs  de  la 
Compagnie  (i).  Peu  d'hommes  ont  plus  aimé  la 
Commission  que  notre  regretté  confrère.  Quelques 
jours  avant  sa  mort  il  Fexprimait  encore,  dans  une 
lettre  intime  adressée  au  Vice-Président,  en  termes  des 
plus  touchants.  Forcé  de  prendre,  avant  Theure,  sa 
retraite  professionnelle,  pour  cause  de  santé  grave- 
ment altérée  par  excès  de  fatigue  et  de  dévoueinent,  le 
docteur  Guéroult  consacra  tout  entiers  les  derniers 
jours  de  sa  laborieuse  existence  à  Tarchéologie  locale, 
moitié  pour  l'histoire  elle-même,  moitié  pour  Tabbé 
Cochet,  son  illustre  ami.  De  médecin  qu^il  ne  pouvait 
plus  être,  devenu  antiquaire  pour  se  délasser,  M.  le  doc- 
teur Guéroult  ne  vivait  plus,  à  la  lettre,  que  pour  la 
Commission.  Rarement  il  manquait  une  de  nos  séances, 
et,  lorsque  ses  communications  parlées  faisaient  défaut, 

» 

(i)  Cf.  Bulletin  de  la  Commission  des  antiquités,  t.  I,  pages 
197-198. 


204 

il  y  suppléait  presque  toujours  par  des  communications 
écrites. 

La  Commission  remercie  M.  le  Président  d'inter- 
préter aussi  fidèlement  sa  pensée  et  s'associe  à  ses 
regrets. 

En  réponse  à  la  demande  de  plusieurs  membres,  le 
secrétaire-adjoint  constate  qu'il  existe  à  Caudebec  trois 
collections  :  la  collection  municipale,  fondée  par  M.  Bio- 
chet;  la  collection  de  l'église,  œuvre  de  M.  l'abbé 
Sauvage,  et  la  collection  de  feu  M.  le  docteur  Gué- 
roult,  celle-ci  la  plus  importante  des  trois.  Si  cette  der- 
nière sera  conservée  ou  aliénée,  c'est  ce  que  Ton  ne 
saurait  dire  encore.  Provisoirement,  M.  Brianchon  se 
croit  en  mesure  d'affirmer  qu'elle  reste  accessible  à  tous 
les  visiteurs. 

—  Cest  avec  un  vif  sentiment  de  satisfaction  que  la 
Commission  apprend,  par  M.  le  Président,  le  retour 
d'un  des  membres  les  plus  assidus  à  ses  séances  et  les 
plus  animés  de  l'esprit  de  famille  archéologique,  M.  de 
la  Serre,  inspecteur  des  eaux  et  forêts  pour  la  circons- 
cription de  Rouen. 

—  L* analyse  partielle  de  la  correspondance  im- 
primée offerte  à  la  Commission  des  antiquités,  dans  la 
séance  du  lo  juin  1882,  dont  M.  Brianchon  donne 
ensuite  lecture,  mentionne  particulièrement  : 

1°  L'ordre  du  jour  adopté  par  la  Société  des  anti- 
quaires de  France,  sur  la  proposition  de  son  président, 
M.  Heuzey,  membre  de  l'Institut,  dans  la  séance  du 
7  janvier  1880,  et  ainsi  conçu  :  «  La  Société  des  anti- 
quaires de  France  est  opposée  en  principe  à  toute  res- 
tauration ».  (Cf.  Mémoires  de  la  Société  nationale 
des  antiquaires  de  France^  5^  série,  t.  I,  p.  49)  ; 


205 

20  La  définition,  par  M.  d'Arbois  de  Jubainville, 
dans  le  même  ouvrage  (p.  igS)^  de  Vercingétorix»  5i<- 
premus  militum  dux,  nom  qualificatif;  le  Vercingéto- 
rix,  comme  on  disait  le  Brenn,  remarque  M.  Bou- 
quet; 

30  Une  très  intéressante  communication  (p.  261- 
263)  de  M.  Héron  de  Villefosse,  conservateur-adjoint 
des  antiquités  grecques  et  romaines  au  musée  du 
Louvre,  sur  la  découverte,  à  Lillebonne  et  à  Saint- 
Jean -de- Folleville,  en  1880,  des  thermes  antiques 
d'Alincourt  et  du  bas-relief  d'Oreste  du  Bois  d'Har- 
court; 

40  Dans  le  Bulletin  de  la  Société  des  amis  des 
Sciences  naturelles  de  Rouen^  pour  1881  :  Les 
Lichens  des  falaises  de  Saint- Jouin,  par  M.  l'abbé  Le- 
tendre,  vicaire  au  Grand-Quevilly  (p.  227-232)  ;  — 
Note  sur  la  découverte  de  VHieracium  pratense, 
Tausch.  dans  l'Eure,  suivie  de  la  description  des 
Hieracium  à  hampe  nue  et  à  rejets  rampants  qui 
croissent  en  Normandie,  par  M.  Alfred  Lacaille,  sup- 
pléant du  juge  de  paix,  à  Bolbec  (p.  333-336);  — 
Note  sur  VElodea  canadensiSy  par  M.  Tabbé  Letendre 
(p.  337-339);  —  Compte  rendu  de  Texcursion  de 
Veulettes  et  Petites-Dalles,  par  M.  Henri  Gadeau  de 
Kerville,  de  Rouen  (p.  341-347)  ;  —  Communications 
nombreuses  de  M.  Lemetteil,  de  Bolbec  (p.  361-371); 

5®  La  description,  dans  le  Bulletin  historique  de  la 
Société  archéologique  de  Tarn -et -Garonne  (t.  IX, 
p.  225-23o) ,  par  Mg^  Barbier  de  Montault,  d'une 
tapisserie  du  xv<^  siècle,  de  fond  identique  à  une  petite 
tapisserie  représentant  saint  Roch,  qui  figurait  à  Tex- 
position  universelle  de  Paris,  en  1878,  et  appartenait 
à  M.  Le  Breton,  de  Rouen. 


2o6 

M.  Gaston  Le  Breton  fait  observer  que  cette  tapis- 
serie est  aux  armes  des  d^Esneval,  qui  portent  pallé 
cTor  et  (fa\tir  de  six  pièces,  au  chef  cousu  de 
gueules; 

6^  Une  savante  analyse  (p.  258-261),  par  M.  R.  de 
Merciat,  d'une  Étude  sur  Varchéologie  chrétienne, 
pubiiée  dans  les  Lettres  chrétiennes  dt  Lille,  et  dues  à 
notre  compatriote,  M.  Paul  Allard. 

—  M.  Gouellain  expose  et  apprécie  la  découverte 
de  tombeaux  francs  faite  à  Pont-Authou,  dans  le  dé- 
partement de  l'Eure,  et  rapportée  par  le  Brionnais  du 
26  novembre  1882,  ainsi  qu'il  suit  : 

On  sait  que,  d'après  la  tradition,  Pont-Authou,  aujour- 
d'hui charmante  petite  bourgade  industrielle  située  sur  la 
Risle,  en  avsl  et  à  peu  de  distance  de  Brionne,  aurait  été 
autrefois  une  ville  très  importante,  ayant  pour  faubourgs 
les  communes  d'Authou,  Thierville  et  Bonneville.  Il  y  a 
quelques  années  déjà ,  on  a  trouvé,  à  Pont-Authou,  de 
nombreuses  antiquités  romaines  :  \ases  funéraires,  débris 
d'armes,  tombeaux  de  pierre,  etc. 

M.  A.  Boulanger,  architecte  à  Brionne,  nous  fait  part, 
dit  le  Courrier  de  VEure^  d'une  découverte  très  intéres- 
sante, au  point  de  vue  archéologique,  qui  vient  d'être  faite 
tout  récemment  par  des  ouvriers  qui  travaillaient  à  la  con- 
struction du  chemin  de  fer  de  Glos-Montfort  au  Neubourg, 
dans  une  tranchée  traversant  les  anciennes  voies  romaines 
de  Lillebonne  à  Lisieux  et  de  Rouen  au  Mans. 

De  nombreux  tombeaux  en  pierre  de  taille  ont  été  mis 
à  nu,  et,  malheureusement,  plusieurs  ont  été  brisés  par  la 
pioche  des  ouvriers  et  jetés  dans  les  remblais  de  la  voie 
ferrée. 

D'autres  tombeaux,  en  plus  grand  nombre,  existent 
encore,  et  semblent  indiquer  l'emplacement  d'une  vaste 
nécropole  gallo-romaine  franque. 


207 

Il  serait  à  désirer,  dans  Tintérêt  de  Thistoire  de  notre 
pays,  que  des  mesures  fussent  prises  sans  retard  par  Tadmi- 
nistration  supérieure  pour  assurer  Tenlèvement  et  la  con- 
servation de  ces  tombeaux.  Ce  qui  serait  d'autant  plus 
facile  que  les  travaux  du  chemin  de  fer  dont  il  s*agit 
s'exécutent  aux  frais  de  TÉtat. 

Le  nombre  des  cercueils  était  de  29. 

Un  dessin,  au  crayon,  d'objets  extraits  des  fouilles 
est  déposé,  par  M.  Gouellain,  sur  le  bureau  de  la  Com- 
mission. 

Ces  objets  consistent  en  :  6  cercueils  en  pierre,  dont 
3  plus  larges  à  la  tête  qu'aux  pieds  et  3  rectangulaires; 
2  couvercles  de  cercueils;  3  armes  en  fer;  i  grand  an- 
neau en  fer  oxydé;  i  double  annelet  en  fer;  i  agrafe 
en  métal  blanc;  i  agrafe  en  bronze;  i  vase  en  terre 
noire;  i  vase  en  terre  grise. 

—  A  M.  le  Président,  qui  demande  si  les  travaux 
exécutés  au  Palais-de- Justice  n'ont  rien  fait  découvrir 
de  nouveau  :  —  «  Rien  absolument,  répond  M.  Lefort,  » 
ce  que  M.  Le  Breton  attribue  au  fréquent  bouleverse- 
ment du  sol. 

—  En  septembre  1882,  dit  M.  Pelay,  les  fouilles 
faites  pour  les  fondations  du  Musée-Bibliothèque,  dans 
la  partie  longeant  la  rue  du  Coquet,  ont  rnis  à  nu  un 
mur  en  piene  assez  important. 

Cette  muraille,  dont  M.  Pelay  a  pu  reconnaître  l'exis- 
tence non  interrompue  à  plusieurs  endroits,  se  dirigeait 
en  ligne  droite  vers  la  tour  du  Donjon  du  château  de 
Philippe-Auguste,  en  prenant  comme  point  de  départ 
le  portail  latéral  nord  de  l'ancienne  église  S*-Laurent. 

Les  quelques  recherches  auxquelles  s'est  livré 
M.  Pelay  n'ont  pu  lui  fournir  aucune  indication  sur 
cette  muraille. 


2o8 

—  M.  Paul  Baudry  soumet  à  Texamen  de  la  G>in- 
mission  une  sorte  de  minerai  gravé,  en  partie  tronqué, 
très-lourd,  eu  égard  à  son  volume,  et  dont  il  désire- 
rait connaître  la  matière  et  Pusage.  L^objet  en  ques- 
tion est  de  forme  polyédrique.  Poids,  environ  i  kil. 
25  grammes;  hauteur  de  la  base,  2  centimètres;  hau- 
teur totale,  7  centimètres  ;  plan  inférieur,  8  centimètres 
sur  6.  Toutes  mesures  données  sans  rigueur  mathé- 
matique. 

M.  Gouellain  pense  que  la  matière  pourrait  être  du 
cinabre  ou  sulfure  de  mercure.  Des  deux  écussons  or- 
nant les  faces  principales,  Pun  révèle,  à  M.  de  Beau- 
repaire,  les  armoiries  des  Carmes  Déchaussés;  Tautre, 
diaprés  M.  de  Merval,  porte  cinq  tiercefeuilles.  Les 
motifs  décoratifs  indiquent  le  caractère  espagnol.  D'une 
inscription,  d'ailleurs  incomplète,  qui  couvre  la  base, 
on  nedéchififre  guère  que  les  lettres  suivantes  »lvssmo 
s^  APZ  LAvs.  Le  style  général  est  celui  du  xvn«  siècle. 
Quant  à  l'usage,  il  reste  indéterminé.  Peut-être  était-ce 
un  poids. 

Présenté,  après  la  réunion,  à  Tun  des  plus  compé- 
tents professeurs  de  la  ville,  celui-ci  y  a  reconnu  un 
hématite  rouge,  formé  d'oxyde  de  fer,  qu^il  décrit  : 
une  pyramidique  tronquée,  irrégulière,  à  huit  pans, 
placée  sur  une  base  d'un  nombre  égal  de  faces. 

A  quatre  heures,  la  séance  est  levée. 

Le  Secrétaire-adjoint, 
Brianchon. 


209 


SÉANCE  DU  22  MARS  i883 

La  séance  ouvre  à  deux  heures  sous  la  présidence  de 
M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Sont  présents  :  MM.  Adeline,  Paul  Baudry,  de  Bel- 
legarde,  Billiard,  le  marquis  de  Blosseville,  Maillet  du 
Boullay,  Bouquet,  de  Girancourt,  de  Glanville, 
Gouellain,  Gaston  Le  Breton,  l'abbé  Loth,  Pelay, 
Tabbé  Tougard,  de  Vesly  et  Brianchon,  secrétaire-ad- 
joint. 

Est  absent  et  excusé  :  M.  le  vicomte  d'Estaintot, 
secrétaire. 

—  La  correspondance  imprimée  comprend  : 

Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  Soissons, 
t.  XI,  2«  série,  1880;  —  Comptes  rendus  et  mémoires 
du  Comité  archéologique  de  Senlis,  t.  VII,  1881  ;  — 
Mémoires  de  la  Société  d'émulation  du  DoubSj 
5«  série,  6^  vol.,  1 88 1  ; — Bulletin  de  laSociété  archéo- 
logique de  Tarn^t-Garonne,  t.  IX,  1881;  —  Bul- 
letin  du  Comité  des  travaux  historiques  et  scienti^ 
JiqueSy  n**'  i  et  2,  1882  ;  —  Bulletin  de  la  Société  in- 
dustrielle d'Elbeufy  no  3,  1882;  —  Cartulaire  du 
prieuré  de  Saint-Étienne^de-  Vignory  (Société  archéo- 
logiquede  Langres),  par  J.  d'Arbaumont,  1882  ;  — Afé- 
moires  de  la  Société  des  antiquaires  du  Centre^  t.  X, 
1882;  —  Mémoires  de  la  Société  académique  de 
Saint-Quentin,  4«  série,  t.  IV,  1882. 

Le  procès- verbal  de  la  séance  du  7  février,  est  lu  et 
adopté. 

—  M.  le  Président  saisit. la  Commission  d'une 
demande  de  secours,  formée  par  la  commune  d'Anger- 


210 

ville-rOrcher,  pour  réparations  au  clocher  et  à  Péglise 
atteints  par  la  foudre  l'année  dernière. 

L'église  entière  d'Angerville-POrcher  est  classée  par 
rÉtat  et  le  Département. 

Le  devis  des  travaux  s^élève  à  5,820  francs,  dans 
lesquels  la  subvention  réclamée  entrerait  pour  un 
chiffre  de  2,820  francs. 

Examen  fait  du  dossier,  dont  les  pièces  sont  régu- 
lières et  auxquels  il  ne  manque  qu'un  plan  pour  être 
complet,  la  Commission  émet  à  Punanimité  un  avis 
favorable  à  la  demande  de  la  commune  d' Angerville- 
rOrcher,  sous  condition  expresse  que  le  style  de 
l'église  sera  respecté  dans  toutes  ses  parties. 

—  En  présence  d'accidents  trop  souvent  renouvelés, 
la  Commission,  s'inspirant  d'un  vœu  de  M.  l'abbé 
Cochet,  croit  devoir  recommander  à  nouveau  l'établis- 
sement de  paratonnerres  sur  tous  les  clochers  classés 
comme  monuments  historiques. 

—  M.  Pelay  remet  à  M.  le  Président  un  croquis  de 
cercueils  en  pierre. 

En  exécutant  des  travaux  d'élargissement  et  de  ni- 
vellement de  la  rue  Tabouret,  dans  les  premiers  mois 
de  1882,  les  ouvriers  ont  rencontré  des  cercueils  de 
pierre,  au  nombre  de  trois  ou  quatre.  Comme  leurs 
congénères  de  la  rue  RouUand,  découverts  en  i833, 
les  cercueils  appartiennent  à  l'époque  gallo-romaine. 
Il  n'en  est  pas  moins  permis  de  supposer,  avec 
MM.  Billiard  et  Paul  Baudry,  que  les  premiers  occu- 
pants des  sépultures  ont  dû  céder  la  place,  selon  l'usage, 
aux  Mérovingiens  ultérieurs  des  vi^  ou  vii«  siècles. 

Les  fouilles  de  la  rue  Tabouret  ont  été  particuliè- 
rement suivies  par  M.  de  Beaurepaire  et  M.  l'abbé 
AUard,  du  clergé  de  Saint-Gervais,  qui  a  pris  soin  de 


311 

recueillir  les  ossements  et  de  les  déposer  au  cime- 
tière. 

Disons  en  passant  que  les  cercueils  en  pierre  de  la 
rue  Tabouret,  sur  lesquels  M.  Pelay  fixe  notre  atten- 
tion, comme  l'urne  en  terre  cuite  de  la  rue  du  Renard, 
aperçue  par  M.  Paul  Baudry,  Tannée  dernière, 
donnent  une  fois  de  plus  raison  à  Tabbé  Cochet, 
quand  il  appelle  si  bien  le  quartier  Saint-Gervais,  — 
«  la  grande  nécropole  de  Rotomagus  »  (i). 

Un  dessin  du  croquis  de  M.  Pelay  sera  relevé,  par 
les  soins  de  M.  Paul  Baudry,  pour  les  archives  de  la 
Commission. 

—  M.  de  Vesly  met  sous  les  yeux  de  la  Commis- 
sion une  épée  en  fer  et  un  javelot  de  bronze.  Ces  deux 
objets  ont  été  extraits  du  lit  de  la  Seine,  à  Oissel,  près 
du  banc  Saînt-Marcin,  lors  des  draguages  exécutés  sous 
la  direction  de  MM.  Lagrenée  et  G.  Léchalas,  ingé- 
nieurs des  ponts  et  chaussées. 

L'épée,  qui  est  fort  bien  conservée,  mesure  o"  jS  de 
lame  et  o'niô  de  poignée,  y  compris  la  garde  et  le  pom- 
meau. Sa  longueur  totale  est  de  o'^gi.  La  largeur  de 
la  lame  est  de  o^^oSS,  près  de  la  garde,  et  de  ©'"oSo  à  la 
naissance  de  la  pointe.  Cette  arme  a  été  obtenue  d'un 
seul  jet,  et  le  pommeau,  de  forme  semi-lenticulaire, 
mesure  o'"07  sur  o'"45.  Ce  poids  était  destiné  à  équili- 
brer Parme  dans  la  main  du  guerrier. 

Le  javelot  de  bronze,  recouvert  d'oxyde,  auquel 
adhèrent  de  petits  coquillages,  mesure  o<"i8  de  hau- 
teur et  o™o55  de  sa  plus  grande  largeur.  La  hampe 
devait  pénétrer  jusqu'à  l'extrémité  de  Parme  :  car  la 

(i)  L'abbé  Cochet,  Répertoire  archéologique  de  la  Seine-Infé- 
rieure ^  col-  372. 


212 

douille  conique  forme  une  saillie  qui  se  continue  jus- 
qu^à  la  pointe. 

M.  de  Vesly  croit  pouvoir  fixer  à  Pépoquede  la 
Gaule  indépendante  Tépée  de  fer  et  dit  que  le  javelot 
de  bronze  est  d'importation  romaine. 

M.  Gouellain  ne  partage  pas  l'opinion  de  M.  de  Vesly 
en  ce  qui  concerne  Tépée  de  fer.  Il  la  croit  postérieure 
et  d'origine  franque.  Cette  arme,  selon  M.  Gaston  Le 
Breton,  est  du  ix<^  siècle. 

M.  de  Vesly  regrette  de  ne  pouvoir  se  rangera  l'opi- 
nion de  ses  honorables  collègues. 

a  L'épée,  dit-il,  dont  on  vient  de  donner  la  descrip- 
tion, est  à  lame  plate.  Elle  a  été  fondue  d'un  seul  jet. 
Elle  ne  présente  aucune  arête,  ni  gouttière,  et,  quoique 
son  exécution  atteste  une  industrie  déjà  développée, 
c'est  en  vain  qu'on  chercherait  dans  l'examen  de  cette 
arme  les  caractères  de  l'épée  franque.  »  M.  de  Vesly 
reconnaît  d'ailleurs  l'embarras  dans  lequel  il  s'est 
trouvé  en  voulant  cataloguer  l'épée  d'Oissel  :  car  il 
n'existe  aucun  type  similaire  dans  nos  collections 
départementales  (i). 

L'épée  en  fer  et  le  javelot  de  bronze,  provenant  des 
dragages  d'Oissel,  sont  offerts  par  M.  de  Vesly  au 
musée  d'antiquités.  Un  dessin  en  sera  remis  aux  ar- 
chives de  la  G)mmission. 

Et,  d'autre  part,  MM.  les  Ingénieurs  chargés  des 
travaux  de  dragage  ayant  promis  à  M.  Maillet  du 
Boullay  de  réserver  les  trouvailles  qu'ils  pourraient 
faire  au  musée  d'antiquités,  M.  de  Girancourt  trouve 

(i)  L'épée  trouvée  à  Oissel  ayant  été  soumise  par  M.  de  Vesly 
à  M.  Nicaise  (de  la  Marne),  cet  archéologue  a  reconnu  que 
Tarme  était  d'origine  Scandinave.  Cest  une  arme  d'importation 
dont  le  type  est  fort  rare  en  France. 


2l3 

juste  d^'adresser  à  tous  les  donateurs,  tant  présents  que 
futurs,  un  témoignage  officiel  des  remercîments  de  la 
G>mmission. 

—  M.  Billiard  soumet  à  l'examen  delà  Commission 
des  spécimens  de  silex  taillés,  recueillis  autour  de 
Rouen,  sur  lesquels  il  donne  les  explications  sui- 
vantes : 

Plusieurs  localités  des  environs  de  Rouen,  et  notam- 
ment Blosseville-BonsecourS;  Darnétal,  Saint- Léger-. 
du-Bourg-Denis,  le  Mont-aux-Malades,  les  plaines  de 
la  rive  gauche  de  la  Seine,  Oissel,  Saint-Étienne-du- 
Rouvray,  Quatre- Mares  et  Sotteville  avaient  déjà 
fourni,  il  y  a  quelques  années,  de  remarquables 
échantillons  des  armes  et  outils  en  pierre  à  Tusage  de 
l'homme  aux  temps  préhistoriques.  Mais,  depuis  un 
an,  ce  sont  les  travaux  exécutés  dans  les  plaines  de 
Quevilly  et  sur  les  bords  du  fleuve  qui  mettent  à  dé- 
couvert une  nouvelle  et  intéressante  série  de  ces 
curieux  monuments. 

«  Cest  la  fleur  du  panier,  dit  M.  Billiard,  que  je 
présente  à  la  Commission,  avec  seulement  deux  ou 
trois  échantillons  déjà  entrés  dans  le  musée,  que  les 
nouveaux  vont  aller  rejoindre  ». 

Voici,  de  Pensemble  de  ces  spécimens,  Torigine,  la 
liste  et  la  description. 

Quevilly.  —  Une  longue  pièce  ronde  en  silex  noir, 
sorte  de  poignard  très  aigu  de  chaque  bout,  de  o"i8 
de  circonférence  maxima  et  d'une  longueur  de  0^44 
centimètres.  Quatre  silex  gris  et  polis,  percés  naturel- 
lement, en  forme  d'^amande,  très  pointus  des  deux 
bouts,  taillés  par  éclats,  et  mesurant,  du  plus  grand  au 
plus  petit,  de  o<°20  à  o^^i  i  de  longueur.  Hache  polie 
en  silex  gris,  longueur,  o>°24.  Hache  polie  en  silex 


214 

rouillé,  longueur,  o"i2o.  Deux  petites  pointes  de 
flèche  miniature  (  i  ) . 

Quai  des  Curandiers.  —  Très  belle  hache  polie,  en 
silex  presque  noir,  longueur,  o™22. 

Seine,  devant  les  chantiers  Ciaparède.  —  Une 
énorme  hache  de  silex  jaunâtre,  en  forme  d^amande, 
percée  naturellement,  très  pointue  des  deux  bouts, 
taillée  par  éclats,  longueur,  o"28,  largeur,  o™i  3,  épais- 
seur au  trou,  o™o6. 

Mont'Saint^Aignan,  —  Hache  polie,  d'une  belle 
forme,  en  silex  gris,  longueur,  o™20. 

DarnétaL  —  Hache  polie,  d'une  belle  forme,  en 
silex  gris,  longueur,  o"^20.  Casse-téte  en  silex  blanc 
rouillé,  outil  taillé  en  éclats,  de  manière  à  prendre  la 
forme  de  la  main  fermée,  qu'il  dépasse  par  les  deux 
bouts.  Deux  silex  plus  ou  moins  arrondis,  en  forme 
de  percuteur,  outil  plutôt  qu'arme.  Pointe  de  flèche 
miniature. 

Saint'Léger-dU'Bourg'Denis,  —  Casse-tête  en 
silex  blanc  rouillé,  outil  taillé  en  éclats  de  manière  à 
prendre  la  forme  de  la  main  fermée  qu'il  dépasse  par 
les  deux  bouts. 

Saint^Étienne-du-Rouvray,  —  Pointe  de  flèche  mi- 
niature. 

Quatre-Mares,  —  Pointe  de  flèche  miniature. 

Poses  (Eure).  —  Pointe  de  flèche  miniature. 

La  Commission  félicite  à  la  fois  dans  M.  Billiard  le 
collègue  qui  représente  plus  particulièrement,  à  ses 

(i)Ces  deux  pointes  de  flèche  miniature,  ainsi  que  les  quatre 
autres  désignées  plus  loin,  ont  été  offertes  par  M.  et  Mlle  Billiard 
au  musée  d'antiquités.  Peu  de  jours  après  la  séance  de  la  Com- 
mission, M.  Billiard  a  reçu  de  Quevilly  une  vingtaine  de  nou- 
velles pointes. 


2l5 

séances,  Parchéologie  préhistorique,  et  le  conservateur- 
adjoint,  qui,  de  concert  avec  l'honorable  continuateur 
de  Tabbé  Cochet,  M.  Maillet  du  BouUay,  ne  néglige 
aucune  occasion  d'enrichir  le  musée  d^antiquités. 

—  M.  Maillet  du  Boullay  présente  un  spécimen  de 
poterie  trouvé  dans  les  démolitions  du  quartier  Mar- 
tain\ille  et  offert  au  musée  d^antiquités  par  M.  Bour- 
don, du  quai  de  Paris. 

Ce  pichet  ou  pot  à  boire,  qui  rappelle  un  vase  à 
pasiîUages,  communiqué  par  M.  Lefort,  dans  la 
séance  du  25  janvier  1882^  est  attribué  au  xv«  siècle,  et 
porte  pour  inscription  ces  mots  :  Fa-f-e«  quitte. 

—  M.  Pelay  informe  la  Commission  que  la  belle 
collection  préhistorique  de  M.  Michel  Hardy,  ainsi  que 
sa  bibliothèque,  viennent  dMtre  en  grande  partie  dé- 
truites par  un  incendie.  La  Commission  est  unanime  à 
déplorer  l'accident  doublement  fâcheux  pour  la  science 
et  pour  le  savant,  dont  notre  sympathique  collègue, 
l'archiviste  de  Périgueux,  a  été  victime. 

—  M.  Brianchon  donne  lecture  de  la  note  suivante  : 

A  la  demande  qui  m'avait  été  faite  par  notre  collègue , 
M.  de  Merval,  dans  la  séance  du  7  février  dernier,  j*ai 
cherché  à  me  renseigner  sur  les  découvertes  sépulcrales  de 
l'église  de  Raffetot,  et  voici  ce  que  j'ai  appris  : 

f  On  a  —  m'écrivait  M.  l'abbé  Brentot,  curé  de  Raffe- 
tot, à  la  date  du  27  février  dernier,  —  on  a,  sur  la  demande 
de  M.  le  vicomte  Roger  des  Mares  de  Trcbons,  de  Grain- 
ville- Ymauville,  retiré  tous  les  débris  qui  encombraient  un 
tombeau,  violé  en  1793,  probablement  par  esprit  de  cupi- 
dité. Ce  tombeau,  d'un  mètre  seulement  de  profondeur, 
renfermait  :  1°  les  gros  ossements  de  deux  corps,  les  deux 
crânes,  plus  une  mâchoire  d'enfant,  le  tout  recueilli  avec 
respect;  2°  deux  têtes  en  marbre  blanc,  d'un  très  beau 
travail,  Tune  4'homme,  l'autre  de  femme,  mutilées,  mais  à 


2l6 

garder  néanmoins  précieusement;  3o  la  plus  grande 
partie  de  la  pierre  tombale,  dont  un  petit  morceau,  que 
vous  aviez  vu,  m'avait  £iit  soupçonner  la  présence.  J'en  ai 
reconstitué  une  assez  bonne  partie.  Elle  est  d'un  François 
de  Kanouville.  Elle  a  trait  à  une  fondation.  Sans  date. 
Conservée  au  presbytère. 

c  A  côté  de  ce  tombeau,  j'ai  eu  idée  qu'il  pouvait  encore 
y  avoir  eu  d'autres  sépultures.  J'étais  dans  le  vrai.  L'ar- 
gile, à  peine  sondée,  ne  m'a  pas  paru  vierge.  A  deux  pieds 
à  peine,  la  pelle  a  rencontré  un  corps  sonore.  C'était  un 
cercueil  en  plomb,  d'un  mètre  de  longueur,  intact.  Sans 
lever  ni  déplacer  le  petit  cercueil,  on  a  continué  au  bout 
les  sondages.  La  terre  n'est  pas  plus  vierge  qu'au-dessus.  Il 
y  a  encore  un  cercueil  à  une  plus  grande  profondeur, 
celui  de  la  mère,  peut-être.  Les  choses  en  sont  là.  » 

M'étant  empressé^  après  cette  lettre ,  de  me  transporter 
à  l'église  et  au  presbytère  de  Raffetot,  j'ai  pu  y  vérifier 
toute  l'exactitude  des  indications  données  par  M.  le  curé, 
auxquelles  je  ne  me  permettrai  d'ajouter  que  quelques 
mots. 

C'est  dans  la  crypte  vide  qui  existe  sous  l'ancienne  cha- 
pelle seigneuriale  qu'ont  eu  lieu  les  deux  fouilles  pra- 
tiquées par  M.  le  curé  de  Raffetot.  Commençons  par  la 
seconde.  J'ai  vu  le  petit  cercueil  de  plomb  trouvé  à 
soixante  centimètres  de  profondeur.  Il  paraît  en  place,  et 
ne  porte  aucune  instruction.  Sa  forme  est  celle  d'un  tube 
à  dessous  plat.  Le  second  cercueil  n'a  pas  encore  été  dé- 
blayé. 

La  première  fouille  offre  beaucoup  plus  d'intérêt. 
Presque  au  fond  de  la  crypte  et  à  gauche  se  trouve  le 
caveau  rectangulaire  visité  par  M.  le  curé.  On  l'avait  rem- 
pli indistinctement  d'objets  appartenant  à  la  sépulture,  et 
d'autres  qui  lui  étaient  étrangers.  Outre  les  gros  ossements 
et  les  têtes  de  marbre,  mentionnés  dans  la  lettre  de  M.  le 
curé,  il  y  avait  encore  de  la  terre,  des  silex,  des  fragments 
de  table  d'obit  et  des  morceaux  de  plomb,  M.  le  curé  a 


2Î7 

recueilli  de  plus  une  grande  lettre  cursive  en  plomb  P,  me- 
surant o«o7  sur  o'»04,  et  deux  clous,  d'où  semble  résulter, 
au  moment  de  la  -sépulture,  l'existence  de  cercueils  de 
plomb  et  de  bois,  et  d'une  inscription  d'applique. 

Les  deux  têtes,  en  marbre  de  Paros,  si  je  ne  me  trompe, 
et  d'une  grande  finesse  d'exécution,  sont  fort  belles.  Elles 
révèlent  la  main  d'un  maître.  Les  figures  ont  été  sauva- 
gement mutilées.  Les  traits  caractéristiques  de  la  physio- 
nomie, le  nez,  la  bouche,  les  sourcils,  les  yeux  n'ont  pas 
trouvé  grâce  devant  le  marteau  des  iconoclastes;  mais  à 
cet  acte  impie  ont  encore  échappé,  comme  par  miracle, 
des  détails  précieux  et  charmants. 

La  tête  de  l'homme  est  nue,  l'oreille  petite ,  le  cou  for-> 
tement  attaché.  Les  cheveux  aplatis  sont  symétriquement 
disposés  par  étages  circulaires  de  sept  ou  huit  rangs  de 
boucles.  Moustache  épaisse,  barbe  courte  et  frisée.  Face 
carrée,  visage  osseux,  pommettes  saillantes. 

La  tête  de  la  femme  est  plus  curieuse  encore.  Sa  coif- 
fure, très  bien  conservée,  et  d'une  forme  particulière  que 
je  me  garderai  bien  de  décrire,  emprisonnant  carrément 
la  tête  aux  cheveux  relevés  tout  autour  du  front,  enrichie 
d'une  double  rivière  de  perles  mêlées  de  cabochons,  puis 
fermée  derrière  par  une  pièce  plate,  aussi  ornée  de  perles, 
suffirait  seule  à  dater  la  sépulture.  Comment  ces  deux 
têtes,  évidemment  du  mari  et  de  la  femme,  ont-elles  été 
rejetées  aux  décombres,  pendant  que  le  reste  des  person- 
nages a  disparu  ?  C'est  sans  doute  que  les  deux  tètes, 
séparées  de  leurs  troncs  auxquels  elles  ne  tenaient  que 
par  un  pivot,  vu  l'exiguité  de  leur  volume,  n'étaient 
bonnes  à  rien,  tandis  que  les  corps,  de  grandeur  naturelle, 
auront  pu  être  sciés,  débités  et  utilisés  pour  le  plus  grand 
profit  des  spoliateurs. 

Les  fragments  d'inscription,  au  nombre  de  dix  ou  onze, 
sortis  également  de  cette  sépulture,  ne  proviennent  pas, 
comme  l'avait  pensé  M.  le  curé,  d'une  dalle  tumulaire, 
mais  bien  d'une  table  de  fondation  ou  pierre  d'obit,  que 

i5 


2l8 

nous  supposerions  volontiers  avoir  été  placée,  plutôt  dans 
la  chapelle  seigneuriale  que  dans  la  crypte.  Sur  cette 
plaque  de  marbre  noir,  de  45  à  5o  centimètres  carres 
environ,  est  gravée,  en  lettres  dorées,  la  partie  d'inscrip- 
tion suivante,  que  nous  attribuons,  d'après  la  forme  de 
certaines  lettres,  et  en  l'absence  du  millésime  qui  n'a  pu 
éire  retrouvé,  aux  premières  années  du  xvii«  siècle. 

EVR  Messire  Franco ys  de  Canovville 
OY,  Seignevr  de  Raffetot,  malleville 

T  DE  VlNACOVRT  MEV  DE  DEVOTION  PO»    AVGMETER  LA 

ICE  A  DÔNÉ  AVMOSNÉ  ET  FODÉ  A  PERPÉTVITÉ  TROYS 

T  A    LEGLISE    DE  RAFFETOT   PO»    Y   ESTRE  CHATÉB   ET 

E  TOVS  LES  lO'     DE   LA  SEPMAINE   LAQUELLE   SE  DIRA  PRO 

EDY.  ET  SAMEDY  ET  LES  AVTRES  loVRS  SE  DIRA 

ENTZ  CONVENABLES  DE  NOIR  ET  DE  ROVGE  qViL 

DE  CHACQVE  M  ESSE  SE  G  HATERA  VN  LIBERA 

SSEVRS,   SVR  LEQVEL  SERA  ALLVMÉ  PENDANT 

POIX  DE  TROIS  LIVRES  ,  ET  SVR    LAVTEL  DEVX 

VE  LE  PREMIER  VENDREDY  DE  CHACQVE 

T  LIBERA  SERA  DISTRIBVÉ  A  TRENTE 

E  LA  PAROISSE  DE  RaFFETOT,  QVI  AVRO 

N  VN  PAIN  dVn  SOLD,  ET  A.  QVINZE  PAV 

PAREILLE  NÉCESSITÉ  ET  QVI  A 

T  JeVDY  CHACVN   SIX  DEN 

NDAT  LE  VIVAT  DV 

CÉDÉ. 

FAICT 

ATÉ  EN  O 

STÉ  DE  S 

ME  DE  H 

CAIR 

NTECO 

DVR 
B 

AV  G 

LR  C 


219 

Église  de  Raffetot  (20  mars  j883). 

Plaque  de  marbre  noire  recueillie  au  presbytère  et 
fragmentée  en  onze  morceaux.  — »■  Inscription  gravée  en 
lettres  dorées.  Dimensions  approximatives  :  hauteur,  o"42  ; 
largeur,  o'n46. 

La  Commission  ne  s*étonnera  pas  si  je  n'ai  pu  quitter 
l'église  de  Raffetot,  qui  conserve  comme  un  reflet  de  son 
ancienne  splendeur,  sans  jeter  un  dernier  regard  sur  les 
fonts  baptismaux  et  les  quatorze  médaillons  renaissance, 
récemment  classés,  comme  on  sait,  parmi  les  monuments 
historiques  du  département.  Ces  objets  sont  remarquables, 
mais  ils  sont  détériorés,  et  M.  le  cure  ne  m*a  pas  caché 
qu'il  serait  heureux  de  voir  le  Département  assurer,  par 
rétablissement  d'une  grille,  la  conservation  des  bas-reliefs 
des  fonts  baptismaux,  et,  par  telles  mesures  que  de  raison, 
la  consolidation  de  quelques  médaillons  qui  tombent  de 
vétusté. 

Je  me  permettrai  encore  de  recommander  aux  lumières 
spéciales  de  mes  confrères,  non  seulement  l'attribution  des 
armoiries  diverses  qui  se  trouvent  ça  et  là  sur  les  pierres 
sépulcrales  ou  de  fondation,  à  une  clé  de  voûte,  sur  la 
cuve  baptismale,  au  socle  de  la  croix  du  cimetière,  et 
jusque  sur  la  cloche  nommée  Catherine  en  1776,  mais 
encore  et  surtout  la  lecture  delà  double  ligne  de  caractères 
du  xvfc  siècle  Inscrits  sur  trois  côtés  d'une  dalle  tumulaire 
encastrée  dans  le  mur  de  la  chapelle  seigneuriale  de 
l'église  de  Raffetot  en  1864. 

Les  quelques  mots  que  nous  soyons  parvenus  à  déchiffrer, 
M.  le  curé  et  moi,  embrassent  les  deux  points  extrêmes, 
l'alpha  et  l'oméga.  Reste  à  suppléer  l'intermédiaire. 

On  lit  au  commencement  : 

Cy  dessoubj  gist  damqyselle. . . 

Et  à  la  fin  : 

Nobles  lecteurs,  prie^  Dieu  et  Marie  que  Vdme  soit  en 
paradis. 

Des  restes  d'armoiries,  placées  à  droite  et  à  gauche  du 


220 

chevet  da  monument,  pourront  aider  à  la  restitution  des 
personnages. 

—  M.  Gaston  Le  Breton  fait  passer  sous  les  yeux  de 
la  Commission  le  dessin  d'une  statue  de  Louis  XV,  par 
Jean-Baptiste  Lemoyne. 

On  sait  que  Térudit  conservateur  du  musée  céra- 
mique de  Rouen  est  Fauteur  d^une  notice  intitulée  : 
Le  sculpteur  Jean^Baptiste  Lemoyne  et  V académie 
de  Rouen.  Nous  ne  saurions  mieux  faire  que  d^em- 
prunter  à  cette  notice,  p.  28,  la  description  du  dessin 
dont  il  s'agit  : 

a  Un  dessin  original  à  la  mine  de  plomb  rehaussé 
de  bistre,  dit  M.  Le  Breton,  représentant  Louis  XV  en 
costume  d'empereur  romain,  élevé  sur  un  bouclier  par 
trois  guerriers  debout,  nous  paraît  être  une  variante  du 
projet  de  J  -B.  Lemoyne  que  Ton  voit  au  Louvre  et 
sur  lequel  le  prince  est  revêtu  d'une  armure  de  son 
temps  et  porté  par  des  guerriers  un  genou  à  terre.  Ce 
dessin  appartenait  à  M.  Jules  Maciet,  qui  a  bien  voulu, 
sur  notre  demande,  en  faire  don  à  la  bibliothèque  pu- 
blique de  Rouen,  t» 

A  propos  d'une  statuette  d'Osiris,  qu'il  soumet  à  la 
Commission,  avec  plusieurs  autres  échantillons  en 
terre  cuite  des  bords  du  Nil,  M.  Gaston  Le  Breton 
entre  dans  des  considérations  détaillées  sur  les  pro- 
duits de  la  céramique  égyptienne  à  l'époque  ptolé- 
maïque,  ainsi  que  sur  les  soins  apportés  par  les  Egyp- 
tiens à  la  conservation  des  morts.  Ces  considérations 
intéressantes,  que  chacun  voudra  relire  dans  le  dis- 
cours de  réception  à  FAcadémie  de  notre  collègue,  La 
céramique  polychrome  à  glaçures  métalliques  dans 
Vantiquité,  sont  couronnées  du  témoignage  d'Héro- 
dote par  M.  Bouquet. 


221 

—  M.  Tabbé  Tougard  communique  à  la  Commis- 
sion un  extrait  de  la  Liste  des  ouvrages  de  Carie 
VanloOy  imprimée  peu  de  temps  après  sa  mort.  On  y 
lit  les  deux  indications  suivantes  : 

«  1726.  Mars  et  Vénus,  gravé  par  Ravenet.  A 
Rouen,  chez  M™«  de  Brèvedent  ». 

a  1 741.  La  Vierge  et  le  Jésus.  A  Rouen  dans  la 
salle  des  Consuls  ». 

Le  même  membre  rappelle  à  ce  propos  que  Tun  des 
tableaux  de  Téglise  de  Motteville  passe  pour  être  du 
même  maître. 

M.  Gaston  Le  Breton  croit  pouvoir  reconnaître, 
dans  un  tableau  de  Carie  Vanloo  à  la  cathédrale,  la 
Vierge  et  Penfant  Jésus  qui  décorait  autrefois  la  salle 
des  Consuls. 

«  Nos  collègues  apprendront  avec  plaisir,  ajoute 
M.  l'abbé  Tougard,  que  la  belle  abbatiale  de  Saint- 
Georges  vient  d'être  pourvue  d'un  maître-autel  en 
pierre,  dont  Pensemble  reproduit  celui  de  l'abbaye  de 
Saint-Germer,  près  de  Gournay.  » 

—  M.  Brianchon  est  heureux  de  préciser,  à  la  suite 
d'une  subvention  de  quarante  mille  francs  récemment 
accordée  par  le  ministère  des  cultes,  la  situation 
financière  de  l'œuvre  pour  la  restauration  de  la  â^che 
de  réglise  de  Notre-Dame  de  Caudebec-en-Caux. 

Dépenses  à  faire 1 55,ooo  fr. 

Ressources  acquises 

A       l  Beaux-Arts.   3o,ooo  ) 
i<»  Etat.  \  ^  .  \  70,000  ) 

/  Cultes 40,000  S  (io5,ooo 

Département 35,ooo  ) 

a»  Souscriptions  libres  de  la  ville 44,000 

Total 149,000 

A  déduire 140,000 


Reste  à  fournir 6,000  fr. 


222 

—  M.  le  Vice- Président  donne  lecture  d'un  mémoire 
qui  a  été  adressé  par  M.  Coppinger  sur  le  Cimetière 
Gallo-Romain  des  Vertus, 

• 

f  II  y  a  trois  ans,  en  interrompant  la  fouille  que  nous 
avions  entreprise  aux  Vertus,  ce  n'était  point  sans  esprit 
de  retour.  A  notre  avis,  si  le  cimetière  était  de  quelque 
importance,  il  devait  comprendre  plus  d'une  vingtaine  de 
sépultures.  Une  nouvelle  campagne,  faite  au  mois  d'octobre 
dernier,  nous  démontra  que  nous  ne  nous  étions  point 
trompé. 

Cette  fois,  à  notre  grand  regret,  nous  n'avions  plus 
près  de  nous  notre  ami,  M.  Michel  Hardy,  et,  nous  devons 
Tavouer,  son  expérience  nous  fit  plus  d'une  fois  défaut. 

Dans  les  sept  sépultures  de  la  fouille  de  1882  (ce  qui 
porte  à  trente-trois  le  nombre  de  celles  que  nous  avons 
découvertes),  nous  retrouvons  les  mêmes  procédés  que 
précédemment.  Les  sépultures  sont  garanties  par  de  gros 
silex  ou  par  des  fragments  de  tuiles.  Les  urnes  cinéraires 
sont  du  genre  alla.  Les  vases  aux  offrandes  rappellent 
les  petits  «  pots-à-beurre,  »  tant  de  fois  représentés  et 
décrits  dans  les  ouvrages  de  M.  Tabbé  Cochet. 

Très  peu  d'objets  ont  pu  être  retirés  intacts  du  sol. 

Une  seule  sépulture  a  été  trouvée  dans  son  état  pri- 
mitif, chose  assez  rare.  Aussi  en  dirons-nous  quelques 
motSk 

Cette  sépulture  ne  se  composait  que  d*une  grande  urne 
cinéraire  forme  «  pot-au-feu  »,  et  d'un  petit  vase  aux 
offrandes,  tous  deux  posés  sur  l'argile  et  hermétiquement 
couverts  d'un  fragment  de  tuile.  Contrairement  à  ce  qui 
s'était  présenté  jusqu'alors,  très  peu  de  terre  avait  pénétré 
à  l'intérieur  de  l'urne  cinéraire,  et,  pour  la'première  fois, 
il  nous  fut  donné  de  nous  rendre  un  compte  exact  de  la 
façon  dont  tout  avait  été  disposé  dans  l'urne.  Au  fond, 
on  apercevait  les  cendres  et  les  débris  d'ossements,  et 
posée  dessus,  légèrement   inclinée,  une  charmante  am- 


223 

« 

poule  à  anses  en  verre  vert  (i).  Cette  petite  ampoule  est 
absolument  intacte,  et  est  certainement  le  plus  précieux 
objet  de  la  fouille  de  cette  année.  Elle  ne  mesure  que 
oi"o35  de  hauteur,  et  011104  de  largeur  à  la  panse. 

Parmi  les  objets  provenant  des  autres  sépultures,  nous 
n'avons  à  signaler  qu'un  vase  aux  offrandes  en  terre  grise 
de  o™io5  de  hauteur,  de  o™o65  dans  sa  plus  grande  lar- 
geur, côtelé,  et  enduit  d'une  couverte  qui  présente  encore 
en  certains  endroits  les  traces  d'une  jolie  teinte  rose  violet. 
Il  est  entier  et  offre,  il  nous  semble,  quelque  intérêt 
à  cause  de  la  couleur  très  particulière  de  sa  couverte. 

Une  sépulture  nous  a  semblé  être  celle  d'un  enfant, 
si  Ton  en  juge  par  les  urnes  qui  sont  de  très  petite  dimen- 
sion. 

Pour  une  des  sépultures,  il  nous  fut  facile  de  consta- 
ter que  nous  avions  été  devancés  dans  nos  recherches. 
Quelques  ossements  épars  et  de  gros  silex  groupés  témoi- 
gnaient encore  de  l'existence  de  la  sépulture,  importante, 
selon  toute  apparence.  Mais  les  urnes  avaient  été  enle- 
vées. 

Très  probablement  nous  étions  en  présence  d'une  des 
deux  ou  trois  sépultures  rencontrées  par  M.  l'abbé 
Cochet  dans  le  sondage  qu'il  fit  en  1S72.  En  fouillant 
avec  soin,  nous  avons  cependant  encore  trouvé,  oubliée 
entre  deux  silex,  une  petite  amulette  en  verre  de  couleun 
verdâtre.  Cette  amulette  ressemble  â  une  bague  en  forme* 
de  tore.  Son  diamètre  intérieur  est  de  0^014,  son  dia- 
mètre extérieur  de  o>"02i.  Son  épaisseur  est  très  irrégu- 
lière et  varie  de  o"oo3  à  o™oo5. 

Nous  avions  espéré,  en  relevant  avec  soin  la  position 
de  chaque  sépulture,  recueillir  quelques  indications  pou- 

(i)  Semblable  à  celle  que  M.  Michel  Hardy  a  trouvée  dans  le 
même  cimetière  en  1872.  -~  Voir  aussIM.  Tabbé  Cochet,  Seine- 
Inférieure  Historique  et  Archéologique,  page  441.  Le  petit 
flacon  de  verre  à  deux  anses,  en  cou  de  cygne,  que  représente 
la  gravure,  est  exactement  l'analogue  du  nôtre. 


224 

vant  nous  guider  dans  nos  recherches;  mais  il  notis  fut 
impossible  de  Êiire  à  cet  égard  quelque  remarque  utile. 
Aucune  méthode,  dans  la  disposition  des  sépultures, 
aucune  règle,  dans  les  distances  qui  les  séparaient.  Cer- 
taines étaient  à  un  mètre  seulement  l'une  de  Fautre. 
Beaucoup  étaient  séparées  par  un  intervalle  bien  plus 
grand,  quelquefois  cinq  mètres. 

Les  sépultures  n'étaient  point  placées  en  ligne,  mais 
plutôt  groupées.  Cest  ce  qui  ressort  de  la  compa- 
raison des  deux  fouilles  de  1879  et  de  1882.  En  1879,  sur 
un  espace  de  cent  mètres  carrés  environ,  nous  avions 
trouvé  vingt-six  sépultures.  Sur  un  espace  à  peu  près  égal 
nous  n'en  avons  découvert  que  sept  en  1882. 

Comme  on  le  voit,  la  campagne  de  cette  année  a  été 
moins  fructueuse  que  celle  de  1879.  Mais,  encouragé  par 
l'accueil  si  bienveillant  fait  à  notre  première  notice  sur  le 
cimetière  des  Vertus  par  la  Commission  des  Antiquités  de 
la  Seine-Inférieure,  nous  n'avons  pas  cru  devoir  lui  laisser 
ignorer  le  résultat  de  notre  seconde  fouille. 

—  Par  mesure  d'ordre  et  dans  le  but  de  garantir  la 
fidélité  des  procès-verbaux  et  d^en  faciliter  la  rédaction, 
M.  le  Président  prie  les  membres  de  la  Commission^ 
qui  prennent  la  parole  au  cours  de  nos  séances,  de  vou- 
loir bien  lui  adresser,  dans  un  délai  le  plus  rapproché 
possible,  des  notes  spéciales  qui  puissent  permettre  au 
secrétaire-adjoint  de  remplir  sa  tâche^  rendue  plus 
lourde  par  la  distance,  avec  autant  d''exactitude  que  de 
bonne  volonté. 

Le  Secrétaire-adjoint, 

Brtanchon% 


225 


SÉANCE  DU   12  MAI  i883. 


La  séance  est  ouverte  à  deux  heures  sous  la  prési- 
dence de  M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Sont  présents  :  MM.  Adeline,  Paul  Baudry,  de 
Blosseville,  Bouquet,  de  Glanville,  Gouellain,  Gaston 
Le  Breton,  Pelay,  de  la  Serre  et  Tabbé  Tougard. 

En  Tabsence  des  secrétaires,  le  procès- verbal  est 
confié  à  M.  Gouellain. 

Se  sont  excusés:  MM.  Brianchon,  d'Estaintot,  Félix, 
Lefort,  Tabbé  Loth  et  Maillet  du  Boullay. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et 
adopté. 

M.  Gaston  Le  Breton  fait  observer  que  son  opinion 
et  celle  de  M.  Gouellain  sur  Page  de  Pépée  présentée 
par  M.  de  Vesly,  est  confirmée  par  VioUet-le-Duc, 
dont  le  Dictionnaire  du  Mobilier  français  offre 
(p.  365)  une  arme  de  tout  point  semblable,  que  ce 
savant  attribue  au  ix«  siècle. 

La  correspondance  imprimée  comprend  : 

Mémoires  de  la  Commission  des  Antiquités  de  la 
Côte-d'Or,  t.  X,  l'c  livr.;  ^Mémoires  de  la  Société 
des  Antiquaires  de  France,  t.  XLII;  —  Société  des 
Antiquaires  de  Picardie,  t.  XIV;  — Société polyma- 
thique du  Morbihan,  années  i88i  et  1882;  —  Société 
archéologique  de  Nantes^  t.  .XXI  ;  -^  Académie  de 
Besançon,  année  1881. 

M*  le  Préfet  soumet  à  la  Commission  un  dossier  con- 
cernant Téglise  de  la  Cerlangue.  Il  s'agit  de  décider 
si  l'allocation  demandée  au  Département,  pour  la  re- 
construction du  chœur^  doit  être  prise  sur  les  fonds 
des  monuments  historiques. 


226 

La  Commîssîon,  sur  Tavis  conforme  de  M.  le  Pré- 
sident,  répond  que  le  secours  doit  être  emprunté  au 
budget  des  édifices  paroissiaux^  attendu  que  le  clo- 
cher seul  de  la  Cerlangue  est  classé. 

Distribution  est  faite  du  Bulletin  de  la  Commission 
pour  l'année  1881,  qui  complète  le  tome  V.  Des 
remerciements  sont  votés  à  MM.  d'Estaintot  et  G.  Le 
Breton  pour  la  table  du  volume  et  les  deux  planches 
qui  ornent  la  présente  livraison. 

M.  le  Président  se  félicite  de  voir  revenu  parmi 
nous,  M.  de  la  Serre,  dont  l'empressement  à  fréquen- 
ter nos  séances  ne  peut  qu'honorer  la  Commission. 

M.  Gouellain  informe  ses  collègues  du  violent 
incendie  dont  a  été  victime  notre  confrère,  M.  Michel 
Hardy,  qui  a  vu  sa  collection  préhistorique  gravement 
endommagée.  Néanmoins  une  lettre  récente  de  cet 
excellent  archéologue  a  informé  M.  l'abbé  Tougard 
que  les  ravages  du  feu  sont  moins  irréparables  qu'on 
n'eût  pu  le  craindre.  M.  Michel  Hardy  espère  recom- 
pléter ses  intéressantes  séries;  et  alors  son  vœu  le  plus 
cher  sera  de  les  faire  entrer  dans  notre  Musée  dépar- 
temental, où  elles  seront  plus  à  Pabri  des  accidents. 

M.  G.  Le  Breton  fait  passer  sous  les  yeux  de  la 
Commission  un  dessin  de  la  cheminée  en  plâtre  d'une 
maison  aujourd'hui  démolie  de  la  rueMalpalu,  n<>  62. 
Cette  cheminée  doit  entrer  au  Musée  céramique.  Dans 
son  ornementation,  M.  G.  Le  Breton  signale  l'in- 
fluence de  Lepautre. 

Le  même  membre  annonce  qu'il  a  réclamé  pour  la 
même  collection  des  boiseries  qui  se  trouvaient  dans 
la  Basse-Vieille-Tour. 

Caudebec-lès-Elbeuf.  —  Découvertes  archéolo- 
giques. —  M.  Gouellain  résume  trois  articles  publiés 


2%y 

au  commencement  du  mois  dernier,  dans  le  Journal 
cPElbeuf,  M.  Drouet  y  raconte  qu'il  a  découvert  plus 
de  3oo  sépultures  à  Caudebec^lès-Elbeuf  sur  un  espace 
d^environ  200  mètres  carrés.  Ces  tombeaux  ont  donné 
environ  5oo  vases,  quelques  objets  de  verre,  deux  épées 
et  des  anneaux  en  fer,  enfin  des  fibules,  des  miroirs  et 
quelques  monnaies  romaines  ou  gauloises  en  bronze. 

Malgré  l'abondance  de  ces  antiques  débris,  notre 
confrère  combat  les  conclusions  de  M.  Drouet,  qui 
affirmait  que  cette  fouille  précise  remplacement  de  la 
ville  d'Uggate.  M.  Gouellain  remarque,  en  effet,  que 
Tabsence  de  murailles  et  de  fondements  dMdifices  ne 
permet  pas  de  tirer  cette  conséquence  de  cette  petite 
campagne  archéologique,  qui  n''en  reste  pas  moins 
fort  intéressante,  et  dont  la  Commission  est  heureuse 
de  féliciter  M.  Drouet,  en  l'engageant  à  poursuivre  ses 
explorations. 

A  Toccasion  de  cette  communication,  M.  Pelay 
expose  qu^un  homonyme  de  notre  ancien  collègue  de 
Caudebec,  M.  Gosselin,  possède  l'emplacement  de 
l'ancien  cimetière  et  qu'il  y  fait  de  fréquentes  décou- 
vertes. Il  a  pu  ainsi  grouper  un  remarquable  ensemble 
de  vases  gallo-romains. 

Le  même  membre  signale  dans  la  rue  Malpalu  la 
porte  et  l'escalier  de  la  maiscjn  dont  M.  G.  Le  Breton 
a  pu  sauver  la  cheminée  d'un  seul  morceau.  II  est  à 
regretter  que  la  ville,  qui  s'est  réservé  tout  ce  qui  peut 
être  intéressant  dans  les  démolitions,  n'ait  pas  songé  à 
leur  conservation.  Une  autre  cheminée  de  la  même 
maison,  d'ailleurs  assez  peu  intéressante,  a  été  achetée 
par  M.  David  Dautresme.  Des  fragments  remarquables 
d'une  troisième  cheminée  ont  été  réunis  par  M.  G.  Le 
Breton,  qui  espère  en  reconstituer  l'aspect» 


228- 

'  Ailiers.  —  Ruines  gallo-romaines,  —  Le  même 
membre  a  extrait  du  journal  la  Risle  (  n»  du  22  avril 
dernier)  la  note  suivante  : 

M.  Brichard,  négociant,  à  Caudebec-en-Caux,  amateur 
photographe,  s'est  rendu  au  Flacq,  commune  d'Aiziers,  et 
a  photographié  les  ruines  gallo-romaines  mises  à  découvert 
par  le  mascaret  dans  un  champ,  près  la  Seine,  appartenant 
à  M.  Jean-Félix  Topsent. 

f  II  en  a  pris  six  vues  destinées  au  musée  de  Caudebec. 

a  Ces  ruines  aujourd'hui  arrachées  de  leur  emplacement 
ont  été  déchirées  par  les  marées  des  9  mars  et  7  avril  i883  ». 

Cimetière  Saint-Maur  à  Rouen.  —  M.  de  Beau  re- 
paire donne  lecture  de  la  notice  suivante  sur  le  cime- 
tière Saînt-Maur. 

NOTICE   SUR   LE  CIMETIERE  SAINT-MAUR  A   ROUEN 

De  tous  les  cimetières  de  Rouen,  celui  de  Saint-Maur 
est  le  seul  qui  soit  ancien.  Sa  situation  dans  un  faubourg 
solitaire  l'avait  sauvé  de  la  proscription  qui  atteignit,  en 
1772,  tous  les  cimetières  de  cette  ville  :  il  y  en  avait  eu 
jusqu'alors  autant  que  Ton  comptait  d'églises  paroissiales 
et  de  communautés  religieuses,  â  son  tour,  il  vient  d'être 
interdit,  ainsi  que  tous  ceux  que  Ton  avait  établis  à  cette 
époque  et  pour  lesquels  on  s'était  cru  permis  d*espérer 
une  durée  indéfînie.  A  vrai  dire^  étant  donnés  nos  prin- 
cipes en  fait  d'administration,  et  nos  exigences  en  fait  de 
salubrité  publique,  cette  mesure  était  inévitable  ;  c'était 
une  conséquence  forcée  du  débordement  de  plus  en  plus 
marqué  de  la  population  urbaine  en  dehors  de  l'enceinte 
des  boulevards  qui  avait  remplacé,  vers  la  fin  du  dernier 
siècle,  les  fossés  et  les  fortifications  du  moyen-âge. 

Ce  cimetière  appartenait  autrefois,  comme  il  appartient 
encore  aujourd'hui,  à  l'Hôtel-Dieu  de  la  Madeleine. 

Suivant  Farin,  il  en  serait  fait  mention,  sous  le  nom  de 


229 

chapelle  de  Saint-Nicolas  de  Beauvoir,  dans  une  bulle 
d'Urbain  III,  de  Tannée  1 185  (i). 

J'avoue  ne  pas  connaître  le  texte  de  ce  document,  mais 
i'ai  sous  les  yeux  une  autre  bulle,  du  mois  de  mai  1 1 98, 
par  laquelle  Célestin  III  confirme  à  ses  chers  fils,  les  ma- 
lades de  rhôpital  de  Sainte-Marie-Madeleine,  entre  autres 
biens,  locum  sancti  Nicolai  de  Belyeier,  avec  les  maisons 
et  les   terres  qui  en  dépendaient. 

Bien  que,  dans  cette  bulle,  il  ne  soit  pas  question  de 
chapelle,  le  nom  de  saint  par  lequel  le  lieu  est  désigné  ne 
permet  guère  de  douter  qu'il  n'y  en  eût  une  dès  ce  temps- 
là. 

Quelques  années  après,  la  vraisemblance  fait  place  à  la 
certitude.  Une  charte  de  1222,  conservée  dans  le  fon^s  du 
prieuré  du  Mont-aux-M  alades,  mentionne,  en  termes 
précis,  ecclesiam  Sancti  Nicolai  de  Bellovisu  (2). 

Il  paraîtrait,  toujours  d'après  Farin,  que  cette  chapelle 
aurait  été  dédiée  par  Tarchevcque  Thibaud,  et  qu'à  cette 
occasion  des  indulgences  auraient  été  accordées  aux  fidèles 
qui  la  visiteraient  le  jour  anniversaire  et  durant  Toctave  de 
cette  fcte.  La  cérémonie  ayant  eu  lieu  le  1 3  janvier,  veille 
de  saint  Maur,  on  peut  admettre  qu'insensiblement  l'ha- 
bitude se  sera  formée  de  donner  le  nom  de  Saint-Maur, 
d*abord  à  cette  chapelle,  ensuite  au  terrain  qui  y  était  at- 
tenant, enfin  à  la  rue  par  laquelle  on  s'y  rendait,  et  cela 
d'autant  plus  naturellement  que  ce  nom,  abstraction  faite 
de  l'orthographe,  dont  le  peuple  n^eut  jamais  souci,  conve- 
nait assez  bien  à  un  cimetière  (3). 

(1)  Histoire  de  Rouen  ^  3*  partie,  p.  66, 

(2)  La  rue  qui  longeait  cette  église  est  désignée  sous  le  nom 
de  vicus  Sancti^Nicholai  de  Bellovisu  et  de  Sancti-Nicholai  de 
Bellovidere,  dans  une  autre  charte  d'avril  ia23  (v.  s.),  même 
fonds.  Le  lieu  dominait  la  ville  et  la  vallée  :  de  là  le  nom  de 
Beauvoir,  équivalent  de  Bellevue. 

(3)  Histoire  de  Rouen,  3*  partie,  p.  66.  Ce  ne  furent  pas  des 
motifs  plus  sérieux  qui  déterminèrent  le  choix  des  patrons  pour 


23o 

Qu'il  y  en  eût  un  a  Beauvoir  dès  la  fin  du  xii^  siècle, 
rien  de  plus  probable.  Au  xiii^  siècle,  son  existence  ne 
saurait  plus  faire  Tobjet  d'un  doute.  Nous  voyons,  en  effet, 
que  ce  fut  là  que  Vincent  du  Valricher,  un  riche  bourgeois 
de  Rouen,  peut-être  même  un  maire  de  cette  ville,  fut 
enterré  avec  sa  femme  Perronnelle. 

Leur  sépulture  donna  lieu  à  l'érection  d'une  seconde 
chapelle  tout  près  de  celle  de  Saint-Nicolas.  Jean  de  Saint- 
Léonard,  neveu  de  Vincent  du  Valricher,  la  fit  construire 
à  ses  frais  ;  il  obtint  de  l'Hôtel-Dieu  que  deux  religieux  y 
célébreraient  à  perpétuité  deux  messes  par  jour. 

Le  cimetière  de  Beauvoir  était  compris  dans  la  paroisse 
Saint-Gervais.  On  le  considéra,  pendant  quelque  temps, 
comme  une  partie  de  l'exemption  des  moines  de  Fécamp, 
à  qui  appartenaient  le  prieuré  et  l'église  Saint-Gervais. 
Aussi  voyons-nous  que,  pour  l'approbation  de  cette  cha- 
pelle, on  crut  devoir  s'adresser  à  l'abbé  de  Fécamp,  lequel 
donna  son  consentement,  en  y  mettant  pour  condition 
que  les  religieux,  chargés  des  offices,  lui  prêteraient 
l'obéissance  canonique  ;  et  que,  sur  les  revenus  affectes  à 
la  fondation,  il  serait  offert,  chaque  année,  une  livre  d'en- 
cens à  l'église  paroissiale  (dimanche,  veille  de  la  Toussaint 
1288)  (i). 

Postérieurement  des  débats  s'élevèrent  entre  l'arche- 
vêque et  les  moines  au  sujet  du  cimetière  de  Beauvoir.  Il 
est  constant  qu'il  finit  par  être  soumis  directement  à  l'au- 
torité de  l'ordinaire,  de  même  que  l'Hôtel-Dieu,  dont  il 
n'était  qu'une  dépendance.  Aussi  était-ce  l'archevêque  qui 

certaines  corporations  de  métier.  Remarquons  que  le  cimetière 
de  Caudebec-en-Caux  était  aussi  sous  le  vocable  de  saint 
Maur. 

(i)  Une  autre  redevance  était  due  aux  religieux  de  Fécamp  par 
l'Hôtel-Dieu,  pour  la  chapelle  primitiye  du  même  cimetière  : 
«  Des  religieux  de  THostel-Dieu,  pour  la  chapelle  de  Saint-Ni- 
colas, où  Ton  presche  le  lundi  de  Pasques,  lx  chandelles  de  cire.  » 
Compte  de  la  baronnie  de  Saint-Gervais,  1495- 1496. 


23l 

nommait  à  cette  seconde  chapelle  sur  la  présentation  du 
seigneur  de  Frontebosc,  fief  situé  à  Limésy  (i). 

Comme  elle  était  dédiée  à  saint  Etienne,  elle  porta  son 
nom  (2).  Elle  fut  dite  aussi  la  chapelle  des  Valricher,  et 
plus  tard,  la  chapelle  de  Frontebosc,  du  nom  seigneurial 
des  héritiers  ou  représentants  du  fondateur. 

S'il  fallait  en  croire  une  tradition  rapportée  par  Farin, 
elle  aurait  servi  autrefois  de  paroisse  aux  habitants  du 
hameau  du  Nid-de-Chien,  en  la  vallée  de  Robec,  et 
c'aurait  été  là  qu'ils  auraient  fait  baptiser  leurs  enÊints 
jusqu'au  jour  où,  cette  chapelle  ayant  été  détruite  par  les 
guerres,  les  fonts  baptismaux  furent  transférés  en  l'église 
du  prieuré  de  la  Madeleine.  Mais  il  est  clair,  pour  nous, 
qu'on  aura  pris  pour  une  pratique  normale  un  fait 
accidentel  ;  et  que  la  chapelle  de  Saint-Etienne,  de  fonda- 
tion récente,  comme  nous  venons  de  le  voir,  ne  dut  être 
adoptée,  pour  église  de  paroisse,  par  les  habitants  du  Nid- 
de-Chien  que  lorsque,  par  suite  ou  de  siège  ou  de  peste, 
les  communications  se  trouvèrent  interceptées  entre  la 
ville  et  les  faubourgs. 

La  dévotion  des  fidèles  envers  les  deux  chapelles,  dont 

(i)  Il  est  fait  allusion  à  ces  débats  dans  un  compte  de  l'arche- 
vêché de  1402-1403  :  «c  Cas  de  nouvelleté  prins  par  Tabbé  de 
Fécamp  contre  Mgr  pour  la  reconstruction  du  cimetière  Saint- 
Mor  1».  Arch.  de  la  S.-Inf.  G.  18.  —  En  Tannée  i658,  Albert 
Le  Marchant,  vicaire  général  de  l'abbé  de  Fécamp,  prétendit 
visiter  la  chapelle  Saint-Maur  :  il  se  présenta,  suivant  le  céré- 
monial d'usage,  à  la  porte  de  cette  chapelle  ;  mais  il  trouva  porte 
close  et  personne  pour  lut  ouvrir;  le  chapelain,  bien  que  régu- 
lièrement prévenu,  jugea  prudent  de  se  tenir  à  l'écart,  par  res* 
pect  pour  les  droits  de  l'ordinaire.  Ibidem,  G.  5204. 

(2)  Chapelle  Saint-Etienne  au  cimetière  Saint-Maur,  vacante 
par  le  décès  de  Richard  Ango,  conférée  à  Jean  Kaulin,  clerc,  à 
la  suite  d'un  procès,  pour  le  patronage,  entre  Agnès  Raulin, 
veuve  de  Jacques  Gouel,  et  le  prieur  de  la  Madeleine,  16  mai 
iSog.  Registre  du  Secrétariat  de  l'Archevêché. 


wk^« 


232 

nous  venons  de  parler,  fut  favorisée  par  diverses  bulles 
d'indulgences,  notamment  par  une  bulle  de  Nicolas  IV, 
1288,  où  saint  Maur  est  signalé,  après  saint  Nicolas  et 
avant  saint  Etienne,  comme  particulièrement  honoré  au 
cimetière  de  Beauvoir.  Le  nom  de  saint  Maur  est  exclu- 
sivement attribué  à  la  principale  chapelle  de  ce  même 
cimetière,  dans  des  lettres  du  cardinal  d'Estouteville,  qui 
nous  apprennent  qu'elle  avait  été  démolie  sous  la  domina- 
tion anglaise  et  qu'on  s'occupait  alors  de  la  réédifier. 

Pendant  longtemps,  les  religieux  de  la  Madeleine 
eurent  à  Beauvoir  une  sorte  de  succursale  de  leur  hôpital  ; 
ils  y  entretenaient  un  chapelain,  parfois  qualifie  prieur, 
avec  quelques  frères  pour  acquitter  les  fondations  et  pré- 
sider aux  enterrements. 

Dom  Nicolas  Le  Gras,  prieur  de  T Hôtel-Dieu,  fit 
ordonner  par  le  chapitre  de  la  communauté  que  Ton 
célébrerait,  à  Saint-Maur,  Tofïice  des  défunts  chaque 
dimanche  de  carême,  et  qu'il  y  serait  dit,  tous  les  lundis 
de  Tannée,  une  messe  de  requiem. 

Les  religieux  perdirent  la  propriété  de  ce  cimetière 
lorsque,  vers  i55i,  une  administration,  mi-partie  laïque, 
mi-partie  ecclésiastique,  prit  possession  de  leur  maison. 
Ils  n'eurent  plus  qu'à  remplir  les  fonctions  du  culte, 
pour  lesquelles  on  leur  laissa  une  portion  de  leurs  anciens 
revenus. 

Les  nouveaux  administrateurs  conservèrent,  du  moins, 
à  Saint-Maur  un  chapelain  qui  recevait  les  offrandes  des 
fidèles  et  devait  en  remettre  une  part  aux  pauvres  de 
THôtel-Dieu.  Quelques  années  après,  en  i566,  ils  furent 
condamnés,  par  arrêt  du  parlement,  à  faire  bâtir  une 
maison  près  d*uQ  terrain  qui  avait  continué  d'appartenir 
aux  religieux,  et  qu'on  appelait  encore,  à  cause  de  cela,  le 
prieuré. 

En  1 63 5,  il  est  question  de  religieuses  de  l'Hôtel- Dieu, 
envoyées  à  Saint-Maur  pour  faire  leur  évent. 

Au  xviiic  siècle  encore,  les  religieux  possédaient,  comme 


233 

lieu  de  récréation,  un  jardin  avec  maison,  attenant  à  Saint- 
Maur  (i).  Le  19  juillet  lySô,  ils  obtinrent  en  échange  de 
ce  terrain,  un  emplacement  près  du  lieu  de  santé  où  Ton 
venait  de  transférer  THôtel-Dieu. 

Deux  chapelles  dans  un  cimetière ,  c'était,  ce  semble, 
autant,  sinon  plus,  qu41  n'en  fallait  pour  satisfaire  à  la  piété 
des  Rouennais.  Une  troisième  y  avait  été,  cependant, 
fondée,  en  1472,  par  f  ung  bon  catholique,  bourgeoys  et 
demeurant  en  la  ville  de  Rouen,  natif  du  Trect  (Utrecht), 
en  AUemaigne,  nommé  Guérart  Louf,  ymaginier  et 
peintre.  »  Cet  artiste,  qui  paraît  avoir  joui  d'une  certaine 
célébrité  parmi  ses  contemporains,  prit  à  sa  charge  les 
frais  de  construction  et  d'ornementation  de  cette  chapelle, 
après  s'être  entendu  avec  les  religieux,  qui  consentirent  à 
lui  donner,  dans  le  cimetière  Saint-Maur,  tout  le  terrain 
qu'il  lui  fallait,  sous  réserve,  toutefois,  qu^ils  en  demeure- 
raient seigneurs  en  fonds  et  en  propriété.  Guérart  Louf  ne 
se  borna  pas  à  cette  œuvre  de  piété.  Il  fonda,  dans  la 
même  chapelle,  c  une  noble  confrarîe  sous  le  nom  de  la 
glorieuse  Résurrection  Notre  Sauveur  et  Rédempteur 
Jhesu-Crist,  saint  Ladre,  sainte  Marthe  et  des  Tré- 
passés >,  et  obtint  pour  cela  l'autorisation  du  couvent  de 
r Hôtel- Dieu.  Les  premiers  associés  étaient  au  nombre 
de  40,  y  compris  le  fondateur.  C'étaient,  je  n'en  cite  que 
quelques-uns  :  Pierre  Le  Forestier,  prieur  de  la  Madeleine  ; 
Jacques  Duval,  avocat  ;  Jean  Le  Normant,  Pierre  Le  Clerc, 
Reynaud  Billon,  notaires  en  cour  d'église  ;  Richard  Le  Rat, 
chanoine  du  Sépulcre;  sire  Robert  le  Cornu,  Robert  de 
Villeneuve,  Colin  Marguerie,  Simon  de  Conflans,  écuyer, 
et  Jacob  Louf,  frère  de  Guérart.  La  confrérie  avait  deux 
sessions  annuelles ,  ou,  comme  on  disait,  deux  sièges  :  le 
siège  d'hiver,  le  jour  de  la  Commémoration  des  morts,  le 
samedi,  le  dimanche  et  le  jeudi  suivants;  le  ^id^ed'été^  le 

(i)  On  voit,  par  un  ancien  document,  que  le  jardin  des  religieux 
occupait  une  longueur  de  117  toises  le  long  de  la  rue  Saint- 
Maur.  Il  est  figuré  dans  le  plan  de  Gomboust. 

16 


234 

lundi  après  Pâques,  le  samedi,  le  dimanche  de  Quasimodo 
et  le  lundi  suivant.  Ce  jour-là,  les  frères  renouvelaient 
leur  bureau,  procédaient  aux  admissions  de  nouveaux 
membres,  et  tenaient  buffet  en  la  chapelle  pour  y  recevoir 
les  aumônes  des  fidèles. 

Chaque  lundi  de  Tannée,  une  messe  était  dite  par  un 
religieux.  Le  premier  lundi  de  chaque  mois ,  cette  messe 
était  chantée  à  note  avec  diacre  et  sous-diacre. 

Le  mardi  qui  suivait  la  Commémoration  des  morts,  les 
frères  servants  s'assemblaient,  sur  la  semonce  de  leur  clerc, 
en  la  maison  de  l'échevin,  vers  deux  heures  de  relevée,  et, 
après  que  celui-ci  leur  avait  offert  du  pain,  du  vin  et  des 
épices,  ils  se  rendaient  à  leur  chapelle,  avec  croix,  ban- 
nière et  clochette.  Là,  ils  entendaient  les  vêpres  des  Tré- 
passés, chantées  par  6  ou  7  religieux  de  T Hôtel-Dieu.  Le 
lendemain,  après  une  procession  autour  du  cimetière ,  au 
chant  du  libéra^  ils  assistaient  à  une  grand' messe  que 
disaient  les  mêmes  religieux.  Plus  tard,  pour  se  conformer 
à  la  volonté  du  testateur,  ils  devaient,  cette  messe  dite, 
aller  jeter  de  Peau  bénite  sur  sa  tombe  et  réciter  à  son 
intention  une  patenôtre  et  un  Ave  Maria, 

A  la  suite  de  cette  cérémonie,  les  frères  convoyaient 
réchevin  jusque  chez  lui,  et  tous  prenaient  ensemble  c  ré- 
fection corporelle,  en  signe  de  bonne  amour  et  de  frater- 
nelle union,  m  L'échevin,  ainsi  que  le  prévôt,  payaient 
chacun  3o  s.  pour  leur  écot;  les  autres  frères  payaient  ce 
à  quoi  ils  étaient  taxés  par  délibération  des  maîtres. 

Une  seule  disposition  des  statuts  me  paraît  mériter  d'être 
rapportée. 

«  A  toutes  les  assemblées  d'icelle  confrarie  se  gouverne- 
ront les  frères  servans  bien  et  honnestement  sans  noises 
ne  tenchons,  ne  nul  blasphème  de  Dieu,  et  s'il  estoit  ainsi 
que  par  aucun  des  servans  en  avoit,  les  maistres  les  pour- 
roient  tirer  du  service,  s'ilz  ne  s'apaisoient.  » 

Je  suis  très  porté  à  croire  que  cette  association  fut 
établie  à  l'instar  de  celle  qui  avait  été  fondée,  peu  de 


i35 

temps  auparavant,  à  Paris,  en  l'église  de  la  Madeleine  de 
la  Ville-l'Évèque,  près  la  porte  Saint-Honoré* 

Cette  dernière  était  d'autant  plus  honorablement  connue 
qu'on  la  disait  fondée  par  le  roi  Charles  VIII  et  par  la 
reine,  sa  femme,  lesquels  avaient  voulu  en  être  appelés, 
Tun  le  premier  frère,  l'autre  la  première  sœur. 

Le  prieur,  les  frères  et  les  sœurs  de  la  Madeleine  (et 
dans  le  nombre,  il  faut  certainement  comprendre  Louf  et 
ses  compagnons)  demandèrent  à  être  affiliés  à  la  confrérie 
de  la  Ville-rÉvêque,  faveur  qui  leur  fut  accordée,  le  20 
octobre  1492,  par  Gilles  Picart,  avocat  au  parlement,  par 
Jean  De  la  Place,  procureur  général  au  Châtelet,  et  par 
Ambourse  Prieur,  agissant  tous  en  qualité  de  gouverneurs 
et  de  maîtres  de  la  confrérie. 

On  ne  sera  pas  surpris  d'apprendre  que  la  bonne  union 
ne  dura  pas  toujours  entre  les  religieux  et  les  confrères  :  Top- 
position  d'intérêts  ne  pouvait  manquer  d'être  une  source 
de  division.  Les  premiers  soutenaient  que  les  maîtres 
n'avaient  le  droit  de  tenir  buffet  dans  la  chapelle  qu'aux 
jours  de  sièges,  ci-dessus  indiqués  ;  ils  trouvaient  aussi  à 
redire  â  l'usage  qui  s'était  introduit  de  foire  des  cueillettes 
(quêtes)  dans  le  cimetière.  Ils  prétendaient  encore  qu'il 
n'appartenait  à  aucun  prêtre  d'y  administrer  les  sacrements 
sans  leur  permission.  De  leur  côté,  les  maîtres  reprochaient 
aux  religieux  de  se  montrer  peu  exacts  dans  la  célébration 
des  messes,  et  de  laisser  les  prédications  à  leur  charge.  Ces 
sortes  de  débats  se  renouvelèrent  plus  d'une  fois.  Il  suffit 
de  les  indiquer  en  passant  :  les  détails  n'auraient  plus  d'in- 
térêt pour  personne. 

Les  statuts  de  la  confrérie  furent  approuvés  par  Mgr 
d'Estouteville,  le  ï6  octobre  1475,  sous  le  titre  de  •  Statuts 
de  l'Association  de  la  bienheureuse  Marie-Madeleine,  mi- 
roir des  pécheurs,  de  sainte  Marthe,  sa  sœur,  et  de  saint 
Lazare,  son  frère,  t  Ils  le  furent  de  nouveau,  et  avec  cer- 
taines modifications,  par  Mgr  Charles  de  Bourbon,  le  8  jan- 
vier 1571.  On  voit,   par  les  lettres  de  ce  dernier,  qu'il 


236 

y  avait  alorà  80  frères  et  40  sœurs.  Un  des  articles  est  ainsi 
conçu  :  c  Ordonné  que  chacun  frère  et  seur  de  ladite 
association  sera  tenu  et  subgect  de  venir,  le  jour  de  la 
procession,  à  la  Magdaleine,  avec  un  chapelain  et  avec  une 
chappe,  sur  peine  d'amende,  le  lundi  après  le  sermon  de 
madame  sainte  Marthe  ». 

Les  souverains  pontifes  joignirent  leurs  approbations  à 
celles  des  archevêques .  Des  indulgences  furent  accordées 
aux  associés  par  Sixte  V,  en  1589;  par  Innocent  X,  en  1649. 

Un  grand  nombre  de  peintres  et  de  sculpteurs  faisaient 
partie  de  cette  confrérie.  Il  est  même  à  remarquer  que 
c'était  une  stricte  obligation,  pour  eux,  de  lui  payer  un 
droit  lors  de  leur  réception  comme  maîtres  dans  la  corpo- 
ration. 

La  chapelle  des  Trépassés,  de  même  que  celles  de  Saint- 
Nicolas  et  de  Saint- Etienne,  fut  ruinée,  soit  pendant  l'oc- 
cupation de  Rouen  par  les  protestants,  soit  à  l'occasion  du 
siège  mis  devant  cette  ville  par  Charles  IX. 

Ce  ne  fut  que  quelques  années  après,  en  1569  et  1570, 
qu'on  put  songer  à  la  relever  de  ses  ruines.  On  en  réédifia 
le  clocher  ;  on  rétablit  les  verrières  qu'on  avait  dû  démon- 
ter à  la  hâte,  dans  un  moment  de  panique.  On  en  fit 
re&ire  trois  nouvelles  par  le  verrier  Jacques  Tuchon  en 
1571  et  1572. 

Cette  dernière  année,  on  paya  112  1.  pour  deux /rwi55^/s 
historiés  mis  au  tableau  de  la  contretable  et  qui  se  fer- 
maient à  l'aide  d'un  cadenas,  et  45  1.  1 3  s.  pour  la  répara- 
tion du  mur  de  la  galerie.  En  1576,  le  menuisier  Robert 
Clerc  refit,  pour  5i  1.,  la  clôture  du  chœur.  En  1 583,  Jean 
Férey,  maçon,  et  le  frère  Louis  Guillebert,  menuisier, 
achevèrent  la  grande  porte  du  pignon. 

L'année  suivante,  des  malfaiteurs  s'introduisirent  dans 
le  clocher,  et  jetèrent  à  terre  le  coq  qui  le  surmontait. 
Vers  le  même  temps,  on  vit  les  catholiques^  réunis  à  Saint- 
Maur,  aux  prises  avec  les  protestants  qui  revenaient  du 
prêche  de  Pavilly. 


Malgré  les  inquiétudes  au  milieu  desquelles  on  vivait 
alors,  on  continua  les  travaux  dé  décoration  entrepris  a  la 
galerie.  Le  maçon  Robert  Chrétien  et  un  artiste,  du  nom 
de  Pierre  Potier,  en  furent  chargés  en  i586  :  ce  dernier 
répara  le  tableau  qui  ornait  la  muraille  et  fit  une  statue 
de  saint  Adrien,  l'un  des  patrons  les  plus  invoqués  contre 
la  peste. 

En  1 586,  une  verrière  fut  offerte  par  Nicolas  Baudry. 
On  y  fit  mettre,  en  souvenir  du  donateur,  une  inscription 
par  Jean  Bezoche,  auteur,  suivant  toute  vraisemblance,^ 
de  la  verrière. 

En  1589,  vers  le  9  avril,  on  fit  démonter  toutes  les 
verrières  qui  avaient  été  restaurées  par  Nicolas  Vereul ,  en 
i582,  et  on  les  fit  porter  chez  le  clerc  de  la  paroisse  de 
Sainte-Marie-la-Petite.  Bien  que  rien  n'annonçât  une  paix 
durable,  on  reprit  pourtant  confiance,  et,  le  5  novembre, 
toutes  les  verrières  étaient  remises  à  leur  place,  par  les 
soins  de  François  Le  Vieil. 

Mais  deux  années  à  peine  s'étaient  écoulées,  qu'en  prévi- 
sion du  siège  dont  la  ville  était  menacée,  on  s'empressait, 
de  nouveau,  de  démonter  les  verrières.  On  les  porta,  cette 
fois,  chez  un  nommé  Bondor  et  chez  Me  Adrien  Du  val,  à 
l'hôtel  du  Petit-Montier  (i).  On  mit  également  en  lieu 
sûr  la  cloche  et  la  menuiserie  de  la  chapelle.  Les  mêmes 
précautions  furent  prises  pour  sauver  ce  qu'il  y  avait  de 
plus  précieux  à  la  chapelle  Saint- Etienne,  notamment  les 
belles  statues  de  VEcce  homo  et  de  Notre-Dame,  et  les 
pierres  où  se  trouvaient  gravées  des  inscriptions. 

Dès  que  la  paix  fut  revenue,  les  confrères  s'occupèrent 
du  rétablissement  de  leur  confrérie.  Plus  actifs  ou  plus 
généreux  que  les  administrateurs  de  T Hôtel-Dieu  et  que 
les  seigneurs  de  Frontebosc,  ils  s'empressaient,  dès  1 595,  de 
faire  reconstruire  la  chapelle  des  Trépassés  et  la  galerie  qui 

(i)  On  connaît  encore  l'hôtel  du  Petit-Montier  en  la  rue  Cau- 
choise. 


238 

y  faisait  suite,  après  en  avoir  obtenu  ia  permission  de 
Tamiral  de  Villars  et  du  Bureau  de  T Hôtel-Dieu.  En  iSgô, 
des  imaginiers  relèvent  la  croix  du  cimetière  et  restaurent 
les  statues  de  VEccehomo,  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec 
celles  de  la  chapelle  Saint- Etienne  (i).  On  fait  revenir  la 
menuiserie  du  chœur,  qui  avait  été  mise  en  dépôt  chez  les 
cordeliers  de  Rouen.  En  1 597,  on  répare  les  verrières  aux 
dépens  d'un  des  maîtres;  on  rapporte  de  Saint-Godard 
deux  statues  qu'on  y  avait  placées  pour  les  soustraire  à  la 
proÊination  pendant  les  troubles. 

En  novembre  1604,  on  paie  6  1.  à  l'cvèque  de  Damas 
pour  avoir  béni  deux  autels  de  la  chapelle  et  celui  de  la 
galerie;  et  12  1.  à  Jean  Dusaussoy,  ancien  maître  de  la 
confrérie ,  pour  l'indemniser  des  frais  du  dîner  qu'il  avait 
offert  à  ce  prélat. 

D'autres  articlçs  de  dépenses  sont  à  noter,  soit  parce 
qu'ils  nous  fournissent  des  noms  d'artistes,  soit  pour  les 
renseignements  qu'ils  nous  procurent  sur  certaines  particu- 
larités archéologiques. 

On  raccoûtre,  en  1609,  la  chaire  du  prédicateur.  On 
paie,  pour  cela,  12  1.  au  menuisier  Nicolas  Roussel,  et  l'on 
achète  pour  14  sous  de  frange.  Cette  chaire,  suivant 
l'usage  général  du  pays,  était  ornée  de  tentures  qui  va- 
riaient suivant  les  circonstances.  En  1604,  maître  Jean 
Agnès,  avait  donné,  pour  la  décoration  de  la  chaire,  une 
courtine  de  toile  noire,  bordée  de  figures  de  tètes  de 
mort  et  de  larmes. 

Il  est  encore  question,  en  1 609,  d'un  image  qui  avait  été 
donné  par  le  frère  Robert  Le  Tellier,  et  que  Ton  fit  peindre  ; 
de  6  anges  donnes  par  un  autre  frère,  qui  furent  placés 
aux  deux  côtés  du  crucifix  ;  d'un  goupillon  (vipillon)  qui 

(i)  Croix  du  cimetière  réparée  par  Robert  Chrétien,  maçon; 
piédestal  et  croix  en  bois,  œuvre  Ju  frère  Louis  Guillebert,  22  I., 
vers  iSyo.  Croix  de  pierre  du  cimetière  raccoûtrée  parie  sculp- 
teur Pierre  Le  Sénéchal,  en  1609. 


239 

fut  attaché  à  un  image  de  sainte  Marthe,  servant  de  reli- 
quaire. 

On  paya,  en  1611,  i5  1.  à  David  Delamare  pour  avoir 
fait  V image  des  Macabez  (Machabées)  (i). 

En  1644,  on  donna  5  1.  10  s.  à  un  peintre  pour  avoir 
rafraîchi  les  images  de  la  Résurrection,  déjà  restaurées, 
en  i6o3,  par  Pierre  Brémontier,  sculpteur,  et  qui  surmon- 
taient le  maltre-autel.  On  paya,  cette  même  année  1644, 
8  1.  1 5  s.  pour  la  sculpture  et  la  peinture  de  VEcce  homo. 

En  1628,  Jean  Pinchon  reçut  35  s.  pour  avoir  remis  en 
plomb  la  verrière  de  la  Cène,  qui  était  au-dessus  de  Tune 
des  portes  de  la  chapelle.  Le  même  verrier  fut  chargé,  de 
nouveau,  de  la  restauration  générale  des  verrières  en 
i635.  Guillaume  Le  Vieil  les  répara,  à  son  tour,  en  1668, 
1680  et  i685. 

En  1673,  on  fit  démonter  la  clôture  du  chœur.  On  y  fit 
mettre  des  portes  et  Ton  replaça  plus  haut  le  crucifix.  Ce 
travail  dut  entraîner  la  suppression  du  pupitre  ou  jubé 
que  l'on  voit  clairement  désigné  dans  un  compte  de  1609. 

Jouvenet  fit  un  bénitier  neuf  pour  4  1.  10  s.  en  1676. 

Un  menuisier,  renommé  pour  son  habileté,  Pierre  Le 
PouUetier  fit,  en  1677,  la  contretable  du  maître-autel, 
dans  le  goût  qui  était  alors  à  la  mode. 

La  galerie  qui  faisait  suite  à  la  chapelle  était,  comme 
nous  Favons  dit,  ornée  d'un  autel.  C'était,  j'imagine,  une 
construction  dans  le  genre  de  celle  qu'on  voit  encore  au 
cimetière  de  Brisegaret,  près  de  Montivilliers.  David  De- 
lamare, déjà  cité,  donna,  en  161 1,  28  aunes  de  toile  pour 
tendre  cette  galerie  les  jours  où  il  s'y  ferait  quelque  prédi- 

(i)  On  peut  se  demander  pourquoi  représenter  les  Machabées 
plutôt  que  tant  de  saints  de  la  religion  chrétienne  qui  avaient 
sacrifié  leur  vie  avec  un  héroïsme  comparable  au  leur.  Ne  serait- 
ce  pas  à  cause  de  la  profession  de  foi  en  la  résurrection  et  en 
l'efficacité  de  la  prière  pour  les  morts,  contenue  dans  leur  his- 
toire? On  sait  que  quelques  archéologues  voient  dans  le  mot 
macabre  une  altération  du  nom  machabée. 


240 

.cation;.  Jean  Pinchon  en  répara  les  vitraux  Tannée  suivante. 

En  1646,  on  se  cotisa  pour  rebâtir  la  galerie,  et  Ton 
s'adressa,  pour  cela,  au  maçon  Henri  Gosset,  et  au  me- 
nuisier Nicolas  Roussel.  Mais,  dès  1659,  on  ne  trouvait 
plus  suffisant  ce  qui  avait  été  fait  :  la  galerie  paraissait 
trop  petite  pour  contenir  le  peuple  qui  y  venait  entendre 
les  sermons  aux  dimanches  et  bonnes  fêtes  de  Tannée, 
et  qui  y  restait  exposé  aux  pluies  et  à  toutes  les  injures 
du  temps.  On  voulait  d'ailleurs,  par  motif  de  piété,  avoir 
le  moyen  de  mettre  à  Tabri  les  os  qui  gisaient  épars  dans 
le  cimetière,  où  ils  étaient  laissés  à  la  merci  des  chiens  et 
des  autres  animaux.  On  décida  donc  de  faire  agrandir  la 
galerie,  de  lui  donner  la  largeur  de  la  chapelle,  et  de 
faire  construire  au-dessus  un  étage  à  usage  de  charnier. 

Je  ne  saurais  dire  où  était  placée  la  chambre  des  assem- 
blées de  la  confrérie.  Ce  que  j'en  puis  dire,  c'est  que  la 
porte  en  était  ornée,  en  16 14,  d'un  rideau  où  était  repré- 
senté un  Ecce  homo,  œuvre  du  frère  Pasquet  Bucquet. 

En  1785,  la  chapelle  des  Trépassés  fut  reconstruite  en 
majeure  partie.  D'après  le  devis  qui  existe  aux  Archives, 
elle  contenait  63  pieds  de  long  sur  16  de  large  dans 
œuvre,  et  était  accompagnée  d'une  sacristie,  qui  lui  faisait 
suite,  de  i5  pieds  de  long  sur  autant  de  large,  au-dessus 
de  laquelle  on  mit  la  chambre  des  assemblées.  Pour  cette 
reconstruction,  on  dut  démolir  le  comble  ainsi  que  le  clo- 
cher de  Tancien  bâtiment.  On  ne  laissa  subsister  que  les 
murs  de  maçonnerie.  Les  travaux,  dont  fut  chargé  Tentre- 
preneur  A.-B.  Le  Jeune,  coûtèrent  aux  confrères  4,5oo  1. 

Pendant  longtemps  la  confrérie  n'employa  pour  l'ac- 
quit des  offices  d'autres  ecclésiastiques  que  les  religieux  de 
THôtel-Dieu.  Mais  la  confrérie  se  maintint  toujours,  grâce 
à  la  faveur  publique,  tandis  que  les  religieux  finirent  par 
être  à  peu  près  complètement  évincés  du  cimetière.  Il  en 
résulta  peu  à  peu  pour  elle  une  véritable  indépendance  ; 
elle  finit  par  avoir  son  chapelain  particulier,  et  par  faire 
régler  ses  offices  directement  par  l'autorité  diocésaine. 


241 

On  conserve  aux  archives  du  département  le  Tableau 
des  Offices  qui  se  faisaient  en  la  chapelle  des  Trépassés. 

La  grand'messe  s'y  disait  à  neuf  heures  chaque  di- 
manche, et  était  annoncée  par  trois  sons  de  cloches,  à 
huit  heures,  huit  heures  et  demie,  huit  heures  trois  quarts. 
On  y  faisait  l'eau  bénite  et  le  pain  bénit. 

On  y  disait  aussi  les  vêpres  à  deux  heures  et  demie,  en 
hiver,  et  à  trois  heures,  en  été. 

L'office  y  était  célébré,  avec  une  grande  solennité,  les 
jours  suivants  :  Rameaux,  Pâques,  lundi  de  Pâques,  Pen- 
tecôte, lundi  de  Pentecôte,  Toussaint,  Commémoration 
des  morts,  fêtes  des  saintes  reliques,  et  de  saint  Lazare. 
La  messe  de  minuit,  à  Nocl,  y  était  célébrée  de  même  que 
dans  les  églises  paroissiales. 

Quelques  cérémonies  conservaient  le  souvenir  des  pre- 
mières relations  de  la  confrérie  avec  THôtel-Dieu.  Ainsi, 
a  la  fête  de  sainte  Marthe,  le  clergé  devait  partir  de  la  cha- 
pelle en  corps,  avec  la  croix  et  les  chandeliers,  pour  se 
rendre  à  l'heure  ordinaire  dans  Téglise  de  la  Madeleine, 
et  de  là  aller  en  procession  faire  station  dans  quelque 
église. 

Le  premier  dimanche  de  carême,  le  dimanche  de  qua- 
simodo,  de  même  qu'à  la  fête  de  sainte  Marthe,  l'office  se 
faisait^  toute  la  journée,  par  les  religieux  de  T Hôtel- 
Dieu. 

Des  prédications  avaient  lieu  très  fréquemment  dftns 
cette  chapelle  aux  frais  des  confrères.  On  peut  citer, 
parmi  les  meilleurs  prédicateurs  de  la  ville  qui  con'sen- 
talent  à  s'en  charger  :  Marin  Le  Harcnger,  jacobin, 
i565,  i566,  iSyo,  1572;  Plumetot,  cordelier,  i565,  i566, 
1567,  1569,  ^^7^y  1571,  1572;  Jacques  Le  Hongre,  ja- 
cobin, i565,  i568,  1569,  '^7^  1^72,  i573;M.  Lempe- 
reur,  i568;  Goulle,  prédicateur  de  Tavent  à  la  cathédrale, 
20  décembre  1571  ;  Me  Boette,  iSjS;  Michel,  prieur  des 
Augustins  de  Rouen,  plus  t^rd  provincial,  1 573  ;  Olivier, 
augustin^  même  année;  le  çarme  Martel,   i58o.,  i585; 


24^ 

Carré,  i585;  Tholle,  i585,  i588;  Natalis,  i586,  i588; 
Me  Rioult,  i586;  Taillepied,  l'auteur  des  Antiquités  de  la 
ville  de  Rouen ^  1587;  Broessin,  iSSg;  frère  Louis  Crava- 
tai, 1590;  Le  Roy,  gardien  des  cordeliers,  iSçS;  Samson, 
docteur  en  théologie,  prieur  des  Augustins,  1600;  Mas- 
querel,  carme,  1602,  i6o3,  1610;  le  curé  d'Arqués,  i6o5; 
Martel,  jacobin,  1606,  1608;  Le  Noir,  augustin,  1606, 
1616;  Guéroult,  carme,  1609,  1614;  Soret,  carme,  i632; 
le  P.  Séraphin,  capucin  (dont  les  sermons  ont  été  publiés), 
de  1666  à  1675;  le  P.  Ambroise,  autre  capucin,  de  1675 
à  1686. 

En  1 567,  on  payait  aux  cordeliers,  pour  vingt-cinq  ser- 
mons faits  par  Plumetot,  la  somme  de  12  1.  11  s.  Vers 
cette  époque,  les  honoraires  d'un  sermon  solennel  ne  dé- 
passaient pas  la  somme  de  i5  sols. 

A  l'occasion  des  prédications,  des  quêtes  étaient  faites 
parmi  les  fidèles,  qui  ne  manquaient  pas  de  se  porter  en 
foule  au  cimetière  Saint-Maur. 

Il  est  à  remarquer  que  si  les  peintres  et  les  sculpteurs 
étaient  afRliés,  en  général,  à  la  confrérie  des  Trépassés,  il 
s'y  trouvait  aussi,  et  en  grand  nombre,  des  personnes 
appartenant  aux  différentes  classes  de  la  société,  et  même 
aux  classes  les  plus  élevées. 

Dans  les  derniers  temps  la  chapelle  des  Trépassés,  dite 
de  Saint-Maur,  fît  oublier  celles  de  Saint- Etienne  et  de 
Saint- Nicolas. 

La  seconde  avait  été  rétablie  après  le  siège  de  i593. 

V Histoire  de  Rouen^de  1731,  en  parle  comme  d'un 
établissement  encore  subsistant  à  cette  époque.  Mais, 
quelques  années  après,  il  n'en  était  plus  question.  L'autre, 
celle  de  Saint-Nicolas,  avait  été  restaurée,  en  1602,  aux 
frais  des  administrateurs  de  l'Hôtel-Dieu.  Un  arrêt  du 
Parlement,  du  27  février  1672,  rendu  sur  la  plainte  du 
couvent,  les  condamna  à  la  faire  mettre  en  état.  Mais 
comme  elle  n'était  que  d'une  faible  utilité,  on  n'y  prit  pas 
grand  intérêt,  et  bientôt  on  la  laissa  tomber  en  ruine. 


243 

Une  ordonnance  de  Tarchevêque,  du  i3  jum  1740,  en 
autorisa  la  démolition  ;  et  ce  furent  les  religieux  eux-mêmes 
qui  sollicitèrent  cette  mesure,  contre  laquelle  il  n'y  eut 
aucune  protestation. 

La  confrérie  des  Chandeliers  s'y  était  réunie  pendant 
longtemps,  avant  de  se  fixer  en  Téglise  de  la  Madeleine. 

Jusqu^ci  il  n'a  été  question  dans  ce  mémoire  que  de 
chapelles  et  de  confréries  :  j'ai  maintenant  à  m'occuper  du 
cimetière  Saint-Maur,  en  tant  que  cimetière  proprement 
dit,  en  m'attachant  à  faire  remarquer  ce  qu'il  présentait 
de  particulier.  Le  sujet  est  lugubre  ;  mais  il  peut  prêter  à 
des  observations  assez  importantes,  si  Ton  veut  comparer 
entre  eux  Tancien  temps  et  le  nôtre. 

Le  cimetière  Saint-Maur  n'était,  à  l'origine,  que  pour 
les  frères,  les  sœurs  et  les  pauvres  de  T  Hôtel-Dieu.  Mais 
les  pauvres  étant  considérés  comme  les  principaux  amis 
de  Jésus-Christ,  il  arriva  bientôt  que  la  piété  fît  choisir 
assez  fréquemment  ce  cimetière  par  des  personnes  riches, 
non-seulement  de  la  ville,  mais  de  diverses  localités  du 
diocèse  (i). 

Nous  avons  déjà  cité  Vincent  du  Valricher.  Avant  lui, 
Robert  Le  Tartarin  et  Emmeline,  sa  femme,  avaient  fait 
une  donation  à  l' Hôtel- Dieu^  en  demandant  à  être  enter- 
rés in  cimiterio  hospitalis,  L*acte  est  de  1275.  Jean  Du 
Désert,  curé  de  Bertheauville,  au  doyenné  de  Valmont, 
faix  également,  en  1291,  une  donation  aux  religieux  de 
THôtel-Dieu,  et  par  le  même  acte  il  choisit  sa  sépulture 
in  eorum  cimiterio  apud  S.  Nicolaum  de  Bellovidere.  Plus 
tard,  Jean  Filleul,  conseiller  en  cour  laie,  demande  par 
son  testament  qu'après  son  décès  c  on  convoie  son  corps 

(i)  Le  cardinal  d'Estouteville,  dans  des  lettres  que  nous  avons 
précédemment  citées,  le  désigne  en  ces  termes  :  Cimiterium 
commune.,,  in  quo  corpora  sive  cadavera  deffunctorum  sepe- 
liuntur,  et  tam  de  monasterio  sive  hospitali  Béate  Marie  Mag- 
daiene,  quam  civitate  et  diocesi  Rothomagensi  caritative  por- 
tantur  et  inhumantun  (20  sept.  1434.) 


244 

en  réglîse  Saînt-Mor  jouxte  Rouen,  en  la  compagnie  de 
ses  amis  ;  et  qu'on  en  fasse  l'enterrement  eu  chimetière, 
dehors  Tcglise,  bien  et  notablement,  t  5  sept.  1429. 

Pareilles  clauses  se  remarquent  •  parmi  les  dispositions 
testamentaires  de  messire  Geoffroi  Behourt  et  de  dame  Eu- 
delot,  sa  mère,  17  mars  1437;  de  Richard  Quesnel,  curé 
de  Saint-Ouen-du-Breuil,  chapelain  de  la  cathédrale,  1449  î 
de  Guillaume  Auber,  curé  de  Vacourt,  autre  chapelain  de 
la  même  église,  1485*,  de  Denis  Pilée,  curé  de  Limésy, 
1 6  mars  1 5o3  ;  de  Guillaume  Oursel ,  curé  de  Saint- Jac- 
ques d'Alihermont,  1 5o8. 

Pilée  annonce  qu'il  a  choisi  Saint-Maur  parce  que  c'est 
communis  sepultura  pauperum;  Oursel  déclare  c  qu'il  a 
singulière  dévotion  à  Saint-Mor,  en  l'oratoire  hors  Rouen.  » 

Le  même  motif  est  plus  amplement  indique  dans  le 
testament  du  chanoine  Guillaume  Le  Brument  :  c  Quo- 
niam  michi^  spiritualium  graciarum  munera  mendicanti 
et  temporalium  bonorum  copia  non  habundanti^  super- 
fluum  videtury  juxta  B,  Augustini  tradicionem,  funeris 
ornatus  et  preciosa  exequiarum  pompa,  corpus  meum 
ecclesiastice  in  loco  humili  tradi  cupio  sépulture^  videlicet 
in  cimiterio  prioratus  sive  oratorii  S.  Mauri  prope  Ro- 
thomagum,  intr a  quod  fidèles  plurimi,  magna  cum  devo- 
tione^  ad  humiles  sepius  preces  concurruntj  ut  saltem  ora- 
tionibus  salus  anime  mee  adjuvetur,  i5o8.  t  II  est  à 
remarquer  que  cet  article  fut  biffé,  vraisemblablement 
par  ordre  du  Chapitre  ;  et  que  l'enterrement  de  Le  Bru- 
ment se  fit,  suivant  l'usage  canonial,  dans  l'enceinte  même 
de  la  cathédrale. 

Thomas  Le  Prévost,  drapier  de  Saint- Nicaise,  ordonne, 
par  son  testament,  qu'après  son  décès  son  corps  c  sera  porté 
de  soir  à  l'Hostel-Dieu  pour  estre  mis  au  charriot  dud.  lieu 
avec  les  autres  pauvres  trespassés,  et  être  porté  avec  yceulx 
au  cimetière  Saint-Mor,  t  16  janvie»*  i558  (i). 

(i)  Tabellion,  de  Rouen,  meubles. 


245 

La  même  année,  le  i8  février,  Olivier  Loîsel,  mirouyer^ 
ouvrier  en  la  monnaie  de  Rouen,  demande  que  son  corps 
c  soit  mis  dans  le  charriot  de  l'Hostel-Dieu  de  la  Madeleine, 
pour  être  porté  au  cimetière  Saint-Maur,  avec  les  corps 
des  pauvres  dudit  Hostel-Dieu  (i).  » 

VJ Histoire  de  Rouen  cite  comme  enterrés  dans  ce  cime- 
tière, Simon  Osmont,  sieur  de  Fresquiennes,  iSij;  Pierre 
Guérin,  notaire  et  secrétaire  du  Roi,  décédé  en  1440  et 
Madeleine  Deschamps,  sa  femme;  dame  Thomasse  Hui- 
lard,  en  son  vivant,  femme  de  Guillaume  De  la  Roche, 
sieur  de  Vandrimare,  décédée  le  2  novembre  i5i4,  et 
aux  frais  de  laquelle  un  charnier  fut  construit  ;  Jean  Le 
Goupil,  sieur  des  Noyers,  décédé  en  1440. 

La  chapelle  de  Samt-Nicolas  contenait  nombre  de 
sépultures  de  religieux  et  de  religieuses .  On  y  voyait  aussi 
celles  de  Louis  de  Pillays,  secrétaire  et  familier  du  Dau- 
phin, fils  de  Colart  de  Pillays,  chevalier,  sieur  d'Ablèges  et 
deBerselou,  décédé  en  1400; — de  Nicolas  Pillays,  sieur  des 
mêmes  fiefis,  décédé  le  1 1  mai  141 5;  -—  de  Marie  Mahieu, 
sa  femme,  décédée  le  11  octobre  1416;  —  de  Jacques  Lamy, 
maître  des  arbalétriers  de  Rouen,  décédé  le  28  octobre 
141 7;  — d'Alonce  de  Civille,  vicomte  de  Rouen,  décédé 
le  26  mai  i352;  —  de  Marie  de  Saldaigne,  sa  femme,  décé- 
dée Tan  1 575  ;  —  de  François  Deudemare,  chanoine  de 
Rouen,  décédé  le  2  juillet  i635. 

La  tombe  la  plus  connue  était  celle  sur  laquelle  on 
lisait  cette  inscription  :  0  Ci  gissent  les  entrailles  de  mes- 
sire  Guillebert  Talbot,  chevalier  anglois,  qui  mourut  le  1 8 
octobre  141 8.  »  Le  défunt  y  était  représenté  portant  son 
cœur  dans  ses  mains,  d'où  ce  proverbe  longtemps  en 
usage  à  Rouen  :  c  II  ressemble  à  Talbot.  Il  porte  son 
coeur,  f  On  avait  gravé  sur  la  pierre  les  armoiries  de  Tal- 
bot qui  étaient  :  «  Elcartelé,  le  i^'  et  le  3",  de  gueules  à  un 
lion  rampant,  et  les  2  autres,  d'azur  à  2  léopars  lyonnés 

(i)  Tabellion,  de  Rouen,  meubles. 


246 

passans,  de  gueules.  >  L'inscription  et  les  armoiries  ont 
été  mentionnées  par  Phistoriographe  de  cette  ville,  Farin, 
qui  a  pu  les  voir  sur  place. 

Je  ne  trouve  à  signaler  comme  ayant  existé  dans  la  gale- 
rie de  la  chapelle  Saint-Maur  que  les  tombes  de  Marie 
Baudren,  décédée  le  18  juillet  1628,  et  celle  de  son  père, 
Antoine  Baudren,  commis  au  greffe  de  THôtel-de-Ville; 
et  dans  la  chapelle  Saint-Etienne,  que  la  tombe  de  Guil- 
laume Toustain,  sieur  de  Frontebosc,  de  Limésy,  etc., 
décédé  en  i535,  et  celle  de  Marie  Toustain,  veuve  en 
secondes  noces  de  Pierre  Le  Brun,  sieur  de  Fresnay,  décé- 
dée le  22  février  1 596. 

Il  est  à  présumer  qu'au  moment  de  la  démolition  de  ces 
chapelles,  au  siècle  dernier,  on  ne  prit  aucunes  dispositions 
pour  assurer  la  conservation  de  ces  diverses  tombes,  bien 
qu'elles  eussent  été  signalées  dans  un  ouvrage  très  répandu 
VHistoire  de  Rouen. 

Asile  des  pauvres  et  de  ceux  qu'un  motif  de  piété  avait 
engagés  à  se  confondre  avec  eux,  ce  cimetière  fut  aussi,  à 
raison,  sans  doute,  de  son  éloignement  de  la  ville,  affecté 
à  recevoir  les  cadavres  des  pestiférés.  On  en  retrancha 
une  partie  près  du  jardin  du  prieuré  qui  fut  attribuée  aux 
protestants  pour  ceux  de  leur  religion  qui  étaient  enlevés 
par  la  peste.  Mais  cela  dura  peu  :  ce  terrain  fut  rendu  au 
prieur,  le  21  juillet  161 2  ;  on  donna  aux  protestants,  en 
remplacement,  un  terrain  proche  du  Champ-du-Pardon  (1). 

(i)  Pendant  longtemps  le  Bureau  de  l'Hôtel-Dieu  ne  se  crut 
pas  permis  d'envoyer  au  cimetière  Saint-Maur  d'autres  cadavres 
que  ceux  qui  avaient  posé  dans  cet  établissement  et  les  cadavres 
des  catholiques.  C'est  ce  qu'il  objecta  à  un  sieur  Gyrauld,  qui 
demandait  de  faire  porter  à  Saint-Maur,  par  quatr*:  hommes,  le 
corps  de  Prévost,  contrôleur  de  l'artillerie,  3  mars  iSôy;  —  aux 
amis  d'un  nommé  Adrien  Blanchet,  hérétique  et  sacramentaire, 
décédé  en  la  maison  du  hallage,  qui  voulaient  le  foire  enterrera 
Saint-Maur,  avec  la  potence,  ainsi  que  les  protestants  avaient 
accoutumé,  10  avril   iSyo.  Cependant,  le  a  décembre  de  cette 


247 

Malgré  lés  trois  chapelles  qui  le  décoraient,  rien,  surtout 
en  temps  de  peste,  n'était  plus  triste,  plus  désolé  que  ce 
cimetière  de  Saint-Maur. 

A  ce  su)et  quelques  traits  sont  à  noter.  Signalons  d'abord 
la  négligence  avec  laquelle,  pendant  un  assez  long  temps, 
se  firent  les  inhumations. 

Les  corps  étaient  enfouis  à  une  si  faible  profondeur  qu'il 
arriva  plus  d'une  fois  que  les  chiens  et  les  loups  en  firent 
leur  pâture.  Cest  ce  dont  se  plaignit  Guillaume  Le 
Roy,  drapier  de  la  rue  Cauchoise,  maître  de  la  confrérie 
des  Trépassés,  12  mars  1564.  Mêmeplaintele  21  avril  1607. 

Figurons-nous  encore  la  fosse  commune.  Elle  est  citée 
en  1574,  dans  une  délibération  qui  prescrit  de  jeter  de  la 
terre  sur  les  corps  entassés  dans  le  charnier.  Le  18  mars 
161 1,  on  fit  marché  pour  faire  un  nouveau   cerne  pour 

même  année,  on  accueillit  la  demande  de  Romain  Aubery  «  qui 
avait  supplié  que  son  corps  fût  reçu  à  l'Hôtel-Dieu  et  porté 
inhumer  ainsi  qu'il  est  accoutumé  de  faire  pour  ceux  de  la  R.  P.R.  » 
On  y  mit  cependant  pour  condition  que  le  corps  serait  apporté 
le  soir  a  pour  éviter  émotion  et  scandale.  »  Cet  acte  de  tolérance  fît 
une  mauvaise  impression,  comme  on  le  voit  par  cette  délibéra- 
tion prise  le  2  mai  1571  :  «  Sur  la  clameur  faicte  par  aulcungz 
catholiques  que  les  corps  de  ceulx  de  la  R.  P.  R.  estoient  indiffé* 
remment  portez  inhumer  avecques  les  corps  des  catholiques,  a 
esté  faict  venir  le  charretier  de  la  maison  de  céans,  auquel  a  esté 
deffendu  de  porter  ceulx  de  la  R.  P.  R.  sinon  en  la  façon  accous- 
tumée,  en  unglieu  prophane,  joignant  le  cimetière  de  Saint-Maur, 
ainsy  qu'il  a  esté  faict  cy-devant,  suyvant  les  arrestz  de  la  Cour.  » 
(Voir aussi  M.  Floquet,  Histoire  du  Parlement ^  t.  III,  p.  63,  où 
sont  racontées  les  scènes  violentes  qui  eurent  lieu,  à  THôtel- 
Dieu,  au  sujet  du  cadavre  d'un  huguenot  que  le  peuple  voulait 
traîner  à  la  voirie.)  —  Samedi  10  décembre  161 1.  «  Aucuns 
de  la  R.  P.  R.  (Bauquemare,  le  baron  de  Courtomer,  De  la 
Rivière,  etc.)  avoient  demandé  le  jardin  du  prieur  de  céans 
proche  et  contigu  le  cimetière  Saint-Maur,  afin  que,  suivant 
TEdit  du  Roy,  et  selon  qu'autrefois  ils  l'a  voient  possédé, 
ils  y  pussent  inhumer  leurs  corps  morts  de  peste,  a  Regnard, 
maître  des  requêtes,  fut  nommé  commissaire  pour  aviser  sur 


248 

rinhumation  des  pauvres  :  il  devait  avoir  48  pieds  en  carré, 
20  pieds  de  profondeur  avec  une  descente  pour  conduire 
plus  aisément  le  charriot  qui  portait  les  corps  audit  cerne. 

«  1 1  avril  1626,  conformément  à  la  requête  de  la  confré- 
rie Saint-Maur,  le  lieutenant  général  du  bailliage  fait  pro- 
céder à  la  visite  du  charnier,  où  Ton  enterre  ordinairement 
les  corps,  clos  d'une  haie  de  bois  mort  d'espine,  soutenue 
et  liée  avec  des  pieux,  distante  dudit  charnier  de  60  pieds 
ou  environ,  aux  dépens  des  confrères.  »  N'est-il  pas 
curieux,  de  voir  ces  derniers  supporter,  dans  cette  circons- 
tance, une  dépense  qui  paraît  si  naturellement  rentrer  dans 
les  charges  delà  police  municipale? 

Le  i5  juillet  i65o,  on  fait  venir  le  charretier,  et  on  lui 
commande  de  recouvrir  de  terre  les  corps  qui  étaient  dans 
le  charnier. 

cette  réclamation.  On  offrit  aux  protestants,  entre  les  portes 
Saînt-Hilaire  et  Beauvoisine,  près  des  fossés,  une  acre  de 
terre  ou  environ.  Ils  refusèrent  ce  terrain.  Mais  peu  de  temps 
après  ils  se  contentèrent  d'une  vergée  de  terre  appartenant 
à  THôtel-Dieu,  au  Champ-du-Pardon,  non  loin  des  four- 
ches patibulaires.  Le  i*'  février  i638,  on  mentionne  «  hors  la 
porte  Bouvreuil,  au  triège  du  Camp-du-Pardon,  par.  Saint-Godard, 
2  jardins,  d'une  acre  et  demie,  plantés  d'arbres,  près  d'une 
place  close  de  murailles  où  Ton  enterre  les  corps  des  personnes  de 
la  R.  P.  R.  qui  décèdent  de  la  contagion  ». —  Il  ne  faut  pas  con- 
fondre ce  cimetière  avec  le  cimetière  ordinaire  des  protestants  qui 
était  situéen  la  paroisse  Saint- Vivien,  à  l'extrémité  de  la  rueSaint- 
Hilaire;  celui-ci  ne  fut  supprimé  qu'après  la  révocation  de  l'Edit 
de  Nantes  et  fut  alors  donné  à  l'Hôpital  Général.  C'était  un  terrain 
clos  de  murailles,  planté  de  sycomores,  entouré  d'une  rangée 
d'arbres,  et  estimé  à  40  1.  de  revenu.  La  personne  à  qui  on  le 
loua  eut  la  malheureuse  idée  d'y  faire  établir  des  jeux  de  boule. 
Le  curé  de  Saint- Vivien  réclama  contre  cette  indécence,  et  le  jar- 
din fut  loué  à  un  autre  locataire  qui  en  tira  parti  d'une  manière 
moins  inconvenante.  —  Un  autre  cimetière  à  l'usage  des  protes- 
tants se  trouvait  à  Saint-Sever,  rue  aux  Chiens  :  il  fut  aliéné  le 
28  juin  1689. 


249 

Si  désolé,  si  lugubre  que  fût  ce  cimetière,  on  ne  laissait 
pas  de  s'y  porter  en  foule  à  de  certains  jours  de  Tannée. 
C'était  le  lieu  que  Ton  choisissait  aussi  de  préférence  pour 
les  distributions  d'aumônes  en  faveur  des  défunts,  de  ceux 
mêmes  qui  avaient  ailleurs  leur  sépulture. 

Le  chanoine  Guillaume  Le  Roux,  qui^  conformément  à 
ses  dernières  dispositions,  fut  inhumé  au  Bourgtheroulde, 
principale  résidence  de  sa  famille,  avait  ordonné  par  son 
testament  de  distribuer,  à  l'occasion  de  ses  obsèques,  aux 
pauvres  qui  viendraient  au  cimetière  Saint-Maur,  5o  mines 
de  blé  en  pain,  et  4  poinçons  de  vin. 

Le  îpur  du  premier  service  fait  à  Rouen  pour  les  obsè- 
ques du  cardinal  d'Amboise,  ministre  de  Louis  XII,  on  fit 
une  distribution  de  douzains  à  tous  ceux  qui  se  présen- 
tèrent au  cimetière  Saint-Maur.  Il  s'y  rencontra  plus  de 
20,000  personnes.  Il  est  vrai  que  cette  distribution  avait 
été  annoncée  à  son  de  trompe,  3  ou  4  jours  à  l'avance. 

Le  mardi  des  Rogations,  une  foule  de  peuple  s'y  rendait 
à  la  suite  de  la  procession  générale  de  toutes  les  paroisses 
et  de  toutes  les  communautés  de  la  ville,  en  revenant  de 
l'église  Saînt-Gervais  où  avait  lieu  la  station  (i). 

L'afHuence  n'était  guère  moins  considérable  le  jour  de 
la  Toussaint.  A  ce  sujet  je  citerai  quelques  ordonnances 
qui  furent  rendues  à  la  requête  des  confrères  de  la 
confrérie  des  Trépassés,  pour  autoriser  l'ouverture  de  la 
porte  Cauchoise  par  laquelle  on  se  rendait  habituellement 
à  ce  cimetière. 

«  Il  est  mandé  au  portier  de  la  porte  Cauchoise  de  Rouen 
de  la  tenir  ouverte  depuis  l'heure  de  midi ,  jour  de  la 
Toussaint  prochaine,  jusques  à  l'heure  de  5  heures  et 
demie  du  soir,  en  faveur  et  pour  l'exercice  de  dévotion 

(i)  8  mai  1620,  «  à  cause  de  la  contagion,  la  procession  du 
mardi  des  Rogations  qui  va  ordinairement  à  Saint-Gcrvais  ne 
passera  pas  par  dedans  le  cimetière  Saint-Maur.  »  —  1 3  mai  1572, 
«  jour  des  processions,  a  esté  cueilli,  aud.  lieu  de  Saint-Mor, 
52  l.  » 


I 


7 


25o 

qui  se  faict  en  la  chapelle  Saint- Maur  par  les  confrères 
d*icelle  et  aultres  led.  jour,  parce  que  le  sieur  David 
Delamare,  maistre  de  la  confrarie  dud.  Sainl-Maur,  sera 
tenu  y  mectre,  de  sa  part,  ung  personnage  notable  à 
garder  lad.  porte  et  y  faire  venir  deux  des  harquebousiers 
de  la  ville  estantz  de  lad.  confrairie,  sçavoir  Jaques  Gouel 
et  Jaques  Enoc,  ausquels  il  est  mandé  se  trouver  à  l'ou- 
verture, garde  et  clausion  de  lad.  porte.  Faict  à  Rouen  le 
25e  jour  de  oct.  i5io.  Signé  :  de  Hanyvel.  » 

Pareille  permission,  sous  les  mêmes  conditions,  est 
donnée,  par  le  Bureau  de  PHôtel-de- Ville  aux  confrères 
des  Trépassés,  le  3o  oct.  1614. 

Le  3o  oct.  1629,  requête  adressée  à  Mgr  le  duc  de 
Montbazon,  gouverneur  de  Normandie,  par  les  chapelain, 
prévôt  et  maîtres  de  la  confrérie. 

Ils  y  exposent  que  «à  l'occasion  du  jour  de  la  Commé- 
moration des  Trespasséz,  qui  devoit  avoir  lieu  le  lundi  pro- 
chain, plusieurs  notables  bourgeois  et  habitans  de  la  ville, 
meus  de  pitié,  sortiroient  hors  de  la  porte  Cauchoise,  le 
jour  et  feste  de  Toussaincts  pour  se  rendre  en  la  chap- 
pelle  des  Trespasséz  fondée  au  cymetière  de  Saint-Mor, 
lieu  non  moins  remply  de  dévotion,  pour  le  nombre  infiny 
des  corps  que  Ton  y  ensepulture,  que  Saint-Innocent-de- 
Paris,  pour,  en  ce  dit  lieu,  entendre  la  prcdicacion  qui 
se  fera,  icelluy  jour  de  Toussainctz,  2  heures  après  midy, 
assister  en  dévocion  au  service  que  Ton  y  célébrera  pour 
les  âmes  des  fîdelles  deffunts  en  général,  les  corps  des 
quels  reposent,  tant  en  lad.  chapelle  que  aud.  cimetière. 
Et  d^autant  qu'à  cause  de  lad.  feste  de  Toussaincts  Ton 
tenoitles  ponts  levez  et  portes  de  ceste  ville  fermez  (i), 
qui  faisoit  que  Ton  a  voit  peine  de  sortir  et  entrer  pour 

(i)  Présentement  les  jours  de  fête,  la  population  des  villes  se 
répand  dans  les  campagnes  environnantes.  Autrefois,  ces  mêmes 
jours,  elle  y  était  renfermée  plus  strictement  que  les  jours 
ordinaires. 


25l 

exercer  lesd.  œuvres  pieuses  et  dévottes,  •  pour  cette 
considération,  ils  demandaient  <  qu'en  faveur  de  ces  dévo- 
tions, conformément  aux  ordonnances  des  sieurs  conseil- 
lers cchevins,  dont  ils  représentaient  un  extrait,  il  plût 
au  gouverneur  de  la  province,  de  commander  au  capi- 
taine qui  seroit,  le  jour  de  Toussaincts,  en  garde  en  la 
porte  Cauchoise,  ensemble  au  portier  d'icelle,  d*en  ûiire 
Touverture  et  la  tenir  ouverte  depuis  l'heure  de  midy 
jusques  à  6  h.  >.  La  permission  fut  accordée;  mais  le 
temps  fut  limité  entre  2  heures  et  5  heures  du  soir. 

On  aurait  peine  à  le  croire,  si  Ton  ne  savait  combien 
autrefois  on  était  familiarisé  avec  les  images  de  la  mort  (i)  ; 
ce  fut  toujours  avec  le  plus  grand  regret,  même  en 
temps  de  peste,  que  les  frères  abandonnaient  ce  lieu  de 
désolation,  et  c'était  avec  bonheur  qu'ils  y  rentraient,  dès 
qu'on  voulait  bien  le  leur  permettre. 

Les  sentences  d'interdiction  rapprochées  de  celles  qui 
les  annulaient,  permettraient  de  préciser  la  durée  de  ces 
terribles  épidémies  qui^  si  fréquemment,  aux  xvi^  et 
xvii^  siècles,  affligèrent  notre  ville.  Mais  il  faut  se  borner 
à  de  courtes  indications. 

Je  vois  que  la  confrérie  fut  transférée  aux  Béguines,  à 
raison  de  la  maladie  contagieuse,  aux  années  1623,  1624, 
1626. 

Le  5  mars  de  cette  dernière  année,  on  fît  dresser  par 
l'avocat  Baudry  (c'était,  je  pense,  un  confrère)  une  requête 
à  la  cour  pour  faire  rapporter  l'ordonnance  de  M.  de  la 
Ferté,  lieutenant  général  au  bailliage,  par  laquelle  il  était 
défendu  de  célébrer  le  service  divin,  de  prêcher  dans  la 
chapelle  des  Trépassés  et  même  de  tenir  ouvert  le  cime- 

(i)  Ce  fut  le  xvi«  siècle  surtout  qui  se  fit  remarquer  par  son 
goût  pour  le  lugubre.  Il  est  aisé  de  le  constater  non  seulement 
par  les  tombes,  par  la  décoration  des  églises  et  des  cimetières,  où 
s'étalaient  les  danses  macabres,  par  nombre  de  compositions 
littéraires,  mais  encore  par  les  singulières  décorations  de$ 
maisons  privées. 


252 

tîère  Saint-Maur.  On  alléguait  que  tout  danger  avait  cessé. 
On  ne  put,  cependant,  être  autorisé  à  y  reprendre  les 
exercices  ordinaires  qu'à  partir  du  premier  dimanche  de 
carême  1627.  Le  lieutenant  général  consentit  alors  que 
les  marqueurs  (ceux  qui  marquaient  les  maisons  des  pesti- 
férés et  faisaient  transporter  les  cadavres  par  lecharriot  de 
r Hôtel-Dieu)  se  retireraient  du  cimetière  et  laisseraient 
les  portes  libres  aux  maîtres  et  confrères  pour  continuer  a 
faire  dire  le  service  divin  en  leur  chapelle. 

En  i633  la  confrérie  est  encore  transférée  aux  Béguines, 
pour  cause  de  la  contagion.  Ce  fléau  l'y  retient  de  i635  à 
1637. 

En  i638,  elle  passe  en  Téglise  Saint-Sauveur^  et  ne  peut 
retourner  à  Saint-Maur  qu'en  1639. 

En  i65i,  il  lui  faut  se  retirer  à  Saint-Michel  :  elle  revient 
à  Saint-Maur  vers  la  fin  de  i653. 

Quelques  années  après,  en  1667,  nouvel  exil  cause  par  une 
épidémie,  très  meurtrière,  et  qui  ne  prit  fin  que  dans  les 
derniers  mois  de  Tannée  suivante.  Les  confrères  se  hasar- 
dèrent, le  20  oct.  1669,  à  demander  l'ouverture  du  cime- 
tière pour  y  continuer,  je  rapporte  les  termes  de  leur  sup- 
plique, c  le  service  divin  tel  qu'il  était  fait  depuis  plus  de 
200  ans,  afin  de  satisfaire  à  la  dévotion  d'une  foule  innom- 
brable de  personnes  dont  les  parents  défunts  reposaient 
à  Saint-Maur,  en  attendant  la  Résurrection  glorieuse.  »  La 
permission  leur  fut  accordée  le  23  janv.  1670,  pour  valoir 
à  partir  du  i^'  mars  suivant. 

Depuis  cette  époque  il  n'y  eut  plus,  à  Rouen,  de  véri- 
table peste  ;  la  confrérie  put  tenir,  sans  interruption,  ses 
assemblées  au  lieu  qui  lui  était  propre  et  qu'elle  affec- 
tionnait. 

Il  nous  reste  encore,  comme  souvenir  de  ces  funestes 
épidémies,  la  tombe  des  19  pères  capucins  qui  périrent 
victimes  de  leur  dévouement  aux  pestiférés,  dans  les 
années  1622,  1623  et  1624.  Je  me  fais  un  devoir  de  trans- 
crire ici  leurs  noms  :  les  pères   Christophe,  d'Amiens; 


253 

Sebastien,  de  Rouen;  Illuminé,  de  Rouen;  Julien,  de  Nesle; 
Barthélémy,  d'Eu;  Josaphat,  de  la  Poterie;  Ange,  de 
Rouen  ;  Girard,  de  Saint-Lô  ;  Nicolas,  de  Caen  ;  Simon, 
de  Rouen;  Félix,  de  Valognes;  Maclou,  de  Dieppe;  Jean- 
Baptiste^  du  Havre  ;  Charles,  de  Honfleur  ;  Alphonse, 
de  Rouen  ;  Yves,  de  Montfort  ;  Claude,  de  Cherbourg  ; 
Alexis,  de  Rouen  (i). 

L'inscription  qui  avait  été  mise  sur  leur  tombe  avait  été 
détruite  pendant  la  Révolution.  Elle  fut  rétablie  en  1822, 
aux  frais  et  par  les  soins  de  la  ville,  sur  la  proposition  de 
M.  de  Martain ville,  maire  de  Rouen.  Elle  est  ainsi 
conçue  : 

.  c  Ici  reposent  les  os 

Des  pères  capucins  qui  s'étant  dédiés 

A   l'assistance  spirituelle  des  malades 

De  la  peste  pendant  les  années 

1622,  1623  et  1624 

Y  ont  fini  leurs  jours  dans  l'exercice 

De  la  charité. 

Leurs  cendres  éloignées  de  celles 

De  leurs  frères  sont  les  illustres 

Marques  d'un  «èle  qui  n'a  pu  être 

Empêché  ni  par  la  crainte  de  la 

Maladie  contagieuse  ni  par  l'amour 

Que  les  hommes  ont   naturellement 

De  vivre. 

(i)  En  la  chapelle  de  Beauvoir  on  voyait  aussi  la  tombe  de 
frère  Pierre  Le  Blond,  religieux  de  THôtel-Dieu,  mort  de  la  peste 
en  1640;  celle  de  Marie  de  Sermentot,  religieuse,  morte  de  la 
peste,  le  2  oct.  1648,  «  le  dixième  jour  après  s'être  consacrée 
pour  l'amour  de  Dieu  au  service  des  pauvres  malades  de  la 
peste  dans  le  lieu  de  santé  ».  Un  registre  de  cet  établissement 
nous  apprend  que,  du  ler  janvier  au  3i  décembre  1637,  il  y  entra 
3,5 1 3  pestiférés.  Mais  combien  d'autres  étaient  morts  dans  des 
maisons  particulières  et  avaient  été  transportés  directement  par 
les  marqueurs  au  cimetière  Saint-Maur! 


a54 

Le  même  évangile  qui  les  avait  déjà 

Dépouillés  de  tous  les  biens  de  la  terre 

Les  a  fait  mourir  dans   le   lit  d*honneur 

Puisque  c'est  en  exerçant  la  charité 

Qui  est  la  première  de  toutes  les  vertus. 

Porte  une  sainte   envie  à  leur  condition. 

Si  tu  ne  veux  être  méconnoissant  ne  refuse  pas 

Tes  prières  à  ces  âmes  généreuses 

Qui  ont  sacrifié  leurs  corps 

Pour  le  bien  être  du  public  (i).  • 

A  part  cette  tombe,  le  cimetière  était  nu.  On  n'y  voyait 
aucune  de  ces  croix,  ni  de  ces  petits  parterres  de  fleurs, 
qui  déguisent,  présentement,  à  nos  yeux,  l'horreur  des 
tombeaux. 

Dans  les  signes  extérieurs  qui  nous  servent  à  témoigner 
notre  reconnaissance  et  notre  affection  pour  ceux  qui  ne 
sont  plus,  il  y  a,  on  me  pardonnera  de  le  dire,  de  la 
mode  comme  en  toute  autre  chose.  Sans  parer  leurs  sépul- 
tures, comme  nous  aimons  à  le  faire  maintenant,  nos  pères 
les  respectaient  autant,  sinon  plus  que  nous  :  ils  avaient 
moins  souci  des  ornements  extérieurs  et  plus  de  piété 
envers  les  restes  des  défunts. 

N'est-ce  pas  par  ce  sentiment  qu'il  faut  expliquer  la 
longue  conservation  de  la  tombe  de  Bedford,  dans  la 
cathédrale,  et  de  la  dalle  funéraire  de  Gillebert  Talbot, 
dans  la  chapelle  de  Saint-Nicolas^  au  cimetière  Saint-Maur, 
dont  nons  avons  parlé  précédemment.  Les  noms  qui  s'y 
trouvaient  inscrits  rappelaient  pourtant  le  souvenir  d*une 
époque  néfaste,  de  la  domination  étrangère,  des  hommes 
qui  avaient  le  plus  contribué  à  rétablir. 

Le  même  sentiment  est  encore  plus  clairement  attesté 
par  Tusage  où  l'on  était  autrefois  de  porter  à  Saint-Maur, 
comme  dans  un  lieu  consacré  par  les  cérémonies  de  la 

(i)  L'ancienne  inscriptioD  portait  «  pour  le  bien  du  public.  » 


255 

religion  et  protégé  par  la  dévotion  du  peuple,  toutes  les 
terres  que  Ton  tirait,  chaque  année,  des  cimetières  de  la 
ville  et  de  Tenceinte  des  églises  afin  de  remédier  à  l'exhaus- 
sement du  sol,  conséquence  forcée  d*inhumations  multi* 
pliées.  Quant  à  la  preuve  de  cette  pratique,  on  la  trouve 
dans  tous  les  comptes  des  fabriques,  et  Ton  n'a  que  l'em- 
barras du  choix  (i). 

Ainsi  le  cimetière  Saint- Maur  était  véritablement  le 
campo  santo  de  la  ville  de  Rouen,  bien  qu'on  ne  voie  pas 
qu'on  y  ait  apporté,  comme  dans  celui  de  Pise,  de  la 
terre  de  Jérusalem,  et  que  très  certainement  aucun  rival  ' 
de  Giotto  n'ait  travaillé  à  sa  décoration.  Mais  c'est  déjà 
quelque  chose  que  nos  peintres,  nos  imaginîers, 
nos  verriers,  se  soient  pris  d'affection  pour  ce  cimetière, 
et  peut-être  aurions-nous  eu  à  signaler,  dans  cet  asile  de 
la  mort,  quelque  œuvre  remarquable,  sans  les  ravages  des 
guerres  et  des  révolutions. 

(i)  Comptes  de  la  paroisse  Sainte  Jean  de  Rouen  :  i636.  «  Payé 
à  celui  qui  mène  le  charriot  de  la  Madeleine,  pour  3  bellenées  de 
terre  de  lad.  église,  pour  porter  au  cymetière  Saint-Mor,  20  s. — 
i63jf  au  charretier  de  la  Madeleine,  pour  avoir  porté  4  voyages 
de  terre  à  Saint-Maur  durant  l'hiver,  32  s.  —  1639,  payé  à 
Henri  Marquis,  maître  maçon,  la  somme  de  4  1.  19  8.,  pour 
avoir  par  luy  racoustré  ung  benestier  de  pierre,  que  pour  avoir 
faict  porter  les  terres  sainctes  de  lad.  église  au  cimetière  de 
Saint-Mor,  4  1.  19  s.  t.  —  1640,  au  charestier  de  la  Madaleine, 
pour  avoir  porté  des  terres  de  Tesglise  à  Saint-Maur,  303.-1642, 
au  charetier  de  la  Magdelene,  pour  avoir  porté  les  terres  de  Tes- 
glise  à  Saint-Maur,  24  s.  —  1643,  au  charretier  de  la  Madelene, 
pour  avoir  porté  les  terres  de  lad.  église  à  Saint-Maur,  16  s.  — 
F.  de  la  paroisse  Sainte-Croix  des  Pelletiers,  17  avril  1690,  per- 
mission du  curé  de  faire  porter  dans  le  cimetière  Saint-Maur 
les  terres  qui  lui  seront  incommodes  dans  le  cimetière  de  son 
église,  parce  que  le  sol  de  ce  cimetière  était  au  dessus  du  niveau 
du  sol  de  réglise,  ce  qui  la  rendait  humide  et  malsaine.  —  F.  de 
la  paroisse  iV.-D.  de  la  Ronde,  19  avril  1760,  terres  du  cime- 
tière de  N.-D.  portées  au  cimetière  Saint-Maur.  » 


256 

Une  fois  cependant  le  cimetière  Saint-Maur  fut  profane, 
et  le  fait  donna  lieu  à  un  procès  qui  émut,  vivement 
l'opinion  publique,  et  se  termina  par  une  sentence  du 
lieutenant  général  criminel  de  Rouen,  du  23  avril  1735. 
Au  mois  de  décembre  précédent,  un  cadavre  avait  été 
enlevé  pendant  la  nuit,  «  crime  d'autant  plus  condamnable 
qu'en  troublant  ainsi  les  aziles  destinez  pour  le  repos  et 
les  cendres  des  morts,  c'était  manquer  de  respect  pour  les 
lieux  saints  et  d'humanité  à  l'égard  du  public.  >  c  II  n'est 
point  de  nation,  disait  le  magistrat,  chez  laquelle  la  sépul- 
ture^ quoi  qu'accompagnée  de  cérémonies  différentes,  ne 
soit  en  très  grande  vénération;  il  n'est  que  les  infâmes  et 
les  criminels  qui  en  soient  privez,  et,  selon  saint  Paul,  il  y 
a  autant  de  charité  d'ensevelir  les  morts  que  de  conserver 
la  vie  aux  vivans.  La  terre  est  le  siège  des  morts,  et  si  c'est 
une  impiété  de  ne  les  pas  inhumer,  de  quel  œil  peut-on 
regarder  ceux  qui  troublent  leur  repos  !  C'est  une  barbarie 
qui  a  été  réprimée  toutes  les  fois  que  la  justice  en  a  eu 
connaissance.  »  La  sentence  fut  imprimée,  lue,  publiée  et 
affichée  aux  carrefours  de  la  ville  et  dans  les  faubourgs. 
Le  corps,  après  avoir  été  reporté  en  l'église  Saint- Patrice, 
fut  inhumé  avec  honneur  dans  le  cimetière  de  Saint- 
Godard.  Quant  à  l'auteur  de  cette  profanation,  il  n'est 
pas  signalé  dans  la  sentence.  C'est  un  égard  que  l'on  eut 
pour  le  coupable,  qui  n'était  autre  que  le  célèbre  Lecat. 
Emporté  par  son  zèle  de  savant,  il  avait  dérobé  un  cadavre 
pour  ses  études  anatomiques. 

La  sentence  du  lieutenant  général  criminel  était  conçue 
en  des  termes  que  n'eussent  pas  désavoué  ses  prédéces- 
seurs. Quelques  années  après  on  n'eût  pas  parlé  de  la 
même  manière.  Quand  on  supprima  les  cimetières,  on  fit 
peu  d'attention  aux  sépultures  :  les  dalles  tumulaires  des 
églises  furent  déplacées  ou  mutilées  avec  un  sans-façon 
auquel  personne  ne  trouva  à  redire. 

Aujourd'hui  il  ne  reste  plus  une  pierre  des  trois  cha- 
pelles du  cimetière  de  Saint-Maur.  Elles  ont  subi  le  sort 


25/ 

de  ces  générations  d'hommes  qui,  tour  à  tour,  sont  venues 
s'engloutir  dans  cet  étroit  espace,  où  l'on  ne  rencontre 
que  des  monuments  des  plus  modestes,  destines  tous,  eux-> 
mêmes,  à  une  disparition  prochaine. 

Du  moins  on  a  conservé  les  vitraux  qui  ornaient  la  plus 
intéressante  et  la  dernière  de  ces  chapelles,  la  chapelle 
Saint-Maur. 

Le  1 7  prairial  1 798,  le  peintre  Le  Carpentier,  agissant 
en  vertu  d'une  commission  du  District,  fît  enlever  ces 
vitraux,  après  les  avoir  fait  soigneusement  encaisser;  ils 
furent  portés  au  dépôt  des  objets  d'art  du  departement.de 
la  Seine- Inférieure. 

Il  est  certain  qu'ils  ne  furent  pas  compris  parmi  ceux 
qui  furent  plus  tard  attribués  à  la  ville  pour  la  formation 
du  musée  municipal.  Us  restèrent,  oublies,  dans  un  coin 
de  la  préfecture,  jusqu'à  Tannée  1820,  que  le  Conseil 
général  les  accorda  à  M.  Crevel,  curé  de  Saint-Romain, 
pour  la  décoration  de  son  église,  où  l'on  peut  les  admirer 
encore  (i). 

(i)  Ces  verrières  sont  ainsi  désignées  dans  un  mémoire  de 
l'année  1680  :  les  4  évangélistes;  la  Création;  la  Résurrection; 
un  tableau  où  Ton  voyait  représenté  le  temple  et  la  piscine  ; 
Job;  le  Déluge;  Tobie;  la  Transfiguration;  la  ville  où  Dieu 
parle  au  peuple  d'Israël  ;  la  Multiplication  des  pains  ;  l'entrée  de 
Jésus  au  temple;  la  Salutation  angélique;  les  3  Maries;  Jésus 
au  jardin  des  Olives  ;  Jésus  en  croix.  —  Le  peintre  Jean  Le  Vieil, 
demeurant  à  Rouen,  paroisse  Saint-Laurent,  rue  Beauvoisinc, 
avait  été  chargé  de  la  restauration  de  ces  verrières.  Le  chiffre  de 
ses  honoraires  et  la  manière  dont  il  s'était  acquitté  de  son  travail 
donnèrent  lieu  à  un  procès.  On  reprochait  à  Le  Vieil  d'avoir 
exagéré  la  dépense,  et^  chose  plus  grave,  «  d'avoir  osté  là  pein- 
ture des  vitres,  de  sorte  qu'il  a  voit  causé  un  dommage  notable 
auxd.  vitres,  les  plus  belles  de  la  ville.  »  Les  confrères  non  seu- 
lement ne  voulaient  rien  lui  payer;  mais  ils  réclamaient,  comme 
indemnité,  une  somme  de  200  1.  Les  parties  nommèrent  pour 
experts,  Pierre  La  Voûte,  et  Jacques  Le  Roy,  l'un  et  l'autre 
verriers,  et  demeurant  à  Rouen,  rue  de  la  Poterne.  Ces  experts 


258 

On  voit  que  \je  Carpentier  avait  fait  enlever^  le  6  prairial 
1793,  delà  même  chapelle,  12  tableaux  qui,  sans  doute, 
ne  lui  paraissaient  pas  sans  mérite.  Je  ne  saurais  dire  ce 
qu'ils  sont  devenus. 

Je  ne  puis  mieux  finir  cette  notice  qu'en  rappelant  un 
souvenir  historique  notable,  qui  se  rapporte  au  lieu  dont 
nous  venons  de  nous  occuper.  C'est  de  Saint-Maur  près 
Rouen,  juillet  141 7,  que  sont  datées  les  lettres  de  pardon 
accordées  parle  Dauphin,  qui  fut  depuis  Charles  VII,  aux 
bourgeois  de  Rouen,  coupables  d'avoir  pris  parti  pour  le 
duc  de  Bourgogne  et  de  s'être  insurges  contre  l'autorité 
royale.  Le  même  lieu  devait  voir  l'année  suivante  une 
partie  de  l'armée  de  Henri  V,  pendant  ce  long  siège  qui  fit 
tant  d'honneur  à  nos  compatriotes. 

A  propos  de  la  tombe  des  Capucins,  morts  au 
service  des  pestiférés,  M.  Tabbé  Tougard  fait  observer 
que  cette  sépulture  était  déjà  en  fort  mauvais  état  avant 
le  milieu  du  siècle  dernier,  puisque  D.  Duplessis  se 
plaignait,  en  1 740,  de  n^avoir  pu  lire  les  noms  des 
religieux. 

La  séance  est  levée  à  trois  heures  et  demie. 

G.  GouELLAiN  et  A.  Tougard. 

furent  pas  agréés;  le  lieutenant  général  s'en  rapporta  à  l'expertise 
de  M.  Le  Carpentier,  maître  des  ouvrages  de  la  ville. 


259 


SÉANCE  DU  3o  JUIN   i883 


La  séance  est  ouverte  à  deux  heures  sous  la  prési- 
dence de  M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Sont  présents  :  MM.  Adeline,  P.  Baudry,  Billiard, 
Bouctot,  Bouquet,  Félix,  Gustave  Gouellain,  Maillet 
du  BouIIay,  Gaston  Le  Breton,  Pelay,  de  la  Serre  et 
Tabbé  Tougard,  faisant  fonction  de  secrétaire. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et 
adopté,  après  quelques  additions  réclamées  par  M.  Le 
Breton  pour  préciser  ses  communications. 

La  correspondance  imprimée  comprend  : 

Mémoires  de  la  Société  Savoisienne^  t.  XXI  ;  — 
Société  des  Amis  des  Sciences  naturelles  de  Rouen  y 
i8c  année,  2«  semestre;  —  Antiquaires  de  Picardie  y 
3e  série,  t.  VI  ;  — Société  historique  et  archéologique 
de  Langres,  t.  H  ;  --^  Bulletin  du  Comité  des  travaux 
historiques  et  scientifiques  y  année  1882,  n®  4;  —  5o- 
ciété  archéologique  de  Béliers,  2«  série,  t.  XI, 
2°  livr.  ;  —  Annales  de  la  Société  historique  et  archéo- 
logique de  Château-Thierry,  1881;  —  Société  his- 
torique d'Elbeu/,  1882,  n°  4;  —  Mémoires  de  la 
Société  académique  de  F  Aube,  t,  XLVI;  —  Bulletin 
de  la  Société  archéologique  et  historique  de  P  Or- 
léanais, n°  1 1 5  ;  —  Bulletin  de  Fa  Société  archéo- 
logique de  Tarn-et- Garonne,  t.  X. 

Enfin  M.  Tabbé  Tougard  offre  à  la  Commission,  au  nom 
des  Bollandistes,  quatre  extraits  de  leurs  Analecta  Bollan- 
dianay  utile  complément  des  Acta  Sanctorum  qui  a 
commencé  à  paraître  en  1882,  et  forme  chaque  année  un 
vol.  gr.  in-80  de  640  pages.  Ces  extraits  sont  les  Vies  de 
saint  Vital  et  de  saint  Geoffroy,  abbés  de  Savigny,  dont 


200 

l'éditeur  est  M.  Tabbé  Sauvage,  la  Vie  de  saint  Ansberty 
les  Miracles  de  saint  Giîduin  et  la  Translation  de 
saint  Germain  de  Paris, 

Cet  hommage  des  savants  Jésuites  est  un  remercîment 
pour  l'envoi  de  notre  Bulletin.  Vers  1870,  la  Commission 
avait  compris  les  BoUandistes  parmi  les  Sociétés  savantes 
auxquelles  la  Préfecture  adresse  d'office  les  travaux  de  la 
Commission,  et  ils  n'ont  cessé  depuis  de  leur  être  réguliè- 
rement envoyés.  Les  BoUandistes  espèrent  que  Ton 
voudra  bien  leur  continuer  cette  faveur;  et  ils  ont  saisi  la 
première  occasion  d'en  témoigner  leur  gratitude  puisque 
c'est  Fan  dernier  seulement  qu'ils  ont  repris  leur  publi- 
cation interrompue  durant  1 5  ans.  Ils  ont  cité  avec  hon- 
neur le  Bulletin  dans  leurs  recherches  sur  saint  Ingaude, 
né  probablement  à  Eu  ou  à  Oust-Marais,  au  vn^  siècle 
(Acta  SS.  Octobre  xiii,  3  F.) 

Tombeau  de  Hugues  d'Orges.  —  M.  Gaston  Le  Breton 
donne  lecture  de  l'inscription  suivante  qu'il  a  relevée 
récemment  au  Musée  du  moyen  âge  (Mittelalterliche  sam- 
mlung)  de  Bâie,  dont  l'installation  actuelle  date  de  1 880.  — 
Cette  inscription,  gravée  sur  une  plaque  de  bronze,  était 
placée  dans  l'église  Saint- Pierre  sur  le  tombeau  de  l'arche- 
vêque de  Rouen,  Hugues  d'Orges  qui  mourut  à  Bâle,  le 
14  août  1436,  pendant  le  célèbre  concile  qui  se  tenait  alors 
dans  cette  ville  : 

Hicjacet  dominus  Hugo^  de  Ourgiis,  archiepiepiscopus 
RothomagensiSf  pro  quo  collegium  huius  ecclesie  tenetur 
celebrare  quatuor  anniversaria  quatuor  temporibus  anni  et 
unum  in  die  sui  obitus.  Singulis  quoque  diebus  anni  tenetur 
sacerdos,  celebrans  missam  majorem,  post  finem  ipsius 
misse  dicere  super  tumba  ejus  De  profiindis,  cum  oratione 
dominica  et  collectis  Deus  qui  inter  apostolicos  et  Fide- 
lium,  cum  aspersione  aque  benedicte,  prout  in  litteris 
desuper  confectis  latius  continetur.  Anima  ejus  requiescat 
in  pace.  Amen. 


26l 

Buste  de  M.  A.  Le  Prévost.  —  M.  d'Esiaintoi,  en 
s' excusant  de  ne  pouvoir  assister  à  la  séance,  à  cause 
des  travaux  de  l'Association  normande»  informe  la 
Commission  de  l'érection,  à  Bernay,  du  buste  d'A.  Le 
Prévost,  notre  ancien  collègue. 

Église  de  Saint- Jean-d^ Abbetot,  —  Empêché  éga- 
lement  de  prendre  place  à  cette  séance,  M.  Brianchon 
envoie  des  renseignements  satisfaisants  sur  Pemploi 
des  1 5oo  francs,  votés  par  la  Commission,  pour  la  res- 
tauration de  Saint-Jean-d'Abbetot,  et  se  loue  du  zèle 
qu'a  témoigné  en  cette  circonstance  M,  Héquet,  maire 
de  la  Cerlangue.  Il  rappelle  que  la  restauration  est 
demeurée  incomplète,  qu'il  faudra  notamment  refaire 
quatorze  marches  de  Pescalier  du  clocher,  et  que  la 
Commission  devra  prochainement  voter  un  supplé- 
ment d'allocation,  en  faveur  du  curieux  monument 
qui  remonte  au-delà  de  Tan  loSo. 

Chêne  d^Allouville.  —  Le  même  membre  invite 
M.  Gouellain  à  mener  à  bonne  fin  un  projet  dont  il  a 
le  mérite  d'avoir  pris  lUnitiative.  Il  s'agit  de  la  réfection 
de  l'escalier  rustique  en  bois  sculpté  qui  permet  l'accès 
à  la  chapelle  du  chêne  d'Allouville. 

M.  Gouellain  explique  qu'en  effet  il  s'était  préoc- 
cupé  de  ce  travail  sur  certains  bruits  qui  parlaient  de 
gâter  ce  doyen  de  nos  forêts  par  un  escalier  en  fonte. 
Mais  il  n'a  pu  suivre  d'assez  près  cette  affaire.  Il  profite 
de  cette  circonstance  pour  remarquer  que  le  décès  de 
notre  collègue,  M.  le  D'  Guéroult,  a  privé  la  Commis- 
sion de  tout  moyen  d'informations  sur  les  environs 
d'Yvetot. 

M.  le  Président  estime  que  le  meilleur  moyen 
d'arriver  à  un  bon  résultat,  est  d'appeler  sur  ce  point 


262 

Tattention  du  sous-préfet  d'Yvetot.  L'administration 
locale  sera  heureuse  d^aiiirmer  sa  sollicitude  pour  ce 
monument  historique^  et  obtiendra  certainement  la 
reconstruction  de  Tescalier  demandé. 

Vitraux  des  chapelles  du  Cimetière  Saint^Maur, 
—  M.  Bouquet ,  après  s'être  excusé  de  son  absence, 
nous  adresse  quelques  notes  sur  quatre  vitraux  des 
chapelles  du  cimetière  Saint-Maur,  qui  décorent 
aujourd'hui  Téglise  Saint-Romain.  Décrits  dès  1827 
par  Licquet  dans  son  Précis  de  Vhistoire  de  Rouen, 
deux  de  ces  vitraux  se  voient  aux  fenêtres  les  plus  voi- 
sines du  portail;  ce  sont  la  Sainte  Famille  et  Sainte 
Geneviève  (dans  l'attitude  qu'a  reproduite  une  statue 
moderne  du  portail  des  Libraires  à  la  cathédrale]  ;  les 
deux  autres  (la  Transfiguration  et  V Histoire d"^ Adam], 
occupent  la  fenêtre  géminée  du  fond  de  Fabside  à 
gauche. 

M.  de  Beaurepaire  observe  que  ces  verrières,  aussi 
remarquables  par  le  dessin  que  par  le  coloris,  ont  été 
placées  à  Saint- Romain,  non  au  G>ncordat,  mais  seu- 
lement sous  la  Restauration. 

M.  Le  Breton  fait  passer  sous  les  yeux  de  la 
Commission  Tesquisse  de  nombreux  carrelages 
émaillés;  il  expose  en  détail  les  raisons  qui  lui  font 
reconnaître. dans  les  beaux  pavages  de  faïence  qu'on 
admire  à  Langres,  à  Palisy  et  au  colombier  de  Boos, 
la  main  d'Abaquesne,  Tillustre  artiste  rouennais.  Et  à 
ce  propos,  il  insiste  sur  la  persévérance  courageuse  que 
mit  la  fabrique  française,  vers  le  milieu  du  xvi*  siècle, 
à  maintenir  les  meilleures  traditions  de  Tart  national  ; 
et  cela  malgré  Tenvahissement  et  la  redoutable  concur- 
rence des  faïenciers  italiens. 

Cette  observation  a  d'autant  plus  d'importance  que 


263 

la  littérature  et  la  langue  subissent  la  même  influence 
dont  elles  ne  surent  pas  toujours  si  bien  se  défendre, 
témoin  les  dialogues  d'Henri  Estîenne  sur  le  langage 
français  italianisé, 

Cartulaire  de  r Hospice.  —  L'administration  des 
Hospices  ayant  jugé  à  propos  de  verser,  dans  les  ar- 
chives dépanementales,  la  partie  ancienne  de  ses  docu- 
ments administratifs,  M.  de  Beaurepaire communique 
à  la  Commission  un  cartulaire  de  PHospice-Général, 
rédigé  vers  1 554,  ^^^^  ^^  ^^^^  ^^^  ^^^^  d'une  fort  belle 
miniature,  intéressante  par  le  costume  et  par  quelques 
groupes  de  personnages. 

Chapelle  de  PHospice.  —  Cette  communication 
amène  le  même  membre  à  lire  le  mémoire  suivant  sur 
la  construction  de  la  chapelle  de  T  Hospice-Général  : 

La  première  chapelle  de  rHospice-Général  de  Rouen 
remonte  à  l'époque  où  Ton  prit  le  parti  de  renfermer  les 
pauvres,  auxquels  jusque-là  on  s^était  contenté  de  distri- 
buer des  aumônes.  Elle  fut  construite  en  i65i.  P'arin  nous 
apprend  que  ce  fut  à  la  Pentecôte  de  cette  année  qu'elle 
fut  bénite  sous  Tinvocation  de  Notre-Dame-de-la-Charité, 
dont  on  fit  la  fête  le  1 5  août,  jour  de  TAssomption.  L'his- 
torien de  Rouen  ajoute  :  «  11  y  a  aussi  des  indulgences 
plénières  et  les  prières  des  quarante  heures  le  jour  de  la 
Pentecôte  et  les  deux  jours  suivants  pour  remercier  Dieu 
de  cet  établissement.  Le  spirituel  y  est  exercé  par  les 
prestres  de  Saint-Vivien  ;  l'office  s'y  fait  comme  dans 
une  paroisse.  11  y  a  même  des  orgues.  > 

Les  comptes  de  l'Hospice  ne  nous  fournissent  aucuns 
renseignements  sur  cette  première  construction.  Nous  y 
voyons  seulement  qu'en  i652,  on  eut  à  payer  à  Etienne 
De  Neuville,  maître  sculpteur,  6o  s.  pour  avoir  gravé  et 
doré  une  pierre  de  marbre  noir  posée  aux  pieds  de  l'image 


264 

qui  surmontait  la  porte  de  la  chapelle  et  qui  avait  été  don- 
née par  M.  des  AUeurs,  conseiller  au  Parlement;  à  Nicolas 
Baudouin,  peintre,  40  1.  pour  avoir  peint,  dans  la  chapelle, 
le  dessous  de  la  grande  porte,  celle  d'à  côte,  le  jubé, 
etc. . .  ;  h  Guillaume  Liégeart,  maître  menuisier,  16I.  pour 
4  prie-dieu,  servant  de  confessionnaux  ;  à  Nicolas  Fabulet, 
autre  maître  menuisier,  1 5  1.  pour  avoir  raccommodé  la 
chaire  du  prédicateur  ;  à  Pierre  Le  Prompt,  6  1.  pour  bois 
de  chêne  sec,  par  lui  fourni  pour  faire  les  montants  de  cette 
chaire;  à  Delamare,' tapissier,  7  1.  i5  s.  pour  avoir  garni 
la  même  chaire,  et  fourni,  pour  cela,  du  roussy  et  du  clou 
doré,  nouvelle  preuve  de  Tusage  où  Ton  était  encore  de 
préférer,  pour  la  décoration  des  chaires  à  prêcher,  les 
tapisseries  aux  sculptures,  contrairement  à  ce  que  Ton  vit 
se  pratiquer  depuis.  Dans  le  compte  de  1654,  il  est  fait 
mention  d'un  crucifix  paye  40  1.  à  Jean  Racine,  maître 
sculpteur;  d'un  marbre  posé,  en  souvenir d*une  donation, 
dans  la  chapelle  et  payé  21  1.  2  s.  au  même  artiste;  de 
tapisseries  que  Ton  empruntait  pour  tendre  la  chapelle  et 
y  dresser  un  oratoire  au  Saint  Sacrement,  pendant  les  trois 
derniers  jours  de  la  semaine  sainte. 

Les  travaux  de  construction  de  cette  chapelle  furent 
entrepris  pendant  que  M.  Damiens,  conseiller  au  Parle- 
ment, était  chargé  de  l'administration  de  FHospice.  Il  est 
à  croire  qu'il  y  contribua  dans  une  large  mesure,  et  que 
ce  fut  une  extrême  modestie  qui  lui  fit  supprimer  toute 
constatation  officielle  de  ses  bienfaits. 

Il  eut  pour  successeur,  dans  cette  pénible  fonction,  M.  de 
la  Motte-Lambert  (i),  qui  devint  plus  tard  évêque  de 
Beryte.  Celui-ci  se  trouvant  à  Rome,  en  1657,  et  se  pré- 
parant déjà  aux  missions  les  plus  périlleuses  et  les  plus 

(i)  Pierre-Marie  Lambert,  sieur  de  la  Boissière  et  de  la  Motte, 
fils  de  Pierre  Lambert,  sieur  de  la  Motte,  vice-bailli d'Ëvreux,  et 
de  Catherine  Heudey  de  Pommainville  et  de  Bocquencey,  né  à  la 
Boissière,  le  28  janvier  1624,  nommé  le  17  mai  1646,  conseiller 
en  la  Cour  des  Aides  de  Rouen,  remplacé  en  juillet  i655. 


265 

lointaines,  se  souvînt  de  la  maison  où  il  avait  fait  l'appren- 
tissage des  œuvres  de  la  charité  :  il  obtint  du  pape  Alexan- 
dre VII  le  corps  entier  de  saint  Basilée,  martyr,  qu'il  s'em- 
pressa d'envoyer  à  l'Hospice  (2  mars  i658). 

Cette  chapelle  subsista  pendant  un  siècle  et  demi. 

On  y  voyait  un  certain  nombre  d'inscriptions  dont  le 
texte  a  été  donné  dans  V Histoire  de  Rouen, 

D'autres,  qui  y  furent  placées  postérieurement  aux  di- 
verses éditions  de  cette  Histoire^  nous  sont  connues  par 
les  copies  qu*on.  en  trouve  dans  les  archives  des  Hos- 
pices. Nous  en  citerons  ici  quelques  unes  (i). 

G.  B,  IHS.  MA,  G,  B. 

A  la  plus  grande  gloire  de  Dieu  la  messe  de  huit  heu' 
res,  qui  se  doit  dire  tous  les  jours  d  perpétuité  en  cette  cha- 
pelle,  a  été  fondée  par  M^  Gabriel  Bijet,  preshtre,  notaire 
apostolique  et  secrétaire  du  Chapitre  de  Péglise  cathé^ 
drale  de  Rouen,  dont  le  corps  repose  cy  dessous,  confor- 
mément au  contrat  passé  devant  les  tabellions  de  Rouen,  le 
2  avril  i6j7,  qui  est  décédé  le  16  février  1682^  âgé 
de  66  ans.  —  Passants,  prie^  Dieu  pour  le  repos  de  son 
âme  et  mette^  à  son  imitation  vos  richesses  en  dépôt  entre 
les  mains  des  pauvres  pour  les  reprendre  dans  l'éternité  {2). 

I.  M. 

Francisco  de  la  Haye-Auher, 
Presbit,  et  Senatori  Rothomagensi^ 

(i)  Un  instant,  après  la  révocation  de  l'Edit  de  Nantes,  on  eut 
l'idée  de  foire  rebâtir,  pour  l'usage  de  THôpital-Général,  le  tem* 
pie  de  Quevilly  dont  les  matériaux  avaient  été  donnés  aux  deux 
hôpitaux  de  Rouen;  mais  on  renonça  à  ce  projet  (10,  i3  juillet 
i685).  —  En  1790,  la  chapelle  de  THospice-Général  n'était  pas 
encore  détruite.  On  y  établit  un  dortoir  pour  les  enfants  par  déli« 
bérationdu  ig  mai  de  cette  année. 

(2)  «  Petit  tableau  autrefois  situé  au  côté  du  midi,  vis-à-vis  la 
chaire,  à  côté  des  orgues,  proche  le  jubé  des  femmes^  au-dessus 
d'une  grande  épitaphe.  >» 

l9 


266 

Cujus  nomen, 

In  his  œdibus  a  se  instauratis^ 

AuctiSy  instructis  per  annos  LX  V, 

Pie  et  féliciter  administratis, 

Sit  pro  elogioy 

Vero  pauperum  patri^ 

Hujus  xenodochii  curatores 

Grati  animi  monumentum 

Pos. 
^tatis  88  sœculi  8 1  (i). 

Epitaphe  rédigée  par  M.  Dornay  pour  la  tombe  de 
M.  Le  Brun,  avocat  au  Parlement,  ancien  conseiller  éche- 
vin,  administrateur  et  bien^iteur  de  l'Hospice. 

Hicjacet 
David  Robertus  Le  Brun, 
In  senatu  Rothomagensi  causarum  patronus, 

Urbis  ejus  exœdilis, 

Hujus  publicœ  pauperum  domus  administrât  or  y 

Vir  integer,  civis  optimus,  egenorum 

Amicus 
Et  pater, 
%,  QMisqU^,es, 

ProbuSy  cinsr,  egenus 

Luge 

Et  ora. 

Obiit  die  XXII  februarii  anno  Domini 

MDCCLXXL 

A  part  ces  inscriptions  je  ne  vois  rien  à  signaler  dans 
rancienne  chapelle  deTHospice;  elle  n'était  guère  fréquen- 
tée que  par  les  pauvres  de  cet  établissement,  et  par  quel- 
ques personnes  qui  y  venaient  pour  la  procession  de  saint 

(i)  «  Petit  tableau  de  cette  epitaphe  soutenu  par  deux  figures 
d'anges  entre  la  fenêtre  et  le  jubé,  proche  la  porte  de  la  rue, 
côté  du  nord.  » 


267 

Barnabe  (i),  ou  le  jour  de  la  fête  patronale  et  pendant  la 
semaine  sainte. 

Non  seulement  elle  était  devenue  insuffisante  pour  le 
service  auquel  elle  était  affectée,  mais  elle  manquait  de 
solidité.  C'est  ce  que  constatèrent  Charles  Thibault,  Pierre- 
Amand  Quinei  de  la  Poterie  et  François  Le  Queux,  archi- 
tectes experts- jurés  du  Roi  pour  le  bailliage  de  Rouen  et 
pour  tout  le  ressort  du  Parlement  de  Normandie.  Ils  dé- 
clarèrent, à  la  suite  de  la  visite  qu'ils  en  firent,  le  29  avril 
1 776,  qu'il  était  indispensable  et  même  urgent  d'entre- 
prendre une  nouvelle  construction. 

Les  conseillers  et  les  notables  de  la  ville  s'assemblèrent 
plusieurs  fois  dans  la  grande  salle  du  Palais  sous  la  prési- 
dence du  premier  président  du  Parlement,  pour  aviser  aux 
moyens  de  se  procurer  les  fonds  nécessaires  pour  cet 
important  travail.  On  adopta  les  plans  de  Tarchitecte  Vau- 
quelin,  et  l'on  décida  que  l'entrée  de  la  nouvelle  église 
ferait  face  au  boulevard  Martainville,  qu'on  avait  à  cœur 
de  décorer  comme  étant  le  commencement  de  la  route 
royale  de  Picardie.  On  décida  encore  que  l'on  demande- 
rait au  Roi  la  permission  de  Êiire  un  emprunt  de  60,000 1. 
en  constitution  de  rentes  perpétuelles,  viagères  ou  autres. 
Construction  et  emprunt  furent  autorisés  par  arrêt  du 
Conseil  du  19  août  1783  et  par  lettres-patentes  du  26  sep- 
tembre suivant. 

D'après  le  devis,  qui  fut  imprimé  dans  le  temps,  l'entre- 
preneur fut  astreint  à  employer,  pour  les  murs,*  des  briques 
de  Tosny  ou  d'autre  lieu  ;  pour  les  fondations,  des  pierres 
de  libage  extraites  des  carrières  de  Caumont;  pour  les 
autres  parties  de  la  bâtisse,  des  pierres  de  Vergelé,  de 
Saint- Leu,  deTrossy  ou  de  Conflans. 

A  l'intérieur,  on  devait  élever  des  étages  de  tribunes 
dans  tout  le  pourtour  de  l'église.  Ces  tribunes  devaient 
être  supportées  par  un  ordre  de  colonnes  doriques  de  deux 

(i  )  Cette  procession  ne  fut  supprimée  qu*en  1 790, 


268 

pieds  de  diamètre  posées  à  cru  sur  le  pavé  de  la  nef.  Cet 
ordre  devait  être  terminé  par  une  architrave  au-dessus  de 
laquelle  s'élèverait  un  socle  continu  avec  des  balustrades 
répondant  aux  entre-colonnes.  Qe  socle  porterait  un  second 
ordre  de  colonnes  ioniques,  terminées  par  un  enta- 
blement. Le  tout  composerait  à  peu  près  Sg  pieds  de  hau- 
teur depuis  le  pavé  jusqu'au  dessus  de  Tentablement.  Les 
murs  extérieurs  et  le  portail  auraient  48  pieds  6  pouces  de 
hauteur,  depuis  le  bas  de  la  retraite  jusqu'au  dessus  deTen- 
tablement.  L'édifice  aurait  à  peu  près  160  pieds  de  lon- 
gueur, y  compris  le  portail  et  les  cages  des  escaliers,  sur  1 6 
pieds  6  pouces  de  largeur  hors  œuvre. 

Ce  devis  fournit  la  description  la  plus  exacte  et  la  plus 
détaillée  du  monument  tel  que  nous  le  voyons  actuelle- 
ment. 

Le  fronton  devait  être  orné  d'une  croix  accompagnée 
de  deux  anges  et  surmontée  de  ces  trois  lettres  emprun- 
tées à  l'antiquité  classique,  et  que  les  jésuites  avaient 
mises  à  la  mode,  D.  O.  M. 

JaddouUe,  ami  de  Vauquelin,  fut  chargé  de  ce  travail  de 
sculpture  dont  il  ne  reste  plus  de  traces.  Il  fut  supprimé  à 
la  Révolution  et  n'a  jamais  été  rétabli. 

Lorsqu'on  avait  abordé  la  construction  de  la  chapelle, 
l'architecte  avait  rencontré  des  difficultés  sur  lesquelles  il 
n'avait  pas  compté  et  qui  tenaient  à  la  mauvaise  qualité 
du  sol.  Les  tranchées  ouvertes,  on  trouva,  à  plus  de  5 
pieds  de  profondeur,  deux  cuves  de  tanneur,  deux  anciens 
aqueducs  et  les  fondements  d'un  mur  de  ville  bâti  sur 
pilotis.  Ce  fut  une  leçon  pour  l'architecte,  qui  se  crut  dans 
l'obligation  de  donner  3  pieds  de  plus  de  profondeur  aux 
fondations  de  l'édifice.  Il  en  résulta  un  excédant  de  dé- 
penses considérable.  On  avait  prévu  une  somme  de 
1 5o,ooo  1.  et  l'on  arrivait  à  celle  de  344,057,  qu'on  essaya 
de  se  procurer  au  moyen  de  l'emprunt  autorisé  de  60,000 1., 
dépareille  somme  accordée  par  l'Intendant  sur  l'Octroi  des 
marchands,  des  aumônes  de  Mgr  de  la  Rochefoucauld,  de 


269 

la  Chambre  du  clergé  et  de  plusieurs  personnes  charita- 
bles. On  convint  de  donner  à  Vauquelin  pour  ses  hono- 
raires 8,5ool.  (i) 

La  première  pierre  fut  posée  en  1785.  Voici  le  texte  de 
rinscription,  gravée  sur  cuivre,  destinée  à  conserver  le 
souvenir  de  cette  cérémonie. 

ARMOIRIES  DU  CARDINAL  DE  LA  ROCHEFOUCAULD 

Z).  O.  M. 

Régnante  Ludovico  X  VL 

Hoc  Nosocomii  Generalis  Templum 

Erexit  Civitas  Rothomagensis 

Rem  Pietaie  Coluit 

Auctoritate  Promovit 

Munificentia  Maturavit 

Votisque  Administratorum  Favens 

Primum  Posuit  Lapident 

Eminentissimus  DD,  Dominicus  de  Rupefucaîdi 

Sancta  Romana  Ecclesia  Cardinalis 

Archiepiscopus  Sedis  Rothomagensis 

Primas  Normanniœ 

Totius  Ordinis  Cluniacensis  Ahhas  Et  Superior  Generalis 

Ordinis  Sancti  Spiritus  Commendator 

Administrator  Princeps  Ejusdem  Nosocomii 

Cujus  Bonum  Impiger 

Studio  Consiliis  Donis 

(i)  Les  adjudicataires  furent  :  Rabardy^  pour  la  maçonnerie, 
Dupont,  pour  la  charpente.  Le  sieur  Lamine  fut  chargé  de  faire 
les  chapiteaux  des  colonnes.  On  lui  paya  pour  ce  travail  1,280  I. 
18  juin  X788.  La  Révolution,  en  diminuant  notablement  les  res- 
sources de  THospice,  mit  les  administrateurs  dans  l'impossibilité 
de  payer  les  adjudicataires  et  les  fournisseurs.  Le  23  novembre 
1790^  on  ne  pouvoit  ofirir  à  Vauquelin,  auquel  on  restait  rede- 
vable de  21,525  1.,  qu'un  à-compte  de  3oo  1.  Le  14  décembre 
1791,  on  devait  encore  3 1,886  1.  Le  18  avril  1792,  la  veuve  de 
Dupont,  décédé  antérieurement  au  7  mai  1788,  réclamait,  sans 
pouvoir  l'obtenir,  le  paiement  de  1,000  1.  dues  à  son  mari. 


270 

Pro  Genii  Beneficentia  Fovît  Et  Nutrivit 

Anno  Salutis  M.  DCC.  LXXXV. 
Architecto  Bernardo  Vauquelin  Rothomagœo 

Cette  chapelle  ne  fut  achevée  qu'en  1 790.  La  bénédic- 
tion s'en  fit  le  25  mars,  jour  de  Tlncarnation  de  N.  S.,  sur 
les 4  heures  de  Taprès-midi,  par  M.  l'abbé  Papillault,  cha- 
noine, administrateur  de  l'Hospice,  délégué  par  l'arche- 
vêque, qui  était  retenu  à  Paris  par  les  travaux  de  l'Assem- 
blée nationale. 

On  y  logea  les  3  cloches  des  Cèles  tins,  que  Ton  avait 
achetées,  le  10  novembre  1784,  i,o5o  1. 

On  y  posa  une  inscription  gravée  sur  plaque  de  cuivre 
ainsi  conçue  : 

Pour  perpétuelle  mémoire  des  dons  et  bienfaits  répétés 

De  Messire  Jacques-Christophe  de  Germont 

Conseiller  clerc  en  la  grand  chambre  du  Parlement  de 

Normandie  au  profit  de  cet  Hôpital  et  singulièrement 

Des  enfants  exposés. 
Du   25  février    ij63. 

f  Par  délibération  du  bureau  d'administration,  sur  le 
rapport  de  ses  dernières  dispositions,  il  a  été  arresté  de 
s'occuper  du  soin  de  remplir  son  intention  en  formant,  s'il 
est  possible,  l'établissement  qu'il  s'est  proposé  pour  élever 
les  enfants  trouvés,  lors  duquel  il  sera  pris  les  mesures 
nécessaires  pour  conserver  et  perpétuer  la  mémoire  et 
reconnaissance,  tant  de  ce  qu'il  a  aumône  en  vue  d'icelui, 
que  de  ses  autres  bienfaits. 

€  Et,  en  attendant,  qu'il  sera  célébré  dans  cette  église  un 
service  solennel,  auquel  tous  les  pauvres  assisteront  égale- 
ment, lequel  service  sera  répété  à  perpétuité  le  24  février, 
jour  de  son  décès. 

«  Que  les  enfants  et  singulièrement  ceux  exposés,  qui 
ont  été  l'objet  de  sa  charité,  réciteront  chaque  jour  le 
pseaume  De  Profundis  à  son  intention. 

c  Que,  quoi  qu'il  n'ait  été  demandé  pour  son  inhuma- 


17^ 

tion  que  quatre  écoles,  tous  les  enfants  y  seront  envoyés. 
€  Et  que  pour  témoignage  public  tant  de  ses  bienâtits 
que  de  la  gratitude,  la   présente  inscription  seroit  ici 
placée  : 

Pauvres^   renfermés  dans  V Hôpital^ 

Et  Fidèles  qui  visite^  cette  Eglise^ 

Priej  Dieu  pour  le  repos   de  son  âme. 

Pour  perpétuelle  mémoire 

Des  dons  et  bienfaits 

De  Messire  Jacques-Christophe  de  Germonty 

Conseiller  clerc  en  la  grande  Chambre  du  Parlement 

De  Normandie. 

«  Cet  établissement,  envisagé  depuis  longtemps  néces- 
saire pour  la  conservation  des  enfants  trouvés,  n'est  devenu 
possible  que  par  les  libéralités  de  ce  Père  des  Pauvres. 

c  Mais  en  s'occupant  de  remplir  ses  intentions,  il  a  été 
indispensable,  l'Hôpital  ne  pouvant  suppléer  à  la  dépense, 
de  se  réduire,  par  forme  d'essai  au  nombre  entretenu  de 
trente  en^nts,  en  attendant  que  la  Providence  le  mette  en 
état,  par  les  aumônes  des  fidèles,  de  subvenir  à  tous. 

c  Lecteurs  qui  applaudissez  à  une  œuvre  aussi  chari- 
table que  patriotique,  contribuez  à  son  exécution.  » 

On  mit  rinscription  suivante  sur  la  tombe  du  chirur- 
gien Leschevin  : 

Cygît 

Jean^Baptiste-André 

Leschevin, 

Chirurgien  émérite  de  cet  Hôpital, 

Autant  estimé  pour  ses  vertus 

Que  regretté  pour  ses  rares  talents. 

Il  cessa  de  vivre 

Le  huit  mars  1788^ 

Agé  de  SS  ans  8  mois, 

Après  avoir  employé  32  ans 

Au  soulagement  des  pauvres 

De  cette  maison. 


272 

Qtte  son  âme  repose  en  paix(\). 

A  peine  construite,  cette  église  fut  enlevée  au  culte  (2). 
Elle  servit  pendant  plusieurs  années  à  des  usages  profanes. 
Elle  fut  rendue  à  sa  destination  après  le  Concordat,  et 
Ton  prit  soin  d*y  rétablir,  en  vertu  d*une  délibération  du 
2  juillet  1806,  tout  ce  qui  pouvait  conserver  le  souvenir 
des  actes  de  bienfaisance  qui  avaient  eu  lieu,  et  pour  cela 
de  remettre  à  leur  place  les  inscriptions  sur  marbre  et  sur 
cuivre  qui  n'avaient  pas  été  détruites. 

Je  n'ai  pas  à  apprécier  le  mérite  architectural  de  la  cha- 
pelle de  r Hospice.  On  ne  saurait  nier  que  l'extérieur  ne 
présente  un  aspect  peu  avantageux;  mais  l'intérieur  ne 
manque  ni  d'élégance,  ni  de  majesté,  et  l'on  s'explique, 
jusqu'à  un  certain  point,  qu'il  ait  excité  l'admiration  des 
contemporains  de  Vauquelin,  qui  a  laissé,  du  reste,  la 
réputation  d'un  habile  architecte. 

Tel  qu'il  est,  il  est  précieux  pour  la  ville  de  Rouen, 
comme  un  type  unique,  dans  ce  pays,  de  l'architecture 
religieuse  à  une  époque  où  les  préjugés  gothiques,  comme 
on  disait,  n'entravaient  plus  l'essor  du  talent.  Il  rentre 
dans  la  classe,  non  pas  des  monuments  remarquables,  mais 
des  monuments  curieux. 

Malheureusement,  bien  qu'il  n'ait  guère  dépassé  l'âge  de 
l'homme,  il  est  décrépit  comme  un  édifice  antique,  et  il  y 
aurait  presque  heu  d'en  réclamer  le  classement  parmi  les 
monuments  historiques,  si  l'on  ne  s'était  fiait  une  loi  de 
s'arrêter  à  l'époque  de  la  Révolution. 

(i)  Cette  inscription  fut  posée  en  vertu  d'une  délibération  de 
radministration,  du  3o  juillet  1788. 

(2)  Dès  le  28  mars  1790^  on  avait  défendu  de  tenir  Téglise, 
ainsi  que  les  portes  et  barrières  extérieures  de  Thospice,  ouvertes 
pour  le  public  pendant  la  quinzaine  de  Pâques.  On  s'était  aper- 
çu qu'on  s'y  portait  pour  éviter  toutes  relations  avec  les  prêtres 
constitutionnels  des  paroisses.  —  Le  14  mars  1792,  l'aumônier  du 
régiment  suisse  de  Salis-Samade  obtint  la  permission  d'y  faire 
des  instructions  aux  soldats. 


273 

Incendie  de  F  Eglise  de  Saint-Saens.  —  M.  Bouc- 
tot  rappelant  en  peu  de  mots  le  désastreux  incendie  que 
la  foudre  a  allumé  dans  Téglise  de  Saint-Saens,  le  lo 
de  ce  mois,  constate  q'ie  cette  catastrophe  est  en  plu- 
sieurs points  toute  semblable  à  la  destruction  de  la 
flèche  delà  Cathédrale  en  1822.  Le  feu,  en  effet,  y  a 
couvé  quelque  temps  au  sommet  du  clocher;  puis, 
ayant  atteint  de  nombreux  nids  de  corneilles,  il  en  a 
rapidement  envahi  toutes  les  autres  parties;  enfin 
la  flèche  consumée  ne  s'est  pas  affaissée  sur  elle- 
même  :  mais  elle  est  allée  tomber  à  quelque  distance 
delà. 

Le  clocher  seul  a  profondément  souffert  de  Tin- 
cendie  :  et  encore  M.  Bouctot  se  demande  si  les  assises 
inférieures  nbnt  pas  assez  bien  résisté  au  fiéau  pour 
être  conservées.  Néanmoins  on  ne  songe  qu'à  rebâtir 
une  église  entièrement  neuve.  Tel  était  depuis  long- 
temps le  vœu  de  toute  la  population  de  Saint-Saens. 
C'est  que  Tédifice  actuel  est  d'un  aspect  peu  agréable, 
et  n'avait  d'intéressant  que  son  clocher  et  les  curieux 
vitraux  que  le  feu  n'a  point  endommagés. 

Quelques  membres  se  préoccupent  de  la  conserva- 
tion de  ces  vitraux.  On  ne  doit  avoir  nulle  crainte  à 
leur  sujet,  puisqu'ils  sont  classés  comme  monuments 
historiques.  S'ils  demeurent  sans  emploi  à  Saint- 
Saens,  ils  entreront  de  droit  au  musée  départemental. 

Plusieurs  de  nos  collègues  réprouvent  l'idée  d'une 
reconstruction,  d'un  goût  douteux,  telle  que  la  muni- 
cipalité peut  rencontrer  des  types  assez  maussades  en 
Flandre.  M.  G.  Le  Breton  rappelle  que  l'église  incen- 
diée possède  des  colonnettes  d'un  très  beau  style 
dont  on  pourrait  s'inspirer  pour  le  futur  sanctuaire. 
Cette  idée  est  parfaitement  accueillie.  Du  reste,  la 


274 

générosité  des  habitants  peut  faire  espérer  un  bel  édifice 
qui  soit  Pornement  de  leur  bourg. 

M.  de  la  Serre  offre  à  la  Commission  un  excellent 
croquis,  qu'il  a  pris  lui-même  il  y  a  quelques  années, 
de  l'ancien  clocher  de  Saint-Saens,  dont  il  rendrait 
possible  la  reproduction.  M.  le  Président  souhaite 
qu'une  gravure  de  Ce  dessin  figure  dans  le  prochain 
Bulletin^  ne  fût-ce  que  pour  rendre  intelligible  cet 
antique  rébus  :  5o5  clochers,  400  cloches  [c'est-k' 
dire  :  A  Saint-Saens,  il  y  a  cinq  clochers  dont  quatre 
sans  cloches) . 

Dragages  de  la  Seine  à  Rouen,  —  M.  Maillet  du 
Boullay  présente  à  la  Commision  diverses  antiquités 
qui  ont  été  gracieusement  offertes  au  Département  par 
MM.  Lavoinne,  ingénieur  en  chef,  et  Juncker,  ingé- 
nieur ordinaire  des  ponts  et  chaussées.  Elles  sont 
sorties  des  dragages  exécutés  dans  la  Seine  en  face  de 
l'île  Méru.  C'est  d'abord  une  grande  épée  mérovin- 
gienne en  fer,  trouvée  la  veille,  toute  semblable  à  celle 
que  les  fouilles  d'Envermeu  révélèrent  à  Tabbé  Cochet  ; 
une  autre  épée  espagnole,  d'une  conservation  parfaite, 
est  attribuée  au  xvi«  siècle.  L'envoi  se  complète  par  deux 
monnaies  :  un  double  écu  de  Louis  XVI  et  une  pièce 
en  or  de  17 14. 

Dragages  à  OisseL  —  Une  note  de  notre  confrère, 
M.  de  Vesly,  nous  informe  que  des  débris  antiques, 
de  toute  sorte,  continuent  à  être  arrachés  au  lit  de  la 
Seine  à  Oissel,  entre  autres  des  armes. 

Couvent  des  Emmurées.  —  M.  P.  Baudry  appelle 
l'attention  sur  quelques  statues,  des  sculptures  et  une 
inscription  qui  restent  peut-être  encore  dans  le  cloître 


275 

et  les  autres  dépendances  des  Emmurées^  si  elles  ne 
sont  point  entrées  dans  les  collections  de  quelques 
personnes  parfaitement  à  même  de  les  recueillir.  On 
objecte  qu^il  serait  peut-être  assez  difficile  d'assurer 
régulièrement  la  conservation  de  ces  objets,  dont  le 
génie  militaire  est  aujourd'hui  possesseur;  M.  Pelay 
remarque  au  surplus  que  deux  des  statues  signalées 
par  notre  collègue  sont  aujourd'hui  décapitées. . 

Prieuré  de  SainULô.  —  M.  Maillet  du  BouUay 
an  nonce  qu'il  vient  d'obtenir  de  M.  le  Maire  de  Rouen 
la  porte  de  l'ancienne  école  normale  de  Saint-Lô,  et 
une  pierre  chargée  d'inscriptions.  Seulement  l'entre- 
preneur a  demandé  qu'on  l'autorisât  à  ne  délivrer 
cette  porte  que  lorsqu'il  le  pourrait  faire  sans  incon- 
vénient. 

Hénouville.  —  M.  Félix,  en  regrettant  la  démolition 
du  château  du  Bellay,  estime  que  quelques  détails 
encore  debout  seraient  très  dignes  d'être  photographiés, 
notamment  un  joli  pavillon  du  temps  de  Louis  XIII. 
Il  serait  même  facile  de  sauver  du  marteau  des  ouvriers 
un  bel  épi  en  plomb.  Une  notice  sur  ce  château,  due 
à  la  plume  de  M.  l'abbé  Faye,  alors  curé  d'Hénouville, 
a  paru  dans  la  Revue  de  la  Normandie^  en  février 
1867. 

M.  le  Président  ajoute  qu'un  souvenir  littéraire  se 
rattache  à  ce  château  par  l'un  de  ses  possesseurs,  l'abbé 
Du  Resnel,  poète  et  traducteur^  membre  de  P  Académie 
fran(;aise  et  de  l'Académie  des  Inscriptions. 

Tableaux  de  la  chapelle  Saint-Yon.  —  Plusieurs 
tableaux  dus  à  Saintigny,  se  détériorent  dans  la  cha- 
pelle Saint-Yon,  qui  n'est  plus  aujourd'hui  affectée  au 


276 

culte.  M.  Félix  demande  qu^il  soit  pris  des  mesures 
pour  leur  préservation. 

M.  de  Beaurepaire  répond  qu'il  n'est  rien  de  plus 
aisé,  attendu  que  ces  tableaux,  quoi  qu^on  ait  pu  dire, 
appartiennent  certainement  à  la  ville  de  Rouen,  qui 
peut  en  disposer  à  son  gré  :  c'est  donc  près  de  Padmi- 
nistration  municipale  que  des  démarches  doivent  être 
tentées. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

A.  TOUGARD. 


277 


SÉANCE  DU  20  OCTOBRE  i883. 

La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence 
de  M.  de  Beaurepaire. 

Etaient  présents  :  MM.  P.  Baudry,  Billiard,  Bouctot, 
Bouquet,  de  Girancourt,  G.  Le  Breton,  Tabbé  Loth, 
de  Merval,  Pelay,  de  la  Serre,  Rœssler  et  l'abbé  Tou- 
gard,  secrétaire  par  intérim. 

Se  sontexcusés  :  MM.  Brianchon,  Maillet  du  BouUay 
et  Simon. 

La  correspondance  imprimée  comprend  :  Bulletin 
du  Comité  des  travaux  historiques,  i883,  i«rfasc.; — 
Bulletin  des  Antiquaires  de  Picardie,  1882;  — 
Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  VOrléanais, 
no  1 16  ;  —  Bulletin  de  la  Société  des  Antiquaires  de 
V  Ouest,  i883,  i^f  fasc.  ;  —  Recueil  de  la  Société  ar- 
chéologique du  département  de  Constant ine,  vol.  32  ; 

—  Bulletin  de  la  Société  de  r Orléanais,  vol.  19; 

—  Congrès  archéologique  de  France^  session  de 
1 88 1  ;  —  Bulletin  de  la  Commission  départementale 
des  Antiquités  du  Pas-de-Calais,  24e  fasc,  1879- 
i883. 

La  Commission  des  Antiquaires  de  l'Oise  a  annoncé 
renvoi  de  son  Bulletin,  en  demandant  l'échange. 
M.  le  Président  n'a  encore  rien  reçu,  mais  a  fait  envoyer 
la  collection  de  nos  Bulletins,  même  avec  nos  Procès- 
Verbaux. 

M.  le  Ministre  de  l'Instruction  publique  a  adressé  à 
la  Commission  le  programme  de  la  réunion  des  Sociétés 
savantes  à  la  Sorbonne  pour  1 884,  avec  le  discours 
qu'il  a  prononcé  dans  la  même  réunion  en  i883. 


278 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  (20  juin)  est 
adopté  après  quelques  observations. 

Eglise  de  Saint-Saens.  —  Ce  qui  vient  d'en  être  dit 
dans  ce  procès- verbal  amène  M.  G.  Le  Breton  à  en 
parler  de  nouveau  à  la  Commission.  Notre  collègue  se 
fait  un  devoir  de  protester  encore  contre  une  recons- 
truction totale  de  l'édifice.  Diverses  parties  de  ce  que 
le  feu  a  épargné  lui  semblent  très  dignes  d'intérêt. 
Une  restauration  lui  paraît  bien  préférable,  d'autant 
qu'elle  ne  peut  manquer  d'être  satisfaisante,  puisqu'elle 
est  confiée  à  notre  collègue,  M.  Lefort. 

Ces  observations  sont  appuyées  par  M.  Bouctot  et 
par  M.  Pelay.  Mais  ce  dernier  membre  demande  si  la 
Commission  a  le  droit  de  s'opposer  aux  projets  des  ad- 
ministrations locales.  On  répond  négativement.  D'ail- 
leurs la  reconstruction  est  depuis  longtemps  désirée 
par  la  population  du  bourg,  qui  n'avait  guère  de  sym- 
pathies pour  la  vieille  église,  et  trouve  de  plus,  dans  un 
déplacement  partiel  de  l'église,  l'avantage  très  apprécié 
d'agrandir  la  place  du  marché. 

M.  le  Président  remarque  enfin  que  le  travail  étant 
aux  mains  de  M.  Lefort,  il  sera  facile  d'obtenir  qu'il 
vienne  nous  donner,  à  une  prochaine  séance,  toutes  les 
explications  désirables.  Alors  la  Commission  pourra, 
en  connaissance  de  cause,  émettre  un  vœu  sur  ce  qu'il 
convient  de  faire,  seule  démarche  qui  soit  dans  ses 
attributions.  La  Commission  se  rallie  unanimement  à 
cet  avis. 

Château  d'Hénouville,  —  M.  de  la  Serre  offre  à  la 
Commission  un  croquis  du  château  d'Hénouville, 
mentionné  dans  la  précédente  séance.  M.  le  Président 
l'en  remercie.  Ce  dessin  enrichira  les  cartons  de  la 


279 

Commission,  et  pourra  peut-être  figurer  au  Bulletin, 

Rouen.  Arcades  romanes.  —  MM.  Pelay  et  P.  Bau- 
dry  ont  remarqué,  ainsi  que  M.  de  Beaurepaire,  des 
arcades  romanes,  voisines  de  Téglise  Saint-Maclou. 
Elles  ont  dû  faire  partie  d^un  édifice  considérable,  mais 
d'une  affectation  inconnue. 

Préfecture.  —  En  creusant  le  sol  au  N.-O.  du  bâti- 
ment des  Archives,  les  maçons  ont  rencontré  une 
importante  muraille,  que  M.  de  Beaurepaire  signale 
comme  un  reste  des  remparts. 

M.  l'abbé  Tougard  fait  les  communications  sui- 
vantes : 

Saint^Aubin-lès-Elheuf.  —  Découvertes  archéologiques. 
—  Par  une  lettre  adressée  le  9  juillet  dernier  à  M.  Tabbé 
Tougard,  M.  Albert  Marguery,  attaché  au  service  des 
Ponts  et  Chaussées,  informe  notre  collègue  que  les  travaux 
de  construction  des  écluses  de  Saint-Aubin-jouxte-Boul- 
leng  n*ont  amené  que  la  découverte  d'une  petite  meule 
romaine  et  d'un  chesneau  en  pierre.  Les  excavations 
atteignent  cependant  jusqu'à  la  craie,  c'est-à-dire  qu'elles 
descendent  jusqu'à  une  profondeur  d'environ  neuf  mètres 
sous  l'eau. 

Un  tel  résultat,  peu  intéressant  par  lui-même,  prouve 
du  moins  que  les  parages  de  Saint- Aubin  et  Elbeuf  furent 
anciennement  beaucoup  moins  fréquentés  par  Thomme, 
que  ceux  d'Orival  et  Oissel.  Leur  position  stratégique 
suffirait  peut-être  à  expliquer  cette  différence. 

M.  Marguery  se  fera  un  plaisir  d'informer  la  Commission 
des  découvertes  notables  qu'il  lui  sera  donné  de  faire. 

Val-de^la-Haye.  —  Monnaie  romaine.  —  M.  l'abbé 
Lesourda  recueilli,  le  24  août  dernier,  au  Val-de-la-Haye, 
un  Postumus  bien  conservé. 

Double  mesure.  —  Sur  la  demande  de  notre  zélé  collègue, 


28o 

M.  Brianchon,  un  habitant  du  Val-de-la- Haye,  M.  Fro- 
mentin, a  offert  au  musée  des  Antiquités  (i^^  septembre) 
une  double  mesure  en  pierre,  qui  est  Tun  des  plus  beaux 
spécimens  de  la  riche  collection  départementale  de  petits 
monuments  analogues.  Le  cordon  sculpté  qui  sépare  les 
deux  mesures  donne  à  penser  que  Tobjet  remonte  à  Tépoque 
romane. 

Quant  à  sa  provenance,  les  renseignements  fournis  par 
le  donateur  permettent  de  supposer  que  cette  mesure  fit 
jadis  partie  du  mobilier  de  la  magnifique  grange  dîmeresse 
de  la  commanderie  de  Sainte- Vaubourg,  qui  demeure,  en 
ce  genre,  Tun  des  types  les  plus  intéressants  de  la  Seine- 
Inférieure. 

Notes  diverses.  —  M.  le  Président  groupe  ensuite 
un  certain  nombre  de  notes  historiques  et  archéolo- 
giques sur  divers  points  du  département. 

NOTES   ARCHÉOLOGIQUES  EXTRAITES  DES  ARCHIVES  DES 
OFFICIALITÉS  DE  FÉCAMP  ET  DE  MONTIVILLIERS. 

En  classant,  pour  en  faire  l'inventaire,  les  documents 
provenant  des  officialités  de  Fécamp  et  de  Montivilliers, 
déposés  actuellement  aux  Archives  départementales,  j^ai 
relevé  quelques  notes  qui  m'ont  paru  présenter  un  certain 
intérêt  archéologique. 

Je  ne  ferai  guère  que  les  rapporter,  sans  trop  me  préoc- 
cuper d'établir  entre  elles  des  transitions  qui  seraient  peut- 
être  forcées,  et  qui,  d'ailleurs,  ne  sont  pas  indispensables. 

Toussaint  Varin,  Augustin  de  Rouen  et  évêque  de 
Thessalonique,  fut  appelé  à  bénir,  le  26  mai  iSoj,  l'autel 
de  N.-D.  en  l'église  de  Veules  ;le  lendemain,  les  autels  de 
Saint-Nicolas  et  de  Sainte- Barbe  dans  la  nef  de  l'église 
d'Ingouville,  et  un  autre  autel,  en  l'honneur  de  saint  Va- 
neng  et  de  sainte  Eulalie,  dans  l'église  de  l'abbaye  de 
Fécamp,  près  de  la  chapelle  in  qua  monstratur  sanguis 
Christi.  Le  dernier  mai  de  la  même  année,  on  le  voit 


28l 

dédier  Téglise  de  Saint-Étienne  de  Fécamp,  aujourd'hui 
classée  parmi  nos  monuments  historiques.  M.  Tabbé 
Cochet,  s'en  rapportant  sur  ce  point  au  Gallia  Christiana, 
fait  honneur  de  la  construction  de  cet  édifice  à  un  person- 
nage  bien  connu  parmi  nous  par  son  goût  éclairé  pour  les 
arts,  Antoine  Bohier.  Si  cette  assertion  était  fondée,  il 
ÊEiudrait  convenir  que  les  travaux  auraient  été  menés  avec 
une  rapidité  surprenante,  puisque,  par  suite  du  procès 
qu'il  dut  soutenir  contre  dom  Le  Roux,  nommé  abbé  par 
les  religieux,  Bohier  ne  put  prendre  possession  de  Tabbaye 
de  Fécamp  qu'en  1 5o6,  bien  qu'il  eût  été  nommé,  par  le 
Roi,  abbé  commendataire,  l'année  précédente.  Il  est  dou- 
teux qu'il  ait  longtemps  séjourné  dans  ce  monastère.  Le 
i8  septembre  1 5i2,  on  y  constate  sa  présence,  par  la  béné- 
diction qu'il  y  fit  des  autels  de  N.-D.  ad  Virgines  et  de 
Saint- J  ean-  Baptiste . 

Le  Répertoire  archéologique  de  la  Seine-Inférieure  attri- 
bue à  un  nommé  Robert  Chardon  la  composition  d'un 
admirable  groupe  de  pierre,  le  Trépas  de  la  Vierge^  qu'on 
voit  encore  dans  l'église  de  Fécamp.  L'artiste,  à  supposer 
qu'on  n'ait  pas  pris  pour  son  nom  celui  d'un  donateur, 
pourrait  bien  n'être  autre  que  le  compilateur  d'un  recueil 
d'actes  à  l'usage  du  secrétaire  de  l'abbaye,  Stylus  pro 
secretariOf  où  nous  lisons,  au  premier  feuillet,  cette  étrange 
signature  : 

«  Celuy  qui  fit  de  sa  char  don 
Veuille  saulver  Robert  Chardon, 
Non  pas  chardon,  qui  drap  chardonne, 
Mais  dom  Robert,  qui  sa  char  donne  ; 
Car  mieulx  sçavoit  la  char  donner, 
Que  de  chardon  drap  chardonner.  » 

Ne  faudrait-il  pas  conclure  de  ces  rimes  que  Robert 
Chardon  était  pitancier  de  l'abbaye  de  Fécamp?  Quoi  qu'il 
en  soit,  il  nous  en  coûterait  moins  de  lui  supposer  le  talent 
d'un  artiste  que  celui  d'un  poète,  même  médiocre. 

Passant  de  Fécamp  à   Montivilliers,  constatons  tout 

'9 


282 

d'abord  que  Téglise  principale  de  cette  dernière  ville, 
Saint-Sauveur,  était  à  la  fois  conventuelle  et  paroissiale. 
Par  Teffet  de  cette  circonstance,  il  y  eut  toujours,  dans 
cette  église,  deux  intérêts  en  présence,  celui  des  religieuses 
et  celui  des  paroissiens  et  de  leur  curé.  Quatre  commu- 
nautés à  Rouen  :  Saint-Amand,  Saint-Lô,  Saint-Ouen, 
Saint-Paul,  avaient  connu,  dans  des  temps  plus  recules, 
cette  situation  embarrassante.  Elles  avaient  fini  par  s'y 
soustraire,  en  faisant  construire,  non  sans  de  grands  frais, 
à  côté  des  églises  primitives,  qui  redevinrent  exclusivement 
conventuelles,  d'autres  églises  qui  furent  mises  à  la  dispo- 
sition des  paroissiens.  Il  en  fut  autrement  à  Montivilliers, 
où  l'opposition  d^intéréts  ne  cessa  d'amener  de  fâcheux 
conflits  à  propos  de  tout  :  heures  des  offices,  portes, 
cloches,  bancs  et  sépultures. 

Pour  ce  dernier  objet,  cependant,  un  arrêt  de  l'Echi- 
quier avait  réglé  d'assez  bonne  heure,  ainsi  qu'il  suit,  les 
droits  des  parties  : 

.  c  Si  ne  pourront  les  parroissiens  ou  trésoriers  faire 
enterrer  en  la  dicte  église  quelconque  personne  que  ce 
soit,  se  ce  n'est  par  le  congié  ou  licence  de  Tabbesse  ou 
trésorière  de  la  dicte  église,  de  leur  doyen  ou  officiai,  ou 
de  l'ung  d'iceulx  ;  mais,  le  congié  demandé  par  les  amys  ou 
exécuteurs  des  trespassés,  la  dicte  abbesse,  pour  honneur 
et  contemplacion  du  cappitaine,  et  pour  la  bonne  amour 
et  affection  qu'elle  veult  avoir  aux  dits  habitans,  a  accordé 
que  elle  ou  la  trésorière  de  la  dicte  église,  leur  doyen  et 
officiai,  ou  Tung  d'eulx,  ne  pourront  refuser  le  dict  congié 
ne  empescher  aux  dicts  parroissiens  et  habitans,  pour  le 
temps  advenir,  que  eulx  ne  puissent  enterrer  quatre  per- 
sonnes notables  d'icelle  parroisse  dedens  le  corps  de  la  dicte 
église  par  chacun  an,  oultre  le  canchel  d'icelle  église,  en 
allant  vers  la  grant  porte  de  la  dicte  église,  et,  se  plus  y 
en  avoit  qui  eussent  la  dévotion  d'estre  enterrés  en  la  dicte 
église,  ce  sera  et  demourra  du  tout  en  l'ordonnance  et 
plaisir  d'icelles  religieuses.  » 


283 

Jusque  dans  les  derniers  temps,  l'autorisation  des  reli- 
gieuses fut  rigoureusement  exigée;  elle  était,  du  reste, 
subordonnée  à  la  condition  de  payer  certains  droits  au 
trésor  de  la  paroisse. 

Notons  seulement  Tinhumation  de  Michel  de  Suresnes, 
que  le  roi  Charles  VII  avait  envoyé  comme  capitaine  à 
Montivilliers,  et  qui  y  décéda  en  décembre  1433,  avant 
d'avoir  vu  le  pays  de  Caux  redevenir,  presque  en  entier, 
la  proie  de  l'étranger;  celle  de  Marguerite,  femme  de  Jean 
Deschamps,  sieur  d'Esnitot,  25  octobre  i5o8;  celle  d'un 
écossais,  Jean  Colzos,  qui  fut  tue  au  service  de  la  France, 
dans  un  combat  naval  livré  aux  Anglais  près  des  côtes  de 
la  Normandie.  Notons  encore,  à  une  autre  époque  plus 
récente,  Tinhumation  de  Louis-Georges  Feudrix,  écuyer, 
sieur  de  la  Fontelaye,  lieutenant  civil  et  criminel  au  bail- 
liage de  Montivilliers,  i^'  avril  1742.  La  demande  avait  été 
rédigée  par  le  fils  du  défunt,  Louis-Georges  Feudrix,  écuyer, 
sieur  de  Bréquigny,  qui  demeurait  pour  lors  à  Montivil- 
liers, et  qui  plus  tard  devait  se  faire  un  nom  comme  érudit. 

Ce  fut,  croyons-nous,  dans  les  difficultés  que  les  parois- 
siens de  Saint-Sauveur  éprouvèrent,  en  mainte  circons- 
tance, de  la  part  des  religieuses,  pour  la  sépulture  de  leurs 
défunts,  qu'il  faut  chercher  le  principal  motif  de  l'établis- 
sement, en  dehors  de  la  ville,  du  cimetière  de  Brisegaret, 
où  ils  finirent  par  avoir  une  galerie  couverte  et  même  un 
oratoire. 

La  formalité  d'une  demande  à  présenter  à  Tabbaye 
paraissait  assez  naturelle  ;  après  tout,  il  est  juste  de  recon- 
naître qu'elle  n'était  pas  tellement  difficile  à  remplir  que 
l'église  Saint-Sauveur  n'ait  été  bientôt  transformée  en  véri- 
table nécropole. 

Il  est  plus  extraordinaire  qu'au  xv«  siècle  on  ne  pût, 
sans  la  permission  des  religieuses,  ouvrir  la  grande  porte 
de  cette  église. 

Une  permission  de  ce  genre  fut  obtenue  à  l'occasion  de 
la  célébration  de  la  première  messe  de  deux  enfants  de  la 


284 

ville,  Nicolas  Le  Faé,  et  Jean  Le  Fèvre,  dit  le  Flamenc, 
en  1434. 

La  même  autorisation  fut  constamment  requise  pour 
établir  des  confessionnaux,  des  chaires,  tabourets  ou  bancs 
dans  réglise;  pour  mettre,  aux  chapelles,  des  clôtures  de 
menuiserie  ;  aux  autels,  des  contretables  ;  aux  fenêtres, 
dés  verrières  ;  le  long  des  murs,  des  statues  ou  des  tableaux. 
Il  est  à  remarquer  que  la  décoration  des  chapelles  fut 
Toeuvre  à  peu  près  exclusive  des  particuliers  ou  des  con- 
fréries. Il  n^en  dut  rien  coûter  ou  peu  de  chose  à  la 
fabrique.  Nous  avons  eu  l'occasion  de  faire  la  même  obser- 
vation à  propos  de  la  cathé4rale  de  Rouen. 

Le  confessionnal,  en  tant  que  meuble  plus  ou  moins 
orné,  d'une  construction  spéciale,  paraît  avoir  été  inconnu 
jusqu'à  la  fin  du  xvi^  siècle. 

Le  II  novembre  1604,  le  vicaire  Thomas  Hermerel 
demanda  la  permission  <  de  faire  bâtir,  du  côté  de  la  cha- 
pelle de  Saint-Nicolas,  entre  les  deux  premiers  piliers  d'en 
bas  de  la  clôture  du  chœur,  un  confession naire  de  bois,  de 
6  pieds  de  long  sur  2  pieds  de  large.  1  II  promettait  d'en 
abandonner  la  propriété  à  l'église.  La  permission  lui  en 
fut  accordée. 

Plusieurs  années  auparavant,  Jean  Hacquet,  avocat  pour 
le  Roi  au  bailliage  de  Caux,  avait  demandé  qu'il  lui  fût 
permis  «  de  faire  rétablir,  dans  la  chapelle  où  estoit  la  vitre 
de  la  Transfiguration,  une  chainture  de  noir  avec  ses 
armoiries,  qu'il  y  avoit  fait  placer  lors  du  décès  de  son 
père,  pour  plus  grande  mémoire  et  décoration  des  trépas- 
sés. »  f  Aucuns,  disait-il,  ne  sçavoit  de  quel  esprit,  avoient 
effacé  et  dilué  icelle  chainture  noire.  •  J'ignore  quel  fut  le 
sort  de  sa  demande.  A  mon  sens,  c'était  bien  assez  de  per- 
mettre au  patron  d'une  église  de  l'entourer  de  ceinture 
ou  litre  funèbre,  comme  attestation  publique  de  droits 
honorifiques.  Pourquoi,  sous  prétexte  de  quelques  actes 
de  libéralité,  des  particuliers  auraient-ils  mis  à  perpétuité 
une  chapelle  en  deuil,  afin  d'avoir  sujet  d'y  placer  leurs 


285 

armoiries  ?  En  tous  cas,  la  prétention  est  à  noter,  et  il  est 
à  croire  qu'on  en  rencontrerait  plus  d'un  exemple. 

Disons,  en  passant,  que  la  vitre  à  laquelle  Hacquet  faisait 
allusion  dans  sa  requête  rappelle  le  titre  sous  lequel 
réglise  elle-même  était  dédiée.  Saint  Sauveur  était  Notre 
Seigneur  honoré  dans  le  mystère  de  la  Transfiguration,  de 
même  que  Sainte  Croix,  vocable  de  nombreuses  églises, 
est  Notre  Seigneur  honoré  dans  le  mystère  de  la  Passion, 
et  peut-être  aussi  dans  celui  de  la  Résurrection. 

Cest  du  moins  ce  que  je  crois  comprendre  d'après  une 
pétition  du  curé  et  des  paroissiens,  tendant  à  ce  qu'il  leur 
fût  permis  c  de  faire  établir,  sur  le  grand  autel  de  leur 
église,  un  tableau  en  forme  de  rétable,  avec  colonnes, 
pilastres,  arquitraves  et  comisses  et  au  dessus  deux  figures 
d'anges,  avec  l'image  du  Salvator  au  milieu,  et,  en  plate 
peinture,  Tistoire  et  mistère  de  la  Transfiguration  de 
N.-S.  ;  •  1617. 

Ce  rétable  dut  remplacer  une  peinture  à  l'huile  repré- 
sentant aussi  Vhistoire  de  la  Transfiguration.  Ce  travail 
avait  été  exécuté  aux  frais  des  paroissiens,  en  i585.  Mais, 
trente  années,  c'est  plus  qu'il  n*en  faut  pour  que  le  goût 
soit  profondément  modifié. 

Je  laisse  de  côté  toutes  les  requêtes  des  confréries,  bien 
qu'il  y  en  ait  d'assez  curieuses,  et  je  me  contente  de  citer 
celle  d'un  capitaine  de  marine,  auquel  on  ne  saurait  con- 
tester le  mérite  d'avoir  bravement  servi  son  pays. 

«  A  Madame,  Madame  de  Moustiervillier. 

€  Nicolas  Lescollier,  escuier,  sieur  d'Aubyéville,  cappi- 
taine  d'une  navire  naguères  équipée  par  lui  contre  les 
ennemys,  vous  supplie  que  une  ensaigne  que  luy  et  ses 
compaignons  victorieux  ont  prinse  sur  les  adversaires  du 
sang  de  France,  icelle  ensaigne  soit  installée  en  l'église  de 
Sainct-Saulveur  de  Moustiervillier,  pour  la  dévocion  et 
confidence  quUls  ont  eue  à  Notre  Seigneur  et  remembrance 
dudit  Seigneur,  et  vous  ferez  bien.  Faict  lexvine  jour  d'oc- 


286 

tobre  Tan  mil  cinq  cents  quarante-deux.  »  Signé  :  N.  Les- 
coUier. 

Il  n'est  guère  permis  de  douter  qu'une  demande  aussi 
légitime  n'ait  été  favorablement  accueillie.  Mais  pourrait-on 
affirmer  que  cet  étendard,  glorieusement  conquis,  ait  orné 
longtemps  les  murs  de  l'église  Saint-Sauveur?  Si  l'on  était 
tenté  d'accuser  le  patriotisme  des  habitants  de  Montivil- 
liers,  qu'on  commence  par  nous  dire  quel  cas  Ton  a  £ait,  à 
Paris,  des  drapeaux  conquis  par  l'illustre  tapissier  de 
Notre-Dame. 

On  connaît  le  cimetière  de  Champfleury  près  d'Harfleur. 
Ce  cimetière,  aujourd'hui  le  seul  de  cette  ville,  fut  pourvu 
d'une  chapelle,  sur  la  demande  des  paroissiens,  en  1 3 1 5  ; 
mais  il  existait  bien  antérieurement.  On  le  trouve  cité  dès 
1481,  ce  qui  n'empêchait  pas  qu'il  y  eût,  près  de  l'église 
paroissiale  de  Saint-Martin  d'Harfleur,  un  cimetière  avec 
charnier,  lequel,  aujourd'hui  disparu,  a  laissé,  comme  trace 
de  son  existence,  à  la  rue  voisine,  le  nom  de  rue  des  Os 
rangés,  dont  on  a  fait,  par  un  euphémisme  volontaire,  ou 
par  pure  ignorance,  la  rue  des  Orangers,  en  substituant, 
sans  souci  de  la  réalité,  un  nom  gracieux  à  un  nom  singu- 
lièrement lugubre.  Le  mardi  de  la  semaine  sainte  148 1, 
Nicolas  Osmont,  clerc  de  la  paroisse  d'Harfleur,  était  con- 
damné à  l'officialité  pour  le  fait  d'avoir  arraché  du  cime- 
tière de  Champfleury  un  austerlin  du  nom  de  Radele 
Ausac,  qui  était  venu  s'y  mettre  en  franchise,  comme  dans 
un  lieu  sacré. 

Je  signalerai  dans  les  archives  de  l'officialité  de  Monti- 
villiers  un  document  relatif  à  la  translation  en  la  chapelle 
de  la  Sainte -Trinité,  appartenant  à  M.  de  Saint-Supplix, 
de  la  statue  vénérée  de  Notre-Dame  des  Flots,  qui  jusqu'a- 
lors était  restée  exposée  au  portail  de  l'église  d'Harfleur, 
1 71 5;  —  une  information  faite  par  l'autorité  ecclésiastique 
au  sujet  de  la  démolition  opérée  à  la  hâte  et  nuitamment, 
au  grand  scandale  des  bourgeois  de  Montivilliers,  de 
l'antique  chapelle  de  la  léproserie   de  Saint- Gilles,  par 


287 

ordre  des  administrateurs  de  l'hôpital  général  du  Havre, 
lesquels  avaient  obtenu  la  réunion  des  biens  de  la  lépro- 
serie à  leur  établissement,  et  n'avaient  rien  de  plus  à  cœur 
que  de  s'exonérer  des  frais  d'entretien  et  de  réparation 
d'un  édifice  devenu,  suivant  eux,  absolument  inutile,  17 18  ; 
—  la  visite  faite  par  Jean  de  Genouville,  licencié  ès-lois, 
doyen  de  Montivilliers,  de  l'église  Saint-Paul  de  Rouen,  en 
1572.  Le  procès-verbal  dressé  à  cette  occasion  constate 
que  l'église  conventuelle  avait  été  ruinée  dix  ans  aupara- 
vant ;  le  comble  menaçait  ruine  ;  il  avait  fallu  mettre  deux 
arbres  debout  pour  le  soutenir  ;  la  salle  capitulaire  restait 
sans  verrines  (vitres),  sans  bancs  ni  chaires.  L'église  parois- 
siale, distincte,  on  le  voit  par  ce  document,  de  l'église 
conventuelle,  n'était  pas  en  meilleur  état  :  elle  n*avait 
plus  même  de  portes. 

Les  bâtiments  du  prieuré  de  Saint-Paul,  réparés  tant 
bien  que  mal,  furent,  de  nouveau  et  plus  sérieusement 
encore,  endommagés  pendant  le  siège  de  1592.  Démolis  en 
partie,  ils  couraient  le  risque  d'être  entièrement  aban- 
donnés.  Par  bonheur,  la  prieure  d'alors,  Barbe  Cavelier, 
appartenait  à  une  famille  de  Rouen,  riche  et  considérée. 
Son  père,  lieutenant  général  du  bailli,  mit  son  honneur  à 
rétablir  le  prieuré^  de  manière  à  faire  regarder  comme  un 
acte  de  sage  administration  la  nomination  qui  avait  été 
faite  de  sa  fille  à  la  dignité  de  prieure,  sorte  de  compen- 
sation qui  avait  été  accordée  à  celle-ci  pour  la  consoler  de 
la  perte  du  titre  d'abbesse  de  Montivilliers  qu'elle  avait 
porté  pendant  quelques  années.  Ce  fut  sans  doute  aux 
travaux  qui  furent  entrepris,  en  1  SgS,  que  nous  sommes 
redevables  de  la  conservation  de  Tancienne  église,  type 
précieux  de  l'architecture  romane  primitive. 

L*église  Saint- Paul  fut  visitée,  le  18  avril  i6o3,  par  Jean 
Quatresols,  doyen  de  Gournay,  comme  délégué  du  vicaire 
général  de  l'exemption  de  Montivilliers.  L'ordonnance 
qu'il  rendit,  à  la  suite  de  sa  visite,  contient  la  prescription 
suivante  :  Tarn  vicario  quant  parrochianis  injunctum  fuit 


28S 

Ut  cruces  in  monimentis  defunctorum  sculptœ  delerentur. 

Vers  le  même  temps,  le  célèbre  Jacques  Gallemant,  curé 
d'Aumale,  visitant  Téglise  d*Harfleur,  en  vertu  de  pareille 
délégation,  ordonnait  aussi  c  que  les  tombes  où  le  signe 
de  la  croix  était  empreint  seroient  levées  et  defètes.  » 

On  trouve  une  prescription  du  même  genre  dans  un 
questionnaire  ou  sorte  de  Mémento  rédigé,  en  1648,  à 
Tusage  du  vicaire  général  de  Fécamp,  pour  appeler  son 
attention  sur  les  points  principaux  qu'il  devait  examiner 
dans  la  visite  des  églises. 

An  sint  cruces  vel  aliœ  imagines  per  pavimentum  ecclesice 
vel  nomina  Dei  vel  sanctorum,  quod  non  decet. 

Le  même  questionnaire  contient  quelques  articles  con- 
cernant les  chaires  à  prêcher. 

An  suggestum  sit  in  loco  apto  et  convenienti^  ut  commode 
sermocinaturus  ab  omnibus  audiatur. 
An  ibi  sit  crucifixi  effigies  apte  accommodata. 
An  scala^  qua  ad  illud  ascenditur,  sit  plana  et  commoda. 
An  super  illud  sit  baldachinum^  decenter  ornatumy   ne 
vox  concionatoris  desuper  dilatetur  ac  diffundatut  (1). 

La  chaire  était  donc  alors  d'obligation  pour  les  églises 
du  diocèse  de  Rouen,  dont  les  exemptions  de  Montivilliers 
et  de  Fécamp  ne  firent  jamais  que  suivre  les  usages  ;  elle 
devait  être  ornée  d*un  crucifix  et  surmontée  d'un  abat- 
voix,  contrairement  à  ce  qui  se  pratiquait  encore  au 
xvi«  siècle,  mais  on  ne  voit  pas  qu  on  se  fût  encore  avisé 
d'en  vouloir  feiire  une  œuvre  d'art.  Souvent,  aux  fêtes 
solennelles,  on  la  couvrait  de  tapisseries.  C'était  par  là 
seulement  qu'elle  prenait  un  aspect  quelque  peu  artistique. 
La  chaire  de  la  cathédrale,  mobile  et  portée  sur  des  rou- 
lettes, a  paru  à  nos  contemporains,  malgré  les  souvenirs 

(i)  En  visitant  réglise  Saint-Barthélémy,  le  18  janvier  1529 
(v.  s.)i  le  doyen  de  l'exemption  de  Montivilliers,  Jacques  Le  Roux, 
enjoint  aux  trésoriers  de  la  paroisse  de  faire  faire  unam  parvam 
cathedram  ad  faciendum  pronum  et  predicandum  verbum  Dei, 


289 

qu'elle  rappelait,  indigne  du  lieu  où  elle  était  placée  :  par 
sa  simplicité,  elle  répondait  parBsiitement  aux  goûts  de 
l'époque  où  elle  fut  construite. 

Le  questionnaire  de  1648  nous  fournit  une  citation  con- 
cernant un  autre  objet  du  culte,  auquel  on  n'attachait  pas 
une  moindre  importance. 

An  sit  crux  in  medio  ecclesiœ  cumymagine  Christi  recte 
elaborata  ? 

Il  s'agit  ici  d'un  crucifix  qui  devait  être  placé  entre  nef 
et  chœur  et  qui  généralement  était  posé  sur  une  poutre 
transversale  ou  sur  un  arc  triomphal. 

Ce  crucifix  était  de  rigueur.  Le  29  janvier  1 398,  les  reli- 
gieuses de  Montivilliei*s  soutenaient  contre  les  paroissiens 
de  Saint-Sauveur  que  ceux-ci  ne  pouvaient  avoir,  dans  la 
partie  de  l'église  qui  était  affectée  au  service  paroissial, 
c  aucunes  ymages  eslevées  sans  la  licence  d'icelles  reli- 
gieuses, excepté  seulement  l'image  du  crucifix.  •  A  la  suite 
de  la  visite  de  l'église  de  Rouelles,  le  dernier  mai  i535, 
injonction  fut  faite  par  le  vicaire  général  de  Montivilliers, 
au  trésorier  de  la  paroisse,  ut  cicius  quant  commode  fieri 
poterit^  altius  erigere  faciat  duo  altaria  prope  crucifixum 
dicte  ecclesiœ  existentia,  illisque  erectis^  pendentem  e 
latere  faciat  constituer  e  et  apponere.  Ordre  de  feire  feire 
une  image  du  crucifix,  au  trésorier  de  Saint-  Barthélémy, 
le  14  mai  i582  ;  —  à  celui  d'Octeville,  le  même  jour;  — à 
celui  de  Rolleville,  le  23  juin  1596. 

Si  nous  réfléchissons  aux  usages  du  moyen-âge,  nous 
comprendrons  que  c'était  le  moins  qu'on  pût  faire  que  de 
placer  un  crucifix  à  l'entrée  du  chœur  pour  tenir  lieu  de 
ces  clôtures  appelées  jubés  ou  pupitres^  ornées  jusque-là 
d'un  cruciflx  monumental,  souvent  accompagné  des  images 
de  la  sainte  Vierge  et  de  saint  Jean,  et  dont  il  est  aisé  de 
constater  l'existence  dans  les  plus  modestes  églises. 

Citons  seulement  dans  un  registre  de  l'exemption  d'Ar- 


290 

gences,  ce  qui  a  trait  à  l'église  d'Amondeville,  visitée  en 
i5o6(i). 

Entre  autres  recommandations  faites  aux  trésoriers  on 
remarque  celle-ci  :  «  Fieri  faciant  ambonem  novum  in 
pulpito.  » 

On  voit  par  là,  ce  que  les  délibérations  du  chapitre  de 
la  cathédrale  nous  avaient  déjà  appris,  qu'on  faisait  une 
différence  entre  Tambon  QX\t  pupitre  ou  jubé.  Mais  j'avoue 
être  hors  d'état  d'indiquer  sûrement  en  quoi  elle  con- 
sistait. 

Suivent  ces  autres  prescriptions  : 

Fiat  piscina  prope  fontes  ad  abluendum  manus  dum 
bapti^antur  pueri. 

Reparetur  benegerium  seu  vas  in  quo  reponitur  aqua 
benedicta  prope  magnam  valvam  ecclesice, 

Amoveantur  archce  in  navi  ecclesice  exîstentes. 

C'était  donc  alors  l'usage  qu'il  y  eût  une  piscine  près  des 
fonts  baptismaux  ;  —  un  bénitier  près  de  la  grande  porte 
de  l'église.  Dans  cette  église  de  village,  nous  rencontrons 
ces  coffres  et  ces  bahuts  où  étaient  déposés  les  ornements, 
les  livres  d'offices,  et  même  les  papiers  des  confréries  et 
des  chapelains.  Il  n'y  a  guère  lieu  de  s'en  étonner,  puis- 
qu'il en  était  de  même  dans  notre  cathédrale. 

Un  compte  du  prieuré  de  Saint-Paul  de  Rouen,  de  1438- 
1439,  fait  mention,  au  chapitre  des  recettes,  des  lettres  de 
mariage  et  des  éciielles  de  noces.  Je  suppose  qu'il  faut 
entendre  par  là  les  offrandes  que  l'on  recueillait  à  la  céré- 
monie des  mariages  dans  des  bassins  particuliers  affectés 
à  cet  usage. 

On  donnait  vulgairement  le  nom  d*e'cuelles  à  ce  que  l'on 
appelle  aujourd'hui  bassins,  et  le  plus  souvent  ces  bassins 
servaient  de  supports  à  des  chandeliers. 

En  i585,  le  prévôt  d'une  confrérie  de  Saint-Sauveur  de 

(i)  Aujourd'hui  Mondevilb,  arrondissement  et  canton  de 
Cucn. 


291 

Montivilliers  obtient  la  permission  •  de  mettre  4  petits 
chandeliers  de  bois  aux  ccuelles  d'étain  où  seroient  poses 
4  cierges,  le  tout  sur  le  travers  d'une  chapelle  de  la  con- 
frérie, ainsi  que  cela  avoit  lieu  aux  chapelles  de  la  Trinité 
et  du  Saint-Sacrement.  1 

Encore  aujourd'hui,  à  Pont-l'Evôque,  les  confrères  de  la 
charité  ont  l'usage  de  faire  la  quête  dans  un  bassin  de 
cuivre  où  se  trouve  posé  un  chandelier. 

Je  finirai  par  deux  citations  qui  donnent  beaucoup  ù 
penser  sur  les  changements  qui  ont  pu  survenir  depuis  le 
moyen-âge  dans  l'état  de  la  Basse-Seine  et  de  la  Lézarde, 
son  affluent. 

Un  procès  s'éleva,  en  1660,  à  propos  des  limites  de  leurs 
paroisses  respectives,  entre  le  curé  d'Harfleur  et  celui  de 
Saint-Nicolas  de  l'Heure.  Le  premier  prétendait  justifier 
que  la  rivière  d'Harfleur  (autrement  la  Lézarde  ;  ce  nom 
est  assez  moderne)  c  prenoit  son  cours  et  alloit  rendre  à 
l'ancien  Hoc  pour  se  décharger  dans  la  Seine  par  le  noir 
rocher  ou  noir  perré.  »  Il  y  eut  là-dessus  mémoires  et 
enquêtes  ;  mais  je  ne  saurais  dire  si  le  curé  prouva  son  dire 
de  manière  à  ne  laisser  aucun  doute  dans  l'esprit  des  juges. 

L'autre  citation  est  empruntée  à  une  pièce  de  procédure 
plus  ancienne. 

Le  29  janvier  1398,  les  paroissiens  de  Saint-Sauveur 
reprochaient  aux  religieuses  de  Montivilliers  d'avoir  laissé 
annuler  le  port  Gaififre  ou  Gahiffre,  c  qui  souloit  estre  en 
la  dite  ville  ou  près  d'illec,  et  ouquel  venoient  les  vesseaux, 
chargés  de  denrées  et  de  marchandises.  > 

Les  religieuses  reconnaissaient  que  le  fait  était  fondé; 
mais  que,  loin  de  leur  être  imputable,  elles  en  étaient  les 
premières  victimes,  puisque  l'annulation  de  ce  port  avait 
réduit  à  rien  leurs  droits  de  coutume. 

Je  me  trompe  fort  ou  ce  changement  dut  être  la  consé- 
quence naturelle  des  travaux  qui  furent  entrepris  à  Har- 
fleur  par  ordre  du  Roi.  Comment  les  vaisseaux  auraient- 
ils  pu  remonter  jusqu'à  Montivilliers  après  que  l'on  se  fut 


29> 

avisé  d'établir  des  écluses  entre  cette  ville  et  la  Seine,  dans 
rintérêt  du  clos  des  Galées  d'Harfleur  ? 

A  roccasîon  de  cette  lecture,  MM.  Pelay  et  de 
Merval  constatent  que  Tusage  d^employer  aux  quêtes, 
en  guise  de  plat^  le  fond  d'un  chandelier  muni  de  sa 
bougie^  subsiste  encore  en  Bourgogne,  et  même  dans 
le  département  de  PEure. 

Chapiteaux  de  SainUWandrille.  —  Enfin,  M.  G. 
Le  Breton  donne  lecture  d'un  mémoire  de  M.  Alfred 
Darcel,  où  notre  collègue  confirme  les  conclusions 
de  M.  de  Glanville,  et  celles  qu^il  a  lui-même  insérées 
dans  le  Bulletin  du  Comité  des  travaux  historiques. 
Il  apporte  de  nouvelles  raisons  qui  obligent  à  rejeter 
absolument  Topinion  de  M.  Galloway.  M.  Le  Breton 
développe  et  fortifie  encore  la  thèse  du  savant  directeur 
des  Gobelins. 

ENCORE    LES    CHAPITEAUX  DE  l'ÉGLISE  DE    SAINT- WANDRILLE 

Tandis  que  M.  de  Glanville  lisait  à  la  Commission  des 
Antiquités  le  remarquable  Rapport  sur  les  Chapiteaux 
du  chœur  de  V Eglise  de  Saint-  WandrillCy  qui  est  inséré 
dans  son  Bulletin  (t.  V.,  3^  livraison,  p.  410  à  424),  le 
Comité  des  travaux  historiques  recevait  de  M.  l'abbé 
Sauvage,  curé  d'Ectot-l'Auber  et  son  correspondant,  une 
communication  relative  à  ces  mêmes  chapiteaux. 

Cette  communication  ayant  été  renvoyée  à  mon  examen, 
je  profitai  de  mon  séjour  annuel  aux  environs  de  Duclair 
pour  aller  étudier  lesdits  chapiteaux,  et  dans  la  séance  du 
5  décembre  je  lisais  au  Comité  le  rapport  suivant  qui  a  été 
publié  dans  la  Revue  des  Sociétés  savantes  (7e  série,  t.  VI, 
p.  469  à  473). 


Rapport  de  M,  Alfred  Darcel  au  Comité  des  Travaux 
historiques^  séance  du  5  décembre  j88i, 

LES  PRÉTENDUS  CHAPITEAUX  ANTIQUES  DE  l'ÉGLISE 
PAROISSIALE    DE    SAINT-WANDRILLE    (sEINE-INFÉRIEURE). 

c  L'église  paroissiale  de  Saint- Wandrille,  bâtie  à  Tombre 
de  la  grande  abbaye  de  Fontenelle,  est  un  assemblage 
assez  mal  agencé  de  constructions  de  plusieurs  styles.  La 
nef  est  séparée  des  bas-côtés  par  quatre  colonnes  ioniques 
supportant  des  arcs  en  plein  cintre  dont  Tintrados  est  orné 
de  caissons  à  rosaces.  Elle  va  se  rétrécissant  vers  le  clo- 
cher, et  est  aujourd'hui  couverte  par  un  berceau  en  plan- 
ches qui  recouvre  une  charpente,  jadis  apparente,  dont  on 
a  coupé  les  poinçons. 

c  Le  clocher,  placé  à  l'entrée  du  chœur,  est  porté  par 
quatre  grosses  colonnes  ioniques  d'où  naissent  les  nervures 
prismatiques  d'une  voûte  en  ogive. 

c  Au  sud  de  la  croisée  s'étend  une  sorte  de  transept, 
plus  long  que  le  bas-côté  auquel  il  correspond  n'est  large, 
voûté  sur  nervures  cylindriques. 

c  Le  chœur,  à  chevet  carré,  est  de  deux  travées  voûtées 
sur  nervures  qui  reposent  d*abord  sur  deux  des  colonnes 
ioniques  du  clocher,  puis,  au  nord,  sur  une  colonne  de 
même  style,  mais  pourvue  d'une  longue  console  destinée 
à  recevoir  un  faisceau  de  trois  colonnes  qui  reçoivent  les 
cinq  nervures  de  la  voûte. 

c  Une  colonne  de  même  style  que  les  nervures  lui  cor- 
respond au  sud.  Un  faisceau  de  colonne ttes  lui  est  adossé 
pour  recevoir  les  arcs  doubleaux  et  les  arcs  ogives  reçus 
par  la  console  du  côté  opposé. 

«  Au  nord  une  chapelle  de  trois  travées  voûtées  sur 
nervures  très  amenuisées  s'étend  le  long  du  chœur. 

«  Au  sud  une  petite  abside  romane,  très  remaniée, 
s'appuyait  à  l'une  des  colonnes  ioniques  du  clocher  et 
s'ouvrait  sur  le  transept  sud. 

«  Cette  partie  a  été  très  profondément  transformée.  Le 


294 

transept  sud  a  été  prolongé  pour  faire  une  sacristie  :  la 
petite  abside  a  été  démolie,  et  une  chapelle  a  été  cons- 
truite latéralement  au  chœur  avec  lequel  elle  communique 
par  deux  arcades,  de  sorte  qu'elle  forme  pendant  à  la 
chapelle  du  nord. 

c  Enfin  un  petit  oratoire  a  été  bâti  en  hors  d'œuvre, 
dans  Tangle  de  la  sacristie  et  de  la  nouvelle  chapelle,  à 
l'usage  de  M.  le  marquis  de  Stacpool,  propriétaire  de 
l'ancienne  abbaye,  aux  frais  de  qui  se  sont  faits,  en 
grande  partie,  tous  ces  travaux  neufe. 

f  Jusqu'ici  tout  le  monde  s'était  accordé  à  attribuer  les 
colonnes  ioniques  de  la  nef,  du  clocher  et  du  chœur  à 
Textrême  fin  du  xvi^  siècle;  la  voûte  du  clocher  au 
xv«  siècle  si  la  tour  est  du  xi*  :  le  chœur  au  xiii*^  et  la  cha- 
pelle du  nord  au  xiv^. 

c  Mais  voici  qu'en  abattant  la  petite  abside  romane  qui 
servait  de  sacristie,  on  découvrit  que  Tun  des  chapiteaux 
ioniques  du  clocher  s'y  trouvait  incrusté,  d*où  Ton  conclut 
que  ce  chapiteau  était  nécessairement  antérieur  à  cette 
abside,  qui  était  du  xi^  siècle.  S'il  était  antérieur  à  la 
renaissance  normande,  tous  les  autres  chapiteaux  étaient 
de  même  date  que  lui,  et  appartenaient  à  Tune  des 
anciennes  reconstructions  de  l'église.  Or,  les  archéologues 
de  la  contrée,  M.  le  docteur  Guéroult,  de  Caudebec,  ainsi 
que  M.  l'abbé  Sauvage,  curé  d'Ectot-l'Auber  et  corres- 
pondant du  ministère,  ayant  découvert  une  chronique  de 
Fontenelle  qui  parle  de  Tune  de  ces  reconstructions  faite, 
entre  les  années  734  et  787,  à  Taide  de  matériaux  anti- 
ques, se  hâtèrent  d'attribuer  au  viii*  siècle  l'église  de 
Saint- Wandrille,  qui  est  placée  sous  le  vocable  de  Saint- 
Michel. 

c  Voici  ce  texte,  donné  dans  le  Spicilegium  d'Achéry 
(t.  III,  p.  21 3)  : 

«  Sub  hujus  denique  tempore^  ErinharduSj  prœpositus 
ejuSy  aedificavit  basilicam  Beati  Archangeli  Michœlis, 
licet  modicOy  pulcherrimo  tamen  opère,  allatis  videlicet 


29S 

pétris  politis  de  Juliobona^  Castro  quondam  nobilissimo  et 
[firmissimo,  ad  construendos  arcus  seu  frontispicium  ejus- 
dem  templi, 

c  Or,  ces  pierres  polies  arrachées  aux  ruines  romaines 
de  Juliobona,  aujourd'hui  Lillebonne,  ne  pouvaient  être 
que  les  chapiteaux  ioniques  actuels. 

€  Malgré  Taspect  fort  peu  antique  de  ces  chapiteaux, 
celui  qui  était  incrusté  dans  les  constructions  que  nous 
admettons  avoir  été  du  xic  siècle  pouvait  apporter  une 
apparence  de  raison  aux  déductions  que  nous  venons 
d'cnumérer.  Malheureusement  ce  chapiteau  prouve  contre 
la  thèse  soutenue  par  M.Tabbé  Sauvage  et  par  M.  Gué- 
rouit. 

€  La  moitié  de  celle  de  ses  volutes  qui  était  encastrée 
est  à  peine  épannelée  :  comme  elle  ne  devait  pas  être  vue 
l'ouvrier  n'a  pas  jugé  nécessaire  d'en  poursuivre  l'exécu- 
tion jusqu'à  son  entier  achèvement. 

€  Nous  pourrions  nous  arrêter  à  cette  preuve  négative, 
mais  nous  demanderons  de  poursuivre  plus  loin  l'examen 
des  divers  chapiteaux  et  même  des  différentes  colonnes 
qu'ils  couronnent. 

€  D'abord  dans  tous  l'astragale  appartient  au  chapiteau, 
tandis  que  dans  toutes  les  constructions  antiques  il  appar- 
tient toujours  à  la  colonne. 

c  En  outre  ce  chapiteau,  très  écrasé,  qui  n'a  de  hauteur, 
avec  son  abaque,  queo<°28  sur  une  longueur,  de  volute  à 
volute,  de  i^^jS,  ne  présente  aucune  apparence  antique, 
les  chapiteaux  de  ce  style  étant  d'ailleurs  très  rares  chez 
les  Romains. 

c  Si  nous  nous  reportons  à  la  colonne  du  chœur,  qui 
est  munie  d'une  console  dont  nous  avons  parlé  plus  haut, 
nous  sommes  forcé  de  reconnaître  que  cette  console  fait 
corps  avec  la  colonne  avec  laquelle  elle  a  été  construite, 
assise  par  assise,  comme  toutes  celles  de  l'église.  Or,  cette 
console  n'a  raison  d'exister  que  pour  recevoir  les  colonnes 
et  les  nervures,  qui  sont  du  xiiie  siècle  ;  elle  est  donc  le 


296 

résultat  d'une  reprise  en  sous-œuvre,  postérieure  par 
conséquent  à  ce  qu'elle  supporte. 

f  Ailleurs  ces  nervures,  —  les  chapiteaux  et  les  colonnes 
qui  les  supportaient  ayant  été  supprimés,  —  tombent 
dans  le  vide,  autour,  notamment,  du  chapiteau  ionique 
jadis  encastré. 

f  Les  différences  d*aplomb  sont  telles  que  Ton  a  pas 
même  essayé  jadis  de  les  raccorder;  quelques  plâtrages, 
qui  datent  d'hier,  lors  de  la  construction  de  la  chapelle  du 
sud,  bouchent  tant  bien  que  mal  les  vides. 

c  Les  constructeurs  du  ziii*  siècle  eussent  été  assez  ha- 
biles certainement  pour  faire  porter  leurs  nervures  sur  des 
appuis  qui  auraient  existé. 

f  Enfin,  la  base  de  la  colonne  à  console,  ainsi  que  celles 
de  plusieurs  autres,  notamment  dans  la  nef,  est  munie  de 
larges  feuilles  s' étalant  sur  les  angles  des  bases;  genre 
d'ornement  que  n'a  jamais  connu  l'antiquité. 

c  Tout,  nous  le  répétons^  dans  le  mode  de  construction 
et  dans  l'aspect  des  colonnes  et  des  chapiteaux  ioniques  de 
la  nef  et  du  chœur  de  l'église  paroissiale  de  Saint- Wan- 
drille  atteste  l'extrême  fin  du  xvi«  siècle,  peut-être  le  xvii"; 
et  nous  nous  étonnons  que  M.  l'abbé  Sauvage,  auteur  de 
la  note  qui  a  servi  de  base  à  l'examen  de  la  question,  et 
M.  le  docteur  Guéroult  s'y  soient  trompés. 

«  Cette  erreur  est  d'autant  plus  singulière  que  les  co- 
lonnes de  la  nef  de  la  remarquable  église  de  Vatteville, 
située  à  quelques  kilomètres  de  Saint-Wandrille,  sur 
l'autre  rive  de  la  Seine,  sont  identiquement  de  la  même 
construction  ;  et  il  en  est  de  même  de  celles  du  chœur  de 
l'église  paroissiale  de  Jumiéges,  élevée  aussi  à  quelques 
kilomètres  de  Saint-Wandrille,  mais  sur  la  même  rive. 

c  II  est  impossible  d'éprouver  le  moindre  doute  â  cet 
égard  et  de  ne  pas  reconnaître  que  les  constructeurs  de 
ces  trois  édifices  appartenaient  au  même  atelier,  et  que 
les  mêmes  mains  y  ont  travaillé  d'après  le  même  mo- 
dèle. 


297 

c  Ainsi  nous  voilà  bien  opposé  aux  conclusions  de 
M .  Tabbé  Sauvage  ;  et,  loin  a  que  les  colonnes  et  les 
arceaux  en  plein  cintre  qui  portent  la  tour  de  Saint- Wan- 
drille  soient  le  plus  ancien  monument  qui  soit  resté  debout 
sur  notre  sol  normand,  »  il  est  impossible  de  les  faire 
remonter  plus  loin  que  Textrême  fin  du  xvi*  siècle. 

«  Quel  fut  le  sort  des  a  pierres  polies  »  enlevées  à  Lille- 
bonne  et  employées,  au  vin®  siècle,  pour  construire 
Tcglise  Saint-Michel? 

€  Si  dans  le  style  redondant  des  chroniqueurs  carolin- 
giens, ces  expressions  peuvent  s'appliquer  à  toute  espèce 
de  pierres  taillées,  n'est-il  pas  permis  d'y  voir  surtout  la 
désignation  de  colonnes  de  marbre  ;  car  à  elles  seules  peut 
s'appliquer  la  désignation  de  pierres  polies,  et  non  à  des 
chapiteaux  qui  sont  sculptés  ? 

€  Or,  l'église  de  Duclair  possède,  sous  son  clocher 
roman  du  xi^  siècle,  deux  colonnes  antiques  de  marbre 
couronnées  de  chapiteaux  corinthiens  de  marbre  blanc, 
dont  le  fleuron  porte  une  croix,  et  qui  sont  mérovin- 
giennes ou  carolingiennes.  Elle  possède  de  plus  quelques 
autres  colonnes  également  de  marbre  antique,  placées 
sous  des  chapiteaux  du  xiii®  siècle^  dans  sa  nef.  Ces  colonnes, 
qui  proviennent  certainement  d'un  édifice  romain,  de 
Lillebonne  fort  probablement,  auraient-elles  stationné  à 
Saint- Wandrille,  placé  à  mi-chemin,  avant  que  d'être 
apportées  à  Duclair?  » 

On  voit  d'après  ce  rapport  que  M.  de  Glanville  et  moi 
nous  sommes  arrivés  aux  mêmes  conclusions  ;  et  que  c'est 
le  même  détail  qui  nous  y  a  fait  arriver,  chacun  de  son 
cote. 

Ce  détail  est  la  partie  du  chapiteau  de  la  colonne  de 
support  du  clocher,  —  la  colonne  sud-est  si  Téglise  est 
orientée,  —  qui  était  encastrée  dans  la  petite  abside  du 
xi^  siècle  aujourd'hui  détruite.  La  volute  de  ce  chapiteau 
est^  en  effet,  «  restée  à  l'état  brut  de  ce  côté  »,  ainsi  que 
le  dit  le  rapport  de  M.  de  Glanville.  Il  ajoute  que  Tarchi- 

20 


298 

tecte  qui  a  démoli  la  petite  abside,  a  constaté  qu'un  vide 
creusé  après  coup  existait  entre  elle  et  le  chapiteau. 
Circonstance  que  j'ignorais  et  qui  ne  fait  que  corroborer 
nos  conclusions. 

J'ignorais  aussi  la  part  importante  prise  dans  cette 
affaire  par  l'archéologue  anglais,  M.  W.  Galloway,  dont  je 
n'ai  connu  les  recherches  et  l'opinion  que  par  l'analyse 
qu'en  fait  M.  de  Glanville  dans  son  rapport.  Mais  j'avouerai 
ne  pas  comprendre  comment  un  homme  compétent  en 
architecture^  qui  a  étudié  pendant  cinq  mois  l'église  de 
Saint- Wandrille,  a  pu,  à  moins  d'être  aveuglé  par  une 
idée  préconçue,  se  méprendre  si  absolument  sur  le  carac- 
tère des  colonnes  dont  il  s'agit. 

Rien,  en  effet,  n'est  antique  en  elles,  sauf  le  style  qu'on 
a  prétendu  imiter  de  très  loin,  mais  en  se  conformant  à 
certaines  habitudes  traditionnelles  et  françaises  de  cons- 
truction. 

Où  M.  W.  Galloway  a-t-il  vu  des  grifles  garnir  la  base 
de  colonnes  taillées  par  des  Romains  ?  Car  il  ne  s'agit  pas  de 
grossières  imitations  du  viii®  siècle,  mais  de  colonnes 
romaines  transportées  de  Juliobona  à  Fontenelle  dans  ce 
même  viii«  siècle. 

Dans  quel  monument  antique  M.  W.  Galloway  a-t-il 
trouvé  des  consoles  dans  le  genre  et  du  profil  de  celle  qui 
a  été  construite  en  même  temps  que  l'une  des  colonnes  du 
chœur  ? 

Quand  M.  W.  Galloway  a-t-il  rencontré  un  seul  cha- 
piteau antique,  à  quelque  ordre  qu'il  appartînt,  dont 
l'astragale  fît  partie  ? 

Or,  l'on  sait  que  l'existence  ou  la  non  existence  de  l'as- 
tragale à  Textrémité  supérieure  du  fût  de  la  colonne  ou  à 
la  base  du  chapiteau,  fournit  un  moyen  infaillible  pour 
distinguer  les  chapiteaux  et  les  colonnes  antiques  de  ces 
mêmes  membres  d'architecture  faits  chez  nous  à  partir  du 
xie  siècle. 

Les  chapiteaux  ioniques  de  l'église  de  Saint-Wandrille, 


299 

de  la  nef  de  Vatteville  et  du  chœur  de  Jumiéges  étant  tous 
munis  de  Tastragale,  il  en  résulte  que  le  constructeur  de 
ces  trois  édifices,  qui  étant  tous  identiques  de  style  et 
d'exécution,  sont  Pœuvre  d'un  même  atelier,  suivait  une 
tradition  qu'il  avait  héritée  de  ses  devanciers  du  moyen 
âge.  Il  était  donc  d^époque  postérieure  à  ce  moyen  âge^  et 
il  est  intéressant  de  voir  que,  vivant  à  Textréme  fin  du 
xvi^  siècle,  ainsi  que  je  le  suppose,  il  fût  encore  attaché 
aux  pratiques  médiévales  tout  en  prétendant  s*inspirer  de 
l'antiquité. 

M.  W.  Galloway  remarque  que  le  plan  de  la  nef  de 
Saint- Wandrille  est  un  trapèze  par  suite  de  «  la  conver- 
gence de  toutes  les  lignes  horizontales  de  la  bâtisse  de 
l'ouest  à  l'est.  >  Je  crois  que  la  convergence  n'existe  que 
dans  la  dernière  travée,  et  que  les  trois  autres  sont  paral- 
lèles. Mais  comment  ne  s*est-on  pas  aperçu  que  cette 
convergence,  graduée  suivant  Tarchéologue  anglais, 
brusque  à  ce  qu'il  m'a  semblé,  était  en  tous  cas  'motivée 
par  la  nécessité  de  ne  point  tomber  dans  le  vide  et  de 
buter  contre  les  deux  piliers  qui  supportent  le  clocher  du 
côté  de  la  nef. 

Ces  piliers  ont  beau  être  de  style  ionique  aujourd'hui, 
ils  existaient  antérieurement  avec  unautre  caractère,  pour 
supporter  la  tour  romane  du  clocher  ;  et,  comme  ces 
piliers  étaient  trop  rapprochés  pour  la  largeur  que  l'on  vou- 
lait donner  à  la  nef  nouvelle,  on  a  rétréci  celle-ci  à  son 
extrémité  supérieure. 

M.  W.  Galloway  qui  n'est  pas  tendre  pour  ceux  qui  ne 
partagent  pas  son  opinion,  et  qui  voit  c  un  tissu  d'absur- 
dités >  dans  les  motifs  de  l'opinion  qui  a  prévalu  jusqu'ici, 
à  savoir  que  les  colonnes  du  chœur,  du  clocher  et  de  la 
nef  de  Saint- Wandrille  sont  postérieures  à  ce  qu'elles 
supportent,  devra  cependant  reconnaître  un  fait.  C'est 
que  la  tour  romane  du  clocher  repose  sur  des  voûtes  à 
nervures  prismatiques,  d'époque  postérieure  par  consé- 
quent à  ce  qu'elles  supportent. 


3oo 

Tout  donc,  dans  le  plan  et  dans  les  élévations  de  Téglisc 
de  Saint- Wandrille,  montre  des  remaniements  successifs, 
qui  bouleversent  Tordre  logique  des  temps  et  des  styles, 
sans  qu'un  plan  d^ensemble  y  ait  présidé. 

En  résumé  il  me  semble  évident,  comme  à  M.  de 
Glanville,  comme  à  Tabbé  Cochet  et  à  beaucoup  d'autres, 
que  la  tour  et  le  chœur  de  cette  église  ont  été  repris  en 
sous-œuvre  lorsque  Ton  reconstruisit  sa  nef,  à  la  fin  du 
xvi«  siècle. 

M.  P.  Baudry  croît  pouvoir  faire  descendre  la  date 
des  chapiteaux  jusqu^au  règne  de  Louis  XIII^  par  les 
analogues  qu'ail  a  examinés  dans  les  ruines  des  Tuile- 
ries. M.  Le  Breton  ajoute  qu'Hun  mascaron  ne  saurait 
être  antérieur. 

M.  de  Beaurepaire  expose  que  la  méprise  n^est  pas 
aussi  grossière  qu'elle  peut  le  paraître.  En  effet,  une 
visite  à  l'église  de  Jumièges  avait  inspiré  à  un  habile 
architecte  français  des  conclusions  semblables  à  celles 
de  M.  Galloway. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  moins  le  quart. 

A.    TOUGARD. 


3oi 


SEANCE  DU  i«  DECEMBRE  i883 

La  séance  ouvre  à  deux  heures  sous  la  présidence 
de  M.  de  Beaurepaire. 

Sont  présents  :  MM.  Adeline,  Bouquet^  de  Giran- 
court,  Lefort,  Lormier,  Tabbé  Loth,  Maillet  du 
BouUay,  Pelay,  de  la  Serre,  Tabbé  Tougard  et  le 
vicomte  d'Estaintot,  secrétaire. 

MM.  Brianchon  et  de  Merval  se  sont  fait  excuser. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  20  octobre  est  lu 
par  M.  Tabbé  Tougard  et  adopté. 

La  correspondance  imprimée  comprend  : 

Mémoires  de  la  Société  (^Émulation  du  Jura^ 
année  1882;  —  Mémoires  de  la  Société  des  anti- 
quaires  du  Centre,  x^blt  des  dix  premiers  volumes, 
i883  ;  —  Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de 
Picardie,  i883,  n»  3;  —  Bulletin  de  la  Société  des 
antiquaires  de  la  Morinie,  32«  année,  227*  livraison; 
—  Commission  des  antiquités  et  des  arts  de  Seine- 
et-Oise,  3*  fascicule,  i883;  —  Société  industrielle 
d'Elbeuf,  année  i883,  no*  i  et  2. 

M.  le  Président  distribue  aux  membres  présents  le 
t.  VI,  i^  livraison  du  Bulletin. 

Vœu  relatif  à  la  conservation  des  ruines  de  San- 
œay,  —  Il  communique  ensuite  à  la  Commission  une 
circulaire  adressée  par  le  Bureau  et  le  Conseil  d^admi- 
nistration  de  la  Société  historique  du  Vexin,  dans 
laquelle,  après  avoir  fait  connaître  un  vœu  relatif  à  la 
la  conservation  des  ruines  de  Sanxay,  émis  par  cette 
Société  dans  la  séance  du  27  octobre,  elle  sollicite  le 
concours  de  la  Commission  dans  le  même  but. 


3o4 

quables  dues  à  M.  l'abbé  Emm.  Auvray^  licencié  es* 
lettres  et  diplômé  de  Técole  pratique  des  Hautes  Études 
de  Paris. 

Il  y  a  dix-huit  mois,  sinon  plus,  Tabbé  Auvray 
écrivait  à  notre  confrère  que  Tabbé  Cochet  donnait  une 
fausse  direction  à  une  voie  romaine  sur  sa  paroisse 
(Criquetot-sur-Ou ville).  M.  Tougard  le  pria  de  lui 
transmettre  à  ce  propos  une  note  pour  la  Commission. 

Mais,  en  poursuivant  ses  explorations,  M.  Auvray 
s'est  vu  insensiblement  amené  à  composer,  au  lieu 
d'une  rectification  de  quelques  lignes,  un  petit  mé- 
moire, soigneusement  approfondi,  avec  planàTappui. 

Le  sol  a  été  interrogé  à  l'aide  d'une  grande  sonde  en 
fer  préparée  pour  cet  usage.  Et  les  fouilles  se  sont  mul- 
tipliées dans  un  grand  nombre  de  champs,  ce  qui  n'a 
pu  se  faire  qu'après  la  récolte.  M.  l'abbé  Tougard 
insiste  auprès  de  la  Commission  pour  que  le  plan  soit 
reproduit,  en  même  temps  que  le  mémoire,  dans  le 
prochain  Bulletin. 

VOIES  IMPORTANTES 

QUI  TRAVERSAIENT  ANCIENNEMENT  LE  TERRITOIRE 

DE    CRIQUETOT-SUR-OUVILLE. 

Trois  voies  importantes  traversaient  anciennement  le 
territoire  de  Criquetot-sur-Ouville.  Elles  tendaient  :  la 
première,  de  Caudebec-en-Caux  à  Arques  -  Dieppe  ;  la 
seconde,  deDoudeville  à  Limésy;  la  troisième,  de  Tabbaye 
d*Ouvilleà  Barentin. 

I. 

VOIE  DE  CAUDEBEC-EN-CAUX   A   ARQUES-DIEPPE. 

Cette  voie,  romaine  dans  son  origine,  s'il  en  faut  croire 
l'abbé  Cochet,  fut  certainement  fréquentée  àTépoque  nor- 
mande, et,  plus  tard,  jusqu'à  la  fin  du  xvi«  siècle,  tant  que 
les  deux  bourgs  qu'elle  reliait  si  directement  conservèrent 


OF 


r 


3o5 

leur  importance.  Elle  passait,  d'après  Tauteur  de  la  Seine^ 
Inférieure  historique^  par  Maulévrier,  TouffrevilIe-la-Cor- 
beline,  Yvetot,  Baons-le-Comte,  Etoutteville-sur-la-Mer, 
Doudcville,  le  bourg  de  Saâne,  Bacqueville,  Bertrevillc, 
Manchouville,  Charlesmesnil,  Tourville  et  Beaumais. 
«  Voilà,  dit-il  (i),  quelle  devait  être,  selon  nous,  la  direc- 
tion de  Tantique  chemin  que  de  nouvelles  recherches  par- 
viendront peut-être  à  retrouver.  »  Ces  recherches  viennent 
d'être  feites,  qui  permettent  de  rectifier  le  trace  qu'indique 
le  docte  abbc. 

Cest  cette  vieille  route  que  suivit  Guillaume  le  Con- 
quérant, lorsque,  du  fond  du  Cotentin,  il  se  rendit,  en 
toute  hâte,  dans  le  Talou,  pour  y  étouffer  la  révolte  de  son 
oncle,  Guillaume  d'Arqués  (2). 

Or,  Robert  Wace  (3)  écrit  que  le  duc  de  Normandie  : 

A  Chaudebec  ala  passer. 

De  Chaudebec  as  Bans  le  Cunte. 

Baons-le-Comte  et  Bacqueville  sont,  pour  nous,  deux 
points  certains  du  chemin  antique,  mais  les  conjectures 
de  Tabbé  Cochet  relatives  aux  villages  intermédiaires 
nous  semblent  fautives.  La  route  traversait  le  territoire  de 
Ectot-les-Baons,  Grémonville,  Criquetot-sur-Ouville,  Ou- 
ville  -  TAbbaye,  Torp-Mesnil,  Thiédeville,  Auzouville  et 
Saint-Ouen-le-Mauger,  suivant  assez  exactement,  jusqu'à 
la  vallée  de  la  Saâne,  le  chemin  de  grande  communica- 
tion no  55. 
Voici  nos  preuves.  '•' 

M.  Henry  Quesnel,  conseiller  d'arrondissement  pour  le 
canton  d*Yerville,  nous  a  communiqué  avec  le  plus  gra- 
cieux empressement  les  titres  de  la  seigneurie  des  Baons 
conservés  en  son   château.  Nous  y  avons  trouvé  deux 

(i)  La  Seine-Inférieure  historique  et  archéologique ^  P»  73, 
n°  16. 

(2)  Idem,  p.  72,  no  i5. 

(3)  Roman  de  Rou.  t.  II,  p.  i5  et  i6  ;  édit  Plu^uet. 


3o6 

plans  dessinds  au  xvin®  siècle,  Fun  de  la  paroisse,  l'autre 
du  domaine  non  fieffé.  Sur  ces  plans,  le  chemin  (T Arques 
passe  au  sud  du  village,  et  n'est  autre  que  la  route 
d'Yvetot  à  Grémonville. 

Au  triège  de  la  Chapelle,  en  face  d'Ectot-les-Baons,  la 
cavce  de  l'ancienne  voie  est  toujours  reconnaissable  ;  mais 
la  charrue  l'aura  bientôt  comblée. 

Dans  nombre  de  titres  concernant  la  paroisse  ou  le  fief 
de  Criquetot,  la  voie  est  appelée  :  rued'Yvetotà  Arques  (i), 
chemin  de  Caudebec  â  Dieppe  (2),  chemin  de  Caudebec  (3), 
chemin  d'Arqués  (4),  chemin  d'Arqués  à  Caudebec (5), 
grand  chemin  de  Caudebec  à  Dieppe  (6),  grand  chemin 
d'Arqués  (7),  grand  chemin  de  Caudebec  à  Arques  (8), 
chemin  du  Roy  nostre  Sire  tendant  à  Caudebec  (9),  che- 
min du  Roy  tendant  d'Arqués  à  Caudebec  (10). 

Notez  que,  plus  les  titres  sont  anciens,  plus  les  appella- 
tions qu'ils  contiennent,  supposent  d'importance  à  notre 
voie. 

A  Ou  ville  (11),  le  terrier  du  fief,  dont  nous  devons  une 

(i)  Titre  de  M.  Adam  de  Criquetot,  1709. 

(2)  Aveux,  Cricqvetot  et  Commanville,  t.  Il,  année  1609.  Bi- 
bliothèque du  Grand  Séminaire  de  Rouen.  —  Registre  des  Bap- 
têmes, 1 601-1667,  année  i63o,  Archives  de  la  Mairie. 

(3)  Aveux,  1. 1,  i63o. 

(4)  Aveux,  1. 1,  1645,  i652,  1659,  i683,  1755  ;  t.  II,  i632.  — 
Registre  des  Baptêmes,  1601-1667,  année  1620. 

(5)  Aveux,  1. 1,  i5  novembre  1723;  t.  II,  2  may  i55o,  2  may 
1595. 

(6)  Aveux,  t.  I,  16  juin  171 1. 

(7)  Aveux,  t.  I,  27  juillet  1644,  i5  novembre  1723;  t.  II,  1686. 

(8)  Aveux,  t.  I,  i632. 

(9)  Titres  de  la  Fabrique,  contrat  de  la  pièce  de  terre  sise 
aux  fosses  Poulardes,  autrefois  lo.  fosse  au  leu.  i55i. 

(10)  Titres  de  la  Fabrique,  contrat  de  Pasquet  Pouchout, 
17  novembre  i585. 

(11)  La  voie  traversait  le  bois  d*Ouville;  nous  l'y  avons  ren- 
contrée. 


3o7 

obligeante  communication  à  M.  de  Lescaude,  mentionne 
le  vieux  chemin  d'Arqués  désigné,  du  reste,  dans  un  aveu 
de  i655  rendu  au  seigneur  de  Crîquetot,  sous  le  nom  de 
grande  rue  tendant  de  Caudebec  à  Tabbaye  d*Ouyille(i). 
C'est  évidemment  le  chemin  que  prirent  le  roi  Charles  IX 
et  Catherine  de  Médicis,  lorsque,  le  4  août  1 563,  ils  inter« 
rompirent  leur  voyage  dTvetot  à  Bacqueville-en-Caux, 
pour  f  disner  en  Tabbaye  d'Ouviile  (2)  ». 

Au-dessus  du  Torp-Mesnil,  en  laissant  le  Mesnil-Mas- 
carel,  hameau  de  Thiédeville,  la  voie  atteignait  Auzouville- 
sur-Saâne.  A  l'endroit  où  elle  franchissait  la  rivière,  exis- 
tait autrefois  Tauberge  mal  famée  de  la  Grippière. 

D'Auzou ville  elle  se  dirigeait  sur  Saint-Ouen-le- 
Mauger(3)  et  creusait,  sur  les  flancs  de  la  colline,  une 
cavée  qui  subsiste  encore. 

Enfîn^  après  avoir  séparé  Lamberville  de  Bacqueville, 
elle  entrait  sur  le  territoire  de  cette  dernière  commune. 

Nous  ne  nous  sommes  pas  contentés  des  documents 
écrits;  nous  avons  interrogé  le  sol,  qui  ne  nous  a  pas 
refusé  son  précieux  témoignage.  Il  nous  a  montré,  ense- 
veli sous  une  couche  d*argile  d'une  profondeur  de  o^iSo 
à  omSo,  le  chemin  de  Caudebec  tel  qu'il  existait  autrefois. 
La  chaussée,  mesurée  en  plusieurs  endroits  (4)j  offre  une 
largeur  de  6  ™  3o.  Le  pavage,  très  compact,  fait  en  silex 
bruts  et  quelquefois  énormes,  a  une  épaisseur  qui  varie 
entre  o  "  3o  et  o  ^  40.  Mais,  nulle  part,  nous  n'avons 
remarqué  l'emploi  du  sable  et  de  la  chaux,  ni  les  quatre 
couches  de  maçonnerie  qu'on  donne  comme  les  signes 

(i)  Aveux,  t.  II,  i655. 

(2)  Nagerel,  cité  par  M.  Tabbé  Sauvage  dans  son  intéressante 
Histoire  populaire  du  Bourg  de  Bacqueville'en^^aux,  p.  39, 

(3)  Le  cadastre  de  Saint-Ouen  et  celui  d'Auzouvîlle  désignent 
notre  route  sous  la  dénomination  de  chemin  d*Yvetot  à 
Dieppe. 

(4)  Notamment  dans  les  pièces  de  terre  qui  portent  sur  le  ca- 
dastre, les  numéros  107,91,92. 


; 


3o8. 

caractéristiques  des  voies  romaines.  Notre  route  ne  serait- 
clle  qu'un  chemin  Brunehaut?  C'est  aux  experts  dans  la 
voirie  de  prononcer. 

Des  limites  de  Grcmonville  jusqu'au  chemin  rural  qui 
tendait  au  carrel  de  Criquetot  et  de  là  à  l'ancien  cime- 
tière, la  route  de  grande  communication  n^  55  suit  la 
voie  antique,  puis,  la  laissant  s'engager  à  gauche  dans  le 
Bois-des-Champs,  elle  longe  seulement  ce  hameau  sans  y 
pénétrer.  Cette  rectification  est  certainement  antérieure  à 
la  seconde  moitié  du  xvii«  siècle;  un  aveu  de  i652  en  fait 
foi  (i);  elle  doit  même  avoir  eu  lieu,  croyons-nous,  avant 
Henry  IV,  t  qui  le  premier  conçut  le  projet  d'améliorer 
les  chemins  >,  mais  dont  l'utile  entreprise  rencontra  une 
vive  opposition  de  la  part  des  députés  de  notre  pro- 
vince (2). 

Il  y  a  donc  trois  siècles  au  moins,  que  la  voie  a  été 
abandonnée  à  Criquetot,  sur  un  parcours  de  700  mètres, 
et,  en  aucun  endroit,  l'encaissement  n'en  est  resté  visible. 
Un  plan,  en  la  montrant  aux  yeux,  la  représentera  avec 
plus  d'exactitude  et  de  clarté  que  ne  ferait  une  description , 
et  l'indication  des  pièces  de  terre  que  nous  reproduirons, 
d'après  le  cadastre,  avec  leurs  numéros,  fournira  un 
moyen  facile  de  contrôler  nos  assertions. 


(i)  Dans  cet  aveu  conservé  au  Grand  Séminaire,  l'herbage 
n°  469  du  cadastre  est  ainsi  borné  :  d'un  côté  le  chemin  (rec- 
tifié) d'Arqués,  de  l'autre  côté,  le  lieu  presbytéral. 

(2)  M.  de  Beau  repaire ,  les  Ponts-et^Chaussées  dans  la  Gêné" 
ralité  de  Rouen  avant  178g*  Rouen,  i883. 

Nota.  —  Nous  ferons  remarquer  que,  sur  la  carte  de  la  Seine- 
Inférieure  au  temps  des  Romains  {la  Seine^ Inférieure  histo- 
rique, p.  28),  la  direction  du  vieux  chemin  manque  de  vérité, 
Elle  n'est  pas  même  conforme  au  tracé  de  l'abbé  Cochet  ;  ce 
n'est  pas  un  défaut.  Mais  ce  qui  en  est  un  grave^  c'est  que  cette 
route  d'Arqués  n'y  passe  point  par  Arques. 


3o9 


II. 

VOIE   ROMAINE   DE  LIMÉSY   A   OOUDEVILLE. 

M.  E.  Gaillard,  dans  ses  Recherches  archéologiques  sur 
la  Seine-Inférieure  y  mentionne  à  Auzouville-rEsneval, 
une  voie  romaine  sur  laquelle  l'abbé  Cochet  (i)  dit  n'avoir 
aucune  donnée.  Or,  elle  allait  de  Limésy  à  Doudeville, 
passant  par  Auzouville,  Saint-Martin-aux-Arbres,  Crique- 
tot-sur-Ouvilie,  et  Amfreville-les-Champs.  Aussi  le  chemin 
de  grande  communication  n»  88,  qui  en  suit  le  tracé,  est-il 
désigne  sous  le  nom  à^ancienne  voie  romaine^  sur  la  carte 
routière  du  canton  d*Yerville  dressée  en  1867  par  les 
soins  de  l'agent- voyer  en  chef  du  département,  M.  Fou- 
ché.  Des  vestiges  de  cette  route  antique  existent  encore 
sous  le  fossé  de  la  masure  n^  279.  L'épaisseur  totale  des 
diverses  couches  de  maçonnerie  dépasse  o^  5o.  A  Tangle 
formé  aujourd'hui  par  la  grande  rue  et  le  chemin  de 
Mantot,  la  chaussée  était  élevée  de  i  "»  3o  environ  au- 
dessus  du  niveau  du  sol.  Grâce  à  ce  remblai,  elle  traver- 
sait le  marais  (2)  de  Commanville  (3),  sans  être  jamais 
couverte  par  les  eaux. 

Dans  nos  titres  elle  est  appelée  :  chemyn  de  Rouen  à 
Saint- Valéry  (4),  chemin  de  Doudeville  à  Rouen  (5), 
grande  rue  de  Commanville  ou  simplement  grand'rue  (b), 

(i)  La  Seine^lnférieure  historique  et  archéologique  y  p.  79,  n°  3. 

(2)  Ce  marais  couvrait  la  masure  no  378,  et,  sans  doute  aussi, 
le  champ  n»  378  bis.  Il  est  maintenant  asséché  ;  et  les  eaux  plu- 
viales, sans  écoulement  naturel,  sont  reçues  dans  une  bétoire 
située  dans  la  pièce  de  terre  n°  245. 

(3)  Commanville,  hameau  populeux  de  Criquetot,  n^est  plus 
connu  aujourd'hui,  des  habitants,  que  sous  le  nom  de  Grand* Rue. 

(4)  Titre  de  M.  Adam  de  Criquetot,  année  1 709. 

(5)  Aveux,  1. 1,  1640.  Bibliothèque  du  Grand-Séminaire. 

(6)  Aveux,  1. 1,  i638,  3  novembre  1659, 1667;  t.  II,  1623,  1626 
1659.  —Archives  de  la  Fabrique,  contrat  de  Jacques  Fontaine, 
22  juin  1554. 


3io 

grand  chemin  de  Rouen  à  Commanville  (i),  grand  chemin 
de  Rouen  (2),  grand  chemin  de  Doudeville  à  Limcsy  (3), 
chemin  du  Roy  de  Doudeville  à  Limésy  (4),  grand  che- 
min du  Roy  (5),  la  Chaussée  (6),  chemin  de  la  chaussée  (7), 
chaussée  de  Doudeville  à  Limésy  (8). 

Il  est  vraisemblable  que  Limésy  et  Doudeville  n'étaient 
pas  les  points  extrêmes  de  la  voie  antique;  mais  qu'elle 
gagnait  la  Seine  à  Rotomagus  par  Pavilly  et  Barentin,  et 
la  mer  à  Saint- Valéry  ou  vers  Tcmbouchure  de  la  Dur- 
dent  (9). 

Au  xvii«  siècle,  et,  peut-être,  antérieurement,  elle  fut 
abandonnée,  sauf  par  les  gens  de  pied,  dans  sa  partie,  de- 
venue sans  doute  impraticable,  comprise  entre  la  route 
départementale  n»  6  et  le  village  d'Auzouville.  On  prenait 
alors,  en  face  du  château  de  Pimont,  la  troisième  voie, 
celle  d'Ouville-FAbbaye  à  Rouen  par  Barentin. 

IIL 

VOIE  d'où  ville-l'abbaye  a   ROUEN   PAR  BARENTIN. 

La  troisième  voie  était  l'ancien  chemin,  aujourd'hui 
supprimé,  d'Ouville  à  Rouen,  désigné  au  cadastre  de  Crî- 

(i)  Aveux,  1. 1,  i5  novembre  lyaS. 

^2)  Aveux,  1. 1,  27  juillet  1644;  t.  II,  lôSg,  1691,  1692. 

(3)  Aveux,  t.  II,  1671,  1684,  1723. 

(4)  Aveux,  t.  II,  1567. 

(5)  Aveux,  1. 1,  i632, 

(6)  Aveux,  t.  I,  1645. 
.  (7)  Aveux,  t.  II,  1625. 

(8)  Aveux,  t.  I,  1692,  1711;  t.  II,  1609,  1689.  --  Titres  de  la 
Fabrique,  1687.  —  Registre  des  baptêmes,  1601-1667,  23  sep- 
tembre 1629,  5  mai  i63o. 

(9)  Le  changement  de  direction  donné  à  notre  voie  la  fît  quel- 
quefois appeler  :  Grand  chemin  de  Doudeville  aux  Mares 
(Aveux,  t.  I,  i685,  1711,  1723;  t.  II,  i655),  et  grand  chemin 
du  Rcy  de  Doudeville  aux  Mares  (I,  i638, 1661, 1687  ;  II,  1711). 
Les  Mares  sont  un  hameau  appartenant  en  partie  à  la  commune 
de  Saint-Martin-aux-Arbres,  en  partie  à  celle  de  Motteville. 


3ii 

quetot  sous  la  dénomination  d'Ouville-l'Abbaye  à  Cide- 
ville.  Il  partait  de  la  route  d'Arqués,  auprès  de  Tabbaye, 
en  face  de  la  vieille  auberge  de  La  BotiCy  formait  la 
limite  commune  d'abord  entre  Ouville  et  Yerville,  puis 
entre  Yerville  et  Criquetot  ;  et ,  après  avoir  traversé  la 
chaussée  de  Limésy,  il  entrait  sur  notre  territoire,  Ion- 
geait  la  Folie  (i)  et  gagnait  les  Mares  (2),  Hongrie  (3),  la 
Sauvagerie  (4),  Cidetot  (5),  Panneville,  Hardouville  et 
Barentin.  Dans  les  titres  il  est  nommé  :  chemin  tendant 
du  prieuré  d'Ouville  à  Pavilly  (6),  chemin  de  Barentin  {7), 
chemin  du  Roy  nostre  sire  tendant  de  l'Abbaye  d'Ouville 
aux  Mares  (8). 

Le  cailloutls  (9)  a,  sur  Criquetot,  une  largeur  de  6 1°  20; 
répaisseur  varie  entre  o  ™  22  et  o  "  34. 

De  cette  route,  seule  la  portion  qui  relie  la  voie  d'Ar- 
qués à  la  chaussée  de  Doudeville  pourrait  avoir  une 
origine  ancienne  ;  il  est  évident  que  le  prolongement  du 
chemin  ne  remonte  qu'à  Fépoqueoù  Ton  dut  abandonner 
la  chaussée.  Mais  cette  époque,  nous  ne  saurions  la  déter- 
miner. Seulement,  en  1629,  la  route  d*Ouville  aux  Mares 
est  qualifiée  de  chemin  du  Roy^  et  peut-être,  à  cette  date, 
y  avait-il  longtemps  déjà  qu'elle  était  fréquentée. 

Nous  dirons,  seulement  pour  mémoire^  qu'à  la  voie 

(i)  Hameau  de  Criquetot. 

(2)  La  seule  maison  de  ce  hameau  qui  soit  sur  la  commune  de 
Motteville,  était  l'auberge. 

(3)  Hameau  de  Motteville. 

(4)  Hameau  de  Cideville. 

(5)  Hameau  de  Mesnil-Panneville. 

(6)  Archives  de  la  fabrique  de  Criquetot,  fieffé  du  27  août 
1770. 

(7)  Archives  de  la  Fabrique;  contract  entre  le  curé  de  Crique- 
tot et  les  religieux ^d^OuvilIe^  au  sujet  du  dixmage;  22  août  1644. 

(8)  Registre  des  Baptêmes  (i  601-1 663)^  23  septembre  1629. 

(9)  Ngus  avons  pratfqué  les  fouilles  entre  la  Campagne  et 
Pi  mont,  dans  le  champ  inscrit  sous  le  n»  33  au  cadastre. 


3l2 

d'Où  ville  se  rattachait  sur  notre  territoire,  au  hameau  de 
la  Campagne,  la  route  de  Saint- Valéry  à  Rouen  par 
Angiens,  Ermenouville,  Etalleville,  Baudribosc  et  Yé- 
manville,  route  que  Cassini  a  figurée  sur  sa  carte.  Elle  se 
termine  aujourd'hui  à  la  voie  d'Arqués,  qu'elle  traversait 
autrefois,  ainsi  que  le  bois  de  Criquetot.  Nous  avons  lieu 
de  croire  que  c'est  le  chemin  harengier  dont  il  est  feit 
mention  dans  le  précieux  aveu  de  Jumiéges  de  l'an  1 526. 

Emmanuel  Auvray. 

Rouen  :  ancien  hôtel  de  r abbaye  de  Sainte-Cathe- 
rine. —  M.  Pelay  communique  le  dessin,  relevé 
diaprés  nature,  d^une  ancienne  construction  dépeadant 
d^une  maison  située  entre  la  lue  Tu  vache  et  la  rue  des 
Crottes,  précédemment  occupée  par  M.  Duforestel, 
épurateur  d^huiles,  et  que  de  nouvelles  édifications 
ne  permettent  plus  d'apercevoir. 

A  cette  occasion,  M.  de  Beaurepaîre  lit  le  résumé 
de  ses  recherches,  condensé  dans  une  notice  sur 
rhôtel  de  Tabbaye  de  Sainte-Catherine. 

NOTICE  SUR  l'ancien  HÔTEL    DE  SAINTE-CATHERINE  A  ROUEN. 

Les  déblaiements  opérés  récemment  dans  le  quartier 
Martainville  pour  l'ouverture  de  la  rue  d'Alsace- Lorraine 
ont  permis  d'apercevoir  un  mur  en  pierre  de  bel  appareil, 
perce  de  fenêtres  dont  la  forme  paraît  indiquer  une  cha- 
pelle du  xiie  siècle.  Ce  mur  qui,  la  première  fois  que  j'eus 
l'occasion  de  le  voir,  me  causa  quelque  surprise,  n'avait 
point  échappé  à  l'œil  vigilant  de  deux  de  nos  collègues, 
MM.  Paul  Baudry  et  E.  Pelay.  Mieux  avisés  que  moi,  ils 
s'étaient  même  empressés  d'en  faire  prendie  des  dessins, 
qu'ils  auront,  je  n'en  doute  pas,  l'obligeance  de  nous  com- 
muniquer. Aujourd'hui,  la  chose  ne  serait  peut-être  plus 
aussi  aisée.  Des  maisons  se  sont  élevées  comme  par  enchan- 
tement sur  ces  terrains  vides  et  nivelés,  et,  à  Theure  qu'il 


3i3 

est,  elles  dérobent  complètement  au  passant  la  vue  du 
monument  en  question. 

Je  m*associerai  toutefois  â  eux,  slls  veulent  bien  me  le 
permettre,  pour  l'œuvre  si  méritoire  qu'ils  ont  entreprise 
et  qu'ils  poursuivent  à  Tenvi  Tun  de  l'autre,  de  conserver 
le  souvenir  du  vieux  Rouen  qui  disparaît  chaque  jour  davan- 
tage; et  je  vous  dirai.  Messieurs,  en  peu  de  mots,  ce  que 
j'ai  cru  reconnaître  dans  cette  intéressante  construction, 
la  plus  antique  assurément  de  tout  le  quartier  Martainville, 
et  Tun  des  très  rares  vestiges  de  l'architecture  romane 
dans  la  ville  de  Rouen. 

Ainsi  que  presque  toutes  les  communautés  religieuses  du 
diocèse,  Tabbaye  de  Sainte-Catherine  du  Mont  avait  son 
hôtel  à  l'intérieur  de  la  ville. 

Dans  une  société  constituée  comme  Test  présentement 
la  nôtre,  la  distance  de  Rouen  au  sommet  de  la  côte  Sainte- 
Catherine  nous  paraîtrait  si  peu  considérable  qu'on  ne 
comprendrait  pas  tout  d'abord  l'utilité  de  cette  seconde 
habitation.  On  pensait  autrement  au  moyen-âge.  Rouen, 
ne  l'oublions  pas,  était  une  place  fortifiée,  dont  les  portes 
ne  s'ouvraient  qu'à  de  certaines  heures  du  jour.  Ne  fallait- 
il  pas,  d'ailleurs,  prévoir  les  guerres  et  ces  temps  de 
troubles,  où,  dans  les  faubourgs,  il  n'y  avait  plus  pour 
l'habitant  la  moindre  sécurité  ? 

En  nous  reportant  aux  habitudes  de  l'ancien  temps,  on 
ne  doit  donc  pas  trouver  étrange  que  l'abbaye  de  Sainte- 
Catherine  ait  eu  son  hôtel  à  Rouen,  tout  aussi  bien  et  pour 
les  mêmes  raisons  que  le  prieuré  de  Bondeville,  les  abbayes 
de  Saint-Georges-de-Boscherville,  de  Jumiéges,  de  Saint- 
Wandrille,  et  tant  d'autres  communautés  religieuses  y 
avaient  le  leur  ;  et  il  était  tout  naturel  que  cet  hôtel  fût 
placé  dans  le  qu^^tier  où  ce  monastère  possédait  nombre  de 
maisons,  fieffées  à  des  bourgeois  suivant  l'usage,  et  un 
moulin  d'un  beau  revenu,  sur  la  rivière  de  Robec,  non 
loin  de  celui  de  la  Commune. 

Si  l'on  devait  en  croire  Farin,  cet  hôtel  serait  venu  à 


3i4 

Tabbaye  de  Sainte-Catherine  par  suite  de  la  donation  qui 
lui  en  aurait  été  faite  par  un  des  glorieux  compagnons  de 
saint  Louis  (i). 

Voici  le  passage  de  notre  auteur  : 

c  II  est  fait  mention,  dans  les  chartes  et  vieux  parchemins 
du  Couvent  du  seigneur  Thomas  de  Gades  Renicourt, 
chevalier  et  seigneur  du  lieu  de  Canteleu  de  Montigny, 
garde  et  chevetain  du  châtel  et  forts  du  pont  de  Rouen, 
et  de  sa  femme  Alienor  Âlorges.  Lesquels  (comme  dit  ce 
vieux  manuscrit)  par  accord  donnèrent  deux  jours  de 
voirieres  fines  au  montier  des  frères  mineurs  de  Saint- 
Clement  de  Rouen.  En  son  vivant,  il  fut  homme  de  bien, 
et  alla  deux  fois  outre  mer  contre  les  Turcs  avec  le  Roy 
saint  Loiiis,  aux  années  1246  et  1260,  et  portoit  en  ses 
armes  de  gueules  au  sacre  d'or  à  membres  clos  et  yeux 
percez,  et  pour  sa  devise  avoit  tenir  son  droit, 

c  II  donna  aux  frères  mineurs  de  Rouen  200  florins 
d'or  aux  léopards  pour  le  bâtiment  du  Dortoir.  Item  un 
calice  d'argent  doré  pesant  quatre  marcs  et  demy,  trois 
cofinots  d'argent  et  trois  cierges  pour  ardoir  devant  la 
belle  dame  (2)  du  montier.  Il  donna  cinquante  chapeaux 
de  batailleurs  aux  frères  religieux  du  Mont  aux  ladres.  Il 
donna  son  manoir  de  Gades  Renicourt  avec  la  chcnaye  et 
le  grand  pré  de  Couvillon  au  prieur  et  aux  religieux  de  la 
Madeleine  de  Rouen.  Il  mourut  le  jour  de  saint  Pierre  aux 
liens,  Tan  1274,  âgé  de  63  ans,  sans  laisser  aucuns  enfants 
de  son  fait,  et  fut  inhumé  au  chapitre  de  la  Sainte-Trinité- 
lez- Rouen,  ausquels  religieux  il  donna  le  moulin  posé  près 
du  moulin  du  Chapitre,  vulgairement  appelé  le  moulin  des 
Planches  et  sa  maison  qui  pose  sur  la  rué  des  Crotes,  à  la 
charge  que  les  religieux  feroient  trois  obits  par  an,  et  un 
peu  après  sa  femme  Aliénor  des  Alorges  quitta  le  monde  et 

(i)  Histoire  de  Rouen,  3e  partie,  p.  263. 
(2)  La  sainte    Vierge.   Cette   appellation  était   commune   au 
xve  siècle. 


3i5 

se  rendit  nonnain  aux  amies  de  Dieu  de  Saint- Léonard  de 
RoUen  (i).  t 

Le  chroniqueur  anonyme  cité  par  Farin,  après  avoir  dit 
que  Thomas  de  Renîcourt  n'avait  pas  laissé  d'en&nts  de 
son  feit,  nous  parle  de  son  fils  puîné  Guillaume  de  Gades 
Renîcourt,  qui  serait  mort  outre  mer  en  la  saillie  de  Da- 
miette  y  du  mariage  de  celui -ci^  de  ses  enfants  et  de  la 
famille  de  Saint- Laurent,  alliée  aux  Gades  Renicourt  (2). 

Nous  avouons,  sans  le  moindre  embarras,  que  tout  nous 
paraît  suspect  dans  ce  récit  :  le  titre  d'honorable  donné  à 
un  chevalier  ;  cette  accumulation  de  titres  de  seigneuries 
hors  d'usage  au  moyen-âge  ;  cette  qualification  de  capitaine 
du  pont  de  Rouen  ;  ce  nom  de  dame  des  Alorges  au  lieu 
de  dame  Alorge;  cette  mention  d'armoiries  compliquées, 
avec  une  devise,  sans  compter  ces  5o  chapeaux  de  batail- 

(i)  Dom  Pommeraye  n'a  guère  fait  que  copier  Farin,  Histoire 
de  V abbaye  de  Sainte^Trinité  dite  du  Mont-de-Sainte-Catherine, 
p.  8iy  ce  qui  ne  l'a  pas  empêché,  dans  le  cours  de  la  même 
Histoire,  de  iaire  remonter  bien  plus  haut  la  donation  faite  de 
THôtel  Sainte-Catherine  aux  religieux  de  l'abbaye  de  Sainte- 
Trinité  :  u  Le  bon  religieux  Siméon  et  ses  confrères  (du  Mont- 
Sinaî)  estans  donc  arrivés  à  Rouen,  furent  recommandez  à  un 
homme  très  noble,  dit  la  Chronique  [de  Verdun],  nommé  Gos- 
selin  qui  les  receut  fort  humainement  dans  son  logis  et  leur 
fournit  abondamment  tout  ce  qui  leur  estoit  nécessaire  pour  se 
délasser  des  fatigues  d'un  si  long  et  si  pénible  voyage.  La  maison 
de  ce  seigneur  etoit  située  (selon  que  l'assure  l'ancienne  tradition), 
proche  Saint-Maclou  au  lieu  qui  est  possédé  par  les  Pères  Char- 
treux et  les  religieux  de  cette  abbaye  et  s'appelle  encore  l'hôtel 
de  Sainte-Catherine.  »  Cependant  Dom  Pommeraye  a  mis  cette 
note  en  manchette  :  «  J'ai  toutefois  de  la  peine  à  croire  ceci, 
d'autant  que  Saint-Madou  était  hors  de  la  ville  en  ce  temps- là.  > 

(a)  Famille  de  Saint-Laurent.  Saint-Laurent,  Général  de  Nor- 
mandie, domicilié  sur  la  paroisse  Saint-Jean  de  Rouen  dès  i333, 
décédé  le  ler  avril  i538.  Autre  Général,  Jean  de  Saint-Laurent, 
décédé  le  ao  décembre  1 546,  inhumé  dans  le  chœur  de  Saint- 
Jean  de  Rouen. 


3i6 

leurs  et  ces  florins  d'or  aux  léopards.  A  vrai  dire,  je  ne 
puis  voir  là  qu'une  grossière  supercherie  imaginée  par  un 
généalogiste  du  xvi^  siècle,  sinon  môme  du  xvii«  siècle, 
pour  flatter  la  vanité  d'une  famille  qui  n'y  regarda  pas  de 
trop  près,  et  dont  les  alliances  et  les  armes  sont  rappelées 
dans  ce  singulier  document  avec  un  à-propos  fort  équi- 
voque. 

J'ajoute  qu'on  ne  trouve  aucune  trace  d'un  chevalier 
Gades  Renicourt,  ni  de  ses  enfants  ni  de  ses  prétendues 
libéralités,  dans  les  archives  des  établissements  dont  il  fut 
soi-disant  le  bienfaiteur. 

On  voit  bien  que  l'abbaye  de  Sainte-Catherine  possédait 
anciennement  un  moulin  sur  Robec  ;  mais  on  voit  aussi 
qu'il  lui  appartenait  bien  antérieurement  à  la  fin  du 
xiiic  siècle,  et  je  suis  très  porté  à  croire  que  l'hôtel  de  la 
rue  des  Crotes  faisait  partie  de  sa  dotation  primitive. 

Pour  nous  en  tenir  aux  documents  certains,  disons  que 
cet  hôtel,  dit  l'hôtel  de  Sainte-Catherine,  devait  être,  entre 
la  Saint-Michel  145 1  et  la  Saint-Michel  1432,  habité  par 
quelques-uns  des  religieux  de  la  Saînte-Trinité-du-Mont. 
Cette  année-là,  à  l'occasion  d'une  inhumation,  ces  religieux 
firent  une  donnée  (distribution)  dans  le  cimetière  de 
Saint-Maciou,  leur  paroisse  :  ils  payèrent  à  l'œuvre  de 
saint  Maciou  18  d.»  au  fossier  qui  ouvrit  l'huis  de  l'aître, 
i5  d.,  aux  maçons  de  l'aître,  2  s.  3  d. 

Un  compte  de  1622  fait  mention  de  20  mesures  de 
bûches,  de  2  muîds  d'avoine  qui  furent  portés  à  la  maison 
des  religieux  de  Sainte-Catherine  ;  de  certains  travaux  qui 
furent  faits  au  jardin  dépendant  de  cette  maison. 

En  1 600,  après  que  la  manse  abbatiale  de  Sainte-Cathe- 
rine eut  été  réunie  à  la  Chartreuse  de  Bourbon-lès-Gaillon  ; 
qu'on  eut  rasé,  conformément  à  l'ordre  du  Roi,  les  murs 
de  la  vieille  église  contemporaine  de  Guillaume-le- Con- 
quérant, les  religieux  bénédictins  transférèrent  leur  com- 
munauté à  l'hôtel  Sainte-Catherine.  Ils  l'occupaient  lors- 
qu'ils traitèrent  avec  l'Hôtel- Dieu  de  Rouen,  qui  leur 


3i7 

donna,  en  échange  d'une  partie  de  leurs  biens,  le  prieuré 
de  Saint-Julien  près  de  Rouen,  où  ils  vécurent  assez  libre- 
ment et  presque  sans  forme  de  communauté  jusqu'à  ce 
que,  moyennant  quelques  pensions  viagères,  les  derniers 
représentants  de  Tantique  monastère  abandonnèrent  aux 
Chartreux  ce  qui  leur  restait  de  leur  temporel. 

Le  21  février  1601,  ils  avaient  loué  à  Charles  Le  Sueur 
c  leur  maison  de  Saint-Maclou,  dite  vulgairement  la  maison 
abbatiale  de  Sainte-Catherine,  ayant  issue  par  la  rue  des 
Crottes.  » 

En  161 3,  ils  firent  bail  de  cette  maison  à  Pierre  Martel, 
bourgeois  de  Rouen.  Elle  est  ainsi  désignée  :  «  Une  maison 
de  fond  en  comble  avec  le  jardin,  court  et  estable,  dépen- 
dant de  ladite  maison,  nommée  Thostel  Sainte-Catherine, 
assise  en  la  paroisse  Saint-Maclou  de  Rouen,  ayant  sortie, 
d'un  costé,  en  la  rue  Notre-Dame,  et,  d'autre  costé,  à  la 
rue  des  Crottes,  réservé  ung  corps  de  logis  estant  proche 
de  la  porte  du  costé  de  ladite  rue  des  Crottes  et  une  vuide 
place  joignant  la  maison  appartenant  à  l'abbaye  de  Corne- 
ville.  »  Le  bail  était  fait  pour  9  ans  par  le  prix  de  3oo  1. 
par  an,  à  charge,  au  preneur,  d'entretenir  la  maison  de 
menues  réparations,  de  ne  point  charger  les  greniers  de 
plus  de  5  à  6  muids  de  grain,  de  tailler  la  vigne  du  jardin, 
de  conserver  les  arbres  fruitiers,  de  souffrir  l'entrée  des 
religieux  de  ladite  maison  pour  aller  chercher  de  l'eau  au 
puits,  quand  ils  occuperaient  le  corps  de  logis  par  eux 
réservé.  Ils  avaient  aussi  retenu  que^  dans  le  cas  où  ils 
seroient  en  nécessité  de  sortir  de  la  maison  de  Saint-Julien 
à  cause  des  guerres,  le  preneur  serait  obligé  de  leur  quitter 
cette  maison,  à  condition  qu'on  lui  rendrôit  le  vin  au 
prorata,  sans  formalité  de  procès,  t 

Nouveau  bail  pour  le  même  prix,  pour  le  même  espace  de 
temps,  au  même  particulier,  en  1621.  Il  s'obligeait  à  faire 
avance  de  756 1.  pour  la  construction  d'un  bâtiment  neuf  le 
long  de  la  rue  des  Crottes.  Dans  le  même  temps,  le  petit 
corps  de  logis  dont  il  est  question  ci-dessus  était  loué  à  la 


3i8 

veuve  et  aux  enfants  de  défunt  Guillaume  Bellin,  qui  pour- 
rait bien  être  le  père  du  prieur  des  religieux  de  Sainte- 
Catherine  transfères  à  Saint- Julien. 

Le  3  novembre  1659^  bail  du  même  hôtel  à  Michel  Cave- 
lier,  marchand  de  Rouen.  I^s  bailleurs  retiennent  encore 
la  faculté  pour  eux  de  venir  demeurer  dans  cette  maison, 
c  dans  le  cas  où  la  guerre  et  le  ravage  les  obligeraient  à 
abandonner  leur  abbaye.  » 

Autres  baux  au  même  particulier,  aux  années  1668, 1671, 
1672. 

Le  1 3  juillet  1698,  les  Chartreux,  substitués  aux  religieux 
bénédictins  de  Sainte -Catherine,  iiefient  à  Siméon  Cave- 
lier,  lieutenant  particulier  criminel  au  bailliage  de  Rouen, 
y  demeurant,  rue  Tuvache,  le  grand  tènement  de  maison 
situé  entre  les  rues  Notre-Dame,  Tuvache  et  des  Crottes, 
appelé  vulgairement  Thôtel  de  Sainte-Catheiine,  consistant 
en  plusieurs  corps  de  vieils  bâtiments,  cours  et  jardins,  le 
tout  borné,  d'un  bout,  la  rue  Notre-Dame,  d'autre  bout, 
la  rue  Tuvache  et  des  Crottes,  cette  fieffé  faite  pour  200  1. 
de  rente  par  an. 

Le  22  octobre  1744,  ce  tènement  de  maisons  était  vendu 
par  Michel-Siméon  Cavelier,  chevalier  de  Saint- Louis, 
colonel  de  dragons,  et  par  Siméon  Cavelier  de  Tourville, 
aussi  chevalier  de  Saint-Louis,  capitaine  du  régiment  des 
Gardes  françaises,  seuls  fils  de  Siméon  Cavelier,  président 
en  la  Cour  des  Aides  et  finances,  à  P.* erre- Vincent  Le 
Maistre,  marchand  fôibricant  toilier  de  Rouen,  à  charge 
de  payer  les  200  1.  de  rente  aux  Chartreux. 

Le  14  décembre  1757,  Le  Maistre  vendit  une  partie  de 
ce  tènement  à  François  Vincent,  marchand  passementier. 

Les  titres  de  propriété  furent  remis  à  la  veuve  Laurent, 
propriétaire  de  toute  la  maison,  après  qu^elle  eut  racquitté 
les  200  1.  de  rente  le  i3  fructidor  an  IL 

Le  souvenir  le  plus  intéressant  que  je  puisse  rattacher  à 
l'hôtel  Sainte-Catherine,  c'est  que  ce  fut  là,  dans  le  petit 
corps  de  logis  rései/é  par  les  religieux  bénédictins   de 


3i9 

Saint-Julien,  que  mourut,  le  22  novembre  1695,  Claude 
Bigot,  prieur  de  Saint- Julien^  Tun  des  principaux  bienfai- 
teurs de  THôtel-Dieu  de  Rouen. 

Une  maison  appartenant  aux  bénédictins  de  Sainte-Ca- 
therine, sise  rue  Notre-Dame,  était  occupée  le  2  août 
1439  par  Robin  Pinel,  dont  le  nom  nous  rappelle  celui 
d*un  entrepreneur  de  fêtes  publiques,  machiniste  ou  com- 
positeur de  mystères  et  de  compositions  dramatiques 
comme  on  les  comprenait  autrefois. 

Au  coin  de  la  rue  des  Crottes,  vers  le  bas,  se  trouvait 
la  maison  de  Jean  Du  Four,  dit  des  Presses,  dont  les 
presses  sont  souvent  citées  dans  des  actes  du  tabellionage. 

Dans  la  même  rue,  une  maison,  nommée  le  Cloître, 
appartenait  aux  représentants  de  Michel  Chinerre,  bour- 
geois de  Rouen. 

Elle  est  ainsi  désignée  dans  un  acte  du  tabellionage  de 
Rouen,  du  3  novembre  1461.  a  Hostel  nommé  le  Cloestre 
avec  cour,  jardins,  estable  et  chapelle,  paroisse  Saint- 
Maclou,  rue  des  Crotes,  où  demeuroit  naguères  messire 
Jehan  Le  Noble,  prestre,  curé  de  Floques.  t 

M.  Pelay  ajoute  que  les  constructions  ainsi  remar- 
quées se  continuent  dans  les  propriétés  voisines;  que, 
notamment  sur  la  propriété  Lamoureux,  existent  des 
arcades  gothiques  et  des  voûtes  en  ogive. 

Sceau  des  Jacobins  de  Rouen.  —  M.  Lormîer  fait 
passer  sous  les  yeux  de  la  Commission  un  sceau  en 
cuivre  autour  duquel  on  lit  la  légende  suivante  sigil- 

LVM.    C.    s.    JACOBI.    ROTH.     ORD.    F.    PRiEDICATORVM ;     EU 

milieu  un  écusson  représentant  la  figure  de  saint 
Jacques  avec  un  bourdon  de  pèlerin,  et  un  chef  de 
trois  fleurs  de  lis  d'or. 

La  chapelle  des  Jacobins  occupait  Taxe  de  la  rue 
Racine,  dont  la  création  ne  date  que  de  Tan  vi. 


320 

M.  de  Beaurepaire  observe  que  cette  chapelle  était 
réglise  du  couvent. 

M.  Pelay  dit  que  la  messe  s^y  est  célébrée  plus  tard 
quedans  les  autres  églises.  M.  de  Beaurepaire  indique 
que  ce  renseignement  n'a  rien  que  de  vraisemblable, 
le  prieur  Gosselin  étant  archiviste  et  favorable  aux 
idées  qui  dominaient. 

Etalon  en  bronze  de  Bolbec,  —  M.  du  Bouliay 
communique  une  lettre  de  M.  Brianchon  relative  au 
don  fait  par  notre  collègue  au  muséed'un  boisseau 
étalon  de  Bolbec. 

Gruchet-le-Valasse,  ler  novembre  i883. 

Monsieur  et  cher  Directeur, 

J'ai  rhonneur  de  devancer  quelque  peu,  par  des  consi- 
dérations qui  ne  vous  sont  pas  étrangères,  le  terme  que  je 
m'étais  fixé  pour  offrir  au  musée  d'antiquités  de  la  Seine- 
Inférieure  un  objet  ancien  que  je  n'avais  promis  à  Tabbé 
Cochet,  votre  prédécesseur  et  mon  ami,  qu'après  ma  mort. 
Cet  objet  n'est  autre  que  le  c  boisseau  estalon  à  bled  >•  de 
Bolbec,  dont  vous  me  permettrez  de  consigner  ici  sommai- 
rement l'historique  et  la  description. 

Le  boisseau  étalon-  de  Bolbec  est  d*airain,  suivant  le 
conseil  de  Gui  Pape  (Quest.  490),  et  orné  sur  tout  l'exté- 
rieur de  feuillages  gravés  en  creux  qui  décèlent  la  main 
du  xive  siècle.  Son  cercle  supérieur,  apposé  après  coup,  en 
cuivre  rouge  uni,  présente  un  écusson,  —  de  gueules^  à 
deux  fasces  éCor^  —  aux  armes  des  ducs  d'Harcourt,  sei- 
gneurs hauts  justiciers  de  Bolbec,  Lillebonne  et  autres 
lieux.  Deux  fleurs  de  lys  accostent  les  supports,  qui  sont 
deux  lions.  La  couronne  ducale,  dont  est  sommé  Técu, 
précise  l'addition  d'une  bordure  qui  ne  saurait  être  anté- 
rieure au  xviiie  siècle,  puisque  l'érection  en  duché  du 
comté  d'Harcourt  date  de   1700.  La  mesure  de  Bolbec 


'i 


321 

pèse  42  livres  ou  21  kilogrammes,  et  contient  exactement 
les  24  pots  d'Arqués  ou  43  litres  77  centilitres  réglemen- 
taires pour  Tancien  boisseau  de  Bolbec  et  Lillebonne. 
Notre  étalon  servait  évidemment  de  setier  régulateur  aux 
halle  et  marché  de  Bolbec  sur  lesquels  s^ctendait  la  juri- 
diction des  baronnie,  comté  et  duché  d'Harcourt.  Relégué, 
à  la  révolution,  dans  les  greniers  de  l'Hôtel-de- Ville  de 
Bolbec,  rétalon  dont  il  s'agit  faisait  partie  d'un  lot  de 
vieille  ferraille  qui  fut  vendu  administrativement  le 
6  février  i865.  Il  en  a  été  distrait  pour  m'ètre  cédé  par 
un  sieur  Le  Hongre,  le  7  décembre  1866. 

Mais  à  quel  seigneur  d'Harcourt  attribuer  la  paternité 
du  boisseau  d'airain  ?  A  Jean  HI,  jusqu'à  preuve  contraire, 
et  pour  la  raison  que  voici  :  Une  charte  de  Philippe  le  Bel, 
de  1 3oo,  rapportée  par  de  La  Roque,  dans  son  Histoire  de 
la  maison  d'Harcourt^  t.  HI,  p.  233,  s'exprime  ainsi  : 
Notum  sit  quod  nos  dilecto  et  fideli  Joanni  Domino  de 
Hericour  (Jean  HI,  dit  le  Bon  on  le  Boiteux^  sire  et  baron 
d'Harcourt,  seigneur  de  Lillebonne  et  Gravenchon,  mort 
en  1 326)  concessimus  in  villa  mei  Trium  Petrarum  (les 
Trois-Pierres)  mercatum  institutum  ad  villam  tuam  de 
Boulebet  (Bolbec). 

Du  marché  au  setier,  il  n'y  a  qu^un  pas.  Et  pourquoi 
ne  serait-ce  point,  sinon  la  première  année,  du  moins 
Tune  des  premières  années  du  xiv^  siècle  et  de  son  gouver- 
nement, que  Jean  le  Bon  l'aurait  voulu  franchir  ? 

Cette  mesure  seigneuriale  a  figuré  :  !<>  à  l'exposition 
universelle  de  1867,  à  Paris,  où  elle  a  valu  à  l'exposant 
une  médaille  de  bronze  ;  2°  à  l'exposition  régionale  du 
Havre,  en  1868;  3<>  à  l'exposition  internationale  de  1878, 
à  Paris,  où,  placée,  par  les  soins  compétents  d'un  bien- 
veillant attaché  au  ministère  des  Beaux- Arts,  M.  Maillet 
du  boullay,  dans  la  salle  du  X  V^  siècle,  sur  un  socle,  près 
de  la  vitrine  du  musée  départemental,  elle  produisait, 
selon  son  expression,  le  meilleur  effet  ;  et  40  à  l'exposition 
rétrospective  de  Caen,  cette  année  même. 


322 

J'espère  que  le  c  boisseau  estalon  à  bled  i  de  Bolbec, 
duxiv*  siècle,  d'après  Andrc  Pottier,  ou  tout  au  moins 
des  premières  années  du  xv«,  comme  le  pensent  MM.  Ch. 
de  Beaurepaire  etTabbé  Sommcnil,  et  qualifie  par  Adrien 
de  Longpérier  c  d'étalon  du  setier  de  Lillebonne,  i  dou- 
blement recommandé  ainsi  par  sa  griffe  du  moyen-âge  et 
par  son  attribution  normande,  sera  reçu  comme  en  famille 
dans  ce  splendide  reliquaire  départemental  normand  qu'on 
appelle  le  musée  d'antiquités,  si  bien  dirigé,  dans  le  passé, 
par  Achille  Deville,  André  Pottier  et  l'abbé  Cochet,  et, 
dans  le  présent,  par  M.  Maillet  du  Boullay,  dont  je  suis, 
avec  les  plus  dévoués  sentiments  d'estime  et  de  confia- 
ternité,  le  très  humble  et  très  affectionné  serviteur. 

Briamchon. 

La  Commission  en  exprime  tous  ses  remercîments. 

M.  de  Beaurepaire  donne  lecture  d^une  notice  sur 
la  façade  de  l'ancienne  maison  de  la  Grosse-Horloge, 
n«  i3i. 

NOTICE  SUR  UNE  MAISON  DE  LA    RUE    DE   LA  GROSSE-HORLOGE. 

On  sait  que  la  belle  £açade  qui  décore  le  jardin  de  la 
tour  Saint-André  provient  d'une  ancienne  maison  qui  fut 
démolie,  il  y  a  quelques  années,  lors  de  l'ouverture  de  la 
rue  Jeanne-d'Arc. 

Cette  maison,  portant  les  numéros  129  et  i3i  de  la  rue 
de  la  Grosse- Horloge,  anciennement  rue  Vanterie,  appar- 
tenait aux  hospices  de  Rouen  et  précédemment  à  l' Hôtel- 
Dieu  de  la  Madeleine. 

La  ville  eut  â  payer,  pour  cette  maison,  aux  hospices, 
une  indemnité  de  62,5oo  1.  Elle  s*en  réserva  la  façade  par 
le  traité  qu'elle  conclut  avec  MM.  Poncet  et  Lévy. 

Je  n'ignore  pas  que,  dans  le  temps  même  de  ce  traité, 
on  s'est  occupé  de  recueillir  quelques  renseignements 
historiques  sur  cette  maison,  très  remarquable  a<:surément, 


323 

et  Tun  des  types  les  plus  parfaits  de  Tarchitecture  de  la 
Renaissance.  Peut-être  ceux  que,  de  mon  côte,  }'ai  pu  me 
procurer,  font-ils  double  emploi  avec  ceux  qui  ont  déjà  été 
signalés.  A  tout  hasard,  je  vous  demande  de  les  consigner 
dans  une  très  courte  notice. 

Le  tènement  de  maisons  dont  il  ne  subsiste  plus  que  la 
plus  brillante  partie  avait  été  emphytéosé  par  THôtel-Dieu 
pour  99  ans,  qui  devaient  nnir  à  Noël  1870,  moyennant 
5,000  1.  de  vin  de  bail  et  une  redevance  annuelle  de 
3,3oo  1.,  à  Pierre-Paul  Thibault,  secrétaire  du  Roi,  négo- 
ciant à  Rouen,  3o  décembre  1779. 

Précédemment  il  avait  été  occupé,  à  titre  de  location, 
par  M™e  veuve  Thibault  et  par  son  fils,  1763-1779;  par 
M.  François  Cecille,  1746- 1763  ;  par  Thomas  Le  Gendre, 
aux  premières  années  du  xviii»  siècle. 

L'Hôtel-Dieu  le  possédait  dès  1698. 

Le  i5  août  de  cette  année,  Jacques  Chappelier,  sieur  du 
Boisguillaume,  demeurant  à  Rouen,  au  ^ubourg  Saint- 
Sever,  avait  vendu  à  THôtel-Dieu,  en  même  temps  que  le 
fief  du  Boisguillaume,  le  tènement  en  question,  ainsi  dési- 
gné :  «  Un  tènement  de  maisons  en  deux  louages,  rue  du 
Gros  Horloge,  paroisse  Saint-Jean,  Tun  occupé  par  le  sieur 
Simon  Gruslé,  marchand  plumnssier,  l'autre  par  M.  Le 
Gendre,  borné  par  les  héritiers  de  la  succession  de 
M.  Scott, ....  provenant  de  la  succession  de  Jacques  Chap- 
pelier, cousin  du  vendeur,  qui  Tavoit  acquis  de  messire 
Adrien  Le  Seigneur^  sieur  de  Reuvîlle,  conseiller  du  Roi 
en  ses  conseils  d'Etat  et  privé,  président  au  Bureau  des 
finances  de  la  Généralité  de  Rouen,  en  son  nom  et  se  fai- 
sant fort  de  messire  Raoul  Le  Seigneur,  chevalier,  sieur 
d'AmoAtot,  son  frère,  par  contrat  passé  le  28  novembre 
1643.  » 

Cette  propriété  appartenait  à  la  famille  Le  Seigneur 
depuis  le  5  mars  i565,  date  de  l'acquisition  qu'elle  en  avait 
faite,  de  René  de  Laigle,  docteur  en  médecine,  et  de  demoi- 
selle Ribault,  sa  femme,  domici'iés  en  h  paroisse  Saint- 


324 

Laurent  de  Rouen.  L'acquéreur,  Adrien  Le  Seigneur,  pour 
lors  marchand  à  Rouen,  y  avait  ajouté  plusieurs  corps  de 
logis,  cours,  puits,  jardins  qui  lui  furent  vendus,  le  8  no- 
vembre 1 584,  par  Jacques  Austin,  avocat  en  la  Cour  de 
Parlement,  fils  unique  et  héritier  de  feu  noble  homme 
Guillaume  Austin,  conseiller  du  Roi  et  général  en  la  Cour 
des  Aides.  Ces  corps  de  logis  ne  paraissent  pas,  d'après 
les  titres,  avoir  eu  de  façade  sur  la  rue  ;  nous  n'avons  pas 
à  nous  en  occuper. 

René  de  Laigle  et  sa  femme  se  disaient  propriétaires  du 
tènement  par  eux  vendu  à  Le  Seigneur  à  titre  de  l'acqui- 
sition qu'ils  en  avaient  faite,  le  9  juillet  i56o,  par  clameur 
de  marché  de  bourse  et  délais  à  eux  fait  au  droit  de 
lad.  damoiselle  Ribault,  de  Thierry  Dupont,  bourgeois  de 
Rouen,  qui  lui-même  l'avait  acquis  de  Marguerite  Ribault, 
veuve  de  Robert  de  Bauquemare,  sœur  et  héritière  de 
défunt  Jean  Ribault,  bourgeois  de  Rouen. 

Avant  les  Ribault,  cette  maison  appartenait  à  une  famille 
Le  Roy. 

Jean  Le  Roy,  drapier,  est  cité  comme  paroissien  de 
Saint-Jean,  dans  un  compte  de  147 1. 

Dans  un  autre  compte  de  i533,  il  est  question  d'une 
maison  sise  sur  cette  paroisse  et  dont  étaient  propriétaires 
les  enfants  de  Jean  Le  Roy. 

Je  suppose  que  la  maison  qui  nous  intéresse  devint  la 
propriété  des  Ribault,  par  suite  du  mariage  de  Marion 
Ribault  avec  Noël  Le  Roy,  ancien  trésorier  de  la  paroisse 
Saint-Jean,  qui  fut  enterré  devant  Timage  du  Crucifix,  en 
l'église  Saint- Jean,  en  1542. 

Ce  qui  n'est  pas  douteux,  c'est  que  cette  maison,  connue 
alors  par  l'enseigne  du  Coq,  rue  Vanterie,  appartenait,  le 
3o  mai  i525,  à  Jean  Le  Roy,  bourgeois  de  Rouen. 

Que  ce  soient  les  Le  Roy  ou  les  Ribault  qui  aient  fait 
construire  cette  maison,  le  point  intéressant  à  constater, 
c*est  que  c'était  une  maison  construite  par  des  bourgeois 
et  pour  l'usage  de  bourgeois,  à  la  différence  de  l'hôtel 


325 

voisin,    malheureusement  disparu,   qui  paraît  avoir  été 
construit  pour  Tusage  d'une  fomille  aristocratique. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

Le  Secrétaire, 
Vicomte  R.  d'Estaintot. 


326 


SÉANCE  DU  28  DÉCEMBRE  i883 

La  séance  ouvre  à  deux  heures  et  demie,  sous  la 
présidence  de  M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Sont  présents  :  MM.  J.  Adeline,  Billiard,  Bouquet, 
Félix,  Gaston  Le  Breton,  Lefort,  Pelay,  de  la  Serre, 
Tabbé  Tougard,  Brianchon,  secrétaire-adjoint. 

Correspondance  imprimée.  —  La  correspondance 
imprimée  comprend  :  Annual  report  ofthe  board  of 
régents  of  the  Smithsonian  Institution  for  the  year 
188 1,  Washington,  i883;  —  Annales  de  la  Société 
des  Lettres,  Sciences  et  Arts  des  Alpes-Maritimes, 
T.  VIII,  1882;  —  Mémoires  de  la  Société  des  Anti- 
quaires de  la  marine,  t.  XVIII,  1882-1883  ;  —  Bul^ 
letin  des  travaux  de  la  Société  industrielle  d'Elbeuf 
année   i883,  n°  3,  8  août-7  octobre. 

Le  Henri  IV  de  la  fontaine  du  Vieux-Palais,  — 
M.  Brianchon  donne  lecture  de  la  note  suivante  : 

Qu'était-ce  donc,  au  juste,  que  cette  statue  de  Henri  IV 
qui  décorait  la  fontaine  du  Vieux- Palais  ?  me  demandait, 
Tannée  dernière,  un  de  nos  honorables  confrères. 

—  Je  ne  sais  pas  !  lui  répondis-je,  selon  mon  habitude. 

J'ai  fait,  depuis,  quelques  recherches,  et,  sans  avoir 
épuisé  les  sources  d'information,  sans  même  avoir  eu  le 
temps  ou  la  possibilité  de  recourir  à  toutes,  si  mon  confrère 
et  ami,  M.  Billard,  m'adressait  encore  aujourd'hui  la  même 
question,  voici  ce  que  je  lui  dirais  et  ce  que  je  demande,  à 
la  Commission,  la  permission  de  lui  soumettre. 

Quand  on  parle  de  la  statue  qui  surmontait  la  fontaine  du 
Vieux- Palais  ou  de  la  place  Henri  IV,  on  croit  générale- 
ment qu'il  ne  s'agit  que  de  la  seule  et  même  représentation 
d'un  personnage  unique.  C'est  une  erreur.  Il  y  en  a  eu  deux. 


327 

La  première  statue  de  Henri  IV,  dont  nous  ignorons 
l'auteur  et  Torigine,  mais  qui  est  certainement  antérieure 
à  1668,  date  de  la  première  édition  de  Farin,  est  restée 
debout  jusqu'en  1780.  La  seconde,  érigée  en  i782,.n*avécu 
que  dix  ans. 

Parcourons  quelques  documents  : 

Farin,  dans  la  3e  édition  de  son  Histoire  de  Rouen,  t.  I, 
p.  27,  s'exprime  ainsi  : 

Source  à'  Yonville^  autrement  dit  de  S.  Filleûil.  —  Cette 
source  vie<it  de  la  montagne  de  Pestet,  proche  Bapaume. 
Sa  première  cuve  ou  citerne  est  voûtée  de  maçonnerie  de 
fond  en  comble.  Elle  a  doure  pieds  de  long  et  dix  de 
large.  On  y  voit  sur  la  porte  les  armes  du  Roi,  de  la  Reine 
et  de  la  Ville,  et,  au  dedans,  les  sources  dont  les  eaux  dis- 
tillent de  plusieurs  endroits  de  la  montagne,  pour  venir 
tomber  dans  la  citerne. 

€  On  commença  à  conduire  Teau  de  cette  source  vers  la 
ville  par  des  canaux  souterrains.  Tan  i3io. 

€  De  cette  source  vient,  sans  compter  les  fontaines  du 
Jardin  du  Prudhomme  ou  Lieu  de  Santé ^  dts  Jacobins,  du 
VieuX'Marchéy  ùm  Marché  aux  Veaux,  de  Saint- Vincent, 
de  la  Poissonnerie  du  Pont  et  de  Lisleux,  —  la  fontaine 
du  Vieux-Palais,  qui  jette  Teau  par  deux  tuyaux,  et  qui 
commença  à  couler  Tan  iSSg. 

€  La  masse  de  cette  fontaine  porte  une  grande  figure 
d'Hercule,  armée  d^une  grosse  massue,  et  ceint  d'une  peau 
de  lion.  » 

D'autre  côté  Guilbert,  dans  ses  Mémoires  biographiques 
ft  littéraires,  publiés  en  181 2,  au  nomJadoulle,  écrit  ceci  : 

«  La  destinée  de  JadouUe  ne  fut  heureuse  sous  aucun 
rapport.  Peu  fevorisé  du  côté  des  biens  de  la  fortune,  il 
eut  encore  le  chagrin  de  voir  détruire  de  son  vivant  les 
ouvrages  qui  lui  avaient  mérité,  dans  notre  ville,  la  consi- 
dération des  amis  des  arts.  Ces  deux  figures  qu'il  fit  pour 
l'église  de  Saint- Yon,  le  beau  bas-relief  représentant 
l'Exaltation  de  la  Croix  qu'il  exécuta  pour  le  portail  de 


328 

réglise  de  Sainte-Croix- Saint-Ouen,  la  statue  pédestre 
d'Henri  IV  qui  ornait  la  fontaine  de  la  place  du  Vieux- 
Palais  (statue  qui  avait  six  pieds  de  haut,  et  qui  avait  été 
placée  sur  la  fontaine,  le  4  juin  1782),  étaient  des  pro- 
ductions de  ce  sculpteur. 

€  Elles  ont  toutes  été  anéanties  pendant  la  Révolution. 

c  II  ne  reste  plus  de  cet  artiste  que  deux  bas-reliefs, 
qui  suffisent  toutefois  pour  faire  apprécier  son  talent.  Celui 
des  deux  où  la  Religion  est  représentée  avec  ses  attributs 
est  au  dessus  de  Tune  des  portes  latérales  de  Téglise  de 
Saint-Ouen.  L'autre,  figurant  la  Charité,  est  placée  sur 
la  principale  porte  de  celle  deTHôtel-Dieu.  i 

A  quoi  il  convient  d'ajouter  les  bas-reliefs  de  la  &çade  de 
Tancien  théâtre  des  Arts,  signalés  en  1879  par  M.  Sauva- 
geot  à  la  Commission,  et  recueillis  par  M.  Maillet  du 
BouUay,  au  musée  d'antiquités. 

On  lit  encore,  dans  les  Lettres  sur  la  ville  de  Rouen  ^ 
d'Alexandre  Lesguillez,  1826,  p.  89-90  : 

«  La  fontaine  du  Vieux- Palais,  située  sur  la  place  dont 
elle  porte  le  nom,  date  de  1559.  Avant  la  Révolution,  la 
statue  pédestre  de  Henri  IV  ornait  cette  fontaine,  laquelle 
aujourd'hui  n'offre  plus  rien  de  remarquable.  Cette  statue 
y  avait  été  placée  en  1782.  On  la  devait  à  Jadoulle, 
sculpteur  distingué  de  cette  ville.  C'était  un  de  ses 
meilleurs  ouvrages.  Le  prince  y  était  représenté  en  habit 
royal,  couronné  de  lauriers,  et  appuyé  sur  un  bouclier  qui 
portait  cette  devise  : 

Ma  sûreté  est  dans  le  cœur  de  mes  sujets 

€  Aujourd'hui  (1826),  l'on  voit  la  mousse  et  quelques 
gramens  se  disputer  la  place  où  naguère  l'on  se  plaisait  à 
contempler  les  traits  du  meilleur  des  rois.  Si,  lorsque  la 
tourmente  révolutionnaire  éclata  dans  notre  ville,  l'on  fut 
obligé  de  soustraire  aux  regards  publics  l'image  d'un 
prince  chéri,  Ton  est  généralement  étonné  que,  depuis  le 
retour  d(»s  Bourbons,  l'on  n'ait  pas  songé  à  relever  un 


3^9 

monument  si  cher  à  tous  les  cœurs  français.  Nous  en 
sommes  d'autant  plus  surpris  que,  si  nous  sommes  bien 
informés,  cette  statue  n'a  pas  été  perdue  pour  tout  le 
monde,  puisque,  dit-on,  elle  orne  un  bosquet  et  une  belle 
propriété  des  environs  de  Rouen. 

c  Dans  l'origine,  c'était  aussi  la  statue  de  Henri  IV  qui 
ornait  la  fontaine  du  Vieux-Palais.  Mais  il  était  représenté 
sous  la  forme  d'Hercule,  revêtu  de  la  peau  du  lion  de 
Némée,  et  tenant  une  grosse  massue  dans  sa  main  droite. 

€  Cette  idée  n^était  pas  heureuse;  car  tout  cet  attirail  ne 
convenait  guère  à  un  prince  qui,  dans  une  circonstance 
importante,  avait  dit  aux  Rouennais  :  Je  ne  veux  d'autres 
forteresses  que  dans  le  cœur  de  mes  sujets,  > 

Enfin  Nicétas  Periaux,  dans  son  Dictionnaire  des  rues 
et  places  de  Rouen,  iSjOjVer^o,  place  Henri-Quatre,  se  re- 
portant aux  dires  de  ses  devanciers,  les  résume  ainsi  : 

«I  La  fontaine  que  l'on  voit  au  centre  de  la  place  Henri- 
Quatre,  a  été  établie  en  1 549.  Elle  est  alimentée  par  les  eaux 
de  la  source d'Yon ville.  Elle  était  surmontée  d'une  grande 
figure  d'Hercule  armée  d'une  massue  et  ceint  d'une  peau  de 
lion,  par  laquelle  on  avait  eu  la  prétention  de  représenter 
le  souverain. 

«  Le  4  juin  1782,  cette  figure  fut  remplacée  par  une 
autre  statue  du  même  prince,  en  habit  royal  et  appuyé  sur 
un  bouclier.  L'œuvre  du  sculpteur  rouennais  Jadoulle  fut 
abattue  et  mutilée  le  5  octobre  1 792. 

€  L'auteur  des  Lettres  sur  Rouen ,  -^  M.  Lesguillez,  -* 
dit  que  cette  statue  orne  actuellement  le  bosquet  d'une 
belle  propriété  des  environs  de  Rouen.  » 

Ici,  suspendant  les  citations,  nous  devons  ouvrir  une 
parenthèse  et  donner  place  à  quelques  observations.  Les- 
guillez a  raison  quand  il  dit  qu'une  statue  d'Henri  IV, 
provenant  de  la  fontaine  du  Vieux-Palais,  se  trouvait,  en 
1826,  dans  c  une  belle  propriété  des  environs  de  Rouen.  » 
Elle  y  est  encore  ;  et  c'est  là  que  nous  l'a  montrée,  il  y  a 
quelques  vingt  ans  un  honorable  conseiller  à  la  cour  de 


33o 

Rouen,  M.  Elie-Lefebvre,  tombée  de  son  piédestal,  et  gisant 
toute  mutilée  dans  les  carrières  de  son  château  de  Can- 
teleu.  Elle  a  été  réparée  depuis.  Mais,  lorsqu'il  allègue 
que  cette  statue  de  Henri  IV  est  celle  de  Jadoulie,  qui 
avait  représenté  le  prince  «  en  habit  royal,  couronné  de 
lauriers  et  appuyé  sur  un  bouclier,  •  Tauteur  des  Lettres 
sur  la  ville  de  Rouen  se  trompe.  Il  n'est  que  trop  certain 
que  le  Henri  IV  de  Jadoulie,  comme  Ténonce  Nicétas 
Periaux,  fut  c  abattu  et  mutilé  i,  disons  mieux,  anéanti,  le 
5  octobre  1792,  sans  doute  en  vertu  du  décret  du  24  août 
de  la  même  année,  qui  ordonnait  de  «  retirer  des  rues  et 
places  publiques,  les  tableaux,  bustes  et  statues  rappelant 
Temblême  de  la  royauté,  »  tandis  que  le  primitif  Henri  IV, 
exactement  décrit  par  Lesguillez,  «  sous  la  forme  d* Hercule, 
revêtu  de  la  peau  du  lion  de  Némée,  et  tenant  une  grosse 
massue  dans  sa  main  droite,  »  est  bien  celui  de  Canteleu. 
Cest  bien  le  Henri  IV,  non  pas  précisément  détrôné,  mais 
descendu  de  son  piédestal  le  4  juin  1782. 

Mais  comment  cette  statue  de  Henri  IV,  provenant  de 
[a  fontaine  du  Vieux-Palais,  est-elle  arrivée  aux  mains  de 
la  famille  Elie-Lefebvre  ?  Comment  est-elle  entrée  au 
château  de  Canteleu  ? 

C'est  ce  qu'il  nous  reste  à  examiner. 

J'en  étais  là  de  mes  recherches,  c'est-à-dire  au  résumé 
de  M.  Nicétas  Periaux,  confirmé  par  M.  Vauquelin  dans 
sa  Notice  sur  Jadoulie  (Précis  de  V Académie  de  Rouen, 
i8o5),  et  par  M.  Edouard  Frère,  dans  son  Manuel  du 
bibliographe  normand,  lorsque  des  pièces  importantes 
tirées  des  archives  du  château  de  Canteleu  par  M.  le  baron 
Henry  Elie-Lefebvre,  qui  a  bien  voulu  me  les  commu- 
niquer, m'ouvrirent  une  voie  nouvelle  et  me  permirent  de 
compléter  mes  informations. 

Voici  ces  pièces  : 

I .  Extrait  du  Registre  des  délibérations  des  assemblées 
de  V Hôtel'de^ville  de  Rouen,  pour  l'année  1779.  — Journal 
des  Eehevins, 


33i 

t  Du  dit  jour  vingt  septembre  mil  sept  cent  soixante  dix 
neuf. 

«  En  délibérant  sur  la  requête  présentée  par  M .  Charles 
Antoine  Le  Febvre,  Conseiller  Échevin  de  cette  ville,  ten- 
dante à  ce  que  pour  Tutilitc  de  sa  maison  dont  il  est 
propriétaire,  scituée  à  RoQen  riie  des  Charrettes,  proche 
du  vieux  palais,  paroisse  de  Saint-EIoi,  il  lui  soit  accordé 
une  demi  ligne  d^eau  à  prendre  sur  le  tuyeau  de  la  fontaine 
du  vieux  palais,  dont  Teau  provient  de  la  source  de  Saint - 
Filleul,  h  ses  obéissances  d'en  faire  la  conduite  à  ses  frais, 
et  de  paicr  annuellement  à  la  Recette  de  la  ville  vingt  sols 
de  rente  à  tolérance  ; 

€  Lecture  faite  de  ladite  requête  par  le  greffier  secrétaire 
de  cette  ville  ; 

t  Oui  le  procureur  du  Roy  parlant  par  M.  de  Boisville, 
Conseiller  Échevin; 

«  Les  avis  pris  : 

«  Il  A  ÉTÉ  ARRÊTÉ  qu'll  cst  accordé  à  M.  Lefebvre,  et  à  ses 
héritiers  en  ligne  directe,  tant  qu'ils  seront  propriétaires 
de  la  dite  maison,  une  demie  ligne  d'eau  à  prendre  sur  le 
tuyeau  de  la  fontaine  du  vieux  palais;  à  la  charge  par  lui 
d'en  faire  la  conduite  à  ses  frais  et  dépens,  et  de  paîer 
vingt  sols  de  rente  à  tolérance  à  la  recette  de  la  ville  à 
courir  du  jour  de  Saint-Michel  prochain. 

Signé  :  «  Lezurier.  • 

2.  Extrait  du  Registre  des  délibérations  des  Assemblées 
de  VHôtel'de^  Ville  de  Rouen  pour  Tannée  1 780.  — Journal 
des  Echevins. 

c  Du  sept  mars  mil  sept  cent  quatre  vingt. 

«  Monsieur  le  Maire  a  représenté  à  la  Compagnie  que  la 
statue  élevée  à  la  gloire  de  Henri  IV  posée  sur  le  massif 
de  la  fontaine  du  vieux  palais,  étant  dans  un  état  de 
caducité  qui  annonce  sa  ruine  prochaine,  il  conviendroit 
en  faire  placer  une  autre  pour  perpétuer  la  mémoire  de 
ce  grand  Roi,  qu'en  conséquence  Messieurs   du    bureau 


333 

auroient  fait  dresser  un  plan  du  massif  et  de  la  statue  à 
remplacer,  qu'ils  soumettent  à  Texamen  de  l'assemblée  -, 

«  Le  dit  plan  vu  et  examiné  ; 

«  Oui  le  procureur  du  Roi; 

«  Les  avis  pris  : 

c  II  A  ÉTÉ  ARRÊTÉ  que  ledit  plan  est  agréé,  et  en  consé- 
quence Messieurs  du  Bureau  autorisés  de  ùAre  faire  tout 
ce  qui  conviendra  pour  la  décoration  de  ce  monument. 

Signé  :  «  Bigot  de  Sommesnil,  »  maire. 

3.  Extrait  du  Registre  des  délibérations  des  Assemblées 
delHôteUde-Ville  de  Rouen  pour  Tannée  1780.  — Journal 
des  Echeiins, 

«  Du  vingt  sept  avril  mil  sept  cent  quatre  vingt,  au 
bureau  de  l'Hôtel  de  Ville  de  RoUen,  devant  Messieurs  les 
Conseillers,  Maire  et  Echevins  de  la  dite  ville,  en  présence 
du  procureur  du  Roy. 

€  Sur  le  raport  à  nous  fait  par  le  sieur  Jaddoule  qu'il 
avoit  visité  la  statue  d'HerCule,  laquelle  suivant  l'opinion 
vulgaire  representoit  Henri  IV,  et  qui  étoit  sur  la  fontaine 
de  la  place  du  vieux  palais  que  la  ville  a  fait  démolir;  que 
cette  statué  étoit  mutilée  un  peu  à  la  tête,  un  bras  cassé 
qui  avoit  été  réajouté,  de  sorte  qu'il  ne  restoit  que  le  tronc 
et  le  bras  gauche  de  bon,  que  dans  cet  état  il  n'étoit  pas 
possible  qu'elle  pût  reservir  sur  la  nouvelle  fontaine  que 
la  ville  se  propose  de  faire  reconstruire  sur  les  fondations 
de  l'ancienne,  et  qu'elle  ne  pou  voit  être  placée  que  contre 
un  mur  en  y  faisant  un  autre  bras  et  des  )ambes. 

«  M.  Lefebvre  Échevin  se  proposant  de  faire  édiffier 
contre  le  mur  de  la  cour  de  sa  maison,  la  fontaine  que  la 
ville  lui  a  accordée  au  mois  de  septembre  dernier,  a  dit  que 
par  vénération  pour  la  mémoire  de  Henri  IV,  il  luy  feroit 
plaisir  de  placer  les  débris  de  cette  statue  sur  sa  fontaine, 
et  a  demandé  que  la  ville  voulut  bien  les  lui  céder  sur  esti- 
mation ; 

f  Sur  quoi  il  a  été  délibéré,  d'une  voix  unanime,  que  les 
débris  de  cette  statué  ne  faisant  point  un  objet  de  valeur, 


333 

seront  donnés  à  M.  Le  Febvre,  en  considération  de  ce 
qu'il  se  propose  de  contribuer  à  perpétuer  la  mémoire  d'un 
Roi  chéri,  en  la  faisant  restaurer. 

Signé  :  «  Bigot  de  Sommesnil.  » 
Et  en  marge  : 

€  Statue  de  la  fontaine  du  vieux  palais  représentant 
Henri  IV  placée  sur  la  nouvelle  fontaine,  le  mardi  4  juin 
1782.  » 

Là  se  bornent  nos  découvertes.  Ce  n'est  pas  tout  ce 
qu*on  peut  trouver  ;  mais  c'est  assez  déjà  pour  répandre 
sur  la  question  une  lumière  certaine.  La  fontaine  du  Vieux 
Palais  a  été  successivement  ornée  de  deux  statues  de 
Henri  IV,  Tune,  d'un  artiste  et  d'une  date  d'origine  égale- 
ment inconnus,  conservée  et  cédée  à  «  M.  Lefebvre  l'aine  » 
en  1780;  l'autre,  détruite,  de  JadouUe,  dont  la  durée  se 
limite  du  4  juin  1782  au  5  octobre  1792. 

C'est  donc  de  la  première  seule  que  nous  avons  à  nous 
occuper. 

Conformément  à  sa  proposition  faite  et  en  vertu  de  l'au- 
torisation reçue,  l'échevin  Lefebvre  s'empressa-t-il  de 
•  placer  les  débris  de  cette  statue  de  Henri  IV-Hercule  sur 
la  fontaine  édifiée  contre  le  mur  de  la  cour  de  sa  maison  » 
qui  appartient  aujourd'hui  encore  à  ses  héritiers,  c'est  ce 
que  nous  ne  saurions  dire.  Tout  ce  que  nous  savons,  c'est 
qu'elle  fiit  cachée  au  moment  de  la  Révolution,  et  que, 
sous  la  Restauration,  elle  se  trouva  mise  ou  remise  en 
honneur  dans  le  parc  de  Canteleu,  puisque  Lesguilliez,  qui 
écrivait  vers  1826,  constate  le  fait  de  l'existence  d'une 
statue,  tout  en  errant  sur  son  identité. 

Jusqu'à  quelle  époque  est-elle  restée  debout?  C'est  ce  que 
nous  ignorons,  mais  probablement  pendant  assez  peu 
d'années,  cette  statue  étant  faite  d'une  pierre  extrêmement 
friable.  Il  y  avait  longtemps  qu'elle  était  reléguée  au  fond 
d'une  carrière,  lorsque  le  conseiller  Elie-Lefebvre  lui  fit 
remettre  une  jambe  de  plâtre,  en  1872  ou  1873,  et  la 
redressa  de  toute  sa  hauteur,,  qui  est  de  six  pieds,  selon 


334 

Guilbert,  sur  un  piédestal  dans  lequel  est  enchâssée  cette 
inscription  : 

Le  2";  avril  1780^  par  délibération  du  corps  des  Eche- 
vins  de  Rouen^  cette  statue  d'Hercule^  qui  représente^ 
suivant  V opinion  vulgaire  de  cette  époque^  Henri  IV^  Roi 
de  France^  a  été  donnée  à  M,  Elie-Lefebvre  alors  Échevin^ 
en  considération  de  ce  qu'il  se  proposait  de  la  faire  res- 
taurer et  placer  dans  sa  propriété^  pour  perpétuer  la  mé- 
moire d^un  Roi  cher  à  la  nation  (i). 

M.  le  baron  Elie-Lefebvre  a  bien  voulu  nous  promettre 
un  dessin  ou  une  photographie  du  Henri  IV  de  Canteleu 
pour  les  archives  de  la  Commission  des  Antiquités. 

Et  maintenant  que  nous  avons  rendu  à  Jadoulle  ce  qui 
appartient  à  Jadoulle,  nous  n'attendons  plus  que  l'occasion 
de  rendre  à  X.  ce  qui  appartient  à  X. 

Ce  nom  du  statuaire  à  qui  Ton  doit  le  Henri  IV  à  peau 
d'Hercule,  du  château  de  Canteleu,  aussitôt  que  nous 
l'aurons  découvert,  si  nous  le  découvrons  jamais,  nous 
n'aurons  rien  plus  à  cœur,  à  titre  complémentaire,  que  de 
le  faire  connaître  à  la  Commission. 

A  moins,  ce  qui  pourrait  être,  que  la  Commission  ne  le 
connaisse  déjà. 

Observations,  —  M.  Bouquet  rappelle  que  le  Hen- 
ri IV,  de  Jadoulle,  figure  dans  Millin  (2). 

(i)  La  status,  à  cause  des  événements  politiques  de  1789, 
n'ayant  pu  être  érigée  dans  la  cour  d'honneur  de  Thôtel  de  la  place 
Henri  IV,  sur  une  fontaine  formant  piédestal  disposée  contre  un 
mur  pour  la  recevoir,  a  été  transportée  à  Canteleu,  où  elle  fut 
dressée  dans  le  parc  du  château  de  M.  Elie-Lefebvre,  vers  la 
hêtrée  actuelle.  On  l'entoura  de  quatre  bornes,  reliées  entre  elles 
par  des  chaînes,  représentant  des  cônes  tronqués,  que  l'on  voit 
encore  auprès  du  Belvédère. 

Vers  t83o,  cette  statue  fut  enlevée,  et,  vu  son  état  de  déla- 
brement et  de  vétusté,  longtemps  abandonnée,  sans  qu'on  y  fit 
aucune  réparation.  — -  Note  du  baron  Henry  Elie-Lefebvre. 

(2)  Millin  (A.  h.),  Antiquités  nationales ^  Paris,  1790- 1798, 


335 

D^âiitres  reproductions  du  même  Henri  IV,  toujours 
en  costume  royal,  de  Lallemand  (i),  Laborde  (2)  et 
Garneray  (3),  sont  également  signalées  par  MM.  Ade« 
Une  et  Pelay. 

M.  Gaston  Le  Breton  confirme  la  réflexion  de  Guil- 
bert  sur  la  destinée  malheureuse  de  la  plupart  des 
productions  du  sculpteur  Jadoulle.  Les  bas-reliefs  du 
Théâtre-des-Arts,  récemment  transportés  au  cloître  de 
Sainte-Marie,  ne  feront  guère  exception  à  la  règle. 

Eglise  et  clocher  de  Saint-Saëns.  —  M.  Lefort 
présente  un  intéressant  rapport  sur  la  réfection  du 
clocher  et  incidemment  sur  la  restauration  de  Téglise  de 
Saint-Saëns. 

Chapelle  de  Sainte-Catherine  ou  de  Saint-Brice,  à 
la  Cathédrale.  —  M.  Le  Breton  appelle  l'attention  de 
la  Commission  sur  Pinterruption  des  travaux  de  la 
chapelle  de  Sainte-Catherine  ou  de  Saint-Brice,  à  la 
Cathédrale.  Il  est  à  désirer,  observe  notre  collègue, 
qu'une  restauration,  si  bien  commencée,  soit  reprise 
et  achevée  le  plus  tôt  possible. 

Eglise  d'Eu.  —  M.  Tabbé  Tougard  signale  à  la 
Commission  Pétat  inquiétant,  au  moins  dans  quelques 
parties,  de  la  belle  abbatiale  d'Eu,  que  Tabbé  Cochet 
plaçait  au  premier  rang  de  nos  monuments  diocésains 
les  plus  remarquables.  Au  rapport  d'un  de  ses  con- 
frères, M.  Tabbé  J.  Dubois,  les  voûtes  du  transept  pré- 
sentent des  taches  verdâtres,  indices  d'infiltration  d'eau, 

(i)  Lallemand,  Vue  des  Tours  du  Vieux-Palais  de  la  ville  de 
Rouen. 

(2)  Laborde  (de),  Description  générale  et  particulière  de  la 
France,  Paris,  Lamy,  1781-1792. 

(3)  Garneray,  le  Vieux-Palais  de  Rouen. 


336 

faisant  craindre  à  la  fois  pour  la  préservation  du  mo- 
nument et  pour  la  sécurité  des  fidèles.  De  plus,  la 
restauration  de  la  magnifique  abside  reste  toujours  à 
rétat  de  projet.  Cest  un  contraste  particulièrement 
fâcheux  avec  le  parfait  état  de  la  nef,  pour  laquelle  des 
allocations  assez  récentes  se  sont  élevées  à  80,  000 
francs  environ. 

La  (Commission  objectera  peut-être,  ajoute  M.  Tabbé 
Tougard,  qu'il  ne  lui  appartient  pas  de  prendre  Pini- 
tiative  d'une  demande  qui  doit  partir  des  administra- 
tions locales.  Mais  il  lui  est  toujours  possible  de  jeter 
un  cri  d^alarme  et  d'éveiller  sur  ce  point  la  sollicitude 
de  Tautorité  départementale. 

Notre  collègue,  M.  Lefort,  architecte  du  département, 
veut  bien  se  charger  de  transmettre  à  son  prédécesseur, 
M.  Sauvageot,  également  notre  collègue  et  architecte 
diocésain,  la  réclamation  de  M.  Tabbé  Tougard  con- 
cernant Téglise  de  la  collégiale-abbaye,  dédiée  à  saint 
Laurent  de  Dublin. 

La  Tour  de  l abbaye  de  SainUAmand,  à  Rouen.  — 
M.  le  Président  donne  lecture  d'un  Mémoire,  suivi  de 
notes,  sur  la  reconstruction  de  l'ancienne  tour  de 
Péglise  abbatiale  de  Saint- Amand,  à  Rouen,  dont  la 
Commission  est  unanime  à  réclamer  Tinsertion  inté- 
grale dans  son  Bulletin. 

L'abbaye  de  St-Amand  de  Rouen  possédait,  au  xvi«  siècle, 
une  église  pour  ses  religieuses,  qui  faisait  suite  à  une 
église  spécialement  affectée  à  l'ofRce  paroissial. 

Cette  église  conventuelle  était  ancienne  :  elle  datait  de 
Tannée  1254.  Elle  mesurait,  en  longueur,  90  pieds  ou  en- 
viron, à  prendre  depuis  la  séparation  de  Tcglise  paroissiale 
dite  alors  le  Petit-St.-Amand  jusqu'au  bout  du  chœur  de 
ladite  église  conventuelle,  en  y  comprenant  l'épaisseur  des 


33; 

murailles.  Sa  largeur  était  de  32  pieds  de  dehors  eh  dehors. 

De  chaque  côté  de  cette  église,  il  y  avait  une  chapelle  (je 
crois  qu'il  faut  entendre  par  là  un  bras  de  transept  accom* 
pagné  d'un  autel),  de  24  pieds  de  longueur  sur  22  pieds  de 
largeur. 

Le  tout  était  voûté  «  en  croisée  d'ogyve  avec  arcs  dou- 
bleaux.  >  Ce  sont  les  termes  d'un  document  du  temps,  et 
je  les  emploie  à  dessein  parce  que,  de  nos  jours,  on  a 
donné  au  mot  ogive  un  sens  qu41  n'avait  pas  pour  les 
anciens  architectes. 

Entre  le  chœur  et  la  nef  s'élevait  une  tour  de  pierre  de 
80  pieds  de  hauteur,  à  compter  du  pavé  jusqu'aux  dalles, 
revêtues  de  plomb  et  formant  terrasse,  sur  lesquelles  était 
posé  un  clocher  de  charpente,  couvert  d'ardoises,  de  90 
pieds  de  hauteur,  avec  un  beffroi  où  avaient  été  suspendues 
6  à  7  cloches,  tant  grosses  que  petites.  A  Montivilliers, 
nous  avons  vu  les  religieuses  se  plaindre  de  l'ambition  du 
curé  et  des  paroissiens  de  St.-Sauveur  qui  s'étaient  avisés  de 
faire  fabriquer  des  cloches  dont  la  voix  couvrait  la  voix 
de  celles  du  couvent.  Les  religieuses  de  St-Amand  avaient 
pris  leurs  mesures  pour  que  les  paroissiens,  leurs  sujets, 
ne  leur  infligeassent  pas  pareille  humiliation. 

La  tour  était  portée,  suivant  l'usage,  sur  les  quatre  pi- 
liers de  la  croisée. 

Au  commencement  de  l'année  i  Syo,  on  conçut  de  Tin- 
quiétude  pour  la  solidité  de  cette  tour. 

Guillemette  de  St-Amand,  pour  lorsabbesse,  fît  appel,  le 
28  janvier,  aux  principaux  ouvriers  de  la  ville. 

C'étaient  les  maçons  Jacques  Channevière,  Pierre  Lau- 
rens,  Jacques  Tourmente,  Jean  Vanier,  Augustin  De  Ry, 
les  charpentiers  Guillaume  Cousture,  Claude  Gigonde, 
Martin  Cousture.  Ils  vinrent  sur  les  lieux  et  procédèrent 
à  l'inspection  de  l'édifice,  en  présence  de  l'abbesse,  de  plu- 
sieurs gentilshommes  et  bourgeois  de  la  ville. 

Ils  constatèrent  c  une  petite  ruine»  à  quelques  piliers  de  la 
tour,  et  ne  parurent  pas  y  attacher  une  grande  importance. 


338 

Mais  quelques  jours  après,  lorsqu'ils  revinrent  pour  aviser 
aux  travaux  de  consolidation  nécessaires,  le  mal  avait  bien 
empiré  ;  il  était  même  devenu  incurable.  Ils  reconnurent 
que  trois  des  piliers  de  la  tour  s'étaient  totalement  éboulés 
et  froissés  depuis  le  fondement  jusqu'aux  chapiteaux  sur 
lesquels  s'appuyaient  les  voûtes.  Ils  déclarèrent  qu'il  n'y 
f  avoit  moyen  de  retenir  iceulx  piliers,  considéré  le  brief 
et  éminent  danger  qui  estoit  en  iceulx,  qu'il  n'y  avoit 
aucune  assurance,  ad  joindre  que  iceulx  piliers  n'estoient 
faicts  que  de  petit  bloc  ou  mouellon  sans  aucune  ligature.  > 

Leurs  prévisions,  cette  fois,  n'étaient  que  trop  fondées. 
Le  lundi  7  février,  vers  7  ou  8  heures  du  soir,  la  tour,  qui 
était  composée,  jusqu'à  la  terrasse  ou  plate -forme,  de 
bittes  et  grosses  pierres  de  taille,  s'écroula  en  écrasant 
l'église  et  en  causant  c  de  notables  abattemens  et  dom- 
mages, tant  au  cloistre,  dorteuil,  chapitre,  chambres,  que 
autres  plusieurs  endroits  d'icelle  abbaye,  pour  le  grand 
estonnement  que  telle  et  sy  pesante  masse,  comme  estoit 
ledit  clocher,  avoit  faict  en  tombant.  > 

L'abbesse,  effrayée  de  la  responsabilité  qui  pesait  sur 
elle,  eut  recours,  dans  cette  circonstance,  à  Tautorité  sé- 
culière. Le  lieutenant  général  du  bailli,  Jean  de  Brèvedent, 
se  transporta  sur  les  lieux,  accompagné  de  Thomas 
Maynet  et  de  Jacques  Cavalier,  l'un  avocat,  l'autre  pro- 
cureur du  Roi.  Après  avoir  constaté  la  gravité  des  dégâts, 
et  vérifié  que,  pour  les  besoins  du  culte,  les  religieuses 
pouvaient  provisoirement  disposer  d'une  chapelle  située 
dans  Tenceinte  de  leur  monastère,  ces  magistrats  com- 
mandèrent à  des  hommes  de  l'art  c  de  veoir,  marcher  et 
visiter  la  ruine  en  question  et  d'apprécier  et  estimer  ce 
qu'il  en  pourroit  coûter  pour  réédifîer  et  remettre  l'église 
en  rétat  qu'elle  estoit  avant  l'accident.  > 

Les  experts  choisis  furent,  pour  la  maçonnerie  :  Jacques 
Chaneviêre,  Pierre  Laurens,  Nicolas  Gellouys  et  Jacques 
Tourmente:  pour  la  charpenterie,  Guillaume  Couture, 
Robert  Langlois,  Martin  Couture. 


339 

Leur  rapport  fut  rédige  le  26  février.  Les  travaux  de 
reconstruction  furent  évalués,  par  eux,  à  25.  5oo  liv.  pour 
la  maçonnerie;  à  i5.  000  liv.  pour  la  charpenterie.  Total 
40.  5 00  livres. 

Ces  constatations,  faites  authentiquement  par  les  officiers 
royaux,  et  le  rapport  des  experts  nommés  par  eux,  ser- 
virent de  fondement  à  la  demande  que  formulèrent,  peu  de 
temps  après,  les  religieuses,  à  Teffet  d'être  déchargées  de 
tous  dons  gratuits,  décimes,  emprunts,  pendant  une  pé- 
riode de  vingt  ans,  moyennant  qu'elles  employassent  ce 
temps  à  la  réédification  de  leur  église. 

En  attendant  une  décision  définitive  sur  cette  demande, 
le  Conseil  d'État  ordonna  aux  officiers  royaux  de  les  tenir 
en  suspens  et  surséance  quant  aux  réparations  à  faire,  et 
leur  fit  défenses  de  les  y  contraindre  par  la  saisie  de  leur 
temporel,  2  avril  1 569. 

Le  principal  intérêt  des  documents  dont  je  me  suis 
borné  à  donner  l'analyse  est  de  nous  fournir  quelques 
noms  d'architectes  et  de  charpentiers,  et  de  nous  renseigner 
sur  certaines  formalités  administratives,  peu  connues  ou 
peu  remarquées. 

Je  ne  saurais  dire  si  l'église  fut  complètement  recons- 
truite, ou  si,  contrairement  à  l'avis  des  experts,  d'abord 
consultés,  il  y  eut  moyen  de  se  contenter  d'une  simple 
restauration.  Ce  qu'on  peut  affirmer,  c'est  qu'au  dernier 
siècle,  l'église  paroissiale  ne  faisait  plus  suite  à  l'église 
conventuelle,  qu'elle  s'étendait  parallèment,  à  quelque  dis- 
tance de  celle-ci,  en  se  rapprochant  de  la  rue  St.-Nicolas; 
qu'elle  s'était  accrue  d'une  ancienne  chapelle,  dite  la  cha- 
pelle St.-Léonard,  d'abord  réservée  aux  religieuses,  affectée 
plus  tard  à  la  corporation  des  brasseurs,  et  séparée  de  l'é- 
glise paroissiale  par  une  muraille  qu'on  abattit  avec  la 
permission  de  l'abbesse,  en  i635. 

Ce  fut,  croyons-nous,  dans  cette  chapelle  que  l'office 
divin  se  célébra  pour  les  religieuses,  dans  les  années  qui 
suivirent  la  chute  de  la  tour. 


Les  archives  de  Tabbaye  de  St.-Amand  sont  à  peu  près 
muettes  en  fait  de  renseignements  archéologiques  et  artis- 
tiques. Peu  de  comptes  ont  été  conservés,  et  ce  qu'on 
peut  relever  dans  ceux  qui  existent  encore  se  réduit  à 
peu  de  chose. 

Compte  de  St.-Amand,  du  3  nov.  1441  au  3  nov.  1442. 

«  Pour  les  Angleys  de  Se  Katherine,  lesquieux  avoient 
pris  et  arresté  le  ver  (verrat)  de  Tostel  de  Boes,  lequel 
s'en  venoit  en  ceste  ville  tout  seul,  pour  leur  vin,  le  xxvi* 
jour  de  novembre,  pour  ce,  ix  s. 

«  Pour  un  pot  de  vin,  à  un  frère  qui  fist  le  sermon  la 
veille  de  TAsompcion,    xvii  d. 

f  Pour  avoir  levé  une  cerreure  d'un  coffre  estant  en  la 
chapelle  S. -Pierre,  pour  avoir  les  lettres  patentes  du  Roy, 
notre  sire,  pour  le  fait  du  procès  de  la  cure  d*Omon- 
ville,    iv  d.  t. 

f  Pour  avoir  des  haveis  et  de  Terbe  pour  l'église,  le  jour 
du  S.  Sacrement,    vi  d. 

«  A.  Messire  Guieffroy  Coulombel,  beaupère  de  chiens, 
pour  ses  gages  dudit  office,  tant  du  temps  passé  que  sur 
cette  présente  année,    Ix  s. 

c  Pour  les  Innocens  de  N.  D.  de  Rouen,  à  eulx. 
donné,  ii  s.  vi  d. 

«  Pour  la  façon  des  nates  de  l'église,    vi  s. 

«  Pour  ung  augustin,  qui  fist  le  sermon  le  xvii*'  jour  de 
mers,  pour  un  pot  de  vin  à  lui  présenté,  pour  ce,  xx  d. 

f  Pour  le  pain  de  Cène,  et  pain  à  chanter,    v  s. 

<  Pour  xxxi  poures  le  jour  de  lad.  Cène,  à  chacun  iii  d., 
vallent  vii  s.  ix  d. 

€  Pour  dragée  pour  la  d.  Cène,  ix  d.  (1). 

(i)  Dans  le  même  compte  :  «  Au  prévost  de  Paris,  lequel  a 
épousé  la  femme  qui  fut  Messire  Guy  le  Bouteilier,  pour  reste  de 
gregnieur  somme  d'une  obligation  en  quoy  Téglise  étoit  obligiée. 

«  À  Messire  Regnault  le  jeune,  curé  de  Caudebec,  pour  reste 
d'argent  qu'il  avoit  preste,  à  notre  grant  besoing,  pour  avoir  du 


34  î 

€  Réception  de  l'abbesse,  madame  de  Vieupont  :  9  février 
1544  (v.  s.)  •<  Payé  au  porteur  de  la  tapisserie  de  M. 
d'Ouessel,    xii  d. 

€  Aux  brouettiers .  qui  apportèrent  de  la  tapisserie  de 
chez  M.  d'Escroville,    xii  d. 

c  Aux  brouettiers  qui  ont  reporte  la  tapisserie  pour  la 
rendre  aux  maisons  ou  Ton  l'avoit  empruntée  pour  la  bien- 
venue de  Madame,    iii  s. 

«  Mercredi  des  Saine  tes  cendres  27  février,  aux  cham- 
berières,  pour  avoir  du  sablon  d'Estampes,  pour  nettoyer 
la  vaisselle,   xii  s. 

c  1 2  mars,  pour  ung  chandelier  achepté  pour  Madame, 
et  deux  fourquettes,  Tune  pour  la  cuisine  de  Madame,  et 
Taultre  pour  le  couvent,    xi  d. 

«  20  mars,  à  un  painctre  qui  avoit  painct  une  bourse 
pour  Madame,  v  s. 

€  20  avril,  à  deux  chantres  et  joueurs  de  violles  qui 
jouèrent  devant  Madame,  fut  donné  par  le  commandement 
de  Madame,  ung  teston,    xi  s. 

«  22  avril,  pour  une  demye  douzaine  de  voerres  achap- 
tés  par  Monsf  le  vicomte,    v.  s. 

«  3  may,  pour  une  pdire  de  quartes  à  jouer,    xv  d. 

«  i3  mai,  pour  une  renge  de  la  bride  de  la  haquenée, 
pour  aller  en  Bretagne  quérir  Madame  Padmiralle, xii  s.vid. 

«  A  ung  charron  pour  avoir  refaict  le  chariot  branslant 
de  Madame,  pour  aller  en  Bretaigne,   xviii  s 

c  Le  lundi  des  Rogacions  19^  jour  de  may,  M.  de  Vieu- 
pont et  M^ie  Renée  allèrent  à  Bos  faire  tondre  les  moutons: 
à  Bonsecours,  en  allant  es  oblacions  où  ils  ouyrent  messe, 
vi  d. 

«  1 1  juin,  à  Jehan  Jolis,  pour  deux  bastons  de  fresne  pour 
faire  une  litière  à  bras  à  porter  Madame  au  Mont-aux- 
malades,  pour  changer  d'air,  viii  s. 

grain,  poui  la  chière  année,  dont  avoit  en  gage  une  tasse  d*argent 
et  deux  choppinectes  de  l'église.  » 


342 

«  Le  vendredi,  20«du  moys  de  juing,  payé  à  deux  femmes 
qui  lavèrent  les  lessives  de  céans  à  raison  que  les  chambe- 
riéres  estoient  occupez  à  la  chambre  où  Madame,  que 
Dieu  absoulle!  labouroit  à  la  mort,  laquelle  remist  son 
espoir  à  Dieu  notre  créateur,  et  ce  dit  jour  à  dix  heures 
du  matin,    ii  s. 

c  La  mise  taicte  pour  Tinhumation  de  feue  Mi°c  de 
Vieupont,  que  Dieu  absoulle,  le  samedi  21^  jour  dudit 
moys  de  juin  audit  an. 

€  Premièrement  à  six  carmes  qui  veillèrent  la  nuiyt 
auprès  le  corps  de  ma  dicte  dame,  et  se  tindrent  jusques 
à  l'heure  de  l'inhumation  ;  et  encores  à  six  aultres  qui 
célébrèrent  messe  a  esté  payé    Iv  s. 

c  A  six  augustins  qui  célébrèrent  messe  le  dit  jour  et 
aux  sept  aultres  qui  portèrent  le  corps  à  Téglise,    xlv  s. 

c  A  six  cordeliers  qui  semblablement  célébrèrent  messe 
ledit  jour,    xv  s. 

«  Et  par  semblable  à  six  jacobins  qui  célébrèrent  messe, 
ledit  jour,    xv  s. 

«  A  traize  enfifans  de  S.  Nicolas  qui  portèrent  les  tor- 
ches,    XX  s. 

«.Pour  une  paire  de  gantz,    ii  s.  vi  d. 

c  Pour  du  feure  de  seigle,  pous  espandre  à  l'église,  et 
par  les  voyes  pour  y  aller,    iii  s. 

c  En  esplingues  noirres  et  clou  pour  attacher  les  arma- 
ries  et  aultre  clou  baillé  au  fossetier,    xii  d. 

«  Une  paire  de  botines  violectes,   ix  s. 

«  Pour  le  contre-autel  et  rideaux  de  la  passion,    iii  s. 

«  Au  paintre  pour  dix  douzaines  d'escuchons,    iiii  1. 1. 

«  A  huit  presbtres  qui  célébrèrent  messe  le  lundy  en- 
suyvant,   xx  s. 

c  Le  samedi,  26^  de  juillet  1544,  Madame  de  Maubisson 
arriva  à  soupper,  qui  yenoit  de  sa  maison  de  Maubisson, 
pour  donner  ordre  et  wider  les  commissaires  qui  estoient 
en  ceste  maison,  payé  pour  une  douzaine  de  voirres  à  pied 
et  une  esguiere,  viii  s.  vi  d. 


343 

€  Le  vendredi,  Séjour  du  mois  d'aoust,  à  une  venderesse 
de  voyrres  et  de  bouteilles,  par  le  commandement  de  M.  le 
viconte,  xii  s. 

c  Le  1 2  novembre,  à  maistre  Laurent,  pour  bailler  à  ung 
homme  de  Sainte  Katherine,  pour  les  droicts  que  a  ung 
religieux  le  jour  qu'il  est  mis  en  terre,  pour  ce,   xx  d. 

«  Le  24  novembre,  à  Boyart,  pour  ung  sommier  qu'il 
mistàPéglisedeS.  Amand,  quisert  à  porterie  cruciiiîement, 
le  moulleure,  et  avoir  quis  le  bois  et  levé  comme  il 
est,    vii  1.  X  s. 

«  Le  jour  S«  Katherine,  au  bouUenger  de  Chappitre  pour 
le  pain  qui  fut  porté  a  Tabbaye  de  S<>  Catherine,  ainsi  que 
on  a  de  coutume,  pour  ce,    x  s. 

€  Le  8  février  1 544  (v  s.),  au  clerc  qui  joua  d'unes  re- 
galles  le  jour  de  S.  Amand,  et  si  vint  jouer  céans,  pour 
ce,    V  s. 

€  9  mars  1 644  (v  s.) ,  pour  six  grands  voyrres  et  une 
couppe,  V  s.  vi  d. 

€  A  Vastel,  orphèvre,  pour  une  petite  chaîne  qu'il  a 
faicte  pour  porter  des  heures,  xxx  s. 

€  II  oct.  1545,  à  maistre  Guillaume  de  Dernestal  qui 
avoit  joué  des  rigalles  par  deux  jours,   44  s. 

€  A  son  homme,    5  s. 

<  A  soupper,  un  gallon  de  vin  clairet,  vi  s. 

€  Le  18,  à  ung  homme  qui  aida  à  apporter  la  tapisserie 
de  M.  d'Oessel.    iii  s. 

«  10  novembre  i545,  à  ung  paintre,  pour  avoir  doré  la 
pomme  du  ciel  de  lict  de  camp  de  Madame,  vii  s.  vi  d. 

€  20  novembre  1 545,  à  Nicolas  Gosselin,  pour  xiv  voerres, 
viii  doubles  et  six  simples,  et  pour  son  salaire  d'avoir  gardé 
la  porte,  le  jour  du  banquet  de  Madame,    liv  s. 

«  2 1  novembre  1 545,  à  Ancellot  du  mestier  d'orfèvrerie 
pour  s'enquérir  et  faire  savoir  à  tous  ceulx  du  mestier  que 
Madame  avoit  adiré  une  estuve  en  façon  de  pomme  à 
tenir  en  la  main,  présent  Abreham  le  Tapissier,    v  s.  > 

Dans  les  pièces  de  comptabilité  du  commencement  du 


344 

xviiic  siècle,  je  signalerai  plusieurs  quittances  d'un  ingé- 
nieur très  connu  à  Rouen  par  ses  travaux  aux  fontaines  et 
au  pont  de  bateaux,  le  frère  Nicolas  Bourgeois,  augustin  ; 
le  devis  de  la  réédifîcation  de  la  grande  infirmerie  sur  les 
parloirs,  de  la  construction  en  neuf  de  l'infirmerie  de  la 
petite  vérole,  de  la  chapelle  des  malades  dédiée  à  S.  Claude 
et  de  riniirmerie  des  sœurs,  1738,  1743. 

Ces  travaux  furent  entrepris  par  ordre  de  l'abbesse 
M^ie  de  Lorge,  qui  mourut  le  21  oct.  1745,  âgée  de  5y  ans. 

On  note  que  les  frais  du  deuil  et  de  Tenterrement  s'éle- 
vèrent à  2.2  II  1.  et  qu'elle  fut  enterrée  dans  Téglise  à  la 
place  des  sœurs  vis-à-vis  la  Sainte  Vierge. 

m 

Communication  est  donnée  par  M.  Brianchon  d^une 
note  concernant  les  bas-reliefs  dits  de  Michel- Ange. 

Deux  bas- reliefs  en  marbre,  mutilés,  mais  d'une  grande 
beauté,  sont  exposés  en  ce  moment  au  Havre,  chez 
M.  Legi^nd,  tapissier,  rue  de  Paris.  Ces  sculptures  pro- 
viennent du  tombeau  de  Claude  de  Lorraine,  duc  d'Aumale, 
premier  duc  de  Guise,  mort  et  inhumé  à  Join ville  en  i55o. 
Une  tradition  les  attribue  à  Michel  Ange.  Mais  ils 
paraissent  être  sortis,  en  réalité,  du  ciseau  de  Dominique 
Florentin.  Ils  étaient  entres,  il  y  quelque  vingt  ans,  dans 
la  collection  de  feu  M.  Délié,  ancien  notaire  au  Havre, 
retiré  à  Manéglise,  près  Montivilliers,  où  l'un  de  nos  col- 
lègues, M.  Roëssler,  les  avait  pu  visiter  et  signaler  dès  1870. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

Le  Secrétaire-Adjoint, 
Brianchon. 


Roiien.  -^  Imp.  E.  Cagniard,  rues  Jeanne-Darc,  88,  et  des  Basiuge,  $. 


PROCÈS-VERBAUX 


DE  LA 


COMMISSION    DES    ANTIQUITÉS 

DE  LA  SEINE-INFÉRIEURE 

PENDANT  L'ANNÉE  1884 


SÉANCE  DU  28  FÉVRIER  1884 

La  séance  ouvre  à  deux  heures^  sous  la  présidence 
de  M.  Ch.  de  Beaurepaire^  vice-président. 

Sont  présents  :  MM.  Adeline,  Baudry,  de  Belle- 
garde,  Billiard,  du  BouUay,  Bouquet,  Gouellain, 
l'abbé  Loth,  Pelay,  de  la  Serre,  l'abbé  Tougard,  de 
Vesly  et  Brianchon,  secrétaire-adjoint. 

Le  secrétaire-adjoint  donne  lecture  du  procès-ver- 
bal de  la  dernière  séance  du  28  décembre  i883. 

M.  Paul  Baudry  fait  observer  que,  s'il  n'assistait 
point  à  la  dernière  séance,  c'est  qu'il  n'a  pas  reçu  de 
lettre  de  convocation. 

La  correspondance  imprimée  comprend  :  Société 
archéologique  de  Bordeaux,  t.  VIII,  i"  et  2«  fasci- 
cules, mars  et  juin  1881  ;  —  Bulletin  de  la  Société 
des  sciences  historiques  et  naturelles  de  Semur 
(Côte-d'Or),  i8«  et  19*  années,  1 881-1 882  ;  —  iî<per- 
toire  des  travaux  historiques  contenant  Vanalyse 


346 

des  publications,  faites  en  France  et  à  Pétranger, 
sur  Vhistoire^  les  monuments  et  la  langue  de  la 
France  pendant  Vannée  1882,  t,  II,  n»»  2  et  3,  i883  ; 

—  Mémoires  de  la  Société  d'émulation  du  Doubs, 
5«  série,  Ville  vol.  1 882-1 883;  —  Bulletin  de  la 
Société  des  amis  des  Sciences  naturelles  de  Rouen^ 
19^  année,  i^  semestre  i883;  —  Mémoires  de  la 
Société  des  antiquaires  du  centre,  armoriai  général, 
XII«  volume,  i"  fascicule,  i883  ;  —  Bulletin  de  la 
Société  archéologique  et  historique  de  V Orléanais, 
t.  VIII,  no  117,  2«  semestre  de  i883  ;  —  Bulletin  du 
comité  des  travaux  historiques  et  scientifiques^  sec- 
tion ^histoire  et  de  philologie,  i883,  no  I  ; —  Tables 
des  Bulletins  et  Mémoires  publiés  par  la  Société  des 
antiquaires  de  laMorinie,  par  E.  Dramard,  188  3; 

—  Bulletin  historique  de  la  Société  des  antiquaires 
de  la  Morinie,  32«  année,  nouvelle  série,  128®  livrai- 
son :  octobre,  novembre,  décembre  1883-1884, 

Réunions  de  la  Sorbonne.  —  Par  sa  lettre  circulaire, 
en  date  du  1 5  octobre  1 883,  M.  le  directeur  des  Beaux- 
Arts,  donnant  avis  que  la  réunion  annuelle  des  délé- 
gués des  Sociétés  des  Beaux-Arts  des  départements  à 
la  Sorbonne  aura  lieu,  en  1884,  à  Tépoque  accoutu- 
mée, invite  le  président  de  la  Commission  des  anti- 
quités de  la  Seine-Inférieure  à  faire  un  pressant  appel 
aux  membres  de  la  Commission  pour  faire  envoyer  au 
Comité  des  Beaux-Arts,  en  février  1 884,  un  ou  plusieurs 
mémoires  ayant  trait  à  Thistoire  de  Tart  dans  notre 
région. 

Les  Arènes  de  Sentis.  —  Afin  d'achever  le  déblaie^ 
ment  de  Tamphithéâtre  gallo-romain  découvert  à 
Senlis  par  le  Comité  archéologique,  M.  le  Préfet  de 


347 

rOise  vient  d'autoriser  rémission  de  10,000  billets  de 
loterie  à  5o  centimes.  M.  Am.  Margry,  secrétaire  de 
la  Commission  de  la  loterie,  adresse,  au  nom  du 
Comité  archéologique  de  Senlis,  une  lettre-circulaire, 
en  date  du  1 6  février  1 884,  à  M  .le  Président  de  la  Com- 
mission des  antiquités  de  la  Seine-Inférieure,  pour  le 
prier  de  s'intéresser  à  la  restitution  d'un  monument 
véritablement  historique,  et  de  lui  donner  un  précieux 
témoignage  de  bonne  confraternité,  en  concourant  à  la 
souscription  dans  la  mesure  de  ses  ressources.  Le 
Comité  de  Senlis  s'empressera  d'envoyer  le  nombre 
de  billets  qu'on  lui  fera  l'honneur  de  lui  demander. 

Église  de  Saint-Jeari'd'Abbetot. —  M.  le  Vice-Pré- 
sident saisit  la  Commission,  aux  termes  d'une  lettre 
de  M.  le  Préfet  dont  il  donne  lecture,  en  date  du  21  fé- 
vrier, de  l'examen  du  dossier  relatif  au  paiement  des 
travaux  exécutés,  en  1880,  à  l'église  de  Saint-Jean- 
d'Abbetot. 

Ce  dossier  contient  : 

1°  Mémoire  de  Valladier  fils,  entrepreneur  à  Rouen, 
du  3o  septembre  1880,  approuvé  par  M.  le  Préfet  le 
3o  mars  i883  ; 

20  Mémoire  de  Gustave  Dufils,  entrepreneur  à  Yve- 
tot,  du  9  avril  i883,  approuvé  par  M.  le  Préfet  le 
3o  mars  suivant  ; 

30  Lettre  de  M.  Dufils  à  M.  le  Préfet,  du  1 3  décem- 
bre i883; 

40  Lettre  de  M.  Héquet,  maire  de  la  Cerlangue,  à 
M.  le  Sous- Préfet  du  Havre,  du  20  décembre  i883  ; 

50  Délibération  du  Conseil  municipal  de  la  Cerlan- 
gue^  du  1 2  janvier  1884  ; 


34« 


60  Lettre  de  M.  le  Maire  de  la  Cerlangue  à  M.  le 
Sous-Préfet  du  Havre,  du  24  janvier  1884  ; 

70  Lettre  de  M.  Grenier,  sous-préfet  du  Havre,  à 
M.  le  Préfet. 

Après  avoir  pris  connaissance  des  pièces  concernant 
les  travaux  exécutés  en  1880  à  Téglise  de  Saint-Jean- 
d' Abbetot  et  en  avoir  délibéré  ; 

Considérant  que  les  dépenses,  quoique  entachées  à 
Porigine  d'une  irrégularité  qui  ne  devra  pas  se  renou- 
veler, étaient  nécessaires,  et  que  Texécution  des  tra- 
vaux ne  laisse  rien  à  désirer; 

La  Commission  est  d^avis  qu'il  y  a  lieu  de  solliciter, 
de  la  bienveillance  de  M.  le  Préfet,  l'allocation,  sur  les 
fonds  départementaux,  d'une  somme  supplémentaire, 
soit  de  1,901  fr.  i3,  y  compris  les  honoraires  de  l'ar- 
chitecte, évalués  à  143  francs,  soit  de  1,758  fr.  i3, 
non  compris  lesdits  honoraires,  destinée  à  parfaire  le 
solde  des  dépenses  faites  pour  réparations  exécutées 
en  1880  à  réglise  Saint-Jean-d^Abbetot. 

Extrait  du  procès-verbal  sera  transmis  d'urgence  à 
M.  le  Préfet  par  les  soins  du  Secrétaire  de  la  Com- 
mission. 

Objets  en  bronze  et  enfer  dragués  dans  la  Seine. 
—  M.  Léon  de  Vesly  met  sous  les  yeux  de  la  Com- 
mission différents  objets  provenant  des  dragages  de 
la  Seine,  dirigés  par  M.  Tingénieur  G.  Lechalas. 

Parmi  les  objets,  désignés  par  M.  de  Vesly,  dans 
Tordre  chronologique,  il  faut  citer  : 

Un  poignard,  deux  javelots  et  une  épée  pistilliforme 
de  répoque  morgienne  ;  une  belle  pointe  d'épieu  de 
l'époque  larnaudienne. 

Après  Tâge  de  bronze,  le  fer  donne  de  curieux  spé- 
cimens. 


349 

Cest  d^abord  une  bouterolle  de  fourreau  datant  de 
la  conquête  romaine  ;  puis  des  scramasaxes,  des  épées 
normandes  et  deux  fauchards,  dont  Tun  peut  remon- 
ter au  xin*  siècle,  tandis  que  l'autre  est  certainement 
du  xv«.  Enfin  un  fer  de  lance,  couvert  de  dessins,  et 
plusieurs  pointes  de  flèche,  terminent  la  série  des  ob- 
jets provenant  du  bief  d'Oissel  et  choisis  par  M.  de 
Vesly  pour  être  soumis  à  l'examen  de  la  Commission. 

M.  Pelay  demande  à  M.  de  Vesly  s'il  peut  fournir 
quelques  indications  sur  les  emplacements  oîi  ces  ob- 
jets ont  été  extraits  du  lit  du  fleuve. 

M.  de  Vesly  répond  que  les  deux  points  qui  ont 
fourni  la  plus  grande  quantité  d'armes  sont  : 

1°  Un  passage  situé  à  l'aval  du  pont  d^Oissel  et  cor- 
respondant à  la  descente  des  Authieux  ; 

2°  Le  Câtelier  ou  Clos-Gosse,  vis-à-vis  le  château 
de  Bédanne,  où  l'on  a  pratiqué  un  dragage  en  amont 
du  banc  Saint-Martin. 

Au  Clos-Gosse  on  a  découvert,  il  y  a  quelque  vingt 
ans,  des  sépultures  franques.  Plusieurs  auteurs  et  no- 
tamment notre  collègue,  M.  Tabbé  Tougard,  disent 
qu'il  y  existe  un  tumulus,  et  la  tradition  y  voit  le  fom- 
beaud*un  chef.  Quant  à  Bédanne,  M.  de  Vesly  croit 
que  le  nom  de  ce  hameau,  voisin  de  Tîle  d'Oissel 
[VOscellum  des  Normands),  est  la  traduction  de 
Beccus  Danorum,  la  rivière  des  Danois. 

M.  de  Beaurepaire  remercie  M.  de  Vesly  de  son 
importante  communication. 

Une  discussion  critique,  à  laquelle  prennent  part 
plusieurs  membres  de  la  Commission,  et  notamment 
MM.  Maillet  du  Boullay,  l'abbé  Tougard,  Pelay, 
Tabbé  Loth  et  Gaston  Le  Breton,  s^engage  sur  les 
objets  anciens  dragués  dans  la  Seine  et  qui  s'élèvent 


35o 


jusqu^à  présent,  ajoute  M.  de  Vesljr,  au  nombre  d'en- 
viron cinquante.  Il  serait  à  désirer  que  ces  objets,  dont 
s'est  entretenu  particulièrement  M.  le  Préfet  avec  un 
des  membres  de  la  Commission,  fussent  déposés  tous 
au  Musée  départemental.  Mais  la  question  de  droit  se 
précise  ainsi  :  tous  les  objets  trouvés  hors  de  Teau, 
épars  ou  enfouis  sur  la  berge  même  du  fleuve,  appar- 
tiennent au  département,  tandis  que  ceux  que  Ton 
recueille  au  fond  du  fleuve,  c^est-à-dire  sous  Teau, 
sont  du  domaine  de  TÉtat.  En  conséquence,  la  Com- 
mission ne  peut  que  renouveler  un  pressant  appel  à 
la  bienveillance,  qui  ne  lui  a  jamais  fait  défaut,  de 
MM.  les  Ingénieurs  préposés  aux  travaux  de  dragage. 
Déjà  M.  Tabbé  Lx>th  a  devancé  la  pensée  de  la  Com- 
mission en  conférant  de  ces  découvertes  avec  M.  Le- 
chalas,  qu'il  a  trouvé  animé  des  meilleures  disposi- 
tions. 

M.  Le  Breton  propose  de  placer,  sur  les  objets  dra- 
gués cédés  au  département,  la  mention  suivante  : 
Donné  par  MM.  les  Ingénieurs  au  Musée  d'anti- 
quités. 

En  résumé,  la  Commission  charge  notre  collègue  et 
directeur  du  Musée  d'antiquités,  M.  Maillet  du  Boul- 
lay,  d'être  l'interprète  de  ses  vœux  auprès  de  l'admi- 
nistration des  ponts-et-chaussées,  et  de  recommander 
de  nouveau  à  sa  bienveillance  la  double  cause  de  This- 
toire  normande  et  de  notre  collection  départemen- 
tale. 

La  Commission  fera  adresser,  en  outre,  par  son 
secrétaire,  à  M.  l'ingénieur  Lechalas,  une  lettre  de 
remercîments. 

Devant  d'autel  du  XVIP  siècle.  —  M.  Gouellain 


35i 

donne  quelques  détails  sur  un  devant  d'autel  prove- 
nant de  Péglise  Notre-Dame-du-Val,  canton  de  Beuz&- 
ville,  arrondissement  de  Pont-Audemer  (Eure),  offert 
au  Musée  d'antiquités  par  MM.  A.  Faroult  et  P.Tou- 
tain.  Ce  devant  d^autel,  en  bois  sculpté  et  doré,  est 
orné,  au  centre,  d^un  médaillon  représentant  la  Cène. 
Il  appartient  à  la  seconde  moitié  du  xvn«  siècle. 

Le  manoir  Méry.  —  M.  Paul  Baudry  donne  lec-* 
ture  de  la  note  suivante  :  , 

LE  MANOIR  MliRY 

Les  travaux  du  chemin  de  fer  d*Orléans,  qui  ont  cul- 
buté presque  toute  la  partie  ouest  de  Saint-Sever,  ont  fait 
disparaître  Tancienne  rue  de  la  Petite- Chaussée  et  par 
cela  même  un  vieux  manoir  qui  avait  accès  sur  la  rue. 

Ce  manoir,  qui  a  plusieurs  fois  exercé  le  pinceau  des 
artistes,  était  séparé  de  la  rue  par  un  fossé  que  Ton  fran- 
chissait au  moyen  de  deux  petits  ponts,  dont  un  couvert. 
Entre  ces  ponts,  une  claire-voie  s'appuyait  sur  deux  piliers 
supportant  des  chiens  sculptés  en  pierre,  que  plus  d'un 
amateur  s'était  proposé  de  joindre  un  jour  à  sa  collection; 
mais  que  leur  possesseur,  à  juste  titre,  s'est  réservé  au 
moment  de  l'expropriation  de  l'immeuble. 

A  l'intérieur  du  domaine,  une  avenue  de  tilleuls  déno- 
tait le  soin  et  la  régularité  qui  avaient  présidé  à  la  dispo- 
sition d'un  des  jardins  de  plaisance  dont  le  ^ubourg 
Saint-Sever  offrait  autrefois  et  offre  encore  aujourd'hui 
de  nombreux  spécimens. 

Deux  principaux  corps  de  bâtiment,  placés  parallèlement 
à  la  rue,  non  loin  de  l'entrée,  se  composaient  chacun 
d'une  construction  accompagnée,  à  droite  et  à  gauche,  de 
paiv liions  moins  élevés  que  la  construction  centrale.  Les 
bois  de  charpentes  étaient  essentés.  Quelques  épis  en 
plomb  pouvaient  remonter  au  règne  de  Louis  XIII. 


?5a 

La  partie  centrale  du  corps  de  bâtiment  situé  vers  le 
nord  renfermait  une  salle  haute  décorée,  sans  doute  à  la 
fin  du  xviii*  siècle,  de  motifs  en  plâtre  représentant  des 
lettres  initiales  et  de  petites  figures  dans  des  médaillons. 
Dans  la  partie  basse,  attenante  au  sud  de  cette  partie  cen- 
trale, on  remarquait  un  plafond  divisé  en  compartiments, 
des  fieurs  modelées  en  plâtre  sur  le  mur  de  séparation,  et, 
sur  chacune  des  faces  est  et  ouest,  une  sorte  d'écusson 
oval,  tenu  par  un  aigle,  et  chargé  de  deux  poissons,  avec 
trois  fieurs  sortant  d'une  même  tige. 

Le  manoir  de  la  Petite-Chaussée  était  entré  vers  1743 
dans  la  famille  Méry.  Au  moment  de  rétablissement  du 
chemin  de  fer,  il  appartenait  encore  à  Tun  des  membres 
de  cette  honorable  famille. 

Françoise  Blondel,  qui  avait  épousé  en  171 7  Nicolas- 
Claude  Méry,  négociant,  paroisse  Saint- Vincent,  s'y  était 
retirée  à  cause  du  bruit  de  la  ville,  qu'un  long  et  doulou- 
reux état  d'infirmité  lui  rendait  insupportable.  Mais, 
comme  elle  y  était  trop  éloignée  de  toute  église  pour  ac- 
complir ses  devoirs  religieux,  son  mari  avait  demandé  à 
Mgr  Nicolas  de  Saulx  Tavannes,  archevêque  de  Rouen,  et 
avait  obtenu  le  6  septembre  1758,  la  permission  d'y  établir 
une  petite  chapelle  ou  oratoire  privé. 

Les  enquête  et  rapport  préalables,  présentés  à  l'arche- 
vêché, portent  que  le  local  proposé  pour  l'établissement 
de  l'oratoire  est  muni  des  objets  nécessaires  à  la  célébra- 
tion du  culte,  qu'il  est  près  du  corps  de  logis  à  gauche,  que, 
par  sa  construction  et  sa  propreté,  il  semble  destiné  à 
Tusage  que  Ton  désire,  et  qu'il  sera  orné  d'un  plafond  très 
propre,  sans  aucun  logement  au-dessus,  ni  communica- 
tion avec  une  grande  salle  existant  à  côté. 

La  permission  comprenait  celle  de  faire  célébrer  une 
basse  messe  toutes  les  fois  que  M™«  Méry  aurait  dévotion 
de  l'entendre,  à  l'exception  des  jours  de  fêtes  solennelles 
et  de  la  fête  patronale,  jour  où  l'on  ne  pourrait  célébrer 
la  messe  sans  une  autorisation  écrite.  En  outre,  les  messes 


353 


ne  devaient  pas  être  dites  aux  heures  de  l'office  paroissial, 
auquel  les  domestiques  et  les  autres  personnes,  non  infir- 
mes et  empêchés,  étaient  tenus  d'assister.  Dans  tous  les 
caS)  la  permission  n'avait  d'autre  durée  que  celle  de  Tin- 
fîrmité  ou  de  l'existence  de  M™«  Méry. 

Charles- Nicolas  Blondel,  d'Hardouville,  prêtre  curé  de 
Cidetot,  doyen  du  doyenné  de  Pavilly,  avait  été  chargé  de 
la  bénédiction  du  modeste  sanctuaire,  et  nous  croyons 
avoir  retrouvé  la  place  de  celui-ci  dans  le  pavillon  situé 
au  sud  du  bâtiment  septentrional.  De  même  que  le  bâti- 
ment auquel  il  était  attenant,  ce  pavillon  se  trouvait  en 
effet  à  gauche  par  rapport  à  l'entrée.  Il  était  orné  d'un 
beau  plafond  et  sans  logement  au-dessus. 

Si  peu  considérable  que  soit  ce  souvenir  local,  nous 
avons  pensé  qu'il  serait  peut-être  permis  de  lui  accorder 
une  courte  mention. 

Urne  à  ustion  romaine,  —  M.  Billiard  présente  à 
la  Commission  une  belle  urne  cylindrique  en  verre, 
trouvée  àOuainville,  près  Cany,  vers  1820,  en  labou- 
rant la  terre,  par  M.  Gédon,  fermier  de  M.  Huë-Ba- 
nois,  de  Bolbec,  et  offerte,  le  22  janvier  dernier,  par 
M.  Huë-Quesnel,  aussi  de  Bolbec^  son  petit-fils,  au 
musée  d'antiquités. 

Cette  urne,  d^une  forme  et  d'une  dimension  uniques, 
était  remplie  d^ossements  incinérés.  La  pâte  est  lisse 
et  sans  nom  de  verrier.  Sans  l'authenticité  avérée  de 
son  origine,  on  croirait  plutôt  cette  urne  de  fabrica- 
tion moderne.  Elle  doit  appartenir  à  la  dernière  pé- 
riode de  Pustion. 

Des  remercîments  sont  adressés  au  donateur. 

Arcade  romane.  —  La  propriété  située  à  Rouen, 
dit  M.  Pelay,  ancienne  rue  Tuvache,  n^  4,  actuelle- 
ment Alsace-Lorraine,  dans  la  muraille  de  laquelle  se 


354 

trouve  une  arcade  romane,  appartenait,  en  1829,  à  un 
sieur  Thomas  Lemare,  qui  Thabitait, 

Elle  passa  ensuite  entre  les  mains  d'un  sieur  Cou- 
sin, marchand  droguiste  et  fut  occupée  par  le  sieur 
Duforestel  jeune,  épura teur  d'huiles,  jusqu'en  i883, 
époque  où,  par  suite  d'expropriation,  elle  devint  la 
propriété  de  la  ville  de  Rouen,  qui  la  revendit  à 
M.  F.  Lancesseur,  entrepreneur,  rue  Bihorel,  n®  9. 

A  Tappui  de  sa  communication,  M.  Pelay  dépose 
sur  le  bureau  de  la  G)mmission  un  calque  à  l'encre  et 
teinté,  comprenant  : 

lo  Extrait  du  Plan  général  de  la  ville  de  Rouen 
déposée  la  mairie  (1884)  ;  2»  extrait  du  Livre  des 
Fontaines,  de  Jacques  Le  Lieur  (i525). 

Dessins  de  la  Commission,  —  M.  Bouquet  rap- 
pelle que  M.  Dutuit,  toujours  considéré  comme  notre 
collègue,  quoiqu'il  ait  donné,  depuis  longues  années 
déjà,  une  démission  demeurée  caduque,  puisqu'elle 
n^a  jamais  été  acceptée,  et  que  chacun  de  nous  vou- 
drait voir  reparaître  à  nos  séances  et  y  prodiguer  les 
trésors  de  son  érudition,  a  fait  relier  à  ses  frais,  en 
deux  magnifiques  volumes,  les  dessins  offerts  à  la 
Commission.  M.  Bouquet  demande  si  tous  les  dessins 
communiqués  à  la  Commission^  depuis  sa  fondation, 
et  qui  doivent  se  trouver,  tant  dans  les  albums  de 
M.  Dutuit  qu^ailleurs,  ont  été  scrupuleusement  con- 
servés. Il  s'agit  ici,  dit  avec  raison  notre  collègue, 
d'une  œuvre^  non  pas  artistique,  mais  historique. 

M.  le  Vice-Président  répond  qu'une  commission 
spéciale  a  été  nommée  pour  le  classement  et  la  conser- 
vation des  dessins.  Cette  commission  a  cru  devoir  pro- 
céder par  voie  d'élimination.  Les  plus  beaux  dessins 


355 


sont  collés  et  mis  à  l'abri  de  toute  détérioration  ou 
déplacement  quelconque. 

Un  membre  propose  d^apposer  le  cachet  de  la  Pré- 
fecture ou  un  timbre  particulier  sur  tous  les  dessins 
devenus  propriété  de  la  G)mmission» 

Le  secrétaire,  M.  d'Estaintot,  observe  M.  le  Vice- 
Président^  a  Phabitude  de  mentionner,  sur  chaque 
dessin  produit  au  cours  de  nos  séances,  à  côté  de  Tes- 
tampille  —  Commission  des  antiquités  —  le  nom  du 
donateur  et  la  date  de  la  réunion. 

Tous  les  dessins  dont  il  s^agit,  à  en  croire  le  Secré- 
taire-adjoint, devraient,  sans  distinction  d^art  ni  de 
mérite,  corrects  ou  informes,  être  conservés  et  classés 
dans  Tordre  du  procès-verbal.  L^utile  prime  le  beau. 

Monnaies  romaines.  —  M.  Pelay  signale  une  dé- 
couverte de  monnaies  romaines  qui  a  eu  lieu,  il  y  a 
huit  jours,  dans  la  forêt  de  la  Londe. 

Ossements,  —  Uamas  d^ossements  humains  décou- 
verts rue  Saint-Lô,  en  face  la  rue  Boudin,  pourrait 
provenir,  au  sentiment  de  M.  de  Beaurepaire,  de  la 
suppression  d^un  de  ces  pieux  charniers  si  communs 
dans  nos  cimetières  au  moyen  âge,  et  dont  M.  Le 
Breton  a  rencontré  encore  en  Bretagne,  tout  récem- 
ment, de  curieux  spécimens. 

Bas^reliefs  dits  de  Michel-Ange,  —  M.  Brianchon 
s'excuse  sur  ce  que  les  bas-reliefs  dits  de  Michel-Ange, 
dont  il  a  été  question  dans  la  dernière  séance,  appar- 
tiennent en  quelque  sorte  à  la  Normandie,  od  ils  ont 
trouvé  asile  depuis  vingt  ans,  pour  refaire,  d'une  ma- 
nière un  peu  trop  longue,  l'historique  de  ces  chefs- 
d^œuvre  de  la  sculpture  du  xvi^  siècle,  et  du  tombeau 


r 

de  Glande  de  Lorraine,  dont  ils  faisaient  le  principal 
ornement.  L'origine  de  ces  bas-reliefs  est  avérée,  leur 
mérite  est  indiscutable,  mais  à  quelle  main  les  attri- 
buer en  définitive?  Adhuc  subjudice.  Des  probabili- 
tés existent,  mais  la  certitude  manque.  Étrange  abné- 
gation de  ces  grands  artistes  qui  savaient  tout,  et  qui 
savaient  si  bien,  dessiner,  bâtir,  sculpter,  peindre, 
et  qui  oubliaient  de  signer  de  pareilles  merveilles  !  La 
légende  qui  les  fait  sortir  du  ciseau  de  Michel-Ange  ne 
prouve  qu'une  chose,  c'est  qu'ils  sont  dignes  de  ce 
puissant  génie,  et  que,  par  l'harmonie  de  la  composi- 
tion, la  hardiesse  des  attitudes,  la  pureté  des  lignes  ei 
la  suavité  des  contours,  le  naturel  et  le  mouvement 
des  groupes,  par  le  sentiment  vrai,  profond,  exquis  en 
un  mot,  qui  se  dégage  de  chaque  personnage  et  de 
Tensemble  des  tableaux,  Buonarroti  les  eût  admis 
sans  conteste  au  nombre  de  ses  enfants,  et,  qui  sait? 
de  ses  enfants  privilégiés  même.  Les  auteurs  du  Voyage 
pittoresque,  d'après  des  renseignements  recueillis  sans 
doute  à  Joinville,  disent  bien  que  le  «  beau  monu- 
ment »,  comme  ils  appellent  le  tombeau  de  Qaudede 
Lorraine,  a  été  exécuté  par  un  artiste  italien,  Dome- 
nico  Florentîno,  plus  connu  sous  le  nom  de  Domi- 
nique del  Barbieri,  et  deux  sculpteurs  français,  Jean 
Picard  dit  le  Roux,  et  Richier.  Mais  des  preuves  ? 
Nodier,  Taylor  et  de  Giilleux  n'en  donnent  pas. 
Claude- Joseph  Benoist,  peintre  des  Vosges,  auteur 
d'un  inventaire  manuscrit  des  sculptures  du  château 
de  Joinville  en  179 1,  se  contente  de  dire  qu'il  ne  com- 
bat ni  la  tradition  qui  attribue  le  tombeau  du  premier 
duc  de  Guise  à  Michel-Ange,  ni  la  tradition  qui  en 
fait  honneur  à  Girardon. 

Pernot  est  plus  précis.  Dans  sa  Notice  sur  les  tom- 


357 

beaux  du  château  de  Joinville)  il  dit  textuellement  : 
V  Ce  fut  à  Joinville  qu^on  exécuta  ce  monument.Trois 
sculpteurs  y  furent  employés  :  Dominique  Florentin, 
Jean  Picard  dit  le  Roux,  et  Richier. . .  Des  mémoires 
et  des  comptes  assurent  que  les  dépenses  montèrent  à 
7,000  francs.  » 

Mais,  ces  mémoires  et  ces  comptes,  ot  sont-ils?  où 
Pernot  les  a-t-il  vus  ?  Il  ne  le  dit  pas.  C'est  cependant 
le  noeud  de  la  question.  M.  Brianchon  ne  les  a  pas 
encore  découverts.  Mais  ils  sont  Tobjet  de  ses  re- 
cherches. 

L'auteur  termine  en  disant  que,  en  Tabsence  de 
témoignages  certains,  examen  fait  de  Tœuvre  de  Ri- 
chier et  renseignements  pris  auprès  dé  plusieurs  maî- 
tres de  la  science,  il  est  porté  à  conclure,  au  moins 
provisoirement,  que  les  bas-reliefs  du  tombeau  de 
Claude  de  Lorraine,  dits  de  Michel-Ange,  ne  sont  pas 
de  l'école  française,  mais  italienne  ;  que  le  célèbre 
sculpteur  lorrain,  Richier,  n'y  est  pour  rien,  mais 
qu'il  y  a  lieu,  au  contraire,  jusqu'à  nouvel  ordre,  de 
retenir  le  nom  de  Domenico  del  Barbieri,  l'un  des 
nombreux  stucateurs,  au  rapport  de  Vasari,  qu'em- 
ployait le  Rosso  dans  le  château  de  Fontainebleau, 
affectionné  particulièrement  de  Maître  Roux,  «  grand 
dessinateur  et  le  plus  habile  de  tous  les  artistes  9. 

Le  Jeu  de  paume  des  Braques,  —  M.  de  Beaure- 
paire  donne  lecture  de  la  communication  suivante  : 

SUR  LES  JEUX  DE  PAUME  DE  ROUEN 

On  sait  que  Molière  vint  à  Rouen  en  i658,  et  qu'il  y 
donna  quelques  représentations  au  jeu  de  paume  des 
Braques.  Les  recherches  de  M.  Bouquet,  publiées  sous  ce 


358 

titre  :  La  Troupe  de  Molière  et  les  deux  Corneille  à 
Rouen  en  1 658,  ne  laissent  aucun  doute  à  cet  égard. 

<c  Le  jeu  de  paume  des  Braques^  dit  notre  savant  col- 
lègue, était  au  bas  de  la  rue  du  Vieux- Palais  qui  débou- 
chait en  face  et  à  peu  de  distance  dé  la  forteresse,  aujour- 
d'hui détruite,  d'où  la  rue  tirait  son  nom...  Il  représen- 
tait un  carré  long,  dont  les  quatre  murs  étaient  construits 
en  pierre  de  taille  et  en  moellons.  Il  avait  94  pieds  de 
longueur  et  3i  pieds  de  largeur  de  dedans  en  dedans.  L'in- 
térieur était  divisé  en  théâtre,  en  amphithéâtre  et  en 
loges,  construites  en  bois  peint  à  Thuile,  avec  cloisons  en 
bois  de  sapin,  recouvertes  de  toiles  gommées.  » 

En  i6o3,  ce  jeu  de  paume  appartenait  à  noble  homme 
Absalon  de  Claire,  seigneur  du  Bosc-Isambart  à  Monville, 
Tun  des  anciens  conseillers  de  la  ville,  domicilié  sur  la 
paroisse  de  Saint-Éloi.  Le  26  juillet  de  cette  année,  on 
voit  ce  particulier  €  bailler  à  rente  et  fîeffer  à  fin  d'héri- 
tage, pour  lui,  ses  hoirs  et  ayants  cause,  au  nommé  An- 
toine Delaunay,  maître  racquetier,  un  tènement  de  mai- 
sons de  jeux  de  paulmes,  vulgairement  nommez  Bracques^ 
assis  en  la  dicte  paroisse,  lesquels  consistoient  en  maisons, 
édifiîces,  petites  courtz  et  jardin,  y  comprins  trois  petits 
louages  de  maison  assis  en  la  dicte  paroisse,  rue  du  Vieux- 
Palais,  ...  à  prendre  lesdits  héritages  fieffez  le  long  des 
héritages  retenus  par  le  bailleur  ;  iceulx  héritages  bornez, 
d'un  costé,  les  Filles- Dieu  dudict  Rouen,  et,  d'autre 
costé,  les  représentans  Pierre  Trencart  et  la  maison  du 
Hault-Pas  ;  d'un  bout,  une  maison  en  la  rue  du  Vieux- 
Palais»  et,  d'autre  bout,  ledict  sieur  bailleur,  à  cause  d'un 
bâtiment  façon  d'appentis,  d'une  grande  court  et  d'un 
corps  de  maison.  »  L'entrée  et  la  sortie  des  jeux  se  disait, 
non  par  la  rue  du  Vieux-Palais,  mais  par  la  rue  Saint- 
Éloi.  Le  plus  grand  des  jeux  était  seul  couvert.  Le  prix 
de  la  fîeife  nous  paraît  considérable  pour  le  temps  :  il  était 
de  800  livres  de  rente,  racquittables  par  14,000  livres,  sans 
compter  60  sous  à  payer,  chaque  année,  à  la  recette  du 


3S9 

Domaine  du  Roi,  et  pareille  somme  à  payer  également, 
chaque  année, aux  Filles-Dieu  (i). 

Le  II  octobre  i554,  le  grand  jeu  de  paume  dit  vulgai- 
rement le  tripot  de  Bracques  était  baillé  à  ferme  pour 
douze  ans  par  Nicolas  de  Cleremuet  et  par  Marie  Huil- 
lard,  sa  femme,  à  Alain  Fontaine  et  à  Etienne  Dauge.  Il 
comprenait  alors  deux  petits  corps  de  maison,  une  grande 
salle  qui  servait  de  despouille^  des  cours,  des  galeries  et 
un  ouvreur  qu'un  nommé  Pierre  Malebranche  avait  fait 
construire  assez  récemment,  et  où  Ton  avait  pratiqué  une 
porte  qui  ouvrait  sur  ]a  rue  du  Vieux- Palais.  Le  prix  de 
location  était  de  80  livres  par  an  (2). 

Ce  jeu  de  paume  passait  pour  un  des  mieux  achalandés 
de  toute  la  ville,  t  On  voyait  s'y  rendre,  dit  M.  Floquet  (3), 
montés  sur  leurs  mules,  tels  conseillers  qui  s'étaient  &it 
excuser  au  Palais  comme  atteints  d'une  indisposition  su- 
bite, »  Ce  fut  un  des  abus  (ce  n*était  pas  le  plus  grave)  que 
l'on  eut  à  reprocher  aux  magistrats  de  la  fin  du  règne  de 
François  I^', 

Le  jeu  de  la  paume  était  en  grande  faveur  d^^ns  l'ancien 
temps.  On  ne  doit  donc  pas  être  surpris  du  nombre  des 
établissements  qui  furent  fondés  à  Rouen  à  l'usage  des 
joueurs.  Il  en  était  de  même  dans  toutes  les  villes.  On 
voit  aussi  qu'il  n^y  a  pas  eu  de  résidence  royale  sans  un 
jeu  de  paume.  Un  théâtre  eût  paru  moins  indispensable. 
Plus  tard  les  représentations  théâtrales  prirent  le  dessus, 
et  finirent  par  faire  négliger  les  jeux  de  paume  dont  elles 
occupèrent  les  vastes  locaux. 

Pour  nous  en  tenir  à  Rouen,  nous  citerons  le  jeu  de 
paume  de  VAigle-cTOr  entre  la  rue  de  l'Aumône,  en  hce  des 
murs  de  Saint- Lô,  et  la  rue  Ganterie,  sur  laquelle  était  la 
porte  d'entrée.  M.  Gosselin  parle  d'un  assassinat  qui^ 

(i)  TaMlhnage  de  Rouen,  meubles. 

(a)  Ibidem, 

(3)  Histoire  du  Parlement  de  Normandie^  t.  I,  p.  5ia. 


36o 


y  fut  commis,  en  iSgi,  sur  la  personne  du  capitaine  Les- 
mons  par  un  autre  capitaine,  Bailleul,  seigneur  de  Beau- 
vais.  Il  émet  l'opinion  que  ce  jeu  de  paume  dut  dispa- 
raître en  1668,  lorsque  l'on  ouvrit  la  rue  Neuve-Saint- Lô; 
mais  c'est  à  tort,  puisqu'on  le  voit  figuré  sur  un  plan  pos- 
térieur à  cette  date,  comme  situé  à  droite  de  cette  rue  en 
allant  à  la  rue  Ganterie.  Il  était  séparé  de  la  nouvelle  rue 
par  l'hôtel  de  M.  de  Frettemeule  (i). 

Les  jeux  de  paume  : 

De  la  Grande  et  de  la  petite  hête^  jeu  de  paume  cité 
par  M.  Périaux,  d'après  M.  Gosselin,  sans  détermination 
de  la  place  qu'il  occupait  ; 

Du  Carolus  d'or  y  cité  par  le  même.  Je  vois  un  tène- 
ment  à  l'enseigne  du  Carolus  d*or^  signalé  comme  situé 
rue  Grand- Pont,  dans  un  titre  de  1625  ; 

Du  Chat  qui  veille^  cité  par  le  même,  sans  détermina- 
tion de  son  emplacement; 

Du  Château" Rouge,  sur  la  paroisse  Sainte-Croix-Saint- 
Ouen.  Il  appartenait,  le  16  novembre  1584,  à  Marc- 
Antoine  Seghizo,  sieur  de  Bouges.  Il  fut  vendu,  en  1 584, 
a  Jean  Desnoz,  maître  d'un  autre  jeu  de  paume  dit  le 
Pélican,  Le  jeu  de  paume  du  Château-Rouge  se  trouvait 
derrière  les  murs  de  Saint-Ouen,  et  n'était  séparé  que  par 
une  maison  d'une  rue  qui  portait  alors  le  nom  de  rue 
Boudin.  11  fut  successivement  possédé  par  Pierre  Mor- 
lière,  Nicolas  Longer  et  David  Salingant.  Ce  dernier,  peu 
de  temps  après  l'avoir  acquis,  le  vendit  aux  Ursulines, 
auxquelles  il  ne  porta  pas  bonheur,  puisqu'il  fut  détruit 
dans  un  incendie,  en  i655  (2); 


<i)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  F.  du  prieuré  de  Saint-Ld. 

(2)  Georges  Le  Roy»  pelletier,  au  ChSteau-Rouge,  pénul.  de 
mars  1483.  Palais  de  Justice,  Reg,  du  hailL  de  Rouen,  —  Jean 
Brière,  psllotier,  vendit  ce  jeu  de  paume  à  Zègre  De  Hault  de 
Bruges,  i3  fév.  1493  (Tab.  de  Rouen). 


36 1 


De  la  Cigogne  ou  de  la  Grue^  derrière  les  murs  de 
Saint-Ouen,  1616,  1626(1); 

De  la  Cloche,  rue  Martainville,  paroisse  Saint-Maclou  (2)  ; 

Des  Cochonnets,  rue  Notre-Dame,  même  paroisse  (3)  ; 

Du  Coquet,  près  du  portail  Saint-Godard  (4)  ; 

Du  Corbel  ou  du  Corbeau^  rue  Beauvoisine,  paroisse 
Saint-Laurent  (5)  ; 

De  la  Cornière^  rue  Dinanderie  (6)  ; 

De  la  Cuiller  à  pot^  autrement  dit  du  Métayer^  où  Mo- 
lière joua,  en  1643,  avec  la  troupe  de  Tlllustre  théâtre.  Il 
était  situé  sur  la  paroisse  Saint-Martin,  près  de  la  Grosse- 
Bouteille  (7)  ; 

Du  Cygnot  (ou  Signot),  paroisse  Saint-Sauveur,  devant 
la  Poissonnerie.  Il  fut  transformé,  en  1793,  en  salle  de 
spectacle,  et  est  devenu  le  Théâtre  Français.  Il  était  tenu, 
en  1772,  par  le  sieur  Toussaint,  qui  fit  insérer  cette 
année-là  une  réclame  dans  les  Affiches  de  Normandie  afin 
d'y  attirer  la  pratique  (8)  ; 

Des  Deux  Maures^  paroisse  Saint- Éloi,  1625.  C'était  un 

(i)  Cité  par  M.  Périaux  et  mentionné  dans  le  Registre  des 
contrats  de  la  fabrique  Sainte-Croix-Saint-Ouen. 

(2)  Cité  dans  un  acte  du  1 1  février  1462  (v.  s.).  Tabellionage 
de  Rouen . 

(3)  Cité  dans  un  acte  du  8  avril  1464.  Ibidem. 

(4)  Cité  aux  années  161 1,  1699.  Arch.  de  la  S.-Inf.  G.  4758, 
48 1 3 .  Ce  jeu  de  paume  donna  son  nom  à  la  rue  du  Coquet,  dite 
encore,  en  161 1,  rue  de  la  Harpe. 

(5)  «  Ostel,  trippot,  jeu  de  paume  du  Corbel,  »  i4déc.  1483. 
Reg,  du  bailliage  de  Rouen;  16  mars  1485.  Tabellionage  de 
Rouen . 

(6)  Cité  par  M.  Périaux. 

(7)  Cité  par  le  même.^  «  La  Cuiller  à  pot,  ruelle  de  TAbre- 
veur  aux  chevaux,  »  27  décembre  1434.  Tabellionage  de 
Rouen,  reg.  24  f»  91  ;  la  Cuiller  à  pot,  rue  Vatier-Blondel,  1621. 
Arch.  de  la  S.-Inf.  G.  4719. 

(8)  Cité  par  Iç  même. 

a4 


365 

des  plus  connus  au  xyii^  siècle.  Comme  le  jeu  de  paume 
des  Braques,  il  servit  fréquemment  aux  représentations 
théâtrales,  et  finit  même  par  devenir  le  véritable  théâtre 
de  Rouen^  après  que  celui-ci  eut  été  affecté  à  Topera  et  à 
TAcadémie  de  musique  (i)  ; 

De  ï Étendard,  paroisse  Saint-Maclou,  en  face  de  la 
fontaine  des  Augustins.  Il  fut  adjugé  par  décret,  en  1 597, 
a  Jacques  Marlet,  qui  fiit,  je  ne  saurais  dire  pour  quel 
crime,  condamné  à  la  peine  capitale.  Il  fut  réédifîé,  en  161 3, 
par  Tavocat  Jacques  Pradon  et  par  sa  femme  Marguerite 
Delaste,  qui  n'eurent  point  trop  à  se  féliciter  de  leur  spécu- 
lation (2)  ; 

Du  Fer  à  cheval,  dont  je  ne  saurais  dire  l'emplacement, 
vers  1 543  (3)  ; 

Du  Héron^  dont  mention  a  été  faîte  par  M.  Gosselin  (4); 

Du  Patirty  rue  de  la  Seille  (5)  ; 

Du  Pélican  y  précité  ; 

(i)  Cité  par  le  même. 

(2)  Arch.  de  la  S.-Inf.^  F.  des  religieuses  du  Saint-Sacrement. 

(3)  Ibid. 

(4)  Le  Cartulaire  de  Saint-Maclou  mentionne,  dans  un  acte 
de  z 5x0,  le  tripot  du  Héron,  près  des  murs  de  Saint-Ouen. 
Cest  peut-être  le  même  que  le  jeu  de  paume  de  la  Cigogne  ou 
de  la  Grue.  Pour  s*expliquer  ces  différentes  appellations,  il  faut 
se  rappeler  que  les  rues  n'avaient  pas  de  noms  officiels, 
qu'on  les  désignait  généralement  par  les  enseignes  qui  s*y 
trouvaient,  et  que  la  même  enseigne  pouvait  être  pour  l'un  une 
Grue,  pour  un  autre  une  Cigogne,  pour  un  troisième  un  Héron. 

(5)  Mention,  le  4  janvier  1483,  «  du  tripot  du  Patin  où  l'on 
joue  à  la  paume.  Archives  du  Palais  de  Justice.  Registre  du 
bailliage  de  Rouen  ;  en  1 542,  «  du  tripot  du  Patin  derrière  les 
murs  de  l'abbaye  de  Saint-Ouen,  paroisse  Sainte-Croix-Saint- 
Ouen,  où  pend  l'enseigne  Saint'Julien.  »  Arch.  de  la  S.-Inf. 
Comptes  de  la  par.  Saint'Étienne^deS'Tonneliers,  i555,  1592. 
Le  2  septembre  1600,  sentence  portée  pour  blasphèmes,  contre 
un  particulier  qui  remplissait,  dans  ce  jeu  de  paume,  la  fonction 
de  marqueur. 


365 


Des  Penteurs,  cité  par  M.  Pénaux,  sans  détermination 
d'emplacement  ; 

Du  Petit  Maur,  cité  par  le  même,  sans  détermination 
d'emplacement  ; 

Du  Renard,  t  L'hôtel  du  jeu  de  paulme  où  pend  pour 
enseigne  le  Regnard  hors  la  porte  Cauchoise,  i  habité  par 
un  pellotier,  i3  juillet  1487(1); 

De  Saint-Eustache,  paroisse  Saint-Sauveur,  rue  aux 
Chevaux,  derrière  la  maison  occupée,  rue  de  la  Pie,  par 
la  famille  Corneille  (2)  ; 

De  Saint-Jeariy  paroisse  Saint-Godard  ;  baillé  à  louage 
par  frère  Martin  de  Troyes,  commandeur  de  Coulombiers, 
pour  lors  administrateur  de  la  maison  de  Saint-Antoine 
de  Rouen,  14  novembre  1478(3)  ; 

Des  Trois  Queues  de  Renard,  cité  par  M.  Périaux, 
sans  détermination  d'emplacement  ; 

De  la  Truie  qui  file,  rue  Martainville,  8  avril  1464  {4)  ; 

Du  Verdelet^  paroisse  Saint-Godard,  près  du  Marché 
aux  chevaux.  Il  appartenait  à  Marc-Aurèle  de  Giverville, 
qui  le  bailla,  pour  six  ans,  à  David  Salingant,  le  1 1  avril 
i653  (5).  En  1721,11  était  acheté,  par  les  Pauvres- Prêtres 
de  Saint- Louis,  de  M.  Louis  de  Cotton,  chevalier,  sieur 

(i)  xg  juin  1487,  Jean  Le  Gros,  pellotier,  prend  à  rente  de 
Jean  Enguerran,  dit  Gault,  cordouennier,  un  tènement  de  mai- 
sons de  jeux  de  paulme  ayant  pour  enseigne  le  Regnard,  pa- 
roisse de  Saint-Andricu  hors  la  porte  Cauchoise.  Mention  du 
tripot  du  Regnard,  comme  propriété  du  Chapitre  de  la  cathé- 
drale, 26  mars  i557;  fieffé  le  7  novembre  i558  ;  cité  le  21  no- 
vembre i563,  Registres  capitulaires ,  C'est  de  ce  tripot  que  la 
rue  du  Renard  tire  son  nom. 

(2)  «  Pour  la  sépulture  d*un  jeune  garçon,  fils  du  maître  du  jeu 
de  paulme  de  Saint-Eustache,  10  sous.  »  Arch.  de  la  S.-Inf., 
Comptes  de  la  paroisse  Saint'Sauveur, 

(3)  Tahellionage  de  Rouen, 

(4)  Ibidem, 

(5)  Ibidem,  Minutes  de  Crosnier. 


364 

de  Verdois,  vendeur  au   nom  de  ses  enfants  mineurs. 

Il  y  avait  aussi,  sur  la  paroisse  Saint-Paul,  un  grand  jeu 
de  paume  dont  les  propriétaires,  MM.  Brice,  prétendaient, 
en  171 8,  faire  un  fief  noble  sous  le  nom  de  fief  de  Mar- 
tainville,  contrairement  aux  droits  des  Chartreux,  substi- 
tués à  Tabbaye  de  Sainte -Catherine  (i). 

Le  26  septembre  i554,  demande  avait  ctc  faite  à  la  Ville 
par  un  particulier  d'établir  un  jeu  de  paume  dans  les  fos- 
sés de  Cauchoise.  Les  échevins  avaient  décidé  que  l'auto- 
risation pourrait  être  accordée,  mais  moyennant  un  prix 
d'argent  (2). 

A  la  date  du  i5  juillet  iSSy^  on  voit  figurer,  dans  un 
acte  du  tabellionage  de  Rouen,  Jacques  Du  Bosc,  ccuyer, 
varlet  de  chambre  du  cardinal  de  Bourbon,  archevêque 
de  Rouen,  lequel  Du  Bosc  s'intitule  c  garde  et  usufruitier 
du  jeu  de  paume  assis  en  la  cour  de  la  dite  abbaye  au 
droit  du  don  à  lui  fait,  sa  vie  durante,  par  ledit  cardinal  ». 

La  nombreuse  clientèle  de  tous  ces  jeux  de  paume 
explique  l'importance  assez  considérable  qu'avaient  alors 
deux  métiers  aujourd'hui  presque  inconnus^  les  métiers 
de  pellotier  et  de  raquettier.  Le  pellotier  fabriquait  les 
éteufs  ou  balles  qui  servaient  au  jeu,  le  raquettier  fabri- 
quait les  raquettes  (3). 

Les  pellotiers  formaient  à  Rouen  une  communauté  vers 
la  fin  du  xv^  siècle.  Le  vendredi,  4  mai  1484,  Martin  Cote- 
rel,  sergent,  rapportait,  devant  le  lieutenant  général  du 
bailli,  que,  ce  jour-là,  en  plein  marché,  à  la  Vieille-Tour, 

(i)  Les  Chartreux  produisirent  un  titre  de  iSgi,  où  ce  prétendu 
fief  n'était  qualifié  que  jeu  de  paume. 

(2)  Délibérations  de  la  Ville. 

(3)  Les  raquettiers  formaient  un  corps  de  métier  distinct. 
12  mars  i552,  Etienne  Le  Pelletier,  raquettier,  paroisse  Saint- 
André-hors-ville.  ^  14  juillet  1 5 16,  Pierre  Piquelley,  du  métier 
de  raquettier,  paroisse  Sainte-Croix-Saint-Ouen.  —  Pénultième 
d'octobre  i558,  Jaspar  Chardon^  raquettier,  même  paroisse  > 
près  de  la  Rougemare.  Registres  du  Tabellionage  de  Rouen, 


365 

accomplissant  le  contenu  du  mémorial  par  lui  présenté, 
c  il  avoit  fait  bruyr  et  ardre  vi  grosses  et  demie  d'esteurs, 
que  les  gardes  du  mestier  a  voient  pris  naguères  et  mis 
en  arrest  comme  faux,  et  dont  ils  avoient  trouvés  saisis 
certains  marchands  forains  (i).  »  Le  23  octobre  i552,  Blan- 
chet  Nouel,  f  faiseur  d'esteurs  »,  de  la  paroisse  Saint-Godard, 
prenait  en  apprentissage,  pour  quatre  ans,  un  nommé  Jac- 
ques Bréard,  âgé  de  quatorze  ans.  Les  éteurs  figurent 
assez  fréquemment  dans  les  aveux,  parmi  les  redevances 
que  les  vassaux  devaient  à  leurs  seigneurs,  ce  qui  doit 
faire  supposer  que  le  jeu  de  la  paume  était  en  vogue  aussi 
bien  dans  les  campagnes  que  dans  les  villes,  dans  les  rangs 
de  la  haute  société  aussi  bien  que  dans  ceux  de  la  bour- 
geoisie. 

Les  registres  de  Tofficialité  viennent  à  Tappui  de  cette 
supposition.  On  y  voit  aussi  que  les  jeux  de  paume  étaient 
souvent  le  théâtre  de  scènes  violentes,  et  que  certains 
ecclésiastiques  ne  résistaient  pas  à  l'attraction  que  ces 
luttes  de  force  et  d'adresse  exerçaient  sur  la  foule (2). 

Mais,  en  dépit  de  ces  abus,  auxquels,  de  même  que  les 

(i)  Archives  du  Palais  de  Justice,  Registre  du  bailliage  de 
Rouen.  ^  Le  2  juin  14S0,  Jean  le  Pilleur  faisait  don  à  la  fabrique 
de  Saint- Vincent,  sa  paroisse,  de  16  sous  provenant  de  la  vente 
des  éteurs  tombés  dans  sa  maison  d*uu  jeu  de  paume  voisin. 
Quelques  mois  après,  sa  femme  venait  offrir  3  sous  5  deniers 
qu'elle  s*était  procurés  de  la  même  manière.  Ârch.  de  la  S.-Inf. 
Comptes  de  Saint- Vincent. 

(2)  Mention  de  jeux  de  paume  à  Auffay,  Brémontier,  Montfort, 
1450;  à  Beuzemouchel,  1453  ;  à  Longchamp,  Lyons-la-Forêt, 
1455  ;  à  Saint-Georges-de-Gravenchon,  1456;  à  Étables,  Fours, 
Muids,  1458;  à  Appsville,  Guénonville^  1464;  à  Susay,  1472; 
à  Omerville,  1484;  à  Pitres,  1485;  à  Liancourt,  1488.  Les 
autres  jeux  usités  dans  les  camppgnes  étaient  ceux  des  barres, 
du  batailleur,  de  la  boule,  de  la  choule,  des  croisettes,  des 
épées  (épées  de  bois),  de  la  pile  et  de  la  quintaine.  On  voyait 
avec  défiance  les  jeux  de  hasard,  spécialement  les  jeux  de  cartes, 
de  dés,  de  rabatues,  de  taxilli  et  d*apipa. 


366 


meilleures  choses  du  monde,  les  jeux  de  paume  pouvaient 
donner  lieu,  il  est  constant  qu'ils  furent  toujours  vus  avec 
faveur  par  l'autorité  publique  (i). 

Par  une  exception  assez  remarquable,  des  lettres-paten- 
tes de  Frs^nçois  I^^^du  9  novembre  1 527,  portaient  que 
€  tout  ce  qui  se  passeroit  au  jeu  de  paume  seroit  payé  à  celui 
qui gagneroit,  comme  une  dette  raisonnable^  acquise  par  son 
travail.  »  Cette  disposition  paraît  avoir  été  inspirée  par  l'é- 
quité à  un  législateur  bienveillant.  Mais  ce  qu'on  y  ajoute 
sent  la  fiscalité  :  f  Pour  éviter  les  procès  qui  pourroient  naître 
de  ce  jeu,  le  Roi  établissoit  un  maître  gardien  général  des 
gages  par  toutes  les  villes  du  royaume,  lequel  commet- 
troit  gens  solvables  par  tous  les  jeux  de  paume,  dont  il 
répondroit.  »  Il  est  juste  de  remarquer,  avec  le  président 
De  la  Mare,  que  cette  invention  resta  à  l'état  de  projet  (2). 

Le  jeu  de  la  paume,  connu  de  toute  antiquité,  a  eu  et  mé- 
ritait d'avoir  ses  historiens,  ses  législateurs,  ses  prôneurs 
et  ses  poètes.  Parmi  eux  il  suffît  de  citer  M.  Bajot,  auteur 
d'un  livre  intitulé  :  Éloge  de  la  paume  et  de  ses  avantages 
sous  le  rapport  de  la  santé  et  du  développement  des  facul- 
tés physiques. 

Dans  cet  ouvrage,  sérieusement  composé,  M.  Bajot  dis- 
tingue la  longue  paume  de  la  courte  paume,  la  première 
qui  se  jouait  dans  un  espace  découvert  et  avec  des  bat- 
toirs, la  seconde  qui  se  jouait  dans  un  espace  couvert, 
d'abord  tout  simplement  avec  la  paume  de  la  main,  plus 

(i)  «  Entre  les  jeux,  dit  Fortin  de  la  Hoguette,  Testament  d'un 
père  à  ses  fils,  ceux  qui  ne  sont  point  sédentaires  comme  la 
longue  et  la  courte  paume,  le  mail  et  le  ballon,  sont  plutôt 
exercices  que  jeux,  qu'on  aime  ou  qu'on  néglige  selon  l'âge  où 
l'on  se  trouve  et  selon  la  disposition  ou  l'attache  qu'on  y  a.  Tout 
le  mal  que  ceux-là  peuvent  faire  en  leur  excès  est  de  lasser  le 
corps  sans  incommoder  que  bien  peu  l'esprit  et  la  bourse.  Les 
sédentaires,  qui  sont  les  échets,  les  dez  et  les  cartes,  sont  plus 
dangereux,  m 

(2)  Traité  de  la  police^  livre  III,  titre  iv,  chapitre  v. 


367 

tard,  à  partir  de  la  seconde  moitié  du  zv*  siècle,  à  Taide 
de  la  raquette. 

A  la  suite  du  témoignage  d'Etienne  Pasquier,  le  savant 
auteur  cite  celui  d'Erasme,  duquel  il  résulte  que,  du  temps 
de  ce  célèbre  écrivain,  la  raquette,  bien  que  fréquemment 
employée,  n'avait  point  encore  un  avantage  marqué  sur  la 
paume  de  la  main,  Tarme  des  temps  héroïques  (i). 

Ce  que  nous  pouvons  dire  à  l'appui  de  l'assertion  de 
M.  Bajot,  c'est  que  le  métier  de  pelottier  paraît  avoir  pré- 
cédé à  Rouen  celui  de  raquettier,  dont  nous  ne  trou- 
vons de  mention  qu'au  xvi^  siècle. 

On  a  inséré  dans  le  Recueil  des  Ordonnances  des  rois 
de  France  les  statuts  des  faiseurs  de  balles  à  jeu  ou  éteurs, 
autrement  dit  pelottiers,  statuts  confirmés  par  Louis  XI 
en  1480.  D'après  l'article  vi  de  ce  document,  les  gardes  de 
ce  métier  avaient  droit  de  visite  chez  les  maîtres  et  ou- 
vriers €  des  jeux  de  paulme  et  tripots  de  Rouen  et  ban- 
lieue, pour  visiter  les  esteufs  et  saisir,  si  mauvais,  avec 
amende  de  i5  sous  contre  les  contrevenants  (2).  »  Les  fai- 
seurs de  balles  à  jeu  formaient  une  confrérie  sous  le  titre 
de  Notre-Dame  et  de  Saint- Louis,  dont  le  siège  était  à 
l'hôpital  (sans  doute  l'Hôpital  du  Roi),  en  la  chapelle  du 
Jardin . 

Au  xviii^  siècle,  cette  communauté  avait  complètement 
disparu.  Les   balles  à  jeu  n'étaient  plus  qu'un  objet  de 

(i  )  Érasme,  dans  un  de  ses  colloques,  met  en  scène  deux  joueurs 
de  paume  : 

Nicolaus,  —  NuUa  res  melius  exercet  omnes  corporis  partes 
quam  pila  palmaria. 

f(ytfronimi<5.<— NuUum  anni  tempus  nobis  panim  accommodum 
est  ad  ludendum. 

Nicolaus,  —  Minus  sudabitur,  si  ludamus  reticulo. 

Hyeronimus,  —  Imo  reticulum  piscatoribus  relinquamus  ;  ele^ 
gantius  est  palma  uti. 

(2)  Cité  par  M.  Tabbé  Ouin-Lacroix,  dans  son  Histoire  des 
corporations  d'arts  et  métiers  à  Rouen. 


368 

commerce  trop  insignifiant  pour  que  ceux  qui  les  fa- 
briquaient pussent  être  réunis  en  corps  de  métier.  On  les 
confondait,  ainsi  que  les  raquettiers,  avec  les  brossiers 
qu'on  laissait  eux-mêmes  en  pleine  liberté,  à  raison  du 
peu  d'importance  de  leur  industrie  (i). 

Les  jeux  de  paume  ne  purent  résister  à  la  concurrence 
que  leur  firent  les  jeux  de  hasard,  et  aussi  les  billards,  les 
cafés  et  les  théâtres. 

Dès  1772,  le  maître  du  Cj^gnot  se  plaignait,  dans  une 
réclame,  de  l'abandon  que  Ton  faisait  des  jeux  de  paume. 
Son  établissement  paraît  avoir  été  le  dernier  que  Ton  ait 
connu  à  Rouen  (2). 

Pour  les  derniers  partisans  de  la  paume  il  ne  restait 
plus,  au  commencement  de  ce  siècle,  que  l'avenue  de  la  Ma- 
deleine. On  combattait  à  ciel  ouvert  :  c'était  un  retour  aux 
usages  primitifs,  moins  par  amour  de  l'ancienne  simplicité 
que  faute  de  spectateurs  et  de  combattants  (3). 

Après  les  jeux  de  paume,  il  serait  assez  naturel  de  parler 
des  jeux  de  mail  ou  de  palle-mail,  qui  n'étaient  guère 
moins  en  honneur,  et  que  les  Anglais  ont  conservés.  Nous 
nous  contenterons  de  citer  un  jeu  de  mail  ou  de  palle- 
mail  qui  était  situé  à  Sotteville,  près  de  Grandmont,  et 
qui  fut  très  achalandé  pendant  tout  le  xvii«  siècle  et  pen- 
dant une  partie  du  siècle  suivant. 

En  i6o5,  Henri  IV  avait  octroyé  t  à  Marguerite  Fleury, 
veuve  de  Michel  Le  Boullenger,  cornet  dessus  et  hautbois 
de  la  maison  royale,  le  droit  de  faire  construire  des  jeux 
de  palle-mail  publics,  privativement  à  tous  autres,  pour 
elle,   ses  enfants,    ses    successeurs  et  ayants-cause,   en 


(i)  Arch.  S.-Inf.,  F.  de  l'Intendance. 

(2)  M.  Périaux,  au  mot  Jeux  de  paume. 

(3)  Ibid,  On  peut  consulter  sur  les  jeux  de  paume  à  Rouen, 
spécialement  dans  leurs  rapports  avec  le  théâtre,  un  très  inté- 
ressant article  de  M.  Bouquet,  inséré  dans  la  Revue  de  Nor- 
mandie de  1869. 


369 

dedans  et  dehors  des  villes  de  Caen  et  de  Rouen,  en  pre- 
nant de  chaque  personne  4  sous  par  jour,  sans  avoir  à 
fournir  autre  chose  que  la  place  dressée  et  accommodée 
comme  il  appartenait». 

Ce  privilège,  assez  singulier  par  sa  nature,  n^était  pas 
concédé  à  titre  purement  gratuit.  C'était  un  expédient 
qu'un  financier  avait  imaginé  afin  de  permettre  au  Roi 
de  s'acquitter,  sans  bourse  délier,  de  480  ccus  qui  restaient 
dûs  audit  Le  Boullenger  (sans  doute  un  musicien  célèbre 
à  la  cour),  pour  ses  gages  des  années  1599  et  1601  et  de 
55o  écus  en  plus  pour  ses  accoutrements. 

Mais  en  accordant  le  privilège,  Henri  IV  fit  une  réserve 
en  faveur  de  son  aumônier,  Jacques  de  Bernage,  qu'il 
avait  gratifié  du  prieuré  d*e  Grandmont,  parce  que  Ber- 
nage, dès  1602,  avait  établi  pour  les  bourgeois  de  Rouen, 
près  du  manoir  prieural,  un  jeu  de  palle-maîl  dont  il 
tirait  bon  parti.  Un  arrêt  du  Conseil  déclara  que  le  prieur 
pourrait  achever  l'installation  de  ce  jeu  et  en  toucher  les 
profits  pendant  toute  sa  vie. 

On  pense  bien  que  le  prieur  n'eût  pu  songer  à  l'exploi- 
ter directement.  Il  le  bailla  à  ferme,  à  un  nommé  Engue- 
hard,  sous  condition  de  laisser  jouer  gratis,  toutes  fois  et 
quantes  qu'il  leur  plairait,  lui  prieur,  ses  frères,  les  sieurs 
bailli,  procureur  fiscal,  greffier  et  receveur  de  la  haute- 
justice  de  Grandmont. 

Plus  tard,  après  la  mort  de  Bernage,  le  palle-mail  fut 
compris  dans  la  manse  priorale  de  Grandmont,  qui  devint 
une  partie  4e  la  dotation  du  collège  des  Jésuites. 

Bien  des  années  après,  on  voit  ces  religieux  prendre  fait 
et  cause  pour  leur  fermier  qu'on  voulait  assujettir  aux 
droits  d'aides,  parce  qu'à  l'occasion  il  donnait  à  boire  aux 
joueurs.  A  les  en  croire,  «  le  jeu  de  mail  importait  à  la 
décoration  et  embellissement  de  la  ville,  et  toujours  le  fer- 
mier avait  eu  la  liberté  de  distribuer  à  ja  jeunesse  qui 


37? 

jouait  au  mail,  un  coup  à  boire  pour  les  rafraîchir  pendant 
la  fatigue  du  jeu  (i).  » 

Je  n'ai  point  recherché  quelle  suite  fut  donnée  à  cette 
réclamation.  On  ne  m'eût  point  tenu  compte  de  ma  peine; 
et,  à  dire  vrai,  cela  n'importe  guère. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

Le  Secrétaire- Adjoint, 
Rrianchon. 

(i)  Arch.  de  la  S.-lnf.,  F.  du  collège  de  Rouen. 


J 


Î7I 


SÉANCE  DU  7  AVRIL  1884 

La  séance  est  ouverte  à  deux  heures,  sous  la  prési- 
dence de  M.  Ch.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Étaient  présents  :  MM.  Adeline,  Paul  Baudry, 
Billiard,  Bouquet,  Gouellain,  Maillet  du  Boullay,  de 
Merval,  Pelay  et  Tabbé  Tougard,  faisant  fonctions  de 
secrétaire. 

S'est  excusé  :  M.  Briarichon. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance,  rédigé  par 
lui^  est  lu  par  M.  Gouellain  et  adopté. 

M.  le  Président  revient  sur  l'importance  de  la  con- 
servation desarchives  et  des  dessins  delà  Commission. 
Le  classement  de  ces  derniers  ne  peut  se  faire  que  plu- 
sieurs mois  après  chaque  séance,  sinon  même  Tannée 
suivante.  Mais  des  mesures  sont  prises  pour  assurer  le 
classement  exact  de  toutes  les  pièces  importantes,  et 
M.  de  Beaurepaire  lésa  même  soustraites  aux  chances 
d*incendie. 

La  correspondance  imprimée  comprend  :  Listofthe 
Society  of  Antiquaries  of  London,  juin  1881  et  juin 
1882;  —  Proceedings  des  mêmes,  avril-décembre 
1880;  —  Les  mêmes,  décembre  1880  et  juin  1881  ;  — 
Les  mêmes,  novembre  1881  et  janvier  1882  ;  —  Mé- 
moires de  la  Société  des  Antiquaires  de  Morinie, 
vol.  XVIII  (1882-1883);  Bulletin  du  Comité  des 
Travaux  historiques,  i883  ;  —  Société  industrielle 
d'Elbeuf,  i883,  août-octobre  ;  —  Bulletin  de  la  Soc. 
des  Antiquaires  de  l'Ouest,  juillet-septembre  i883; 
—  Bulletin  de  la  Société  des  Amis  des  Sciences  na- 
turelles de  Rouen,  1882,  2«  semestre;  —  Bulletin  de 


372 

la  Société  historique  et  archéologique  de  Langres, 
i883. 

Porche  de  la  VieuX'Rue.  —  Demande  de  classe- 
ment. —  L'objet  principal  de  cette  séance  est  une  lettre 
de  M.  le  Préfet  qui  soumet  à  la  Commission  une  de- 
mande de  classement  du  porche  de  Téglise  de  la  Vieux- 
Rue,  qui  a  été  adressée  à  l'Administration  départe- 
mentale par  le  maire  conjointement  avec  le  curé. 

M.  Pabbé  Tougard  objecte  Tinconvénient  qu'il  y 
aurait  à  trop  multiplier  les  classements.  Néanmoins, 
plusieurs  membres  estiment  qu'il  est  impossible  de 
rejeter  cette  demande  sans  examen  ;  et  la  Commission 
délègue,  pour  la  visite  de  Péglise,  MM.  Gouellain  et 
Pelay^ 

Académie  de  Musique  et  la  Comédie  à  Rouen,  — 
M.  Bouquet  fait  la  communication  suivante  : 

Messieurs, 

A  la  dernière  séance,  notre  honorable  vice-président  a 
pu  préciser,  à  l'aide  d'un  document  nouveau,  remplace- 
ment du  Jeu  de  Paume  des  Braques,  qui  servait  aux  comé- 
diens de  passage  pour  la  représentation  de  leurs  pièces,  à 
Rouen,  et  qui  tint,  pendant  longtemps,  une  place  consi- 
dérable dans  cette  partie  de  notre  histoire  locale,  jusqu'en 
1696,  comme  nous  avons  eu  l'honneur  de  vous  le  dire. 

Par  une  association  d'idées  toute  naturelle,  Tun  de  nos 
collègues  a  demandé  si  l'on  savait  ce  qu'étaient  et  où 
étaient,  à  Rouen,  une  Académie  royale  de  musique  et  la 
Comédie^  dont  il  est  souvent  fait  mention,  vers  la  même 
époque. 

Nous  avions  dit  que  la  réponse  à  la  question  se  trouvait 
dans  les  Simples  notes  sur  les  anciens  théâtres  de  Rouen 
du  xvi^  au  xvii«  siècleSy  rassemblées  par  un  laborieux  et 


373 

consciencieux  travailleur,  M.  E.  Gosselîn,  qui  les  donna  à 
la  Revue  de  la  Normandie,  en  i863. 

Elle  y  est,  en  effet;  et  c'est  en  profitant  de  ses  recher- 
ches et  en  y  joignant  quelques  détails  nouveaux,  que  nous 
espérons  pouvoir  préciser  remplacement  et  le  rôle  de  cette 
Académie  royale  de  musique  et  de  la  Comédie,  avec  la 
date  de  leur  apparition. 

Ainsi  que  notre  honorable  vice-président  Ta  rappelé,  le 
Jeu  de  Paume  des  Braques,  où  avaient  lieu,  au  xvii«  siècle, 
les  représentations  théâtrales,  était  situé  au  bas  de  la  rue 
du  Vieux-Palais  et  voisin  des  Filles-Dieu,  nom  donné  aux 
religieuses  chanoinesses  de  Saint-Augustin,  à  cause  de  la 
régularité  de  leur  vie  ;  et  il  avait  un  rival  dans  le  Jeu  de 
Paume  des  Deux- Maures,  que  les  comédiens  prenaient 
aussi  pour  y  représenter  leurs  pièces,  surtout  au  milieu  de 
ce  même  siècle. 

Or  il  règne  quelque  incertitude  sur  l'emplacement  oc- 
cupé par  le  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures,  transformé 
en  théâtre. 

En  février  1863,  M.  Gosselin  a  commencé  par  dire  :  t  Le 
Jeu  de  Paume  des  Deux- Maures  était  situé  rue  des  Char- 
rettes, au  bas  et  à  l'encoignure  delà  rue  Herbière.  •  Mais, 
peu  de  temps  après,  il  se  corrigea  lui-même  en  disant  : 
f  Vis-à-vis  la  rue  Herbière  et  non  pas  â  l'encoignure, 
ainsi  que  cela  a  été  dit  par  erreur  dans  le  numéro  de  la 
Revue  de  la  Normandie  de  février  i863,  page  34.  • 

Nous  ne  savons  d'après  quelle  autorité  M.  Gosselin  avait 
introduit  cette  note  rectificative  au  bas  de  son  texte,  à  la 
page  139  de  la  Revue  de  la  Normandie.  Mais  un  texte 
contemporain  et  surtout  les  constatations  postérieures 
permettent  d'afHrmer  que  sa  rectification  était  bien  fondée. 

Le  texte  contemporain  a  été  connu  de  M.  de  Beaure- 
paire,  qui  l'a  publié,  en  1859,  dans  un  numéro  du  iVoi/- 
velliste  de  Rouen,  que  nous  n'avons  pu  retrouver. 

C'est  M.  Eudore  Soulié,  l'auteur  des  savantes  Recherches 
sur  Molière  et  sur  sa  famille,  qui  nous  l'a  révélé,  quand  il 


374 

nous  a  permis  de  le  publier,  en  1 86  3,  dans  la  Revue  de  la 
Normandie. 

L'exploit  d'un  sergent,  du  nom  de  Vincent,  signifié  le 
lo  août  i652,  à  la  requête  des  administrateurs  de  THôtel- 
Dieu  de  la  Madeleine  de  Rouen,  parle  de  l'emplacement 
du  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures.  «  J'ay  sommé  noble 
homme  Laurens  Conseil  sieur  d'Argil  commedien  estant 
de  présent  à  Rouen  et  parlant  à  sa  personne  viron  Midy 
estant  au  jeu  de  paulme  des  Deux  Mores  au  bas  de  la  rue 
Herbière  de  paier,  compter  ausd.  sieurs  administrateurs... 
les  deniers  qu'ils  ont  receus..,  pour  les  pauvres  dudit 
Hôtel-Dieu.  •  (Revue  de  la  Normandie,  année  i865, 
p.  3o8.) 

Ces  mots  :  c  Au  bas  de  la  rue  Herbière  »  ne  signifient 
pas  c  au  coin  n,  et  ils  peuvent  très  bien  s'entendre  aussi 
par  «  au  débouché  »  ;  ou  bien  :  t  vis-à-vis  de  la  rue  Her- 
bière. » 

On  se  demande  comment,  au  Heu  de  cette  périphrase  : 
«  Au  bas  de  la  rue  Herbière  »,  le  sergent  n'a  pas  mis  le 
nom  même  de  la  rue  des  Charrettes.  C'est  que  tel  n'était 
peut-être  pas  alors  son  nom.  La  rue  que  nous  appelons 
aujourd'hui  rue  des  Charrettes,  depuis  la  rue  Grand-Pont 
jusqu'à  la  place  Henri  IV,  avait  porté  précédemment  plu- 
sieurs noms.  Elle  s'est  appelée  de  quatre  noms,  sur  son 
parcours.  En  commençant  par  l'est,  on  avait  la  rue  des 
Charrettes  ;  puis,  la  rue  aux  Noix  ;  à  la  suite,  la  rue  de 
devant  le  Pont  Tiretaigne  ;  et  enfin,  la  rue  du  Palais^  dans 
la  partie  aboutissant  au  Vieux-Palais.  Le  plan  de  Gom- 
boustde  i655  donne  bien  le  nom  de  €  rue  des  Charrettes» 
depuis  la  rue  Grand-Pont  jusqu'à  la  rue  de  la  Vicomte. 
Mais  il  est  sans  indication  aucune  pour  le  reste  de  la  rue. 
Ensuite  il  montre,  au  bas  de  la  rue  Herbière,  un  grand 
quadrilatère  compris  entre  la  rue  de  la  Vicomte,  à  l'est  ; 
la  rue  Saint-Eloi,  à  l'ouest;  les  murs  de  la  ville,  au  sud; 
disant  face  au  quai,  entre  les  portes  de  îa  Vicomte  et  Saint- 
Eloi,  et  enfin,  au  nord,  la  suite  de  la  rue  des  Charrettes, 


\ 


! 


375 

dont  le  nom  était  peut-être  encore  :  <  La  rue  de  devant  le 
Pont  Tiretaigne  >  ;  car  tout  ce  quadrilatère  est  appelé,  par 
Gomboust:  c  Ponttaritaine  •. 

Taillepied  cite  parmi  <  les  ponts  qui  servent  commodé- 
ment pour  passer  de  rue  en  autre,  le  pont  de  Taritaine,  > 
(Les  Antiquités  de  Rouen,  p.  34).  C'était  en  1 587  que  ce 
pont  servait  encore  à  passer,  sinon  un  cours  d^eau  que 
nous  ne  connaissons  pas,  au  moins  les  grosses  eaux  pro- 
duites par  les  débordements  ou  les  marées  de  là  Seine, 
voisine  de  cet  endroit  et  très  fréquents  alors,  avant  la 
surélévation  des  talus  qui  rencaissaient  mal,  comme  on  le 
voyait,  jusqu'au  commencement  de  notre  siècle,  tout  le 
long  de  la  ligne  des  quais  de  la  rive  droite. 

Dans  la  partie  du  quadrilatère  ou  itot  de  malsons  appelé 
€  Pontaritaine  »  et  faisant  face  à  la  rue  Herbière,  se  trou- 
vait donc  le  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures,  dont  il  était 
souvent  question  dans  les  Archives  de  T Hôtel-Dieu,  à 
propos  de  la  perception  du  droit  des  pauvres,  de  i65o  à 
1660,  comme  cela  résulte  de  témoignages  postérieurs,  que 
nous  allons  rappeler. 

Ainsi  que  M.  Gosselin  nous  l'apprend,  <  c'était, en  1682, 
un  grand  bâtiment  qui  avait  la  porte  d'entrée  dans  la  rue 
des  Charrettes,  mais  non  sa  façade  ;  car  il  fallait,  pour  y 
parvenir,  suivre  une  longue  et  étroite  allée,  qui  traversait 
tout  le  corps  de  logis  derrière  lequel  il  se  trouvait.  Il  était 
«  entouré  et  enfoncé  de  toutes  parts  par  des  maisons  im" 
médiatement  contiguès,  »  (Arrêt  du  Parlement  du  27  jan- 
vier 1682).  Tout  était  en  bois;  les  murailles  étaient  com^ 
posées  de  poteaux  très  distants  les  uns  des  autres  et  dont 
les  intervalles  étaient  garnis  de  clayes  légèrement  en- 
duites  de  plâtre,  >  (Simples  notes  sur  le  théâtre,  ibid. , 
p.  140.) 

Mais  ce  nom  de  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures  ne  tarda 
pas  à  disparaître,  et  voici  dans  quelle  circonstance.  En  dé- 
cembre 1688,  un  nommé  Bernard  Vaulticr,  seigneur  des 
chants^  présenta  une  requête  au  lieutenant  général  du 


376 

Bailli  de  Rouen,  Marc  Antoine  deBrèvedent,  pourTinfor- 
mer  <  qu'il  avoit  le  dessein  d'y  établir  une  Académie 
royale  de  musique,  vulgairement  dite  opéra  >.  Il  le  sup- 
pliait de  lui  accorder  <  la  permission  de  s^établir  en  quel 
lieu  il  lui  semblerait  bon  être  ;  y  faire  construire  un 
théâtre  avec  toutes  ses  dépendances  ».  (M.  Gosselin,  l'^t'i., 
p.  38.) 

Le  8  janvier  1689,  la  permission  fut  accordée  dans  les 
termes  de  la  requête,  et  Vaultier  n'en  profita  que  dans  une 
certaine  mesure  pour  la  construction  du  théâtre  projeté. 

L'argent  lui  faisant  défaut,  au  lieu  de  bâtir  un  nouveau 
théâtre,  il  se  rabattit  sur  le  Jeu  de  Paume  des  Deux- 
Maures,  et  le  disposa  pour  servir  aux  représentations  ly- 
riques qu'il  avait  en  vue.  Quand  tout  fut  terminé,  «  on 
plaça  au-dessus  de  la  porte  d'entrée  une  plaque  en  marbre 
noir  avec  ces  mots  gravés  en  lettres  d'or  :  Académie  royale 
DE  MUSIQUE.  »  Depuis  ce  temps,  le  nom  de  Jeu  de  Paume 
des  Deux-Maures  disparut  pour  faire  place  à  celui  d! Aca- 
démie royale  de  musique,  au  lieu  à'Opéra^  qui  en  était 
synonyme. 

A  son  tour,  le  Jeu  de  Paume  des  Braques  avait  égale- 
ment reçu  une  dénomination  nouvelle.  Comme  depuis 
i658,  date  de  la  venue  de  Molière  et  de  sa  troupe  à  Rouen, 
on  y  avait  représenté  presque  exclusivement  la  comédie, 
nom  donné  alors  a  toutes  les  pièces  du  genre  dramatique, 
l'habitude  s'établit  de  l'appeler  «  La  Comédie.  » 

La  preuve  en  est  fournie  par  un  compte  des  Recettes  de 
l'Hôtel-Dieu,  au  profit  des  pauvres,  dont  M.  Ch.  de  Beau- 
repaire  vient  de  publier  le  fragment  que  voici,  dans  son 
Rapport  au  Conseil  général^  en  i883.  «  lo*  février  1690. 
Délibéré  que  les  deniers  qui  seront  reçus,  à  VOpéra  et  à 
la  Comédie,  seront  partagés  également  entre  les  deux 
hospices,  comme  il  a  été  arresté  en  l'hôpital  des  Valides, 
par  délibération  du  3o  novembre  dernier.  » 

Voilà  bien  les  deux  théâtres  que  Rouen  possédait  alors 
et  que  les  comptes  de  l'Hôtel- Dieu  appelaient  autrefois 


377 

Le  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures  et  Le  Jeu  de  Paume 

des  Braques. 

.  Aussi  M.  Périaux  a-t-il  eu  bien  raison  de  dire  :  c  A  la 
date  du  24  janvier  1691  a  été  constatée  l'existence  à  Rouen 
d'une  Académie  royale  de  Musique  :  tel  est  le  nom  qu'avait 
pris  une  troupe  d'opéra  qui  était  venue  s'installer,  en 
1689,  au  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures,  dans  la  rue  des 
Charrettes,  en  face  de  la  rue  Herbière,  en  concurrence 
avec  une  autre  troupe  qui  jouait  ta  comédie  au  Jeu  de 
Paume  des  Braques,  situé  au  bas  de  la  rue  du  Vieux-Pa- 
lais. »  (Histoire  de  Rouen^  p.  5o5.) 

De  toutes  les  pièces  lyriques  jouées  sur  l'ancienne  scène 
du  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures,  transformée  en  Opéra, 
nous  n'en  connaissons  qu'une  seule,  en  la  possession  de 
Tun  de  nos  collègues,  M.  Pelay,  qui  nous  Ta  obligeamment 
transmise.  En  voici  le  titre  complet  :  Proskrpine,  tragédie 
en  musique  ornée  d'entrées  de  Ballet,  de  Machines  et  de 
Changemens  de  Théâtre,  Représentée  par  TAcadémib 
ROYALE  DE  MUSIQUE  établie  à  Rouen.  Imprimée  pour  ladite 
Académie  à  Rouen,  chez  Jean-B.  Besongne,  ru6  Ecuyere, 
au  Soleil  Royal.  M.DC.XCV.  >  C'est  un  in-40  de  64  pag. 
Cette  <  Tragédie  en  musique  »,  comme  on  disait  alors,  se 
compose  d'un  prologue  et  de  cinq  actes,  les  deux  derniers 
fort  courts. 

Quand  le  Jeu  de  Paume  des  Braques,  situé  au  bas  de  la 
rue  du  Vieux-Palais,  eut  été  détruit  par  un  incendie,  le 
17  mars  1696,  le  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures,  trans- 
formé en  Académie  royale  de  musique,  resta  le  seul 
théâtre  de  la  ville  de  Rouen. 

Peu  de  temps  après,  pour  un  motif  resté  inconnu,  mais 
vraisemblablement  parce  que  l'opéra  n'y  réussit  guère, 
Tancien  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures  changea  encore 
une  fois  de  nom.  Il  abandonna  celui  à' Académie  royale 
de  musique  pour  prendre  celui  de  :  La  Comédie^  devenu 
libre  par  l'incendie  du  Jeu  de  Paume  des  Braques.  Car,  à 
.partir  du  xviu^  siècle,  on  trouve  constamment  :  La  Co^ 

a5 


3/8 

médie^  pour  désigner  Tunique  local  où  se  donnaient  alors, 
a  Rouen,  toutes  les  représentations  théâtrales,  quel  qu'en 
fût  le  genre,  tragédie,  comédie,  opéra,  Êarces,  vaudeville, 
etc. 

Cest  là  que  Voltaire  vit  une  troupe  d'opéra,  dont  il  parle 
dans  une  de  ses  lettres,  adressée  à  Thiriot,  en  1723  :  <  Je 
suis  actuellement  à  Rouen...  où  je  passe  fort  bien  mon 
temps.  Il  y  a  ici  nombre  de  gens  d'esprit  et  de  mérite, 
avec  qui  j'ai  vécu,  dès  les  premiers  jours,  comme  si  je  les 
avais  vus  toute  ma  vie.  On  me  fait  une  chère  excellente  ; 
il  y  a  de  plus  un  Opéra  dont  vous  serez  très  content  \  en 
un  mot,  je  ne  me  plains  à  Rouen  que  d'y  avoir  trop  de 
plaisir  ;  cela  dérange  trop  mes  études,  et  je  m'en  retourne 
ce  soir  à  la  Rivière,  pour  partager  mes  soins  entre  une 
ânesse  et  Marianne,  »  Sa  santé  fort  délicate  avait  besoin 
du  lait  d'ânesse,  et  il  fit  en  grande  partie,  à  la  Rivière- 
Bourdet,  chez  le  président  et  la  présidente  de  Bemières,  la 
médiocre  tragédie  dont  il  parle. 

C'est  sur  ce  théâtre  aussi  que,  suivant  l'un  de  nos  anciens 
collègues,  M .  De  la  Quérière,  se  firent  entendre  deux  des 
plus  grandes  célébrités  théâtrales  du  xviii^  siècle.  €  Quand 
Lekain  et  W^^  Clairon,  dit-il,  vinrent  à  Rouen,  la  salle  de 
spectacle  existait  dans  la  rue  des  Charrettes,  en  face  de  la 
rue  Herbière,  précisément  à  côté  de  l'entrepôt  réel  du 
commerce.  On  dit  que,  par  sa  forme,  sa  petite  étendue  et 
son  peu  d'apparence,  elle  avait  beaucoup  de  rapport  avec 
la  salle  du  Vieux-Marché.  »  (Rouen,  Revue  monumentale^ 
historique  et  critique^  i835,  p.  76.)  M*'*  Clairon  était  ac- 
trice de  la  Comédie  de  Rouen,  en  1739. 

Enfin,  M .  De  la  Quérière  nous  apprend  encore  que  Tun 
des  premiers  cafés  ouverts  à  Rouen,  fut  voisin  de  la  Co- 
médie établie  dans  le  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures, 
c  Nous  tenons  de  source  certaine,  dit-il,  qu'il  existait  au 
moins  un  café  dès  l'an  1730,  lequel  était  placé  près  de 
l'ancienne  Comédie,  située  rue  des  Charrettes,  en  face  de 
la  rue  Herbière.   Ce  café  était  moins  fréquenté  par  les 


3/9 

bourgeois  que  par  les  acteurs  et  les  habitués  du  théâtre,  d 
(Revue  rétrospective  rouennaise,  i853,  p.  25.)  Pour  ce 
motif,  il  portait  le  nom  de  «  Café  de  la  Comédie.  » 

Les  choses  se  passèrent  à  Rouen  comme  elles  s'étaient 
passées  précédemment  à  Paris,  quand  Alexandre- Procope 
Couteaux,  limonadier,  avait  fondé,  au  début  du  xvin*  siècle, 
le  café  célèbre  qui  devait  porter  et  retenir  son  nom,  dans 
la  rue  de  TAncienne-Comédie,  à  deux  pas  de  la  Comédie- 
Française,  établie,  en  1688,  dans  le  Jeu  de  Paume  de 
l'Etoile,  rue  des  Fossés-Saint-Germain-des-Prés. 

La  salle  de  la  Comédie  resta  l'unique  théâtre  de  Rouen, 
pendant toutle  xviii^  siècle,  jusqu'au  29  juin  1776,  où  elle 
fut  remplacée  par  le  Théâtre-des-Arts,  que  nous  avons 
tous  connu  et  dont  l'ouverture  eut  lieu,  ce  jour-là,  en 
l'honneur  du  patron  de  Corneille. 

Dès  lors,  le  vieux  Jeu  de  Paume  des  Deux-Maures  ne  fit 
plus  que  végéter,  recevant  des  comédiens  ambulants^  des 
physiciens  ou  des  acrobates,  jusqu'au  jour  où  il  disparut 
complètement,  en  1 836,  pour  permettre  d'élever,  sur  une 
partie  du  quadrilatère  de  Pontaritaine,  la  Douane,  les 
magasins  et  la  cour  des  Entrepôts  et  d'ouvrir  la  rue  du 
même  nom,  qui  va  de  la  rue  des  Charrettes  sur  le  quai  du 
Havre. 

Telles  furent  les  destinées  de  ce  Jeu  de  Paume  des 
Deux'Maures^  appelé  successivement  Académie  royale  de 
musiquCy  Opéra  et  La  Comédie^  où  nos  pères  allèrent  cher- 
cher les  distractions  du  théâtre,  pendant  près  d'un  siècle  et 
demi,  et  dont  le  souvenir  avait  si  bien  disparu  que  son  em- 
placement était  devenu  un  petit  problème  d'histoire  locale, 
aussi  bien  que  les  noms  divers  qu'il  a  portés. 

L'intérêt  qui  vous  fait  accueillir,  à  chacune  de  nos 
séances.  les  plus  minces  détails  sur  l'histoire  de  Rouen, 
nous  donne  lieu  d'espérer  que  vous  accueillerez  le  déve- 
loppement de  ceux-ci. 

La  commission  vote  des  remerciements  à  cette  très 


38o 


intéressante  lecture.  M.  de  Merval  fait  observer  qu'un 
Jeu  de  Paume  fut  ouvert  à  Rouen  peu  d'années  avant 
le  Révolution.  M.  de  Beaurepaîre  donne  quelques 
détails  sur  plusieurs  Jeux  de  Paume  cités  à  Rouen 
dès  le  xv«  siècle.  Ils  y  ont  été,  croit  M.  Bouquet,  jus- 
qu'au nombre  d'une  trentaine.  Selon  la  remarque  de 
M.  le  Président,  ce  jeu  est  resté  en  grande  faveur 
parmi  les  Anglais,  qui  en  ouvrent  fréquemment  sur 
nos  côtes,  au  voisinage  des  stations  de  bains. 

La  Londe.  —  Monnaies  romaines.  —  M.  Gouel- 
lain  revient  sur  la  découverte  de  monnaies  romaines 
annoncée  dans  la  précédente  séance.  Il  donne  lecture 
d'une  lettre  de  M.  Drouet,  de  Caudebec-lès-Elbeuf,  en 
date  du  17  mars  dernier,  qui  résume  la  trouvaille. 
Elle  comprend  120  bronzes,  la  plupart  grand  module 
(dont  plusieurs  sont  très  frustes),  de  Trajan,  Adrien 
{14  pièces),  Antonin,  les  deuxFaustine,  Marc-Aurèle, 
Vérus,  Lucille,  Commode  (i3),  Crespine,  Septime 
Sévère,  Julia  Domna,  Postume  (14  pièces).  Un  Com- 
mode  porte  ce  revers  rare  Pietati  senatus, 

M.  Drouet,  non  content  de  décrire  ces  pièces,  offre 
au  musée  départemental  quelques-uns  de  ces  bronzes. 
Des  remerciements  lui  sont  votés. 

Place  de  la  Calende.  —  Chapelle  de  Morgny.  — 
Sous  ce  titre,  M .  de  Beaurepaire  lit  une  note  dont 
voici  le  résumé  : 

PLACE   DE  LA  CALENDE. 

Je  suis  très  porté  à  supposer  que  le  portail  de  la  Calende 
tire  son  nom  de  rassemblée  dite  Calende,  parce  que  l'ap- 
pel ou,  comme  on  disait,  la  vocation  des  ecclésiastiques, 
tenus  à  comparaître  à  cette  assemblée,  se  faisait  des  degrés 


38i 


ou  marches  de  ce  portail.  Le  même  nom  de  Calende  au- 
rait été  assez  naturellement  donné  à  la  place  voisine. 

On  appelait  petite  Calende  l'assemblée  annuelle  des 
ecclésiastiques  d'un  doyenné,  par  opposition  aux  assem- 
blées générales  de  tout  le  clergé  du  diocèse,  qui  se  tenaient 
deux  fois  par  an,  à  des  époques  réglées,  et  qu'on  appelait 
synodes.  Mais  Calende,  sans  autre  qualification,  pourrait 
bien  avoir  été^  plus  anciennement,  un  terme  générique 
pour  designer  les  assemblées  ecclésiastiques. 

Quoi  qu'il  en  soit,  au  point  de  vue  étymologique,  je  ne 
saurais  voir,  dans  ce  mot,  une  autre  signification  que  celle 
de  vocation  ou  d'appel. 

A  une  époque  ancienne,  le  même  mot  de  Calende  dési- 
gnait aussi,  à  Rouen,  une  confrérie  de  prêtres  de  la  ville 
de  Rouen,  dont  le  siège,  pendant  longtemps,  fut  fixé  dans 
l'église  de  Saint-Nicolas.  On  conserve  aux  Archives  de  la 
Seine-Inférieure,  dans  le  fonds  de  Jumièges,  une  charte  de 
Richard,  curé  de  Saint-Sauveur,  et  des  prêtres  de  la  Ca- 
lende de  Rouen  :  «  Ricardus,  ecclesie  S.  Saîvatoris  près- 
byteTy  et  tune  decanus^  et  compresbiteri  Kaîende  que  est 
apud  Rothomagum.  1^  La  Charte  est  de  i2o5.  Il  est  fait 
mention,  dans  une  autre  charte  de  1201,  d'un  achat  de 
rente  fait  par  le  Chapitre,  concessione  sacerdotum  de  Kalen- 
da  (j). 

Nous  ne  nous  occupons,  dans  cette  note,  que  de  la 
place  dite  de  la  Calende. 

Le  2  juillet  1 504,  la  Ville  accordait  à  Richard  Perchart, 
curé  de  Saint-Gervais  de  Paris  et  chanoine  de  la  cathé- 
drale de  Rouen,  la  permission  de  fiaire  élever  une  croix  de 
pierre  sur  cette  place,  sous  réserve  toutefois  que  cela  ne 

(i)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  F.  du  Chapitre.  —  «  Nos  decanus  et 
presbyteri  Kalende  Rothom.  tradidimus  Galtero  de  Bosco  Guil- 
lelmi,  fabro, . . .  juin  i23i,  Cart.  de  S.-Ouen,  n»  29,  f"  47  v». 
Andréas,  clericus,  procurator  Kalende  Rothom.  avril  1254,  Ibid, 
f»  41.  —  Decanus  et  fratres  Kalende  Rothom,,  août  1280,  F.  de 
S.-Amand. 


382 

pourrait  «  porter  aucun  préjudice  à  la  Ville  ni  aux  libertés 
d'iccUe  ».  De  son  côté,  le  même  jour,  le  Chapitre  avait 
donné  à  Perchart,  la  même  permission  et  à  peu  près  dans 
les  mêmes  termes,  ce  qui  nous  oblige  à  conclure  que,  dès 
ce  temps-là,  la  propriété  de  cette  place  était  un  sujet  de 
litige  entre  le  Chapitre  et  la  Ville. 

Le  1 3  septembre  suivant,  cette  croix  était  achevée,  et  les 
chanoines  décidaient  que  le  lendemain,  jour  de  l'Exalta- 
tion de  la  Sainte  Croix,  une  procession  se  ferait  autour  de 
ce  monument  dû  à  la  piété  de  leur  confrère.  La  même  céré- 
monie eut  lieu,  chaque  année,  à  la  même  fête,  conformé- 
ment au  contrat  de  fondation  de  Perchart. 

Pommeraye  dit  que  cette  croix  fut  posée  aux  dépens 
d^un  honorable  bourgeois  nommé  Flandrin.  Il  n'a  point 
fait  attention  que  ce  particulier,  Michel  Flandrin,  n'était 
que  le  mandataire  de  Perchart  (i). 

Cette  croix,  ajoute  Pommeraye,  demeura  sur  la  place 
de  la  Calende  depuis  Tan  i5o4  jusqu'à  l'an  1614  (2), 
«  que  la  Calende,  qui  a  tant  de  fois  changé,  fut  fort  embellie 
d'un  grand  bâtiment  qui  fait  face  à  ce  portail,  et  qui  sert 
d'une  grande  salle  pour  les  pauvres  deTHôtel-nieu.  » 

Il  désigne  ainsi  le  bâtiment  qui  fut  élevé  en  vertu  d'une 
délibération  des  compagnies  souveraines,  du  8  mars  1676, 
confirmée  par  un  arrêt  du  Conseil,  du  9  janvier  1677,  et 
dont  la  construction  fut  confiée  à  l'architecte  Gravois.  Ce 
bâtiment  subsiste  encore,  mais  il  a  perdu  un  de  ses  pavil- 
lons. 

Une  nouvelle  croix,  moins  haute  et  moins  large  que 
celle  de  Perchart,  fut  placée  en  vertu  d'une  délibération 
du  16  février  1680,  ainsi  conçue  : 

«  M.  Cathelan,  administrateur  en  charge  (de  l'Hôtel- 
Dieu),  fera  mettre  une  croix  au  milieu  de  la  place  de  la 
Calende,  avec  quatre  bornes  aux  quatre  coins,  pour  mar- 

(1)  Voir  Délibérations  capitulaires,  2  juillet  1504. 

(2)  Elle  figure  sur  le  plan  du  Livre  des  fontaines  de  Le  Lieur. 


383 


quer  la  place  commune  entre  MM.  du  Chapitre  et  THôtel- 
Dieu  et  un  lieu  de  cimetière,  suivant  qu'il  est  porté  par 
le  contrat  d'acquisition  fait  par  ledit  Hôtel-Dieu  de  MM.  du 
Chapitre.  » 

La  croix  de  la  Calende  figure  sur  les  plans  de  Rouen  du 
dernier  siècle.  Ce  monument  religieux  et  les  bornes  de 
pierre  qui  entourent  la  place  indiquent  que  le  terrain  avait 
été  bénit.  Mais,  à  cette  époque  et  depuis  longues  années 
déjà,  les  chanoines  avaient  beaucoup  de  peine  àendéfendre 
le  caractère  sacré,  non  seulement  contre  le  Domaine  et 
contre  la  Ville  qui  voulaient  y  établir  un  marché  (i),  mais 
encore  et  surtout  contre  les  profanations  de  la  foule.  «Les 
charlatans  et  vendeurs  de  chansons,  lisons-nous  dans  une 
sentence  de  1716,  s'oubliant  du  respect  dû  aux  lieux 
saints,  avaient  l'insolence  de  se  placer  au  pied  de  la  croix, 
et,  pour  se  procurer  le  débit  de  leur  mauvaise  marchan- 
dise, y  chantaient  des  chansons  profanes  et  assez  souvent 
capables  d'offenser  les  oreilles  chastes.  »  Le  bruit  de  ces 
chants  troublait  l'office  divin  qui  se  fiaisait  dans  les  cha- 
pelles des  Vœux,  du  Saint-Esprit  et  de  Saint-Romain.  Sur 
la  plainte  du  procureur  fiscal,  le  bailli  de  la  haute-justice 
du  Chapitre  autorisa,  en  1716,  l'huissier  des  chanoines  à 
chasser  ces  chanteurs,  à  saisir  leurs  enseignes,  leurs  livres 
et  leurs  feuilles.  Plusieurs  années  après,  mêmes  abus  et 
mêmes  plaintes.  On  voyait  encore  sur  cette  place,  comme 
si  c'eût  été  un  marché  public,  au  jour  des  halles,  des  char- 

(i)  Aream  in  qua  venduntur  casei  et  ova  prope  ecclesiam  Ro- 
thomagi,  1 2  mars  1 29 1 .  M.  Chéruel,  Histoire  de  Rouen,  I,  p.  204. 
—  Plateam  vacuam  in  qua  venduntur  ova,  dictant  la  Calende, 
xve  siècle.  Cart.  de  N.-D.,  no  9,  f»  56  v«.  —  i5  février  i5o8, 
ordre  aux  marchands  de  hareng  blanc  et  sor  sur  la  place  de  la 
Calende  d'aller  à  Tavenir  à  la  place  de  la  Basse-Vieille-Tour.  Ils 
devaient  être  remplacés,  sur  cette  place,  par  les  marchands  de 
fruitage,  qui  seraient  retirés  de  la  Basse- Vieille-Tour.  On  allègue 
comme  raison  de  ce  changement  Tinfection  causée  par  le  hareng. 
Arch.  de  la  Ville,  Délibérations. 


384 

latans,  des  vendeurs  de  chansons,  des  joueurs  de  gobelet, 
qui  s'installaient  au  pied  de  la  croix  et  qui  y  attachaient 
même  leurs  tableaux.  Il  s*y  engageait  des  querelles  qui 
troublaient  le  repos  des  malades  de  T Hôtel-Dieu.  Souvent 
aussi  des  manœuvres  se  permettaient  de  ranger  là  leurs 
charrettes,  leurs  brouettes  et  leurs  hottes,  et  les  enfants 
s'y  donnaient  des  rendez-vous  pour  leurs  divertisse- 
ments (i). 

Aux  deux  derniers  siècles,  c'était  autour  de  la  croix  de 
la  Calende  que  le  clergé  de  la  cathédrale  faisait  l'adoration 
à  la  procession  des  Rameaux  et  la  commémoration  des 
morts  le  jour  de  la  Toussaint  (2).  Aune  époque  antérieure, 
ces  cérémonies  s'étaient  faites  dans  la  portion  du  cimetière 
attenante  à  la  nef  méridionale,  que  Ton  appelait  le  grand 
aître,  près  de  la  loge  aux  maçons  (3). 

ANCIENNE  CHAPELLE  A  MAUDÉTOUR. 

Dans  sa  Géographie  de  la  Seine-Inférieure,  notre  col- 
lègue, M.  l'abbé  Tougard,  fait  mention  d^une  chapelle, 
située  en  ce  lieu,  et  qui  aurait  été  détruite  auxvi*  siècle. 

Il  y  avait  longtemps,  d'après  la  tradition  conservée  dans 
le  pays,  que  cette  chapelle  avait  cessé  d'exister,  lorsque 
M.  Pierre  Duval,  secrétaire  du  Roi,  maison  et  couronne 
de  France,  sollicita  de  l'archevêque  la  permission  d'en  éta- 
blir une  autre,  en  remplacement,  sous  le  même  titre,  dans 
son  château  de  Morgny. 

Uautorité  ecclésiastique  prescrivit,  au  préalable  (1728), 
une  information,  dont  il  fut  dressé  un  procès-verbal  au- 
quel nous  empruntons  quelques  renseignements,  qui  pour- 

(i)  Arch.  de  la  S.-Inf.,  F.  du  Chapitre,  G.  2423. 

(2)  2  nov.  1604,  on  revient  «  à  l'usage  de  toute  antiquité  de 
faire,  à  Tentour  de  la  croix  de  la  Calende,  la  procession  du  jour 
des  morts.  »  Délibérations  capitulaires. 

(3)  Arch,  de  la  S.-Inf.  G.  2639.  Ces  processions  s'y  faisaient 
encore  en  i583. 


385 


raient  bien  être  les  seuls  que  Ton  ait  conservés  pour 
rhistoire  de  cette  chapelle. 

L'édifice  en  question  était  situé  à  cent  pas  environ  du 
manoir  seigneurial  de  Maudétour. 

Près  de  là  était  une  grosse  butte  de  terre  qui  avait, 
disait-on,  servi  d'emplacement  au  château  primitif.  En 
fouillant  on  y  avait  trouvé  un  escalier  de  pierres  de  grès, 
du  charbon  et  des  fragments  de  poterie. 

Anciennement  la  chapelle  et  la  butte  étaient  entourées 
de  larges  fossés.  M.  Duval  les  avait  fait  combler,  et  avait  fait 
abattre  de  fort  gros  arbres  qui  avaient  poussé  sur  les 
ruines. 

En  démolissant  le  restant  des  murs,  on  avait  mis  à  jour 
«  plusieurs  corps,  à  rengée  les  uns  des  autres,  dont  la  tête 
et  les  ornements  se  tenoient  en  leur  entier.  »  Un  de  ces 
corps  n'avait  pas  moins  de  6  pieds  2  pouces,  d'après  la 
mesure  qu'en  prirent  les  ouvriers. 

Au  XVII*  siècle,  le  château  de  Maudétour  avait  appar- 
tenu à  la  famille  de  la  Bazoge,  dont  les  représentants 
se  réfugièrent  en  Hollande  pour  cause  de  religion  (1). 

(i)  Le  fief  de  Maudétour,  demi-fief  de  haubert,  relevant  du 
Roi  à  cause  de  sa  vicomte  de  Rouen,  situé  en  la  paroisse  de 
Crevon,  avait  été  vendu,  le  26  mai  i53i,  par  Antoine  dePoissy, 
à  Denis  Hédou.  Le  22  octobre  1564,  il  appartenait  à  Jacques 
Gallet,  écuyer,  dont  un  des  descendants,  des  mêmes  nom  et 
prénom,  eut  pour  héritier  son  neveu,  Guillaume  de  la  Basoge, 
conseiller  au  Parlement  de  Normandie,  qui  en  rendit  aveu  le 
10  avril  1669.  Bans  Taveu  de  Philippe  de  la  Basoge,  seigneur 
du  dit  lieu  de  la  Basoge,  de  Chèvreville  et  de  la  Vallée,  pour  le 
fief  de  Maudétour,  qui  lui  appartenait  en  sa  qualité  de  fils  et 
héritier  de  Guillaume  de  la  Basoge.  conseiller  au  Parlement,  on 
signale,  comme  ayant  été  incorporé  au  fief  de  Maudétour,  une 
portion  de  fief  dit  le  fief  de  Sainte-Marguerite,  contenant 
26  acres  en  3  masures,  «  sur  lequel  il  y  avoit  place  de  chapelle 
ancienne,  au  droit  de  laquelle  le  curé  dudit  lieu  de  la  Pomme- 
raye  perce  voit  la  dixme...  et  à  ce  moyen  sujet  de  dire  ou  faire  dire 


386 


C'était  à  eux  qu'on  attribuait  la  suppression  de  la  cha- 
pelle. On  les  accusait  d'avoir,  par  leurs  mauvais  traite- 
ments, oblige  le  chapelain  à  se  retirer  ;  d'avoir  employé  le 
fût  de  la  croix  comme  support  pour  le  cadran  de  leur  châ- 
teau ;  d'avoir  fait  perdre  à  la  cloche  son  usage  sacre,  en  la 
faisant  servir  à  l'appel  des  vassaux  le  jour  des  plaids. 

Un  meilleur  sort  avait  été  réservé  à  la  statue  de  sainte 
Marguerite,  sous  le  vocable  de  laquelle  la  chapelle  était 
dédiée  :  cette  staïue  se  retrouvait  dans  Téglise  de  Quin- 
campoix. 

Il  est  assez  extraordinaire  qu'on  ne  sut  dire  au  juste  sur 
quelle  paroisse  cette  chapelle  était  située.  Les  uns  disaient 
que  c'était  sur  Crevon,  d'autres  que  c'était  sur  La  Pom- 
meraye. 

Le  Pouillc  du  diocèse  de  Rouen  de  lySS  place  la  cha- 
pelle de  Sainte-Marguerite  à  La  Pommeraye,et  lui  donne 
pour  patron  l'archevêque  de  Rouen. 

Armoiries  du  manoir  Méry.  —  M.  Paul  Baudry 
complète  dans  les  termes  suivants  sa  communication 
de  la  dernière  séance  : 

Dans  la  séance  dernière,  je  vous  ai  signalé,  à  propos  de 
l'ancien  manoir  Méry,  de  Saint-Sever,  des  armoiries  en 
plâtre,  que  la  bienveillance  du  dernier  propriétaire  de  cet 
immeuble,  M.  Quesnel,  m'a  permis  de  recueillir,  lors  de 
l'expropriation  faite  par  le  chemin  de  fer  d'Orléans. 

Je  m'étais  contenté  de  dire  que  ces  armoiries  portaient 
deux  poissons  et  trois  fleurs  sortant  d'une  même  tige. 

M.  Gouellain,  qui  possède  et  qui  a  su  interpréter  ces 
mêmes  armoiries  sur  un  plat,  daté  de  1650,   lequel  fait 

messe  en  ladite  chapelle  aux  jours  de  dimanche  et  aux  festes 
solennelles  et  livrer  au  seigneur  une  poignée  de  chandelles  de 
cire  le  jour  Sainte  Marguerite,  »  20  février  171 5.—  Archives  de 
la  Chambre  des  Comptes.  La  Basoge  et  Chèvreville  sont  deux 
communes  de  Tarrondissement  de  Mortain  (Manche). 


387 

partie  de  sa  riche  collection,  m*a  mis  à  même  de  compléter 
mes  renseignements. 

Ce  sont  celles  des  Legendre,  sieurs  de  Romilly,  dont  un 
représentant,  Guillaume,  fut  conseiller  au  Parlement  de 
Rouen  en  1695.  L'Armoriai  de  M.  de  Merval,  qui  donne 
cette  dernière  indication,  traduit  ainsi  TÉcu  :  «  Coupé 
d'azur  et  d'argent  ;  l'azur  chargé  de  deux  poissons  d^ar- 
gent,  posés  en  fasce,  l'un  au  dessus  de  l'autre,  le  second 
contourné  ;  l'argent  chargé  d'un  rosier  de  sinople  à  trois 
branches,  chaque  branche  terminée  par  une  rose  de 
gueules.  » 

Voilà  donc  un  nouveau  titre  de  gloire  pour  les  annales 
du  manoir  Méry. 

Rouen. — Poteries  et  autres  fragments. — M.  Pelay 
fait  passer  sous  les  yeux  de  ses  collègues  divers  objets 
recueillis  par  lui,  le  2 1  mars  dernier,  dans  la  nef  de 
Tancienne  collégiale  Saint-Georges.  Ils  lui  ont  paru 
provenir  d'une  sépulture.  La  ferrure  peut  appartenir 
à  un  cercueil;  un  gros  clou  est  d'attribution  moins 
aisée. 

M .  Gouellain  pense  que  les  vases  sont  en  grès  et  de 
la  fabrication  de  Martincamp,  près  Neufchâtel.  Ils 
doivent  dater  du  xvi«  siècle  et  avoir  servi  à  la  phar- 
macie. 

Eglise  Saint-Sever.  —  M.  Paul  Baudry  a  recueilli, 
sur  la  place  de  Téglise  Saint-Sever,  plusieurs  frag- 
ments de  pierre,  qu'un  œil  exercé  pourrait  sans  doute 
dater.  Il  les  croit  appartenir  à  Tune  des  églises  primi- 
tives de  Saint-Sever  et  antérieure  à  celle  qui  a  disparu 
vers  1860. 

Cimetière  antique  à  Etrépagny.  —  A  la  fin  du 
mois  dernier,  un  cimetière  qui  peut  être  mérovingien, 
s'est  révélé  à  Etrépagny.  Le  Patriote,  dans  un  de  ses 


y^ 


388 


premiers  numéros  d'avril,  y  signale  environ  25  sar- 
cophages en  pierre  de  Saint-Gervais,  généralement 
orientés.  Tous  avaient  été  violés.  Ils  étaient  accom- 
pagnés de  fragments  céramiques  de  toute  sorte  et  de 
deux  épées. 

Vierge  en  ivoire.  —  M.  Bligny,  de  Rouen,  ancien 
agent  de  change,  offre  aux  archives  de  la  Commission, 
par  rintermédiaire  de  M.  Maillet  du  BouUay,  la  belle 
héliogravure  d'une  statue  de  la  sainte  Vierge,  achetée 
par  lui  à  Aix.  Elle  ne  mesure  pas  moins  de  45  centi- 
mètres de  hauteur.  C'est  une  des  plus  grandes  pièces 
d'ivoire  que  Ton  connaisse.  La  Commission  remercie 
M.  Bligny  du  bon  souvenir  qu'il  conserve  de  sa  ville 
natale. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  moins  le  quart. 

Le  Secrétaire  intérimaire, 

A.  TOUGARD 


389 


SÉANCE  DU  3o  MAI  1884 


La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence  de 
M.  Ch.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Étaient  présents  :  MM.  Adeline,  Paul  Baudry,  Bil- 
liard,  de  Glanville,  Gustave  Gouellain,  Lefort,  Tabbé 
Loth,  de  Merval,  Pelay,  Pabbé  Robert,  de  la  Serre  et 
Tabbé  Tougard,  chargé  du  procès- ver  bal. 

Il  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la  dernière 
séance  [du  7  avril),  qui  est  adopté  sans  observation. 

Se  sont  excusés  :  MM.  Maillet  du  Boullay,  retenu 
par  l'organisation  de  l'Exposition  ;  et  Brianchon,  qui 
informe  la  Commission  de  divers  faits  dont  il  sera  pris 
connaissance  au  cours  de  la  séance. 

La  correspondance  imprimée  comprend  :  Société 
des  Antiquaires  de  France,  vol.  XLV  (1882);  — 
Discours  de  M.  Fallières  au  Congrès  des  Sociétés 
Savantes,  le  19  avril  188  5,  11  pp.  in-40  ;  —  Bulletin 
de  la  Société  archéologique  de  r  Orléanais,  n®  118; 

—  Bulletin  historique  et  archéologique  des  Anti- 
quaires de  la  Morinie,  n®  129;  —  Bulletin  de  la  So- 
ciété des  Antiquaires  de  Picardie,  année  i883,  n®  4; 

—  Bulletin  du  Comité  des  travaux  historiques  et 
scientifiques,  année  i883,  n®  2;  —  Bulletin  delà 
Société  des  Antiquaires  de  l'Ouest,  i883,  no4;  — 
Académie  de  Besançon,  1882  ;  —  Mémoires  de  la 
Société  historique  de  Langres,  vol.  III,  1884.  — 
Enfin,  cinq  brochures  in-80  et  une  brochure  in-40 
(avec  figures),  en  norvégien  et  en  latin,  sont  venues  de 
Christiana.  La  Commission  offrira  un  Bulletin  en 
remerciement  et  par  voie  d'échange. 


Clocher  de  Caudebec-lès-Elbeuf.  —  Demande  de 
classement.  —  La  correspondance  manuscrite  consiste 
en  une  lettre  de  M.  le  Préfet,  demandant  Tavis  de  la 
Commission  sur  le  classement  du  clocher  de  Caudebec- 
lès-Elbeuf,  réclamé  par  la  fabrique  de  cette  église. 

Les  explications  données  par  M.  Lefort  démontrent 
que  cette  tour  est  intéressante  et  mérite  la  faveur  qu^on 
veut  obtenir.  MM.  Tabbé  Loth  et  le  chanoine  Robert 
parlent  dans  le  même  sens  :  cette  tour  aurait  été  par 
deux  fois  menacée  de  démolition,  puis  on  aurait  résolu 
de  ne  point  la  réparer  afin  de  la  laisser  tomber  de  sa 
belle  mort  :  mais  un  certain  nombre  d'habitants  tient 
à  ce  reste  des  anciens  âges  et  veille  à  sa  conservation. 
M.  de  Glanviile  estime  que  cette  tendance  est  louable 
et  trop  rare  pour  qu'on  ne  la  favorise  pas  énergique- 
ment.  En  conséquence,  la  Commission  décide,  à  une 
très  grande  majorité,  qu'il  y  a  lieu  de  prendre  en  consi- 
dération la  demande  de  classement. 

Porche  de  la  Vieux-Rue.  —  Avis  favorable  au  claS' 
sèment,  —  M.  Gouellain  rend  compte  de  la  visite  qu'il 
a  faite,  le  19  avril  dernier,  avec  notre  collègue  M.  Pelajr, 
à  l'église  de  la  Vieux-Rue,  en  vertu  de  la  délégation 
qui  lui  en  avait  été  confiée  par  la  Commission. 

Sans  être  fort  beau,  le  porche  de  cette  église  est  à 
conserver.  Ses  sculptures  accusent  Tépoque  d'Henri  III 
ou  d'Henri  IV,  et  ont  beaucoup  d'analogie  avec  celles 
de  la  maison  qui  termine  la  rue  de  la  Vicomte  dans  la 
Grande-Rue.  Ses  parties  principales  sont  solides;  il 
faudrait  seulement  supprimer  l'arcade  de  brique  et 
pierre  qui  a  remplacé  les  deux  poteaux  de  bois  de  l'en* 
trée.  La  clef  de  voûte  est  datée  1753  (et  non  1752, 
comme  le  dit  le  Répertoire  archéologique).  Nos  con- 


39 1 

frères  ont  conseillé  au  mairedes^adresserà  la  personne 
qui  a  réparé  le  porche  de  Ry  et  de  lui  demander  un 
devis  estimatif. 

Ils  souhaiteraient  qu'à  Toccasion  du  classement  du 
porche,  on  classât  également  le  baptistère  qui  date  du 
xin^  siècle,  et  présente  sur  ses  trois  grandes  faces  une 
curieuse  suite  de  personnages  non  encore  expliqués. 
La  Commission  entre  dans  cette  pensée.  M.  le  Prési-* 
dent  prie  donc  M.  Gouellain  de  rédiger  un  rapport 
motivé,  qui  sera  soumis  à  M.  le  Préfet  pour  appuyer  la 
demande  de  classement. 

Morgny.  —  Inscription  funéraire,  —  Au  cours  de 
leur  excursion,  nos  confrères  ont  relevé  dans  l'église 
de  Morgny  Tinscription  suivante  : 

Cx  devant  gist  M,  Pierre  Mulotin,  natif  de  St  Valéry  en 
CauXy  Prêtre,  Curé  de  Morgny,  décédé  le  3  May 
1707^  lequel  laissa  680  /.  po^  payer  les  contretables  du 
chœur  et  des  2  chapelleSy  avec  j56  L  2  s.  6  d.  po^  fonder 
une  basse  Messe  à  perpétuité  en  cette  église, 

Lillebonne,  —  Découvertes  archéologiques,  —  La 
lettre  de  M.  Brianchon  signale  à  la  Commission  un 
fond  de  poterie  romaine  en  terre  rouge,  trouvé  en  avril 
dernier  près  du  manoir  d'Alincourt,  et  qui  laisse  lire 
à  rintérieur  CARANTINL  Non  loin  de  là  s'est  révélé 
une  sorte  de  puits  absorbant,  à  pierres  perdues,  d'en- 
viron un  mètre  de  diamètre,  qui  semble  également 
romain.  Enfin  deux  monnaines  d'argent  ont  été  cou- 
ramment interprétées  par  le  conservateur-adjoint  du 
musée  départemental. 

Lillebonne.  —  Théâtre  romain,  —  La  précinction 
inférieure  appelle  d'urgentes  réparations,  sans  les- 


392 

quelles  les  étrangers  pourraient  croire  que  ce  curieux 
monument  est  laissé  à  Pabandon.  M.  de  Glan ville 
appuie  cette  demande  en  faisant  observer  que,  lorsque 
la  réparation  nécessaire  devient  trop  considérable,  elle 
prend  les  proportions  d'une  reconstruction  partielle, 
et  court  ainsi  grand  risque  de  défigurer  les  restes  qui 
en  sont  Tobjet. 

Lillebonne,  —  Clocher,  —  Notre  collègue  s'applaudit 
du  beau  travail  de  consolidation  exécuté  à  la  tour  de 
Téglise  par  notre  confrère  M.  Sauvageot,  avec  autant 
de  talent  que  de  célérité.  Commencé  en  octobre  der- 
nier, il  a  été  terminé  en  février  suivant. 

Saint'GeorgeS'de'Boscherville, — Dalle  tumulaire, 
—  Enfin,  M.  Brianchon  signale  au  nombre  des  objets 
qui  mériteraient  un  emploi  opportun  du  reliquat  du 
crédit  des  monuments  historiques,  la  belle  pierre  tom- 
bale de  Saint-Georges  «  qu'il  serait  si  facile  de  recou- 
vrir d'une  glace  biseautée  assujettie  par  des  baguettes 
de  cuivre.  »  M.  Tabbé  Tougard  observe  qu'elle  est 
ordinairement  recouverte  d'un  tapis.  Mais  M.  Pelay 
pense  que  les  dangers  de  détérioration  sont  sérieux,  et 
propose  de  la  relever  contre  un  des  murs  de  l'église. 

Graville-Sainte-'Honorine.  —  La  liquidation  du 
compte  des  dépenses  faites  au  tombeau  de  Malet,  de- 
mandée par  M.  le  chanoine  Robert,  lui  est  renvoyée 
pour  modification  et  complément  du  dossier. 

Dalles  du  Musée  d'Antiquités.  —  La  mention  du 
tombeau  de  Saint-Georges  amène  M.  Lefortà  déplorer 
les  dégradations  qu'ont  subies,  du  fait  des  intempéries 
de  Tair,  les  splendides  dalles  adossées  à  la  muraille 
.extérieure  du  musée  départemental.  Mieux  eût  valu, 
cent  fois,  les  laisser  à  leur  emplacement  primitif  que 


■•^i. 


393 

de  les  soumettre  ainsi  à  des  chances  fatales  de  destruc- 
tion. La  pluie  en  fouette  les  parties  supérieures;  et 
régoût,  en  rejaillissant  du  sol,  mine  avec  plus  de 
dommage  encore  le  bas  de  ces  merveilleuses  sculp- 
tures. On  a  bien  proposé  de  munir  le  bâtiment  de 
gouttières;  mais  comme  la  construction  appartient  à  la 
ville,  cette  dépense  devient  un  sujet  de  contestation 
entre  elle  et  le  département. 

Mais  pourquoi  la  Commission  ne  solliciterait-elle 
pas  de  Tadministration  départementale  un  crédit  spécial 
pour  protéger  les  dalles  au  moyen  d'auvents,  et  les 
mettre  à  Tabri  des  infiltrations  du  sol  à  Taide  d'une 
lame  de  plomb  ?  Il  y  a  urgence,  vu  le  peu  de  temps 
qui  reste  pour  préparer  le  dossier  de  la  prochaine 
session  du  Ck>nseil  général.  Aussi  la  Commission 
donne-t-elle  à  l'unanimité  pleins  pouvoirs  à  M.  le 
Président  pour  s'entendre  avec  M.  Lefon,  aux  fins  de 
présenter  à  très  bref  délai  une  demande  motivée,  des- 
tinée à  prendre  place  dans  le  rapport  du  Préfet  au 
Conseil  général. 

Collections  normandes  au  XVIIfi  siècle,  — 
M.  Tabbé  Tougard  croit  utile  de  transcrire  pour  le 
Bulletin  deuj,  pages  du  livre  écrit  sur  V Utilité  des 
Voyages  par  l'académicien  Baudelot  de  Dairval  (édi- 
teur des  Voyages  du  Rouennais  Lucas),  réimprimé  à 
Rouen  en  1727  avec  notes  de  Mahudel,  autre  membre 
de  l'Académie  des  Inscriptions. 

L'auteur  termine  son  tome  II  par  la  liste  des  plus 
célèbres  collections  de  France,  et  en  signale  dans  les 
villes  de  Saint-Denis,  Reims,  Châlons-sur- Marne, 
Amiens,  Dijon,  Besançon,  Strasbourg,  Lyon,  Avi- 
gnon, Aix,  Marseille,  Nîmes,  Montpellier  et  Toulouse. 

26 


394 

Mais  Rouen  est  la  seule  ville  oîi  il  en  compte  jusqu'à 
huit. 

Il  faut  regretter  qu'il  ne  se  soit  pas  alors  trouvé 
quelque  zélé  publiciste  qui  nous  ait  laissé  une  descrip- 
tion assez  détaillée  de  ces  collections,  comme  M.  de 
Lérue  Ta  tenté  naguère  pour  les  plus  belles  pièces  de 
nos  confrères,  MM.  Gouellain,  d'Iquelon  ei  P.  Bau- 
dry.  A  son  défaut,  nous  recueillerons  avec  soin  ces 
lignes  par  trop  sommaires  (vol.  II,  pp.  447-449). 

Rouen.  —  M,  de  Pontcarré,  premier  Président  au  Par^ 
lement  de  Rouen^  a  une  bibliothèque  fort  belle  et  considé- 
rable par  le  nombre  et  le  choix  des  livres,  et  un  recueil 
des  plus  amples  de  tous  les  auteurs  qui  ont  écrit  de  This- 
toire  de  PYance.  Son  cabinet  de  curiosités  mérite  aussi 
d'être  vu  ;  mais  son  médailler  qui  est  très  riche  et  très 
ample,  est  estimé  des  connaisseurs  comme  le  plus  parfait 
sans  contredit  en  argent  qu'il  y  ait  en  Europe.  Il  est  entre 
autres  composé  de  celui  de  M.  Foucault,  conseiller  d'Etat, 
de  celui  de  M.  le  marquis  de  Seignelai,  et  de  plusieurs 
autres.  Le  grand  nombre  de  médailles  rares  et  uniques 
qui  s'y  trouvent,  et  que  cet  illustre  magistrat  se  fait  un 
plaisir  de  montrer  aux  savants  ;  ses  conversations  savantes 
et  ses  manières  obligeantes  dédommageront  amplement  la 
peine  de  ceux  que  leur  curiosité  fera  venir  en  cette  ville. 

Le  R.  P.  de  Grainviîle^  Jésuite  du  collège^  a  aussi  un  fort 
beau  médailler  et  bien  assorti  (i). 

Les  PP.  Capucins  ont  un  recueil  d'estampes  considé- 
rable, et  outre  cela  quantité  de  coquillages,  de  curiosités 
et  d'animaux,  qui  ornent  bien  leur  bibliothèque. 

M.  Le  François  a  un  assez  beau  cabinet,  où  l'on  trouve 

(i)  Cet  habile  antiquaire,  né  à  Rouen  où  il  mourut  en  lySo,  a 
publié  une  quinzaine  d'ouvrages  dont  la  plupart  sont  des  mé- 
moires archéologiques,  insérés  dans  le  Journal  de  Trévoux  et 
parfois  réimprimés. 


39  5 

quantité  de  coquillages,  de  pétrifications,  de  marcassites, 
d'habits  et  d*armes  de  sauvages  ;  plusieurs  agathes  et  autres 
pierres  gravées  et  non  gravées  :  des  couteaux  pour  les 
anciens  sacrifices,  et  quelques  tableaux  des  plus  habiles 
maîtres,  comme  du  Titien  et  autres,  etc. 

M.  Le  Moyne  a  aussi  un  cabinet  très  riche  en  livres  de 
conséquence,  et  autres  curiosités  différentes  très  recher- 
chées, avec  nombre  considérable  de  volumes  d'estampes 
reliés  très  proprement. 

M.  Lucet  a  assemblé  beaucoup  de  coquillages,  et  a  un 
choix  de  fort  beaux  tableaux. 

Af.  Guérin  mérite  aussi  d'être  cité  pour  avoir  nombre 
de  beaux  tableaux. 

M.  de  Laisemontj  maître  apothicaire  et  très  habile 
artiste,  a  plusieurs  préparations  chimiques  très  curieuses. 

Dieppe.  — M.Féret,  apothicaire,  sedistingue  dans  la  ville 
par  un  amas  de  diverses  curiosités  naturelles,  auquel  il 
ajoute  quelques  médailles  et  monuments  antiques. 

M.  de  Beaurepaire  constate  que  Rouen  devait  être 
assez  pauvre,  en  tableaux  du  moins,  puisque  Descamps 
affirmait  vers  1 760  qu'il  n'y  en  avait  pas  à  Rouen 
pour  3o,ooo  fr.  M.  Paul  Baudry  fait  observer  qu'il  y 
en  eut  peu  après  une  belle  galerie  dans  la  famille 
Ribard.  Descamps  contribua  plus  que  personne  à 
propager  ici  Testime  des  bonnes  toiles. 

Souvenirs  de  pèlerinages.  —  M.  Gouellain  fait 
passer  sous  les  yeux  de  ses  collègues  deux  figurines  en 
argent  représentant  saint  Michel  terrassant  le  dragon. 
Les  connaisseurs  les  datent  du  temps  de  Louis  XI H. 
Elles  sont  rares  en  ce  métal. 

M.  de  Beaurepaire  donne  lecture  des  notes  sui- 
vantes : 


396 


COLONIE   ROUENNAISB  A   ARRAS. 


Le  document  qui  suit,  emprunté  par  nous  à  un  re- 
gistre du  cahier  de  nos  archives  municipales,  indique 
pour  quelle  part  la  ville  de  Rouen  fut  appelée  au  repeu- 
plement d'Arras,  après  que  le  roi  Louis  XI,  en  punition 
de  ses  révoltes,  eut  supprimé  son  nom,  auquel  il  voulait 
que  fût  substitué  celui  de  Franchise,  c  Le  Roi,  dit  Duclos 
{Histoire  de  Louis  X/,  t.  I,  p.  38o),  pour  s'assurer  des 
nouveaux  habitants  et  obliger  les  villes  d'où  il  tiroit  des 
ménages  entiers  à  faire  de  bons  choix,  fit  avancer  par 
chacune  de  ces  villes  cinq  cents  écus,  à  ceux  qui  en  sor- 
toient  pour  venir  s'établir  à  Ârras  ;  ainsi  elles  choisirent 
des  gens  laborieux  afin  qu'ils  pussent  rendre  les  sommes 
qu*on  leur  avançoit.  i 

€  En  ung  cahier  de  parchemin  est  contenu  comme,  Tan 
M.  un  c  un  zx^  le  Roy  envoia  en  la  ville  d' Arras,  qui  est 
là  appellée  la  ville  de  Franchise  plusieurs  mesnagiers  pour 
y  demeurer,  ausquelz  fust  à  ceste  fin  baillé  argent  par 
ceulx  de  leurs  estatz,  ce  qui  fust  amesnagé  par  les  com- 
missaires que  le  Roy  envoia  audit  lieu  ;  et,  de  la  dite  part 
de  la  ville  de  Rouen,  furent  lesdicts  commissaires  M.  Guil- 
laume de  Serizey,  conseiller  du  Roy  et  Tung  des  dictz 
commissaires,  sire  Mahieu  Du  Reaulme,  Tung  des  conseil- 
lers de  la  ville  de  Rouen,  et  Pierre  Daré,  secrettaire  du 
Roy. 

Les  mesnagiers  y  envolez  de  Rouen  comme  il  ensuit  : 

Denis  de  la  Vallée,  Jehan  Le  Cordier,  Jehan  Coignon, 
CoUin  Le  Bourg,  Guillaume  Le  Lorry,   tisserans  de  draps. 

Jehan  Baillemont,  Henry  Bonhomme,  Robin  Pépin, 
Guillaume  Dupire,  Jehan  de  Villiers,  Collin  Morice,  Chris- 
tophe Miche,  foulions,  lesquels  recongnoissent  que  par  les 
dicts  commissaires  leur  avoit  esté  faict  bailler  S60  livres 
de  fine  laisne,  au  prix  de  trente  1.  vallans  108  1.,  et  oultre 
preste   la   somme  de  36  1.,    pour  paiement  desquelles 


397 

sommes  ils  promettent,  tous  ensemble,  livrer  les  draps 
qu'ilz  feront  pour  estre  sur  ce  paiez. 

Tous  lesquelz  autres  mesnagiers  cy-après  nommez  ne 
sont  tenus  à  restitution,  ains  reçoivent  pour  composition 
les  sommes  cy-après  : 

Pierre  Le  Thiais,  dinant,  lx  1.; 

Robinet  Hedin,  sainturîer,  xl  1.  ; 

Denis  Vastel,  Collin  Maugart,  taverniers,  chacun  iiii»  l.; 

Robinet  Dufour,  paticier,  xxx  1.  ; 

Adam  Louvel,  poulaillier,  xl  1.  ; 

Guillaume  Guillos,  tireur  de  fil  de  fer,  xl  1.  ; 

Jehan  Credes,  tisseren  en  thoilles,  xx  1.  ; 

Guillaume  Auzoult,  ballencier,  xl  1.  ; 

Geuffroy  Guilebert,  plastrier  et  couvreur  de  pierre, 
xxx  1.  ; 

Cardinot  Hugues,  savatier,  xxx  1.  ; 

Jehan  Le  Moine,  mesguicher,  xxx  1.  ; 

Oliivier  Blondel,  hostelier,  xxx  1.  ; 

Geuffroy  Babou,  hostelier,  iiii«  1.  ; 

Jehan  Du  Douit,  chandelier,  iiii"  1.; 

Colin  Le  Bas,  esguilletier,  xl  1.  ; 

Guillaume  Asselin,  boursier,  xl  1.  ; 

Pierre  Grout,  paticier,  xl  1.; 

Robin  Autrefoy,  couvreur,  xl  1.  ; 

Jehan  Desprez,  mareschal,  xl.  ; 

Robinet  Le  Maignen,  cordonnier,  xxx  1.  ; 

Thomas  le  Thieullier,  potier  de  terre,  xx  1.  ; 

Guillaume  Delisle,  cuisinier,  xx  1.  ; 

Anthoine  Roussignol,  artillier,  xx  1.  ; 

19  ouvriers  delaisne,  chacun  lx  s.  ; 

Pierre  Mauger,  mareschal,  Girrart  Fossart,  sellier,  Ul- 
fran  Callot,  orfebvre,  Jehan  Gaudray,  broudeur.  Robinet 
Perquin,  miroier,  chacun  xl  s. 

Jacques  More,  bastier,  Jehan  Le  Portier,  tanneur,  Au- 
gustin De  la  Mare,  tapissier,  Pierre  Dupont,  charon, 
Ëstiennot  le  Fourmagier,  estaimier,  Pierre  Des  Hayes, 


398 

mesquicher,  Pierre  du  Liais,  faiseur  de  traict,  Jacques 
Turgis,  cordonnier,  Jehan  Du  Buse,  cordier,  Jehan  Guerin, 
casublier,  Jehan  Feré,  chacun  xl  s. 

Le  tout  jouxte  une  quittance  passée  devant  Guillaume 
Escoullant,  clerc  et  greffier  des  eschevins  de  la  dite 
ville  t. 

La  ville  de  Rouen  fournit  à  Ârras,  quelques  années 
après,  des  entrepreneurs  et  des  artistes,  pour  des  fêtes  qui 
furent  offertes  à  la  Reine.  La  dépense  fut  considérable  et 
ne  fut  pas  payée  sans  difficulté.  Etienne  Ponchel  ou  Pin- 
chon,  de  Caen,  échevin  d'Arras,  se  trouvait  de  passage  à 
Rouen,  les  entrepreneurs  firent  arrêt  sur  ses  biens,  ce  qui 
donna  lieu  à  un  long  procès  devant  le  lieutenant  général 
du  bailli  de  Rouen.  Il  en  fut  question  en  plusieurs  au- 
diences (i). 

L'affaire  n'est  indiquée  avec  quelque  clarté  que  dans  le 
jugement  provisoire  du  22  décembre  1483,  dont  voici  les 
termes  : 

«  Dudit  jour  de  relevée,  devant  P.  Raoulin  (lieutenant 
général  du  bailli). 

(  Sur  un  arrest  fait  par  Robinet  Diquelon,  sergent,  à  la 
requeste  de  Robinet  Pinel  et  maistre  Guillaume  Le 
Maretz  par  vertu  du  privillège  aux  bourgois  de  ceste  ville 
de  Rouen  (2),  pour  la  somme  de  i  ic  1.  t.  sur  deux  chevaulx 
[sic)  et  autres  biens  apparienans  à  Estîenne  Ponchel,  de 
Caen,  l'un  des  echevyns  de  la  ville  de  Franchise,  estans  en 
la  maison  de  Guillaume  Viel,  de  Sainct  Estienne  aux  Ton- 
neliers, et  laquelle  somme  les  dessus  dits  demandeurs 
disoient  leur  estre  deue  pour  raison  de  l'Entrée  que  ledit 
Pinel  et  autres  ses  compagnons  et  complices  disoient  avoir 
faiz,  à  la  requeste  dudit  Ponchel  au  joyeux  advenement  de 
noire  très  redoublée  et  très  honnorée  dame  la  royne  de 

(i)  Archives  du  Palais  de  justice,  Registres  du  bailliage. 
(2)  Privilège  des   bourgeois  de  Rouen  de   ne   pouvoir    être 
distraits  de  leurs  juges  naturels. 


399 

France,  lequel  arrest  ledit  Pînchon  (sic)  voulloit  deffendre 
par  plusieurs  raisons,  en  demandant  délivrance  desdits 
biens  arrestez,  lesdictes  parties  ouyes,  appoincté  fut  que 
ledit  Michel  aura  délivrance  des  dicts  chevaulx  et  autres 
biens  arrestez,  en  baillant  piège  audict  Dicquelon,  sergent, 
de  respondre  dudict  arrest,  et  en  surplus  ladicte  matière 
fut  continuée  jusques  aux  prouchains  plés  à  ma  ce  d'aprez 
Noël  prouchain,  pour  apporter  leurs  fais,  sauf  aprez  les- 
dicts  fais  baillés,  à  mectre  et  traicter  ladicte  matière  en 
extraordinaire,  se  faire  se  doibt.  Et,  ce  fait,  ledict  Guil- 
laume Viel  pleiga  et  cauxionna  ledict  Ponchel  d*ester  à 
droit  sur  ledict  arrest,  dont  ledict  Robinet  Diquclon, 
sergent,  fut  content  (i).  » 

Robert  Pinel  fut  à  Rouen  l'organisateur  des  fêtes  que 
nos  échevins  offrirent  à  Charles  VIII  lors  de  sa  joyeuse 
Entrée.  C'était  un  poète,  un  machiniste  et  vraisemblable- 
ment un  compositeur  de  mystères,  ainsi  que  ses  associés 
maistre  Gaultier  Mareis  ou  Marais  ou  du  Marais  et  Jean 
Mareis  ou  Marais  ou  du  Marais.  Il  m'a  paru  indispen- 
sable de  faire  connaître  leur  nom  sous  sa  véritable  forme. 

Le  fait  dont  il  est  ici  question,  intéressant  à  noter  pour 
l'Histoire  de  Rouen,  n'avait  pas  échappé  à  l'attention  de 
M.  Edouard  Gosselin  (2). 

TABLEAU  DONNÉ  A  LA  VILLE  DE  ROUEN  PAR  M.  DE  LA 

BOURDONNA  YE. 

Louis-François  de  la  Bourdonnaye,  chevalier,  marquis 
delà  Bourdonnaye,  seigneur  de  Launay,  Loyselinière,  etc., 

(i)  7,  29  janvier,  6,  7,  10  février,  5  mars  i683  (v.)  22,  23  mars 
1484.  Le  nom  de  maître  n*est  donné  qu*à  Gaultier  Marais,  qui 
pourrait  bien  avoir  été  le  poète  de  la  compagnie.  ^  Robinet 
Pinel  paraît  avoir  joui  d'une  certaine  fortune  et  d'une  véritable 
considération  à  Rouen. 

(2)  Voy.  Recherches  sur  les  origines  et  l'Histoire  du  Théâtre 
à  Rouen,  1868,  p.  17. 


400 

conseiller  du  Roi  en  ses  Conseils,  et  maître  des  Requêtes, 
fut  Intendant  de  la  Généralité  de  Rouen  de  1733  à  lySS. 

Il  était  fils  dTves-Marie  de  la  Bourdonnaye  qui  avait  été 
Intendant  de  la  même  Généralité  à  la  fin  du  xvn«  siècle. 

Il  composa  deux  Mémoires,  Tun  sur  rutilitédes  machines 
propres  à  suppléer  le  travail  des  hommes  ;  Tautre,  intitulé  : 
Réflexions  sur  ce  qui  pourroit  contribuer  à  la  perfection 
des  édifices  publics. 

Peu  d'Intendants  ont  laissé  à  Rouen  de  meilleurs  sou- 
venirs, et  ont  fait  preuve  de  plus  de  capacité. 

M.  de  la  Bourdonnaye  était  né  à  Bordeaux  le  12  juillet 
1700.  Il  mourut  au  château  de  la  Bourdonnaye,  en  Bre- 
tagne, le  12  juillet  1779  (i). 

En  quittant  Rouen,  il  avait  fait  don  à  cette  ville  d^un 
grand  tableau  de  Mignard  représentant  Louis  XIV  à  che- 
val. La  lettre  par  laquelle  il  priait  les  échevins  d'agréer 
cet  hommage  fut  insérée  dans  les  Registres  des  délibéra- 
tions. Elle  mérite  d'être  conservée  parce  qu'elle  peut  mettre 
sur  la  voie  d'une  oeuvre  d'art  remarquable,  qui  n'est,  peut- 
être,  qu'égarée. 

A  Paris,  le  23  juillet  1755. 

V  J'ay  à  Rouen,  Messieurs,  un  tableau  que  j'imagine  qui 
pourra  convenir,  tant  à  cause  de  sa  grande  proportion,  que 
du  sujet  qu'il  représente,  dans  une  des  salles  du  nouvel 
hôtel-de- ville,  à  l'élévation  duquel  vous  allez  commencer 
à  donner  vos  soins.  C'est  un  portrait  de  Louis  XIV  à  che- 
val, peint  par  Mignard.  Le  Roy  le  donna  luy-mesme  dans 
le  temps  à  M.  le  premier  président  de  Novion,  mon  ayeul 
maternel,  de  qui  il  me  vient.  Je  ne  puis  en  faire  un  meil- 

(i)  La  famille  de  la  Bourdonnaye  portait  pour  armes  :  de  gueules 
à  3  bourdons  d'argent  en  pal.  Le  marquisat  de  la  Bourdonnaye 
avait  été  érigé  par  lettres  de  février  1717,  en  faveur  d'Yves-Marie. 
On  peut  voir  Téloge  de  Louis-François  de  la  Bourdonnaye  dans 
les  Mémoires  de  l'Académie  de  Rouen,  t.  IV. 


40I 

leur  usage  que  de  le  destiner  â  un  lieu  dont  les  portraits 
des  rois  doivent  faire  Tornement  le  plus  naturel  et  le  plus 
décent.  Je  vous  prie  de  recevoir  le  présent  que  j'en  fais  à 
Phôtel-de-ville.  C'est  un  témoignage  du  zèle  que  j'ay  tou- 
jours eu,  et  que  je  ne  perdray  jamais,  pour  tout  ce  qui  se 
raporte  au  bien  et  à  l'avantage  de  cette  ville,  et  j'espère 
qu'il  pourra  servir  quelquefois  à  vous  faire  souvenir  de 
moy  et  à  vous  rappeler  -la  mémoire  du  temps  que  j'ay 
passé  avec  vous. 

Si  MM.  de  Sassetot  et  Bigot  veulent  consentir  à  garder 
ce  tableau  pendant  quelque  temps  dans  la  maison  que 
j'occupois,  je  crois  que  le  mieux  que  vous  puissiez  faire 
est  de  Ty  laisser  jusques  à  ce  que  vous  ayiez  un  endroit 
où  pouvoir  le  placer  à  demeure. 

Je  suis  plus  parfaitement  que  personne,  Messieurs,  votre 
très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

De  la  Bourdonnaye. 

Suscription  :  <  Messieurs  les  Maire  et  esche  vin  s  de 
Rouen  •. 


HOTEL  DES  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 

L'hôtel  des  Sociétés  savantes,  situe  rue  Saint- Lô,  em- 
prunte quelque  intérêt  des  hauts  personnages  pour  lesquels 
il  fut  construit,  et  des  divers  services  publics  qui  y  ont  été 
successivement  installés  depuis  la  Révolution. 

Jusqu'aux  premières  années  du  règne  de  Louis  XV^  le 
premier  président  du  parlement  n'eut  pas  de  maison  qui 
lui  fût  particulièrement  affectée.  Les  Intendants  eux- 
mêmes,  ce  qui  était  plus  fâcheux,  se  logeaient  où  ils  vou- 
laient et  où  ils  pouvaient;  et  ce  ne  fut  qu'en  1781,  que  fut 
construit,  pour  eux,  Thôtelde  Tlntendance,  sur  une  partie 
de  remplacement  des  Jacobins. 

La  construction,  aux  frais  de  la  Ville,  d'un  hôtel  pour  le 
premier  président  fut  ordonnée  par  un  arrêt  du  Conseil 


402 

d^tat  du  17  avril  1717.  Les  éctievins  furent  autorisés  à 
pourvoir  à  la  dépense  au  moyen  d^un  octroi.  Le  plan  et 
les  devis  furent  dressés  par  l'ingénieur  Jean  Martinet,  qui 
avait  pour  inspecteur  M.  Guillouet.  Les  adjudicataires  des 
travaux  furent  les  frères  Etienne-Nicolas  et  Jacques  Bar- 
jolie.  En  17 19,  on  décida  de  compléter  cet  hôtel,  en  y 
adjoignant  3  remises  de  carrosses  et  une  nouvelle  écurie. 
Les  travaux  entrepris  pour  ces  divers  bâtiments  furent 
reçus  par  Tarchitecte  les  6  février  1 719,  24  janvier,  10  juillet 
1720  et  14  mars  1721. 

En  1722,  la  grande  écurie,  voûtée  en  pierres  de  taille, 
s*écroula  et  écrasa  quelques-uns  des  chevaux  du  premier 
président  Camus  de  Pontcarré.  Cela  donna  lieu  à  une  de- 
mande en  indemnité  :  l'ingénieur  et  les  entrepreneurs 
furent  mis  en  cause. 

Un  procès-verbal  fut  dressé,  après  visite  des  lieux,  par 
M.  Le  Carpentier,  maître  des  ouvrages  de  la  Ville,  et  par 
les  architectes  Millets  Desruisseaux  et  Pierre  Jarry.  Ils 
concluaient  à  la  responsabilité  de  ceux  qui  avaient  été 
chargés  de  la  construction  (19  mars  1722). 

Un  autre  procès-verbal  fut  dressé  quelque  temps  après 
par  M.  Louis  Darneuse  Dessablonnières,  ingénieur  du 
Roi,  qu'un  arrêt  du  Conseil  avait  commis  pour  faire  la 
visite,  non  seulement  de  l'écurie  écroulée,  mais  aussi  du 
grand  corps  de  logis,  sur  la  solidité  duquel  on  concevait 
quelques  inquiétudes.  Cet  ingénieur  reconnut  (4  mai  1722) 
que  ce  dernier  bâtiment  était  construit  suivant  les  règles 
de  l'art  (i),  mais  que  l'écurie  prêtait  à  de  justes  reproches. 
Ce  fut  d'après  ses  devis  qu'elle  dut  être  relevée,  ce  qui 
indique  que,  bien  que  protégé  par  l'Intendant  de  la  Géné- 
ralité, M.  Martinet  fut  reconnu  coupable,  sinon  d'inha- 
bileté, tout  au  moins  de  négligence  (2). 

(1)  V Histoire  de  Rouen,  édition  173,  irc  partie,  p.  91,  appelle 
cet  édifice,  ce  magnifique  hôtel,,..*  ce  superbe  bâtiment. 

(2)  Archives  de  la  ville  de  Rouen. 


40  3 

Dans  ce  temps-là,  les  ingénieurs  n'étaient  pas  distingués 
des  architectes  comme  ils  le  sont  de  nos  jours  :  aussi  le 
choix  qui  avait  été  fait  de  M.  Martinet  n'avait-il  rien 
d'extraordinaire. 

La  dépense  totale  s'éleva  à  400,000  1.,  d'après  V Histoire 
de  Rouen  de  lySi. 

Les  constructions  entreprises  avaient  nécessité  Texpro- 
priation  de  plusieurs  immeubles  appartenant  à  MM,  Ro- 
bert Le  Cornier  de  Cideville,  Pierre  Bouchart,  sieur  de 
Contremoulins,  Jean- Baptiste  Ango  de  Lézeau,  comme 
représentant  sa  femme  Catherine  Du  Moustier  (maison  à 
l'enseigne  de  Bacchus),  M.  de  Mesnilbus,  avocat-général 
au  parlement,  Jacques  Le  Cesne,  curé  de  Léry  (maison  à 
renseigne  de  la  Bastille),  Marguerite  Ferrand,  les  religieux 
de  Saint-Antoine,  les  religieux  de  Jumièges,  pour  une 
partie  de  jardin  qui  dépendait  de  leur  hôtel  de  la  Poterne. 
L'arrêt  du  Conseil  d'État  avait  évalué  les  acquisitions  de 
terrains  à  78,440  1. 

On  peut  juger  par  l'écurie  de  M.  de  Pontcarré  de  ce  que 
devait  être  le  train  d'un  premier  président  du  parlement. 
Encore  feut-il  remarquer  que  ce  haut  fonctionnaire  avait 
un  hôtel  à  Paris,  qui  ne  devait  pas  être  moins  somptueux. 

Au  moment  de  l'accident  dont  nous  venons  de  parler,  il 
s'y  trouvait  6  juments,  i  cheval  de  carrosse,  un  cheval  de 
selle,  un  cheval  de  suite  et  un  petit  hidet,  tous  animaux 
de  prix  d'après  l'estimation  des  experts. 

Les  premiers  présidents  qui  ont  résidé  dans  cet  hôtel 
sont  MM.  Nicolas  Camus  de  Pontcarré,  Geoffroi  Camus 
de  Pontcarré,  Armand-Thomas  Hue  de  Miroménil,  Ni- 
colas de  Montholon. 

L'hôtel  du  premier  président  dépendait  de  la  paroisse  de 
Saint- Lô. 

Le  premier  président  était  trésorier  d'honneur  de  la 
paroisse.  C'est  le  titre  qui  lui  est  donné  dans  les  Tableaux 
de  Rouen  de  1 774-1 779. 

L'hôtel  du  premier  président  a  changé  d'aspect.  On  n'y 


404 

voit  plus,  le  long  de  la  rue,  ces  longues  barres  de  bois  aux- 
quelles les  plaideurs  et  les  juges  avaient  l'habitude  d'atta- 
cher leurs  chevaux  quand  ils  venaient  au  palais  pour  leurs 
affaires  ;  on  n'y  voit  plus  ce  pont  qui  permettait  au  premier 
président  d'entrer  de  son  appartement  dans  le  palais  sans 
passer  par  la  rue  et  sans  être  vu. 

Bien  antérieurement,  probablement  à  la  Révolution,  on 
avait  fait  disparaître  une  inscription  sur  marbre  noir  qui 
ornait  le  vestibule  à  droite  de  l'entrée.  Elle  était  ainsi 
conçue  : 

Anno  Domini  M.  DCCXVII  Mensis  Junii  XXV.  Hœc 
Domus  in  habitationem  hujusce  Provinciœ  senatus  prin- 
cipum  destinata,  Jussu  Ludovici  X  VFranciœ  et  Navarrœ 
Régis ^  Philippi  Ducis  Aurelianensis  Regni  Regentis  con- 
silio,  Nicolao  Petro  le  Camus  Domino  de  Pontcarré  milite 
Neustriœ  Proto  Prceside  ;  sumptibus  Urbis  Rothomagen» 
sis  ;  Leonoro  du  Bosc  équité  Domino  de  Radepont  ejusdem 
Urbis  tune  majore^  Jacobo  Roland^  Michaele  de  Mojr, 
Thoma  Planterose,  Petro  le  Marquier^  Mellone  Cécile^ 
Nicolao  Pommeraye  Mdilibus^  Francisco  de  Bailleul  pro' 
curatore  Régis  et  Urbis ^  construi  ccepit. 

L'Histoire  de  Rouen,  qui  nous  fournit  le  texte  de  cette 
inscription,  nous  apprend  encore  qu'aux  deux  côtés  du 
marbre  étaient  deux  bustes,  posés  chacun  sur  un  piédestal, 
Tun  représentant  Louis  XII,  roi  de  France,  l'autre  Georges 
d'Âmboise.  Sous  le  premier  était  écrit,  sur  un  marbre  noir, 
Louis  XII^  Roy  de  France^  et  sous  l'autre  :  Georges 
d'Amboise,  cardinal. 

Epéeavec  inscription.  —  Notre  compatriote,  M.  Lo- 
quet, possède  une  très  belle  épée  du  xni«  ou  même  du 
xii^  siècle  trouvée  dans  la  Seine  près  de  la  Mivoie.  Elle 
porte  une  inscription  incrustée  en  argent.  Bien  que 
très  lisible,  même  en  des  mots  entiers,  cette  inscription 
est  absolument  énigmatique,  comme  M.  le  Président 


4o5 

en  convainc  la  Commission  en  lui  offrant  un  fac-similé 
exact  de  ce  petit  monument  épigraphique. 

M.  Gouellain  rappelle  que  ces  sortes  d^Inscriptions 
étaient  fréquemment  une  prière  ou  le  début  d^n 
psaume.  Ce  doit  être  une  utile  ouverture  pour  l'inter- 
prétation de  ces  caractères  obscurs. 

La  séance  est  levée  à  trois  heures  et  demie. 

Le  Secrétaire  intérimaire, 

A.    TOUGARD, 


4o6 


SÉANCE  DU    10  JUILLET  1884 


La  séance  ouvre  à  deux  heures  un  quart,  sous  la 
présidence  de  M.  Ch.  de  Beaurepaîre,  vice  président. 

Etaient  présents  :  MM.  Adeline,  Paul  Baudry, 
Billiard,  Bouctot,  Lefort,  ''abbé  Loth,  de  Merval, 
Pelay,  chanoine  Robert,  de  la  Serre,  de  Vesly  et  Tabbé 
Tougard,  faisant  fonction  de  secrétaire. 

Il  lit  le  procès-verbal  de  la  précédente  séance 
(3o  mai),  qui  est  adopté  sans  observation. 

Se  sont  excusés:  MM.  Bouquet,  Brianchon,  Félix  et 
Maillet  du  Boullay. 

La  correspondance  imprimée  se  compose  de  :  Mé- 
moires de  la  Société  archéologique  de  Rambouillet, 
vol  VII;  —  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de 
Nantes,  vol.  XXU]—  Bulletin  de  la  Société  des  An- 
tiquaires de  Picardie,  1884,  n<>  i;  —  Mémoires  de  la 
Société  d'Emulation  d'Abbev'Me,  vol.  XV;  —  Bulle-- 
tin  de  la  Société  des  Antiquaires  de  P Ouest,  1884, 
i^'  trimestre. 

Dalles  de  l'enclave  Sainte-Marie,  —  A  propos  du 
procès-verbal  de  la  dernière  séance,  M.  Gouellain 
proteste  contre  les  différents  moyens  de  préservation 
proposés  en  faveur  des  dalles  tumulaires  adossées  au 
mur  extérieur  du  musée  des  Antiquités.  Il  estime  que 
leur  translation  à  Tintérieur  du  musée  s'impose  comme 
une  nécessité  qui  sera  possible  dans  un  délai  assez 
rapproché.  M.  Pelay  partage  entièrement  cette  manière 
de  voir. 

M.  Lefort  explique  que, conformément  au  vœu  delà 
Commission,   il  avait  préparé   un   projet  de  devis, 


407 

s'éievant  à  600  francs  environ,  pour  installation  de 
petits  auvents  distincts  au-dessus  de  ces  magnifiques 
images.  Mais  au  moment  où  il  allait  le  présenter  à  M.  le 
Préfet,  il  en  a  été  détourné  par  le  conservateur  du 
musée,  qui  prévoit,  lui  aussi,  Tintroduction  prochaine 
de  ces  pierres  tombales  dans  les  galeries  de  la  collection 
départementale. 

Devis  de  Graville.  —  M.  le  chanoine  Robert  dépose 
sur  le  bureai)  le  compte  des  travaux  de  Graville,  qui 
doit  être  envoyé  à  M.  le  Préfet. 

Porche  de  la  Vieux-Rue.  — L'affaire  de  cet  intéres- 
sant monument  est  en  bonne  voie.  Son  classement  est 
appuyé  par  M.  le  conseiller  d^arrondissement  Benner; 
Tadministration  locale  a  voté  3 00  francs  pour  sa  res- 
tauration, laquelle  est  confiée  aux  entrepreneurs  qui 
ont  exécuté  celle  de  Ry. 

La  Vieux-Rue,  —  Inscription  de  la  cloche,  — 
M.  le  curé  de  Morgny  a  communiqué  à  nos  confrères 
qui  ont  visité  le  porche,  Tinscription  de  la  cloche  dont 
suit  le  texte  : 

Lan  I  jSg^  fai  été  bénite  par  Af»  Charles  Len/ant,  curé 
de  Saint-André^Hors-la- Ville,  de  Rouen,  et  nommée 
Marie-Thérèse /y^rA/e  Guillaume  Bigot,  marchand,  ancien 
administrateur  de  V  Hôpital-Général  de  Rouen,  et  par  dame 
Marie-Thérèse  La  Vigne ,  bourgeoise  de  Rouen,  —  M' Jo- 
seph  Beux,  curé  de  Vieille-Rue,  et  Pierre  Gilles,  trésorier 
en  charge. 

Morgny,  —  Inscription  obituaire.  —  L'église  de 
Morgny  renferme  Pobitque  voici,  relevé  par  M.  Pelay. 

Pour  perpétuelle  mémoire  à  Tadvenir. 
Vénérable  et  discrète  personne  M«  Charles  Le  Bourgeois 
natif  de  Magny-le-Fréville,  diocèse  de  Bayeux,  prêtre  curé 


4o8 

de  cette  églize  de  Morgny,  a  fondé  en  icelle  â  perpétuité, 
tous  les  ieudîs  de  chaque  semaine  une  messe  basse  en  Thô- 
neur  du  très  Saint  Sacrement  de  l 'autel,  en  laquelle  sera 
aussy  fiaiite  mémoire  dudit  fondateur  par  une  oraison  con- 
venable pour  la  rémission  de  ses  péchez,  et  à  la  fin  de  la 
messe,  un  libéra^  de  pro/undiSy  et  oraison  sur  le  lieu  de 
sa  sépulture,  avec  un  obit  par  chaque  année  au  iour  de 
son  deceds  arrivé  le  27*  mars  1680,  où  sera  chanté  un  noc- 
turne des  trépassez  avec  deux  hautes  messes,  la  première 
du  très  Saint  Sacrement  de  Tautel,  et  la  dernière  des  dé- 
functs,  durant  laquelle  on  sonnera  en  voilée  la  grosse 
cloche  de  la  ditte  églize,  et  à  la  fin  du  dit  obit  le  libéra^  de 
profundis  et  oraison  sur  la  sépulture  du  dit  fondateur  avec 
un  cierge  ardant  pendant  le  dit  obit,  le  tout  conformément 
au  con...  o...  devant  n...  Las...  ve  et  Robert  Le  Tellier, 
notaires  à...  1678. 

Restent  six  lignes  indéchiffrables. 

A  propos  de  cette  inscription,  M.  de  Beaurepaire  fait 
remarquer  qu'il  serait  possible  d'en  compléter  le  texte  au 
moyen  du  testament  du  curé  Charles  Le  Bourgeois.  Ce 
document  existe  aux  Archives  du  département,  parmi  les 
papiers  de  la  fabrique  de  Morgny. 

Voici  quelques  extraits  de  ce  document  : 

«  Je  Charles  Le  Bourgeois,  presbtre,  curé  de  la  parroisse 
de  N.-D.  de  Morgny,  doyenné  de  Ry,  diocèse  de  Rouen, 
reconnoissant  qu'il  n'est  rien  plus  certain  que  la  mort,  ny 
rien  plus  incertain  que  l'heure  d'icelle,  et  ne  désirant 
partir  de  ce  monde  sans  avoir  disposé  de  telz  biens  qu'il  a 
plu  à  Dieu  me  donner,  fais  et  ordonne  mon  testament  et 
dernière  volonté  ainsy  qu'il  ensuit.  Premièrement  je  re- 
commande mon  âme  à  Dieu  le  père  tout  puissant,  à  Jésus- 
Christ,  son  filz  unique,  notre  Sauveur  et  médiateur,  et  au 
divin  et  St-Esprit,  trois  personnes  en  un  mesme  Dieu;  à  la 
glorieuse  Vierge  Marie,  mère  de  nostre  mesme  Rédempteur, 
ma  principale  advocate  auprès  de  son  cher  fils,  à  mon  ange 


409 

tutélaire  et  fidèle  gardien,  et  à  tous  les  espritz  bienheureux, 
aux  Sts  patriarches,  apostres,  martyrs  et  confesseurs,  spé- 
cialement au  glorieux  St  Charles  Borromée,  mon  patron, 
avec  le  chœur  des  vierges  et  martyres,  particulièrement  à 
la  bienheureuse  Ste-Quiltère,  vierge  et  martyre,  réclamée 
pour  patronne  en  lad.  église,  et  généralement  à  tous  les 
saincts  et  sainctes  de  Paradis,  que  je  prie  de  vouloir  estre 
intercesseurs  envers  Dieu  pour  la  remission  de  mes 
péchez.  Et  je  veux  que  mon  corps,  aprez  mon  décedz,  soit 
inhumé  dans  le  milieu  du  chœur  de  Tcglise  de  Morgny,  le 
tout  conformément  au  contract  de  la  fondation  que  j'ay 
^icte  d'une  messe  du  St-Sacrement  de  Tautel,  le  jour  de 
jeudy  de  chaque  semaine,  à  perpétuité,  recours  aud.  con- 
trat passe  devant  Nicolas  Cave  et  Robert  Le  Tellier,  no- 
taires garde  nottes  royaux,  commis  par  S.  M.  en  la 
vicomte  de  Rouen,  sergeanterie  de  Cailly,  branche  de 
Blainville,  le  3^  juillet  1678,  deuement  accepté  et  lecture, 
mis  et  reposté  dans  le  coffre  du  Trésor...  Et,  pour  mémoire 
de  lad.  fondation,  je  désire  qu'il  soit  pris  sur  mes  meubles 
les  deniers  nécessaires  pour  acheter  une  pierre  de  taille  de 
la  grandeur  requise,  sur  laquelle  sera  fait  sommairement 
mention  de  lad.  fondation.  »  Suivent  certaines  dispositions 
en  faveur  de  son  frère  Etienne  \^  Bourgeois,  chanoine  de 
Motteville  (1),  de  ses  nièces,  filles  de  son  autre  frère  Louis 
Le  Bourgeois,  8  mars  1 680. 

Charles  Le  Bourgeois  avait  été  nommé  à  la  cure  de 
Morgny,  en  remplacement  de  Denis  Coquin,  décédé  le 
25  mars  i635  (2). 

(i)  II  Tavait  eu  comme  vicaire  à  Morgny  en   1670  et    1671. 

(2)  Ce  curé,  originaire  de  la  Feuillie-en-Lyons,  avait  &it  une 
fondation  en  faveur  de  réglise  de  Morgny.  (V.  son  testament 
du  3  avril  1634.)  Il  avait  été  premier  témoin  synodal  du  doyenné 
de  Ry.  Il  mourut  à  Tâge  de  62  ans,  après  avoir  été  curé  de 
Morgny  pendant  23  ans.  Comme  Ch.  Le  Bourgeois,  il  avait 
voulu  être  inhumé  sous  la  lampe,  au  milieu  du  chœur.  Il  avait 
succédé  au  curé  Noël  Le  Clerc^  dès  1606. 

»7 


410 

Il  eut  pour  successeur  Pierre  Mullotin  dont  l'inscription 
funéraire  nous  a  été  signalée  par  notre  collègue,  M.  Gouel- 
lain,  dans  la  séance  du  3o  mai  de  cette  année. 

L'an  1728,  la  paroisse  de  Morgny  ne  contenait  que 
35  feux  et  i3o  communiants. 

Ce  qui  donnait  de  b  valeur  à  ce  bénéfice,  c'est  que  le 
curé  était  seul  décimateur. 

On  a  conservé  les  comptes  de  la  fabrique  de  Morgny 
des  XVII®  et  xviii*  siècles.  Nous  y  relèverons  quelques 
indications  qui  ne  sont  pas  sans  quelque  intérêt. 

Le  i3  oct.  1609,  M.  Behotte,  grand  archidiacre,  visitant 
réglise,  renouvelle  la  défense  de  louer  le  cimetière  pour 
en  faire  un  pâturage,  «  à  peine,  aux  prestres  y  consentans, 
de  suspense,  et,  aux  laïques,  d'excommunication.  » 

Le  25  juillet  1 602,  dans  le  cours  d'une  autre  visite  archi- 
diaconale,  le  même  Behotte  faisait  défense  au  curé,  c  de 
permettre  que  la  terre  de  son  église  fût  ouverte  pour 
inhumer  aulcune  personne,  que  au  préalable  le  thrésorier 
ne  l'eût  fait  certain  qu'il  avoit  reçeu  60  s.  pour  le  droit  du 
thrésor.  • 

Un  passage  de  ces  comptes  établit  clairement  que  les 
obligations  du  trésorier,  obligations  auxquelles  nulle  part 
on  ne  pouvait  se  soustraire,  s'étendaient,  dans  les  cam- 
pagnes, fort  au-delà  de  ce  qu'on  pouvait  réclamer  d'un 
comptable  ou  d'un  administrateur. 

t  Le  lundy  3oe  jour  de  mars  1671,  Tendemain  du  jour 
de  Pasques,  aud.  an,  heure  et  yssue  de  la  messe  parroissiale 
de  Morgny,  nous  Charles  Le  Bourgeois,  presbtre,  curé 
dud.  lieu,  et  les  thrésoriers  et  parroissiens  soubssignez, 
procédant,  ainsy  qu'il  est  accoustumé  en  pareil  jour,  à  la 
nomination  et  ellection  des  thrésoriers  de  l'église  dud. 
Morgny,  avons  esleu  et  nommé  la  personne  de  Pierre 
Vallot,  y  demeurant,  pour  aider  et  assister  la  personne  de 
Marin  Du  Busq,  entrant  thrésorier  présentement  en 
charge,  en  ce  qui  concerne  le  service  et  toutes  les  fonctions 
qui  se  rendent  au  dedans  de  l'église,  comme  à  cueillir  et 


porter  les  plats,  tant  à  la  première  qu'en  la  grande  messe, 
les  dimanches  et  festes,  allumer  et  esteindre  les  luminaires, 
apprester  les  choses  nécessaires  au  divin  service,  comme 
Teau  et  sel  à  bénir,  servir  à  Taspersion  de  Teau  béniste, 
recepvoir  et  distribuer  ou  faire  distribuer  le  pain  bénist  le 
dimanche,  assister  aux  processions  accoustumées,  et  y 
porter  la  croix  et  banière,  et  généralement  rendre  tous  les 
services  nécessaires  en  la  célébration  du  divin  office  par 
leurs  personnes  ou  autres  par  eux  commis  en  leur  absence, 
et  mesme  assister  charitablement  aux  inhumations  et  y 
porter  la  croix ,  de  tous  lesquels  services  nous  avons  fait  la 
déclaration  et  lecture  ausd.  trésoriers,  à  ce  qu'ils  n'en  pré- 
tendent cause  d'ignorance,  et,  en  cas  de  manquement, 
négligence  ou  refus,  avons  protesté  ausd.  thrésoriers  et 
tous  autres  à  l'advenir  de  les  y  faire  contraindre  par  justice, 
multer  d'amende  leur  négligence  et  les  faire  respondre  de 
tous  intérestz  et  despens  du  thrésor  de  lad.  église,  auquel 
cas,  nous  trésoriers  soubssignez  avons  prié  et  donné  pou- 
voir, par  les  présentes,  de  faire  toutes  poursuites  et  instances 
au  nom  dud.  thrésor,  contre  les  thrésoriers  délinquanz, 
devant  tous  juges  à  qui  la  connoi.ssance  en  appartient,  aud. 
sr  curé  de  Morgny,  sans  requérir  autre  délibération  que  la 
présente.  » 

Les  mêmes  comptes  font  mention  d'achat  par  la  fabrique 
de  vin,  pour  les  Pâques,  jusqu'en  1640  (i).  Dans  les 
comptes  postérieurs,  cet  article  disparaît,  et  Ton  ne  men- 
tionne, comme  dépense  ordinaire,  que  Tachât  de  buis 
pour  les  Rameaux. 

Mais  constamment  on  voit  figurer,  au  chapitre  des 
recettes,  deux  sortes  d'aumônes,  les  gerbes  de  Notre- 
Dame,  que  les  paroissiens  offraient,  à  la  fête  de  la  Nativité 

(i)  Pour  un  pot  de  vin  à  Pâques  8  s.,  1626.  —  Pour  le  vin  de 
Pâques,  3  s.  6  d.,  1 63 2.  —  Pour  le  vin  de  Pâques^  8  sous, 
i635.  —  Pour  le  vin  de  Pâques,  5  s.,  1639.  —  Pour  le  vin  de 
Pâques,  5  s.,  1640. 


412 

de  la  Sainte- Vierge,  et  les  œufs  de  Pâques,  qui  souvent 
étaient  vendus  aux  enchères  au  profit  de  la  fabrique  (i). 

On  acheta,  en  i636,  un  missel  romain,  3  1.  de  papier 
peint  et  du  parchemin  (pour  quel  usage,  je  ne  saurais  le 
dire),  53  s.;  un  canon  et  2  évangiles,  12  s.;  en  1666, 
5  aunes  de  messeline  (2)  à  fleurs  à  faire  le  pavillon  du 
tabernacle. 

Parmi  les  travaux  mentionnés,  je  ne  vois  à  noter  qu*une 
chaire  à  prêcher  et  un  lutrin  (lectrin),  et  des  confession- 
naux faits  en  1671;  —  les  2  contretables  des  autels  des 
chapelles,  pour  lesquelles  ont  eut  à  payer  àNoél  Jouvenet, 
sculpteur  à  Rouen,  une  somme  de  48  1.,  1670;  —  la  vitre 
du  milieu  du  chœur,  qui  paraît  avoir  été  en  verre  blanc 
losange,  avec  une  ovale  où  se  trouvaient  représentées  les 
armes  du  marquis  de  Monteclair  et  de  Madame  sa  femme, 
donateurs  de  lad.  vitre:  la  dépense  totale  pour  cet  objet  fut 
de  59  1.,  sept.  1664. 

Cette  dame  était  Marie  Langlois,  fille  de  Georges  Lan- 
glois,  chevalier  de  Tordre,  sieur  de  Motteville,  premier 
président  de  la  Chambre  des  Comptes  de  Normandie.  La 
seigneurie  de  Morgny  lui  était  échue  en  sa  qualité  d'héri- 
tière de  son  aïeul  maternel,  Robert  de  Hanyvel,  seigneur 
de  la  Chevalerie  et  de  Saint- Etienne -du-Rouvray,  décédé 
le  23  novembre  1645. 

Ce  Robert  de  Hanyvel  est  auteur  d'un  opuscule  intitulé  : 
€  Jésus  Christus,  Maria  Virgo,  de  Sanctis  Hymni,  quos 
Jesu  Christi  summo  in  terris  vicario  Beatissimo,  sanctissi- 
moque  Patri  nostro  Urbano  Papse  octavo,  Dei  ejusdem 

(i)  Gerbes  de  N.-D.,  8  1.,  i636.  —  En  sept., gerbes  données  à 
réglise,  à  raison  de  10  s.  6  d.  la  gerbe,  4I.  4  s.,  1672.^  Œufs 
de  Pâques,  25  s.,  i636.  —  Œufs  donnés  à  Téglise  à  Pâques 
1669,  vendus  et  enchéris  par  Louis  Lamoureux,  à  60  s.  — 
200  et  un  quarteron  d'œufs,  à  raison  de  19  s.  6  d.  le  cent^  44  s., 
X673. 

(2)  M.  Lîttré  ne  cite  pas  d'anciens  exemples  de  ce  mot  messC" 
Une  ou  mousseline. 


4i3 

misericordia  compositos  a  se  offert,  dicat  et  consecrat 
Robertus  de  Hanyvel,  Miles,  nativitate  Parisîensis,  civitate 
Rothomagensis,  origine  vero  uterque,  et  de  la  Chevalerie, 
S.  Stephani  de  Rouveré,  necnon  aliorum  Dominas  et  pa- 
tronus  locorum.  —  Rothomagi  ex  officîna  Laurentii 
Maurry,  cum  approbatione  et  priviiegio.  M.DCXXXIX  (i).> 

Cette  famille  de  Hanyvel,  alliée  à  des  familles  espa- 
gnoles (2),  était  originaire  du  diocèse  d'Auch,  où  le  culte 
de  sainte  Quitaire  était  très  répandu.  Je  suppose  que  ce 
fut  Robert  de  Hanyvel  qui  l'introduisit  dans  Téglise  parois- 
siale de  Morgny,  sur  laquelle  il  avait  des  droits  de  seigneur 
patron. 

Le  curé  Charles  Le  Bourgeois  paraît  avoir  eu  la  pensée 
de  composer  une  notice  historique  sur  cette  sainte,  qu'il 
appelle  la  seconde  patronne  de  son  église.  Je  ne  relèverai, 
dans  l'ébauche  qui  a  été  conservée  de  ce  travail,  que  l'in- 
dication d'un  manuscrit  qu'on  possédait  dans  ce  temps-là, 
en  l'église  de  Saint- Vivien  de  Rouen,  où  il  y  avait  une 
chapelle  dédiée  à  sainte  Quitaire.  €  Dans  la  ville  de 
Rouen,  en  l'église  parroissiale  de  St- Vivian,  il  y  a  une 
chapelle  et  une  célèbre  et  fort  ancienne  confrérie  de  Ste- 
Qu itère,  où,  parmi  les  tiltres  d'icelle,  il  se  trouve  deux 
manuscrits  fort  antiques,  Tun  françois^  dans  lequel  la  vie 
de  cette  saincte  est  rapportée  amplement,  et  l'autre,  latin, 
au  commencement  duquel  est  escrit  :  a  Ce  livre  est  de  la 
parroisse  de  St- Vivian  de  Rouen,  fait  et  parfait  Tan  mil 
trois  centz  quatre-vingt  douze,  »  dans  lequel  il  se  trouve 

(i)  Petit  vol.  in-32  de  19a  pages,  qui  m*a  été  communiqué  par 
M.  l'abbé  Sauvage. 

(2)  Robert  de  Hanyvel  était  cousin  de  Fernand  de  Salinas, 
prochancelier  de  Tarchiduc  Albert.  Fernand  de  Salinas  mourut 
en  i3go.  Robert  Hanyvel  a  composé  son  épitaphe.  La  fille  de 
Robert  de  Hanyvel,  Madeleine,  avait  épousé  Georges  Langlois, 
dont  elle  n'eut  qu'une  fille,  mariée  au  marquis  de  Monteclair. 
Robert  de  Hanyvel  avait  été  l'exécuteur  testamentaire  du  curé  de 
Morgny,  Den.  Coquin. 


414 

neuf  leçons  de  la  vie  de  Ste-Quitère,  pour  l'office  ecclé- 
siastique de  sa  feste,  suivant  le  vieil  usage  du  diocèse  de 
Rouen.  > 

Nous  voyons  qu'après  la  marquise  de  Monteclair,  la  sei- 
gneurie de  Morgny  fut  possédée  par  Louis  Puchot,  maître 
ordinaire  en  la  Chambre  des  Comptes,  demeurant  à  Rouen, 
rue  de  la  Pie,  paroisse  St-Sauveur,  25  juin  1682;  —  par 
Louis  Puchot  des  Alleu  rs,  sieur  de  la  Pommeraye,  con- 
seiller en  la  Cour  des  Comptes,  Aides  et  Finances,  1 71 3  ;  — 
par  ses  héritiers,  Nicolas  Puchot  des  AUeurs,  conseiller  au 
Parlement,  et  le  comte  des  AUeurs,  ambassadeur  de  France 
a  Constantinople,  171 3.  Les  enfants  de  ce  dernier  la  ven- 
dirent, vers  la  fin  de  Tannée  1725,  à  Yves-Michel  Duval, 
seigneur  de  Vimont,  Maudétour,  Pubeuf,  Dieulois  dit  Cu- 
verville,  président  en  la  Cour  des  Comptes,  Aides  et 
Finances. 

De  son  fils  Augustin-Marc-Prosper  Duval  de  Maudé- 
tour, ancien  capitaine  au  régiment  de  Bourbon-Infanterie, 
elle  passa  à  M.  Belhomme  de  Franqueville,  qui  la  possé- 
dait encore  en  1 789. 

A  M.  Pierre  Mullotin,  décédé  le  3-  mai  1707,  dont 
Louis  Puchot  fut  l'exécuteur  testamentaire,  succédèrent, 
dans  la  cure  de  Morgny,  Jean-Claude  Marc,  1 707-1 741, 
Huet,  1749;  —  Jacques-Nicolas  Farel,  1 755-1791. 

Adrien  Balesdent,  vicaire  de  cette  paroisse,  était  en 
même  temps  maire  de  la  commune  en  1791. 

Le  seigneur  de  Morgny  présentait  à  cette  cure. 

Cléon.  -- Fourneaux  gallo-romains,  —  M.  de  Vesly 
donne  lecture  de  la  note  suivante,  accompagnée  d'un 
plan  et  d'une  vue  de  Péglise. 

Il  y  a  quelques  jours,  M.  Tabbé  Cottey,  curé  de  Cléon, 
faisant  réparer  le  pavage  du  porche  de  son  église,  eut 
ridée  de  pousser  la  fouille  un  peu  profondément  afin  de 
s'assurer  s'il  n'y  existait  pas  de  sépultures. 


4i5 

• 

La  tranchée  qu'il  ouvrit  perpendiculairement  à  Taxe  de 
régiise  ne  révéla  pas  la  présence  de  tombeaux,  mais  mit  à 
découvert  plusieurs  petites  constructions  de  briques.  Il 
informa  de  cette  découverte  MM.  de  Beaurepaire  et  l'abbé 
Loth  et  les  invita  à  venir  la  visiter. 

J^eus  rhonneur  d'accompagner  M.  de  Beaurepaire  lors 
de  sa  visite,  et  c'est  le  résultat  de  notre  examen  que  je 
rapporte  ici. 

La  fosse  pratiquée  par  M.  l'abbé  Cottey  mesure  2°^oo 
de  longueur  et  o™8o  de  largeur  ;  elle  permettait  de  recon- 
naître à  i^iS  de  profondeur,  une  aire  en  argile  battue, 
sur  laquelle  reposaient  4  petites  coupoles  (x)  en  briques 
lices  par  un  mortier  d'argile.  La  forme  hémisphérique  de 
ces  coupoles,  mesurant  0^70  de  diamètre  extérieur,  est 
obtenue  par  le  retrait  des  six  assises  de  briques  posées  à 
plat,  et  la  forme  rayonnante  par  la  taille  de  chaque  brique 
à  l'une  des  ses  extrémités  seulement.  A  l'intérieur  un  revê- 
tement, en  mortier  d'argile,  pratiqué  par  l'ouverture  laissée 
au  sommet  de  la  coupole,  permettait  d'obtenir  une  calotte 
parfaite. 

Le  croquis  joint  à  ce  rapport  permettra  d'ailleurs  de 
juger  les  curieux  détails  que  présentent  ces  constructions, 
ainsi  que  leurs  dispositions,  etc.,  etc.. 

Lorsque  je  visitai  la  découverte  de  Cléon,  quelques 
heures  avant  M.  de  Beaurepaire,  je  crus  être  en  présence 
de  petits  monuments  destinés  à  protéger  des  urnes  ciné- 
raires, et  je  plongeai  ma  main  à  l'intérieur,  cherchant  si  je 
ne  trouverais  pas  l'olla  des  gallo-romains;  mais  je  ne 
retirai  que  des  charbons  et  des  fragments  d'argile  cuite  et 
noircie,  provenant  du  revêtement  intérieur. 

L'hypothèse  des  cupules  destinées  à  protéger  des  urnes  et 
à  remplacer  le  dolium,  devait  donc  être  écartée.  D'ailleurs 
il  n'eût  pas  été  nécessaire  de  construire  une  aire  d'argile 

(i)  Une  de  ces  coupoles  a  été  détruite  par  l'ouvrier  lors  de  la 
fouille. 


4i6 

et  d'employer  cette  terre  refractaire  pour  liaison  ;  un 
mortier  ordinaire  en  ciment  quelconque  eût  suffi.  Les 
cupules  de  Cléon  ont  été  destinées  à  faire  ou  à  recevoir 
du  feu  et  c'est  ce  caractère  bien  démontre  qui  nous  a 
amenés,  M.  de  Beaurepaire  et  moi,  à  nous  demander  si 
nous  n'étions  en  présence  de  fourneaux  d'un  hypocauste  ou 
de  substructions  d'une  de  ces  salles  appelées  concamerata 
52/ia/io.  Cependant  cette  hypothèse  ne  peut  pas  être  admise. 
Les  ruines  de  thermes  antiques,  ainsi  que  les  découvertes 
faites  en  Gaule,  ont  toujours  montré  Thypocauste  chauffé 
par  un  fourneau  unique  répandant  la  chaleur  au  moyen 
de  tuyaux  prismatiques  et  les  salles  situées  au-dessus  des 
hypocaustes  ont  leur  pavage  soutenu  par  une  série  de 
petits  pilastres  ou  piliers  de  terre  cuite.  Le  texte  de 
Vitruve,  si  souvent  obscur,  se  trouve,  pour  cette  partie  des 
constructions  antiques,  conforme  aux  découvertes  faites 
par  les  archéologues. 

Aussi  est-on  amené  à  voir  dans  les  cupules  de  Cléon  des 
récipients  où  étaient  déposés  les  charbons  provenant  du 
bois  consumé  dans  le  fourneau  proprement  dit  et  destinés 
à  chauffer  une  étuve  ou  laconicum. 

On  pourrait  ainsi,  la  folle  du  logis  aidant,  émettre  et 
développer  de  nombreuses  hypothèses.  Nous  avons  préféré 
vous  exposer  simplement  la  découverte  de  Cléon  et  vous 
demander  de  voter  un  crédit  afin  d'entreprendre  quelques 
fouilles  sommaires. 

La  question  ainsi  étudiée  pourra  vous  être  soumise  avec 
détails  et  mériter  un  intérêt  que  vous  pouvez  déjà  pré- 
juger. 

M.  le  Président  expose  que  la  Commission  n'a  point 
précisément  de  fonds  dont  elle  puisse  disposer  pour 
cet  objet,  mais  que  Tallocation  de  M.  Maillet  du 
BouUay  comprend  un  crédit  qui  peut  être  affecté  aux 
fouilles  et  aux  recherches  de  monuments  archéolo- 
giques. Il  Ta  pressenti  à  ce  sujet,  et  croit  savoir  que  le 


417 

conservateur  du  musée  affectera  volontiers  une  somme 
de  200  francs  pour  continuer  Texploration.  Les 
travaux  pourraient  être  surveillés  par  M.  du  Boullay, 
assisté  de  M.  de  Vesly. 

M.  de  Beaurepaire  s'étonne  queces  débris  si  anciens 
et  si  peu  résistants  niaient  point  été  altérés  par  réta- 
blissement des  fondations  du  porche.  M.  de  Vesly 
répond  que  malgré  sa  proximité,  le  porche  n^a  pu  leur 
faire  courir  aucun  risque. 

Les  mêmes  membres  signalent  dans  Féglise  de 
Cléon  plusieurs  vitraux  intéressants,  dont  l'un  est 
daté  de  i538;  et  un  curieux  lutrin  que  l'on  croit  pro- 
venir de  Saint-Étienne-d^Elbeuf. 

Jubé  de  la  Cathédrale.  —  A  propos  de  la  suppres- 
sion de  ce  monument,  M.  P.  Baudry  lit  la  note 
suivante. 

Messieurs, 

On  a  beaucoup  parlé  depuis  quelque  temps  de  la  démo- 
lition prochaine  du  Jubé  de  la  Cathédrale  de  Rouen,  et 
plusieurs  journaux  ont  proteste  contre  cette  démolition. 

La  Commission  départementale  des  antiquités  a-t-elle  à 
se  prononcer  dans  cette  question,  et  à  prendre  un  parti 
pour  ou  contre  ?  Je  Tignore.  Mais,  quelle  que  puisse  être 
son  opinion  à  cet  égard,  comme  il  serait  trop  tard,  —  si 
cette  opinion  était  favorable  à  la  conservation  du  monu- 
ment, —  d'attendre,  pour  se  prononcer,  que  le  monument 
fût  abattu,  peut-être  est-il  à  propos  d'en  dire  un  mot  dès 
maintenant. 

Or,  malgré  Thabîtude  généralement  admise  aujourd'hui, 
de  répéter  que,  en  principe,  les  jubés  et  clôtures  des  chœurs 
doivent  être  bannis  de  nos  églises,  et  que  le  jubé  de  la 
Cathédrale  de  Rouen  doit  d'autant  plus  l'être,  que  son 
style  est  en  désaccord  avec  l'ensemble  de  l'édifice,  je 


4i8 

demanderai  à  la  Commission  la  permission  d'exprimer  ici 
un  avis  complètement  opposé. 

Et  contrairement  à  plusieurs  personnes  qui  jugent  la 
question  autrement  que  moi,  je  n'apporterai  ici  aucune 
passion,  aucun  parti  pris.  Je  l'examinerai  simplement  avec 
vous,  Messieurs,  si  vous  le  voulez  bien.  La  chose  en  vaut 
la  peine. 

En  dehors  même  des  traditions  liturgiques  et  des  sou- 
venirs religieux  que  je  pourrais  invoquer  à  l'appui  de  mon 
sentiment,  une  commission,  chargée  comme  la  nôtre,  de 
la  conservation  des  œuvres  d'art  que  nous  ont  léguées  nos 
devanciers,  hésitera  beaucoup,  je  l'espère,  à  déclarer  que, 
désormais,  nos  églises  seront  privées  de  hautes  stalles, 
grilles,  ambons,  jubés,  clôtures  de  toute  sorte,  qui  ne 
permettent  pas  aux  regards  des  fidèles  de  plonger,  sans 
obstacle,  dans  l'intérieur  du  chœur.  Si  l'absence  de  toute 
clôture  était  admise  en  principe,  il  faudrait,  en  effet,  ren- 
verser près  d'ici,  les  jubés  d'Arqués  et  de  Moulineaux,  et 
ailleurs  les  splendides  sculptures  de  Chartres,  d'Amiens 
et  de  tant  d'autres  cathédrales. 

Est-ce,  —  ce  qui  est  plus  probable,  —  parce  que  le  jubé 
de  Rouen  forme,  par  son  style,  relativement  moderne,  une 
opposition  trop  marquée  avec  le  style  primitif  de  la 
Cathédrale,  qu'il  doit  être  sacrifié  ?  Mais  alors,  sauf  peut- 
être  la  base  de  la  tour  Saint-Romain,  il  faut  successive- 
ment sacrifier  aussi  tout  ce  qui  constitue  ce  vieil  et  véné- 
rable édifice,  auquel  tant  de  siècles  ont  apporté  le  tribut 
de  leurs  inspirations  variées,  et  de  leurs  travaux  qui, 
malgré  les  plus  incontestables  beautés,  offrent,  entre  eux, 
des  différences  de  style  considérables. 

Rien  n'est  plus  aisé  que  d'abattre  ;  rien  de  plus  fecile  à 
décider.  C'est  une  mode  qui  dure  depuis  longtemps.  Mais 
abattre  pour  ne  rien  faire  de  mieux,  est,  au  moins,  très 
téméraire.  Si  l'on  doit  faire  mieux,  voyons  ce  que  l'on  a  à 
nous  proposer.  Si  l'on  ne  doit  rien  faire  du  tout,  respec- 
tons ce  que  les  autres  ont  fait. 


419 

Je  n'admets  qu*une  réserve,  —  sérieuse  il  est  vrai,  •—  à 
Texpression  de  mon  sentiment  :  ce  serait  le  cas,  où  les 
piliers  sur  lesquels  s'appuie  le  jubé,  auraient  été  entamés 
pour  recevoir  celui-ci,  et  où,  vu  la  charge  énorme  de  la 
flèche  qu'ils  supportent,  il  serait  à  propos  de  supprimer  le 
jubé  pour  les  consolider  et  leur  rendre  toute  la  plénitude 
de  leur  force. 

M.  Bouctot  s^est  préoccupé  de  cette  question  et  a 
étudié  rhistorique  des  jubés  de  N.-D.  dans  le  mémoire 
de  Tabbé  Langlois.  Il  voulait  introduire  le  débat 
devant  le  Conseil  général  ;  mais,  après  avoir  pressenti 
quelques  membres,  il  a  reconnu  que  la  discussion  n^ 
aurait  aucune  chance  de  succès.  Il  demande  à  M.  le 
chanoine  Robert  de  faire  connaître  l'historique  de  la 
campagne  entreprise  contre  ce  monument. 

Notre  collègue  répond  que,  malgré  sa  qualité  d'in- 
tendant de  la  Métropole,  il  a  toujours  été  tenu  à  Pécart 
dans  cette  entreprise.  Le  clergé  de  la  cathédrale  n'est 
pas  favorable  au  maintien  dePétat  de  choses  actuel;  et 
quand  le  Chapitre  a  été  consulté,  le  jubé  n'a  recueilli 
que  4  suffrages  en  sa  faveur,  tandis  que  g  voix  Pont 
condamné. 

La  Commission  constate  que  Popinion  publique 
n'est  pas  mieux  disposée.  Malgré  le  bon  accueil  fait  par 
le  Nouvelliste  aux  notes  de  M.  Baudry,  la  presse 
locale  préfère  s'abstenir.  La  Commission  n'en  croit 
pas  moins  devoir  protester  contre  la  destruction  de  cette 
œuvre  d'art,  et  en  formuler  ses  regrets  les  plus 
profonds. 

Plusieurs  membres  réclament  notamment  contre 
deux  conséquences  probables  de  cette  mesure  :  le  dépla- 
cement de  l'autel  du  Vœu,  si  intéressant  par  le  souvenir 
historique  qu'il  rappelle,  et  la  suppression  de  quatre 


420 

des  stalles,  qui  sont  admirées  de  toute  I*Europe. 

M.  le  Président  propose  de  constituer  pour  la  défense 
du  jubé,  une  commission  pour  laquelle  il  désigne 
MM.  P.  Baudry,  Bouctot,  l'abbé  Loth  et  le  chanoine 
Robert.  Malgré  Tinsistance  de  nos  collègues  sur  la 
compétence  que  leur  donne  leur  titre  d'ecclésiastiques, 
MM.  Loth  et  Robert  déclinent  la  délégation  qu'on 
leur  confie. 

M.  Tabbé  Robert  émet  alors  la  pensée  de  tenter  une 
démarche  auprès  de  Mgr  Tarchevéque,  qui  ne  fait  que 
poursuivre  le  projet  de  son  prédécesseur.  Après  quel- 
ques pourparlers,  la  Commission  nomme,  à  cet  effet, 
MM.  P.  Baudry,  Bouctot  et  Gouellain. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  moins  le  quart. 

Le  Secrétaire  intérimaire, 

A.    TOUGARD. 


421 


SÉANCE  DU  9  OCTOBRE  1884 

La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence 
de  M.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Étaient  présents  :  MM.  Billiard,  Félix,  Gouellain, 
de  la  Serre,  de  Vesly,  et  Tabbé  Tougard,  faisant  fonc- 
tion de  secrétaire. 

Il  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la  précédente 
séance,  adopté  sans  observation. 

Se  sont  excusés  :  MM.  Adeline,  Bouquet,  P.  Bau- 
dry,  Le  Breton,  Maillet  du  BouUay  et  Brianchon.  Ce 
dernier  fait  connaître  que  s'il  avait  assisté  à  la  der- 
nière séance,  il  eût  été  d'avis  «  formellement  contraire 
à  la  conservation  du  jubé  de  la  cathédrale  ». 

M.  le  Président  observe  à  ce  propos  que  la  mention 
des  membres  présents  dégage  entièrement  la  responsa- 
bilité des  absents  dans  les  questions  sur  lesquelles  la 
Commission  émet  un  avis. 

Correspondance  imprimée.  —  Elle  comprend  : 
Bulletin  du  Comité  des  travaux  historiques  ;  Archéo^ 
logie,  1884,  no  3  ;  —  idem,  Histoire  et  Philologie, 
1884,  n®  I  ;  —  Répertoire  des  travaux  historiques, 
vol.  III  ;  —  Bulletin  archéologique  de  Tarn-et^Ga- 
ronnCy  i883  ;  —  Mémoires  de  la  Société  historique 
du  Cher  y  1 884  ;  —  Bulletin  de  la  Société  académique 
rf^Laon,  vol. XXIV;  — Bulletin  de  la  Société  archéolo- 
gique de  l'Orléanais,  n®*  1 1 9  et  1 20  ; —  Mémoires  de  la 
Société  archéologique  de  l'Orléanais,  vol.  XVIII  et 
atlas  ;  —  Bulletin  de  la  Société  archéolog.  de  Nantes j 
1 883  ;  —  Bulletin  de  la  Société  des  Amis  des  sciences 
naturelles  de  Rouen,  19»  année,  i883  ;  —  Mémoires 


422 

et  Documents  publiés  par  la  Société  Savoisienne, 
vol.  XXII;  ■—  Mémoires  de  la  Société  d'Émulation 
d'Abbeville^  vol.  XV  ;  —  Mémoires  et  Documents 
publiés  par  la  Société  archéologique  de  Rambouillet^ 
vol.  VII  ;  —  Bulletin  de  la  Société  des  Antiquaires 
de  Picardie^  1884,  u9  \\  —  Mémoires  de  la  Société 
académique  de  l'Aube,  vol.  XLVII  ;  —  Mémoires  de 
la  Société  Eduenne,  nouv.  série,  vol.  XII  ;  — Annales 
de  la  Société  historique  de  Château-Thierry,  1882. 

Second  centenaire  de  Corneille.  —  L^objet  de  la 
présente  réunion  est  de  communiquer  à  la  Commis- 
sion rinvitation  qui  lui  a  été  faite,  par  M.  le  Préfet  et 
M.  le  Maire  de  Rouen,  de  se  faire  représenter  dans  le 
cortège  de  la  manifestation  qui  se  prépare  en  l'hon- 
neur du  grand  Corneille.  Sont  délégués  à  cet  effet, 
MM.  Billiard  et  de  Vesly. 

Hommage  de  M,  Hardy,  —  Notre  savant  corres- 
pondant, M.  Michel  Hardy,  offre  à  la  Commission 
un  intéressant  mémoire  qu*il  vient  de  publier  à 
Rouen,  chez  Métérie  :  Le  Cimetière  franc  d'Eu  et  la 
Tombe  d'un  Monétaire  (32  pp.  in-80  avec  planches), 
oti  sont  résumées  plusieurs  découvertes  notables  faites 
Tannée  dernière.  Des  remercîments  lui  sont  adressés. 

Sépultures  de  Saint-Lô,  —  M.  Gouellain  obtient 
ensuite  la  parole  au  sujet  des  cercueils  de  plomb  que 
les  tranchées  ouvertes  dans  Pancienne  École  normale 
ont  mis  à  nu  dans  '  un  caveau  funéraire,  comme  la 
presse  locale  Va  enregistré  avec  plus  ou  moins  d'exac- 
titude le  14  septembre  dernier.  Ces  sépultures  datent 
du  xvi«  au  xviii«  siècle  et  appartiennent  à  la  famille  de 
Brinon,  comme  Ta  dît  Farin.  Elles  portent  des  épi- 
taphes  gravées  sur  cuivre,  dont  la  conservation  est  à 


423 

désirer.  Le  procédé  d'embaumement  était  assez  défec- 
tueux, quoique  plusieurs  cadavres  fussent  encore  bien 
conservés.  Les  tranchées  ouvertes  jusqu^alors  ont  mis 
à  jour  des  murs  romains  très  larges  et  en  parfait  état, 
qui  ont  pu  être  l'enceinte  primitive  de  la  ville.  La  mu- 
nicipalité a  imposé  à  Tentrepreneur  Tobligation  de 
réserver  tous  les  débris  pouvant  offrir  quelque  intérêt. 

M.  le  Président  remarque  à  ce  sujet  que  la  topogra- 
phie du  prieuré  de  Saint-Lô  et  de  son  voisinage  est 
souverainement  importante  pour  ^histoire  de  Rouen. 
La  porte  Sainte- Apolline,  supprimée  vers  i53o,  s'ou- 
vrait entre  Phôtel  de  France  et  la  rue  des  Fossés- 
Louis-VIII.  Ce  dernier  nom  rappelle  que  les  rem- 
parts de  la  métropole  normande  se  dressaient  encore 
entre  la  rue  Ganterie  et  Saint-Lô,  quand  on  éleva 
dans  la  rue  de  l'Aumône  ces  maisons  qui  constituaient 
en  plein  xni«  siècle  une  véritable  cité  ouvrière,  assise 
sur  les  fossés  de  la  ville.  Il  serait  donc  à  propos  de 
relever  avec  soin  le  plan  du  terrain  :  sur  l'invitation 
de  M.  le  Président,  M.  de  Vesly  veut  bien  accepter 
cette  mission. 

Ceci  amène  M.  de  Beaurepaire  à  regretter  qu'on 
n'ait  pas  exécuté  une  vue  intérieure  de  la  grande  église 
des  Cordeliers,  comme  de  récents  travaux  en  ont 
fourni  une  occasion  qui  ne  se  représentera  plus. 

Fouilles  de  Cléon.  —  M.  de  Vesly  expose  que  les 
découvertes  faites  à  Cléon  n'ont  pas  été  explorées  avec 
toute  l'entente  désirable.  Elles  n'ont  pas  encore  dit 
leur  dernier  mot  et  se  distinguent  par  des  particulari- 
tés qui  n'ont  point  encore  été  signalées  dans  notre  ré- 
gion. Au  milieu  de  fragments  de  poteries  mérovin- 
giennes et  du  moyen  âge  se  sont  rencontrés  quatre 


424 

petits  dômes  formés  de  briques  et  d^un  diamètre 
de  o"40  à  o"*5o,  avec  traces  de  charbon.  Ils  étaient 
terminés  par  des  sommets  en  bronze.  Notre  confrère 
a  voulu  laisser  absolument  intact  un  de  ces  mysté- 
rieux réceptacles  et  en  livrer  l'exploration  complète 
aux  maîtres  de  Tarchéologie  souterraine,  notamment 
à  M.  Alexandre  Bertrand. 

M.  l'abbé  Tougard  fait  les  deux  communications 
suivantes  : 

Projet  d'ambons  à  la  Cathédrale.  —  Un  détail  peu 
connu  qui  se  rattache  à  la  suppression  du  jubé  de  la 
Cathédrale,  a  été  rcvclé  par  une  source  absolument  au- 
thentique. 

Le  cardinal  de  Bonnechose  se  proposait  de  remplacer 
le  jubé  par  deux  ambons.  En  ce  qui  le  concerne,  notre 
collègue  est  loin  d^approuver  cette  idée,  non  à  cause  de 
l'effet  à  produire,  sur  lequel  il  serait  peut-être  difficile  de 
se  prononcer,  mais  surtout  parce  que  ces  ambons  eussent 
introduit  dans  Tédifice  un  élément  étranger  à  la  construc- 
tion primitive,  et  ainsi  tout  à  fait  discutable  en  principe  ; 
pouvant  en  un  mot  renouveler  la  critique  la  plus  fondée 
contre  le  jubé  disparu. 

AuFFAY.  Restauration  des  fenêtres,  —  La  fenêtre  prin- 
cipale du  chevet  de  la  belle  église  d'Auffay  a  été  entière- 
ment restaurée  au  mois  de  juin  dernier.  La  dépense  est 
considérable  et  s*élève  à  3,400 francs.  Notre  confrère  espère 
que  la  Commission  applaudira  à  ce  bon  travail,  et  qu'elle 
en  souhaitera  la  continuation  en  Tappuyant  au  besoin  au- 
près de  l'administration  départementale. 

M.  le  Président  estime  que  les  habitants  d'Auffay  ont 
effectivement  le  devoir  de  dresser  les  devis  de  la  restau- 
ration des  autres  fenêtres,  projet  qui  a  toutes  les  sympa- 
thies de  la  Commission. 


425 

Fontaine-Jacob.  — A  nciennes  mœurs  judiciaires.  — 
Sous  ce  titre,  M.  de  Beaurepaire  lit  le  mémoire  ci- 
après  : 

« 

Au  bas  de  la  côte  Sainte-Catherine,  sur  le  bord  de  la 
rivière  d'Aubette,  il  y  avait  un  lieu  nommé,  de  toute  an- 
tiquité, la  Fontaine- Jacob  (i).  Jusqu'à  Fépoquedela  Révo- 
lution, il  fut  connu  comme  le  siège  d'une  de  ces  hautes- 
justices  seigneuriales,  si  nombreuses  au  moyen  âge,  mais 
devenues  assez  rares  au  xvmc  siècle,  par  suite  des  atta- 
ques réitérées  des  officiers  royaux  et  des  légistes,  qui  ne 
manquaient  pas  de  voir  de  mauvais  œil,  quand  ils  ne  la 
qualifiaient  pas  de  pure  usurpation,  toute  autorité  qui 
n'émanait  pas  immédiatement  du  chef  de  TÉtat.  La  juri- 
diction dont  nous  parlons  avait  pour  territoire  un  fief  du 
même  nom,  lequel  s'étendait  sur  plusieurs  paroisses,  quel- 
ques-unes assez  éloignées,  et  qui,  après  avoir  dépendu  de 
l'office  de  l'aumônier  de  l'abbaye  de  Sainte-Catherine, 
passa,  en  1670,  entre  les  mains  des  Chartreux  de  Saint- 
Julien,  en  conséquence  d'un  accord  conclu  entre  ceux-ci 
et  les  représentants  de  la  vieille  communauté  bénédictine. 
Pendant  longtemps,  les  maisons  comprises  dans  cette  sei- 
gneurie avaient  toutes  été  marquées  d'une  croix  :  c'était 
le  signe  de  la  tenure  en  pure  aumône;  mais  cette  pratique 
avait  cessé  d'être  en  usage  au  dernier  siècle. 

S'il  fallait  en  croire  un  feudiste  de  i636,  qui  n'a  fait 
vraisemblablement  que  copier,  en  tête  de  son  terrier,  un 
document  d'une  date  beaucoup  plus  ancienne,  l'origine 
de  cette  juridiction  serait  assez  bien  éclaircie. 

Après  nous  avoir  parlé  d'un  Lucas  Le  Chevalier,  qui 
fut  grand  chambellan  de  Normandie  et  eut  l'honneur 
d'accompagner  le  duc  Robert  en  Terre  Sainte,  il  nous  ra- 

(1)  /m  vîco  de  Fonte  Jacob,  s.  d.  —  Ante  Fontem  Jacob,  ah 
Albeta  usque  ad  vivarium  domini  Régis ,  1237,  Fonds  de  Sainte- 
Catherine. 

»8 


426 

conte  que  le  fils  de  ce  personnage,  Jacob  Le  Chevalier  (i), 
amiral  et  grand-maître  de  l'artillerie  de  Guillaume  le  Bâ- 
tard, obtint,  en  1090,  l'érection  d'une  haute-justice  pour 
son  fief  Vassal  près  de  Rouen,  dans  l'enclave  duquel  était 
assis  le  monastère  de  Sainte-Catherine. 

c  Cette  haute- justice,  poursuit  notre  auteur  anonyme, 
ledit  Jacob  Tomosna,  en  pur  don,  à  perpétuité,  à  l'ofRce  de 
Tomosnier  de  ladicte  abbaye,  avec  ses  circonstances  et 
deppendances,  par  une  seule  féaulté  audit  duc,  laquelle 
fut  nommée  depuis  le  noble  fief  et  haute- justice  de  la 
Fontaine  de  Jacob,  de  laquelle  la  glèbe  ou  chef-mois  et 
domaine  non  fieffé  est  assis  en  la  paroisse  de  N.-D.  de 
Blosville  dit  Bonsecours,  où  il  étoit  désigné  sous  le  nom  de 
fief  de  Tomosnerie  de  Tabbaye  de  St«-Catherine-du-Mont.  > 

S'il  y  a  lieu  de  mettre  en  doute  certains  points,  par  trop 
fabuleux  et  naïfs  de  cet  exposé,  ce  qui  suit  nous  paraît  à 
l'abri  de  toute  contradiction  sérieuse. 

«  A  remarquer  que  le  lieu  destiné  à  tenir  la  juridiction  de 
ladite  baronnye  et  haulte  justice  est  assis  en  la  paroisse  de 
Saint-Paol,  au  faubourg  de  Martainville,  au  bas  de  ladite 
coste,  dans  une  maison  bastie  sur  une  masure  apparte- 
nant à  présent  à  Jean  Thierry,  à  droict  de  fieffé  Êiicte  par 
lesdits  abbé  et  religieux  à  Laurent  Le  Vasseur,  demeu- 
rant en  ladite  paroisse  de  Saint-Paol,  ladicte  masure  con- 
tenant de  longueur  sur  rue  70  pieds  ou  environ...,  devant 
laquelle  maison  a  lieu  de  juridiction  et  encore  une  belle 
fontayne  et  source,  où  il  vient  ung  gros  bras  d*eau,  la- 
quelle se  meslange  avec  Teau  de  la  rivière  de  la  Grande- 
Aubette^  qui  porte  encore  à  présent  le  nom  de  la  Fon- 
taine de  Jacob. 

(x)  Jacobus,  comme  nom  d*homme,  aurait  dû  former  Jacques. 
On  ne  voit  pas  d'ailleurs  pourquoi  le  nom  de  lieu  viendrait  du 
prénom  plutôt  que  du  nom.  Jacob  employé,  dans  ce  cas,  comme 
qualificatif  du  mot  fontaine,  nous  paraît  inspiré  par  des  souve» 
nirs  bibliques,  à  dessein  peut-être  d'eifacer  la  trace  de  supersti- 
tions payennes. 


427 

«  Celte  baronnye  et  haulte  justice  de  la  Fontaine  de 
Jacob  s'estent  en  plusieurs  paroisses  et  lieux  de  la  vicomte 
de  Rouen,  tant  en  ladite  paroisse  de  Saint-Paol,  faubourg 
de  Martainville,  dans  la  ville  de  Rouen,  en  plusieurs  par- 
roisses  d'icelles,  la  paroisse  et  faubourg  de  Saint-Hilaire, 
Saint-Gilles  de  Répainville,  Saint -Pierre-de-Carville,  Der- 
nestal,  Saint-Légier-du-Bourdeny,  Bloville,  Pont-Saint- 
Pierre,  Roumilly,  Orgeville,  le  Mesnil-soubz-Verclive, 
Sayneville  et  autres  lieux. 

c  Icelle  jurisdiction  est  fournye  d'un  bailly,  un  viconte 
ou  lieutenant,  procureur  fiscal  ou  d'office,  greffier  et  deux 
sergents,  ausquels  offices  à  présent  les  religieux,  prieur  et 
couvent  d'icelle  abbaye  pourvoient  de  plain  droit  et  capi- 
tulairement. 

c  Ladicte  juridiction  se  tient,  tous  les  lundys  de  chaque 
sepmaine,  dont  l'appel,  pour  le  civil,  ressortist  par  devant 
M .  le  bailly  de  Rouen,  et,  pour  le  crime,  au  parlement  ; 
et  est  appelé  ledit  bailly,  tous  les  ans,  aux  assises  mercu- 
riales tenues  audit  bailliage  après  l'appel  du  bailly  de 
Jouy  et  de  Gauciel.  i6  mai  i636.  i 

Un  droit  de  haute  justice  était  assurément  une  noble 
prérogative,  et  qui  relevait  singulièrement  la  dignité  d'un 
fief;  mais,  pour  le  profit,  il  était  nul.  Si  les  religieux,  pro- 
priétaires de  la  baronnie  de  la  Fontaine-Jacob,  se  mon- 
trèrent attachés  à  cette  juridiction,  il  faut  convenir,  cepen- 
dant, qu'ils  ne  se  mirent  jamais  en  grands  fi'ais  pour  en 
rendre,  aux  magistrats  de  leur  choix  et  à  leurs  justiciables, 
l'exercice  honorable  ou  aisé. 

  la  Fontaine-Jacob,  en  effet,  point  de  prétoire  qui,  par 
sa  construction  ou  par  sa  décoration  intérieure,  ait  jamais 
pu  avoir  la  prétention  d'exciter  l'intérêt  de  l'artiste  le  plus 
indulgent.  Mais  si  l'archéologue,  naturellement  moins  diffi- 
cile à  satisfaire,  cherche  dans  les  monuments  ou  dans  les 
textes,  non  pas  une  expression  de  l'art^  mais  la  forme  ha- 
bituellement donnée  aux  œuvres  qui  sortent  de  la  main  des 
hommes  et  servent  à  leurs  besoins  physiques  ou  moraux, 


428 

ce  qui  nous  reste  à  dire  pourra  bien  ne  point  paraître  ab- 
solument indigne  de  son  attention. 

Le  14  février  1484,  Gervais  Le  Danois,  aumônier  de 
Sainte-Catherine,  baille,  pour  neuf  ans,  à  un  tanneur  du 
nom  de  Richard  Le  Ruays,  «  un  hôtel  et  tènement  es 
faubourgs  de  Martainville,  près  la  Fontaine-Jacob,  d'un 
costé  Robin  Pinel,  d'autre  costé,  un  nommé  Barate,  d'un 
bout  la  rivière  d'Aubete,  d'autre  bout  les  prés  Martin  Le 
Verdier  et  sa  femme.  •  L'aumônier  retient  la  faculté  de 
pouvoir  faire  tenir  dans  cet  hôtel  ses  plaids  et  sa  juridic- 
tion (i). 

Le  même  hôtel  fut,  non  plus  seulement  baille  à  ferme, 
mais  fieffé,  le  26  mars  i  SSg,  à  un  toilier  du  nom  de  Lau- 
rent Le  Vasseur,  avec  obligation  à  celui-ci  d'y  garder  à 
ses  périls  les  malfaiteurs  qui  «  seroient  pris  et  appréhendés 
sur  ladite  justice,  et  de  quérir  et  trouver  chambre  pour 
faire  les  examens  et  informations  desdits  malfaiteurs  tou- 
tes les  fois  que  mestier  en  seroit.  1 

Cet  hôtel  fut  brûlé  pendant  les  troubles  de  1 562,  et,  peu 
de  temps  après,  rétabli,  vraisemblablement  aux  moindres 
frais  qu'il  fut  possible. 

En  1622,  Jean  Le  Carpentier,  avocat,  qui  remplissait  les 
fonctions  de  procureur  fiscal  en  cette  haute  justice,  re- 
montrait «  qu'il  y  avait  dans  le  jardin  dudit  lieu  plusieurs 
lézards,  aspics,  et  autres  bestes  venimeuses  qui  se  nour- 
rissaient et  cachaient  dedans  les  herbes  et  autres  choses 
putréfaictes   estans  audict   jardin,  qui   apportoient  une 

(i)  Les  prétoires  et  les  prisons  des  justices  inférieures  étaient  à 
peu  près  partout  dans  de  pareilles  conditions.  —  Guillaume 
Adens  et  Jeanne,  sa  femme,  vendent  à  Jean  Titaire  «  une  maison, 
le  fons  de  la  terre  sur  quoy  elle  siet  en  bourgage  de  Ducler,  en 
laquelle  est  le  cep  du  Roy  pour  prison,  avecque  le  droit  qu'ils 
avoient  ou  chemin  royal  à  aler  à  la  rivière  pour  mener  les  pri- 
sonniers, et  certains  droits  d*usage  en  la  forêt  du  Roy  à  cause 
d*icelle  maison.  »  Le  prix  de  la  vente  ne  s'élevait  qu'à  6  1.  t. 
18  mars  1483.  Fonds  de  Tabbaye  de  Jumièges,  Duclair. 


429 

grande  incommodité  au  public  et  autres  personnes  entrans 
dans  le  prétoire  de  la  juridiction,  mesmes  aux  personnes 
qui  seroient  mises  au  cachot  dudit  lieu  ».  Le  propriétaire 
de  la  maison,  qui  était  en  même  temps,  aux  termes  du 
contrat  de  fiefTe,  le  concierge  de  la  juridiction,  fut  con- 
damné à  faucher  les  herbes  du  jardin,  et  à  prendre  quel- 
ques dispositions  pour  rendre  le  prétoire  propre,  com- 
mode et  habitable.  Mais  je  ne  sais  sUl  n'arriva  pas  à  se 
faire  dispenser  de  foiirnir  le  mobilier,  assez  élémentaire 
pourtant,  qu'on  avait  eu  la  pensée  de  lui  réclamer. 

Croirait-on  que  plus  de  cent  ans  après,  en  plein  règne 
de  Louis  XV,  ce  prétoire  fût  encore  tel  qu'on  Pavait  vu 
dans  ces  temps  où  c'était  sous  l'orme  que  se  tenaient  les 
justices  de  village  ? 

Qu'on  en  juge  par  la  requête  suivante  : 

«  A  Monseigneur  le  procureur  général  du  parlement  de 
Normandie  supplient  humblement  les  bailly,  officiers  et 
avocats  de  la  haute  justice  de  la  Fontaine-Jacob, 

«  Et  vous  remonstrent  que  les  devoirs  de  leur  état  les 
mettent  dans  la  nécessité  d'accéder  tous  les  lieux  où  ils 
doivent  les  remplir. 

«  Mais  ils  sont  obligez  d'abandonner  le  prétoire  de  la 
haute  justice  de  la  Fontaine- Jacob,  si  vous  n'avez  la  bonté 
de  leur  subvenir. 

«  En  effet,  l'état  de  ce  prétoire,  certifié  par  le  procès- 
verbal  joint  à  la  présente,  vous  démontre.  Monseigneur, 
qu'à  tous  égards  il  est  indécent,  presque  inaccessible  et 
inhabitable. 

«  Dans  l'hiver,  il  faut  que  la  porte  soit  ouverte,  puisque 
c'est  de  là  qu'on  reçoit  le  jour. 

«  C'est  dans  cet  endroit  que,  la  porte  ouverte  sur  le 
bord  d'un  grand  chemin  très  fréquenté  (i),  on  est  obligé 
de  faire  toutes  les  opérations  de  la  justice,  même  les  plus 

(i)  C'était  une  des  routes  que  Ton  suivait  pour  se  rendre  de 
Rouen  à  Paris. 


43o 

secrettes«  faire  enqueste  et  informations,  ei  faire  prester 
les  interrogatoires. 

€  Pour  y  entrer,  comme  pour  en  sortir,  il  faut  se  tenir 
par  la  main  ;  le  plus  petit  homme  est  obligé  de  se  cour- 
ber en  deux,  s'expose  à  tomber,  et,  s'il  se  relève  trop 
tost,  court  les  risques  de  se  casser  la  teste  contre  le  lin- 
teau de  la  porte. 

€  Lorsque  Ton  est  dedans,  le  plus  petit  homme  est  en- 
core obligé  de  se  courber  pour  passer  dessous  le  sommier. 
Les  juges  et  les  avocats  sont  obligez  de  passer  dessous 
pour  prendre  place. 

c  Le  greffier  ne  peut  être  placé  ailleurs  que  sous  ce 
sommier,  et  il  est  autant  occupé  à  veiller  pour  avertir  les 
plaideurs  de  se  garantir  de  ce  chemin  qu'à  remplir  les 
devoirs  de  ses  fonctions. 

€  Luy-mesme  est  le  premier  exposé.  Aussy  s'est-il  sou- 
vent blessé. 

«  Lorsqu'on  est  en  place,  les  avocats  plaident  d^assis, 
parce  qu'ils  ne  peuvent  plaider  debout  ;  les  basques  de 
leurs  habits  portent  à  terre  dans  l'eau  et  dans  la  boue. 

t  Et  maintenant,  Monseigneur,  que  par  votre  prudence 
et  votre  attention  pour  l'honneur  de  l'État,  le  bon  ordre 
est  rétabli,  les  robes  longues,  dans  ce  prétoire,  en  ramas- 
sent l'eau  et  les  ordures.  C'est  un  fait  éprouvé  depuis  la 
lecture  et  enregistrement  de  l'arrêt  de  la  Cour  rendu  sur 
votre  réquisitoire. 

f  Dans  ces  circonstances,  et  n'y  ayant  plus  lieu  d'habi- 
ter le  prétoire,  n'y  ayant  point  de  chambre  de  Conseil,  les 
suppliants  se  flattent  que  vous  les  dispenserez  de  toutes 
les  difficultés  avec  les  propriétaires  de  la  haute  justice,  et 
que  vous  leur  subviendrez  de  votre  authorité  pour  ré- 
clamer pour  eux  le  droit  général.  Pour  quoy  ils  ont 
recours  à  votre  autorité,  à  ce  qu'il  vous  plaise,  Monsei- 
gneur, indiquer  aux  suppliants  des  lieux  convenables  et 
décents,  dans  lesquels  ils  puissent  remplir  leurs  devoirs, 
soit  provisoirement,  soit  définitivement,  afin  que  le  cours 


43 1 

de  la  justice  ne  soit  pas  interrompu.  Et  vous  ferez  jus- 
tice. »  Signé  :  Malfilâtre,  Harel^  procureur  fiscal,  Delà- 
cour,  De  TocqueviUe,  Guillibaud  (avocats). 

L'information  faite  le  28  avril  1750,  dont  le  procès- 
verbal  était  joint  à  cette  requête,  constatait,  en  effet,  que 
la  Chambre  du  Conseil,  extrêmement  petite,  servait  de 
passage  à  un  appartement  qui  n'avait  pas  neuf  pieds  car- 
rés, mais  dont  on  n'avait  pu  prendre  exactement  la  me- 
sure p>arce  qu'il  était  encombré  de  mauvais  meubles  de 
toute  sorte.  Il  constatait  encore  que  le  prétoire  était  situé 
sur  le  bord  du  chemin  qui  longeait  la  rivière  d'Aubette, 
chemin  étroit  ne  permettant  strictement  que  le  passage 
d'une  charrette,  et  élevé  de  deux  pieds  au-dessus  du  sol 
du  prétoire  ;  que  le  prétoire  contenait  environ  dix  pieds 
carrés  ;  qu'on  y  entrait  par  une  porte  de  trois  pieds  huit 
pouces  de  hauteur  ;  qu'il  n'avait  pas  de  plancher,  que  son 
aire  était  la  terre  nue  ;  qu'il  y  pénétrait  un  jour  très  in- 
suffisant par  une  croisée  de  trois  pieds  carrés  qui  faisait 
face  à  des  bâtiments  trop  rapprochés  ;  enfin  que  le  cachot 
n'était  pas  autre  chose  qu'une  cave  à  laquelle  on  accédait 
par  un  appartement  où  se  faisaient  les  lessives.  > 

Ce  déplorable  état  avait  été  depuis  longtemps  signalé 
aux  Pères  Chartreux  :  ils  alléguaient,  pour  s'exempter  de 
toutes  dépenses,  qu'eux  ou  leurs  auteurs  avaient  aliéné 
un  fonds  pour  fournir  tout  ce  qui  était  nécessaire  aux 
suppliants,  et  que  c'était,  en  bonne  justice,  aux  proprié- 
taires du  fonds,  suivant  les  termes  du  contrat  de  fieffé 
de  1339,  à  fournir  au  prétoire  une  Chambre  de  Conseil 
décente  et  une  prison  convenable. 

Le  prétoire  fut  réparé  vaille  que  vaille,  et  resta  tou- 
jours attaché  au  terrain  fieffé.  Le  propriétaire  de  ce  ter- 
rain, Jean  \.e  Barbier,  dans  son  aveu  de  1788,  se  recon- 
naissait obligé  à  garder  les  malfaiteurs,  à  fournir  et  quérir 
une  Chambre  du  Conseil  pour  faire  les  informations.  Le 
fonds  de  terre,  qu'il  qualifie  la  Cour  Souveraine,  où  se 
tenait  la  juridiction,  était  borné,  suivant  sa  déclaration, 


432 

par  le  chemin  qui  passait  le  long  de  la  Grande-Aubettc 
et  par  le  fosse  de  la  Petite-Aubelte. 

Quelques  années  auparavant,  cette  juridiction  avait  failli 
être  supprimée  au  profit  de  la  compétence  des  officiers  du 
bailliage.  Après  de  longues  procédures,  un  arrêt  du  Par- 
lement, du  8  mai  1783,  cassa  et  annula  une  ordonnance 
du  bailli  du  8  octobre  1781  et  maintint  les  sieurs  prieur 
et  religieux  de  la  Chartreuse  en  possession  de  leur  haute 
justice. 

Leur  droit  avait  été  exposé  dans  un  savant  mémoire 
où  Ton  retrace  l'histoire  de  cette  juridiction  particulière, 
et  où  Ton  s'efforce  de  prouver  la  légitimité  des  hautes 
justices  en  général. 

Ce  factum  est  intitulé  : 

c  Mémoire  pour  les  sieurs  prieur  et  religieux  de  la 
Chartreuse  de  Saint-Julien  de  Rouen, 

«  Contre  le  substitut  de  M.  le  procureur  général  du 
bailli  de  Rouen.  > 

La  pièce  est  fort  étendue,  et  il  n'en  pouvait  guère  être 
autrement)  eu  égard  à  l'importance  de  la  question,  qui 
devait  être  élucidée  par  Texposé  des  principes  du  droit 
féodal. 

Nous  n'en  citerons  que  quelques  passages  : 

c  Les  Chartreux  de  Saint-Julien  de  Rouen  possèdent, 
au  droit  des  religieux  de  l'ancienne  abbaye  de  Sainte-Ca- 
therine, le  fief  et  la  haute  justice  de  la  Fontaine- Jacob, 
dont  le  prétoire  est  au  faubourg  Martainville.  Cette  haute 
justice  a  une  existence  de  plus  de  sept  siècles,  attestée 
par  l'histoire  et  par  les  monuments  les  plus  anciens. 
L'exercice  s'en  est  fait  publiquement  sous  les  yeux  de 
tous  ceux  qui  auroient  été  intéressés  à  l'interrompre,  et 
il  a  toujours  été  paisible.  Le  droit  des  Chartreux  repose 
sur  une  possession  dont  l'origine  est  si  reculée  qu'on  n'en 
peut  découvrir  l'époque,  possession  contradictoire  avec  le 
Roi  par  les  déclarations  qui  lui  ont  été  rendues  à  la  Cham- 
bre des  Comptes,  contradictoire  avec  ses  officiers  souve- 


433 

rams  en  cette  cour  par  les  arrêts  de  dernière  main-levée 
qu'ils  ont  rendus  après  vérification,  contradictoire  avec 
le  bailliage  de  Rouen  qui,  depuis  dix-sept  ans,  reçoit  les 
baillis  de  la  Fontaine-Jacob,  connoit  des  sentences  ren- 
dues, en  cette  juridiction,  et  y  a  plusieurs  fois  renvoyé, 
sur  la  réclamation  du  procureur  fiscal,  des  causes  dont  il 
avoit  été  saisi  en  première  instance.  Cest  ce  droit  de 
haute  justice,  établi  sur  un  fondement  aussi  respectable, 
que  les  officiers  du  bailliage  de  Rouen,  ont  osé  attaquer 
en  1781,  avec  autant  d'irrégularité  à  la  forme  que  d'injus- 
tice au  fonds,  i 

L'auteur  signalait  dans  cette  attaque  contre  les  Char- 
treux l'essai  d'un  plan  plus  vaste  formé  contre  les  sei- 
gneurs propriétaires  de  hautes  justices  dans  les  bourgs  et 
dans  la  banlieue  de  Rouen.  Les  hautes  justices  étaient 
nombreuses  et  importantes.  Outre  celle  des  Chartreux  au 
faubourg  Martainville,  madame  Tabbesse  de  Montivilliers 
en  avait  une  à  Saint-Paul^  les  religieux  de  Fécamp  avaient 
celle  de  Saint-Gervais  au  faubourg  Cauchoise.  Il  y  en 
avait  trois  au  faubourg  Saint-Sever  :  celle  d'Emendreville 
appartenant  à  M.  le  prince  de  Soubise,  celle  de  Grandmont, 
et  celle  des  religieux  de  Bonne-Nouvelle. 

Au  bas  du  mémoire  on  lit  le  nom  d'un  homme  qui  plus 
tard  parvint  à  la  célébrité,  et  ne  peut  pourtant  figurer 
parmi  ceux  des  défenseurs  des  institutions  de  l'ancien 
r(*gime.  Nous  voulons  parler  de  l'avocat  Thouret  qui  fut 
syndic  de  l'Assemblée  provinciale  de  la  Haute-Normandie 
et  député  à  l'Assemblée  nationale  (i). 

(i)  II  est  curieux  de  rapprocher  de  câ  mémoire  ce  que  le 
même  auteur  dit  des  justices  seigneuriales  dans  ses  Observa- 
tions sur  l'Histoire  de  France. 

«  La  Révolution  a  détruit  les  justices  seigneuriales.  Nous  avons 
vu  que  cette  institution  avoit  pris  son  origine,  d'une  part,  dans 
l'ambition  et  dans  la  violence  des  leudes,  et  d'autre  part,  dans  la 
lâche  complaisance  des  Rois,  obligés  de  leur  céder  une  partie  du 
butin  qu'ils  faisaient  en  société  dans  le  pillage  de  la  nation. 


434 

A  vrai  dire,  le  barreau  devait  bien  quelque  reconnais- 
sance aux  hautes  justices,  puisque,  grâce  à  elles,  il  était 
permis  à  ses  membres  de  cumuler  les  avantages  d^une 
profession  lucrative  avec  les  honneurs  de  la  magistrature. 
Aussi  les  concurrents  ne  manquaient  pas,  et  les  places 
étaient-elles  souvent  briguées  par  des  praticiens  qui 
s'étaient  fait  un  nom  au  bailliage  ou  dans  les  cours  sou- 
veraines, et  qui  plus  tard  siégèrent  dans  des  justices 
royales. 

Il  est  aisé  de  le  reconnaître  par  la  liste  que  nous  avons 
dressée,  bien  qu'elle  soit  loin  d'être  complète. 

Robert  Langlois,  bailli,  1376. 

Carados  Garin  ou  Guerin,  bailli,  22  novembre  1457, 
17  février  1460. 

Pierre  Gyel,  bailli,  1 3  novembre  1487. 

GuifTroi  Marie,  bailli,  18  avril  1529. 

Martin  Dubosc,  seigneur  d'Emendreville,  bailli,  1 3  mai 
1 583- 1394.  Il  fut  consulte  comme  représentant  de  la 
haute  justice  de  la  Fontaine-Jacob,  pour  la  réformation 
de  la  coutume  de  Normandie. 

Nicolas  Corneille,  écuyer,  licencié  ès-lois,  bailli,  8  jan- 
vier, 2  mars  1597. 

Charles  Duval,  avocat  en  la  cour,  bailli  vicomtal,  der- 
nier août  1598,  2  décembre  1606. 

Robert  Belin,  avocat  en  la  cour,  bailli  vicomtal,  23  no- 
vembre 161 5. 

Jacques  Throsnel,  avocat  en  la  cour,  bailli  vicomtal, 
17  septembre  162 1-1624. 


«  Outre  l'injustice  de  cette  origine,  comment  auroit-on  pu 
tolérer  plus  long-temps  que  de  simples  citoyens  possédassent 
en  propriété,  comme  un  droit  foncier  de  leurs  terres,  une  des 
plus  importantes  fonctions  du  gouvernement,  celle  de  faire  exé- 
cuter les  lois  par  Texercice  du  pouvoir  judiciaire.  •  Abrégé  des 
révolutions  de  l'ancien  gouvernement  françois,  édition  de  1800, 
pp.  80,81. 


435 

Jacques  Onfifroy,  licencié  ès-lois,  bailli  vicomtal,  1627, 
28  avril  1637. 

Pierre  de  Cahagne,  avocat  en  la  cour,  bailli  vicomtal, 
3  novembre  1 637-1 665,  année  de  son  décès. 

Jacques  Bigot,  avocat  en  la  cour  (i),  bailli  vicomtal, 
1 665- 1667,  après  avoir  été  procureur  fiscal,  à  partir  du 
2  juin  i632. 

Pierre  Loynel,  licencié  ès-loîs,  avocat  en  la  cour,  bailli 
vicomtal,  i5  juillet  1669-1695. 

Jacques  Noël,  licencié  ès-lois,  avocat  en  la  cour,  bailli 
vicomtal,  7  octobre  1678- 17 19. 

Jacques-Nicolas  Guillard,  licencié  ès-lois,  avocat  en  la 
cour,  bailli  vicomtal,  1728,  —  2  août  1741. 

Louis  Malfilâtre,  licencié  ès-lois,  avocat  en  la  cour, 
bailli  vicomtal,  1746- 1764. 

Gaspard- Guillaume  Lavenu,  licencié  ès-lois,  avocat  en 
la  cour,  bailli  juge  criminel  et  de  police,  à  partir  de 
1783. 

Au  dernier  siècle,  le  bailli  tenait  la  juridiction  tous  les 
mardis,  à  deux  heures  de  l'après-midi.  Il  tenait  aussi  les 
plaids  et  gage-pièges  de  la  seigneurie  aux  jours  indiques 
par  les  Chartreux,  pour  y  recevoir  les  déclarations  de 
leurs  vassaux. 

Pendant  quelque  temps,  il  y  eut  concurremment  avec 
le  bailli,  et  à  l'imitation  des  juridictions  royales,  un  vicomte 
à  la  haute  justice  de  la  Fontaine- Jacob.  Nous  pouvons 
citer  les  noms  de  Nicolas  Le  Comte,  vicomte,  i385,  16  no- 
vembre 1391  ;  de  Guillaume  Toustain,  vicomte,  2  juillet 
1460,  8  octobre  1464  ;  de  Charles  Marais,  écuyer,  licencié 
ès-lois,  vicomte,  2  mars  i526. 

Plus  tard,  le  vicomte  disparaît,  et  le  bailli,  qui  le  rem- 
place, s'intitule  bailli-vicomtal. 

Mais  toujours  il  y  eut,  au-dessous  du  bailli,  un  lieute- 
nant, comme  lui,  licencié  ès-lois  et  avocat  en  la  cour. 


(i)  Avait  été  reçu  avocat  le  10  janvier  1647. 


436 

Laurent  Martel,  docteur  ès-droits,  fut  nommé  lieute- 
nant général  civil  et  criminel  du  bailli  de  la  Fontaine- 
Jacob,  le  4  juin  1817,  et  fut  remplacé,  le  19  avril  1627,  par 
Jacques  Pauger,  licencié  ès-lois,  avocat  en  la  cour,  qui  eut 
lui-même  pour  successeur,  en  1670,  Noël  Germain. 

La  venu,  bailli  précité,  n'avait  été  pendant  longues 
années  que  le  lieutenant  de  Malfîlâtre  (i). 

Il  y  eut  de  plus,  constamment,  dans  cette  juridiction, 
un  procureur  fiscal.  Citons  Jacques  Bigot,  avocat  en  la 
cour,  nommé  à  cette  charge  le  2  juin  i652  ;  encore  en 
fonction  en  i655. 

François  Vereul,  i656-i657. 

Jacques-Nicolas  Guillard,  nomme  le  7  septembre  1697. 

Jacques  Noël,  1695-1696. 

Richard  Harel,  1730- 1745. 

De  Tocqueville,  1774-1779. 

Plusieurs  de  ces  procureurs  fiscaux  devinrent  baillis. 

Il  y  avait  aussi  un  greffier. 

Tous  ces  officiers  avaient  été  nommés  par  Taumônier  de 
Fabbaye  de  Sainte-Catherine  et,  plus  tard,  par  les  Char- 
treux, lorsque  cette  abbaye  eut  été  définitivement  réunie 
â  la  Chartreuse  de  Saint-Julien-lès-Rouen.  Mais,  il  im- 
porte de  ne  pas  s'y  tromper,  une  fois  nommés,  ils  étaient 
inamovibles  :  tout  lien  cessait  entre  eux  et  ceux  à  qui  ils 
devaient  leur  titre.  C'est  même  une  remarque  à  faire,  que 
parfois  on  les  vit  affecter,  à  l'usage  de  ces  derniers,  une 
indépendance  qui  ressemble  à  de  l'impolitesse. 

De  cette  haute  justice  dépendait  un  tabeliionage  parti- 


(i)  Parfois  le  bailli  était  remplacé  par  un  avocat  qui  ne  prend 
pas  le  titre  de  lieutenant  :  Pierre  de  Bethencourt,  avocat,  licen- 
cié ès-lois,  tenant  la  juridiction  pour  l'absence  du  bailli,  8  fé- 
vrier i656;  —  Jean  de  La  Faye,  écuyer,  avocat,  vicomte  pour 
Tabsence  du  bailli,  4  juin,  i5  juillet  1659;  —  François  Semé- 
laigne,  licencié  ès-lois,  avocat  au  parlement,  exerçant  pour  le 
décès  du  bailli,  16  avril  1697. 


43/ 

culier  qui  fut  exercé  pendant  quelque  temps  par  deux 
tabellions.  Les  plus  anciens  contrats  qui  y  furent  passés 
sont  intitulés  du  nom  du  bailli  de  la  haute  justice  en  sa 
qualité  de  garde  du  scel,  suivant  un  usage  alors  général 
en  Normandie. 

Notons,  en  finissant,  que  sur  le  territoire  de  la  Fon- 
taine-Jacob, considéré  comme  faubourg  de  Rouen,  il  exis- 
tait quelques  communautés  d'arts  et  métiers  qui  préten- 
daient n*être  point  confondues  avec  celles  de  la  ville. 

Un  arrêt  du  Parlement,  du  5  juin  lySy,  régla  leurs 
rapports  réciproques.  Il  défendait  aux  juges  haut-justiciers 
de  la  Fontaine-Jacob,  aussi  bien  qu'à  ceux  d'Émendre- 
ville,  Grandmont  et  Sotteville,  de  recevoir  désormais  à  la 
maîtrise  aucun  ouvrier,qu'il  n'eût  fait  apprentissage  suivant 
les  statuts  reconnus,  et  présenté  chef-d'œuvre  devant  les 
gardes  de  la  ville,  ou  eux  dûment  appelés  en  même  temps 
que  les  gardes  des  hautes  justices,  et  n'eût  été  conduit  au 
serment,  au  prétoire  des  dites  hautes  justices,  par  les 
gardes  réunis.  Les  gardes  de  la  ville  étaient  maintenus 
dans  le  droit  de  faire,  concurremment  avec  ceux  de  l'ex- 
térieur, la  visite  des  maîtres  des  faubourgs  ;  d'assister  aux 
chefs-d'œuvre,  sans  pouvoir  cependant  rien  exiger,  ni 
accepter  de  repas,  sous  peine  d^amende  arbitraire  et  d'être 
destitués  des  fonctions  de  gardes. 

Ce  règlement,  qui  a  été  imprimé,  nous  reporte  à  un  état 
de  choses  tout  aussi  éloigné  de  nos  mœurs  que  l'était  la 
juridiction  même  de  la  Fontaine-Jacob. 

En  levant  la  séance  à  3  heures  1/2,  la  Commission 
décide  qu'elle  va  sur  l'heure  explorer  le  chantier 
de  la  rue  Saint-L6. 

L'examen  des  tranchées  écarte  la  probabilité  qu'on 
y  ait  sous  les  yeux  les  anciennes  murailles  de  Rouen. 
M.  Gouellain  remarque,  avec  sa  haute  compétence  de 
céramiste  exercé.,  que  les  derniers  procédés  de  fabrica- 
tion n'arrivent  point  à  obtenir  une  pâte  aussi  fine  ni 


438 

une  cohésion  aussi  fortes  que  celles  qui  se  peuvent 
admirer  dans  les  briques  romaines  dont  le  sol  est  jon- 
ché. La  Commission  se  promet  d'interroger  les  nou- 
velles tranchées  que  Ton  doit  ouvrir  dans  ce  soi, 
auquel  plusieurs  rattachent  les  temples  païens,  le 
lupanar  et  Pamphithéâtre  mentionnés  dans  la  vie  de 
plusieurs  saints  pontifes  de  Rouen,  tandis  que  d^au- 
tres  les  reportent  entre  la  rue  Beffroi  et  celle  du 
Cordier. 

Le  Secrétaire  intérimaire, 

A.  TOUGARD. 


439 


SÉANCE  DU  22  NOVEMBRE  1884 

La  séance  ouvre  à  deux  heures  un  quart,  sous  la  pré- 
sidence de  M.  Ch.  de  Beaurepaire,  vice-président. 

Étaient  présents  :  MM.  Adeline,  P.  Baudry,  Billiard, 
Bouctot,  Gouellain,  Lefort,  de  la  Serre  et  Pabbé  Tou- 
gard,  faisant  fonction  de  secréaire. 

Se  sont  excusés  ;  MM.  Bouquet,  Brianchon,  Maillet 
du  Boullay  et  Pelay. 

M.  Tabbé  Tougard  donne  d^abord  lecture  du  procès- 
verbal  de  la  précédente  séance  qui  est  adopté  sans  obser- 
vations, et  pour  lequel  des  remerciements  lui  sont 
adressés  par  M.  le  Président. 

Eglise  d'Auffay.  —  Fenêtres  du  chevet.  —  M.  le 
Secrétaire  informe  la  Commission  que  le  vœu  de  M.  le 
Président,  relativement  à  la  continuation  de  la  restau- 
ration des  fenêtres  du  chœur,  a  été  transmis  par  lui  à 
M.  le  Doyen  d'Auffay.  Ce  vœu  a  été  entendu,  et  le 
Conseil  municipal,  aussi  bien  que  la  Fabrique,  en  ont 
délibéré  et  ont  voté  ensemble  une  somme  de  900  fr. 
pour  la  restauration  des  deux  fenêtres  latérales.  L'ar- 
chitecte a  préparé  ses  plans  et  devis  ;  et  le  projet  n^attend 
plus,  pour  entrer  dans  la  période  d'exécution,  que 
Tallocation  qui  sera  vraisemblablement  votée  par  la 
Commission  départementale. 

Eglise  des  Cordeliers.  —  La  Commission  est  in- 
formée que  des  dessins  de  cet  édifice  ont  été  conservés 
par  MM.  Paul  Baudry  et  Simon  :  M.  de  Beaurepaire 
en  réclame  un  pour  les  archives  de  la  Commission;  il 
insiste  sur  les  souvenirs  historiques  qui  se  rattachent 


440 

à  cet  édifice,  où  eurent  lieu,  à  la  dernière  Assemblée 
provinciale,  d^i  m  portantes  réunions  populaires,  ainsi 
que  sur  le  rôle  de  ses  religieux,  docteurs  en  théologie 
ou  prédicateurs,  ce  qui  donnait  à  ce  couvent  une  im- 
portance plus  considérable  que  n'en  eut  même  l'ab- 
baye de  Saint-Ouen. 

Correspondance  imprimée.  —  Elle  se  compose 
comme  il  suit  :  Mémoires  de  la  Société  des  Anti" 
quaires  de  France,  5«  série,  vol.  IV,  i883  ;  —  Bulle- 
tin  de  la  Société  des  Antiquaires  de  Normandie, 
vol.  XI  et  XII  ;  —  Mémoires  de  la  Société  des  Anti^ 
quaires  du  Centre,  vol.  XI,  1884;  —  Bulletin  delà 
Société  académique  de  F  arrondissement  de  Boulogne-- 
sur-Mer,  vol.  III,  liv.  3,  4  et  5;  —  Bulletin  de  la 
Société  archéologique  de  Nantes,  vol.  XXI II,  pre- 
mier semestre  de  1 884  ;  -r  Bulletin  de  la  Société  des 
Antiquaires  de  Picardie j  1884,  n^  3  ;  —  Commission 
des  Antiquités  de  Seine-et^Oise,  fasc.  4  ;  —  Société 
industrielle  d'Elbeuf,  1884,  n*»s  i,  2  et  2  b.  ;  —  Con- 
cours agricole  à  Broglie,  i3  et  14  septembre  1884- 

Caudebec4ès-Elbeuf.  —  Arrêté  de  classement.  — 
M.  le  Président  donne  lecture  d'un  arrêté  de  M.  le 
Préfet,  en  date  du  18  novembre  1884,  qui  classe  au 
nombre  des  monuments  historiques  la  tour  de  Téglise 
de  Caudebec-lès-Elbeuf,  conformément  à  Tavis  favo- 
rable donné  par  la  Commission  des  Antiquités. 

Le  Préfet  de  la  Seine-Inférieure,  Officier  de  Tordre 
national  de  la  Légion  d'honneur,  Officier  de  l'Instruction 
publique. 

Vu: 

La  pétition  en  date  du  3o  avril  1884,  par  laquelle  les 
.membres  du  Conseil  de  fabrique  de  Péglise  de  Caudebec- 


441 

lès- Elbeuf  demandent  le  classement  parmi  les  monuments 
historiques,  de  la  tour  de  Téglise  de  cette  commune  ; 

Les  avis  fevorables  de  la  Commission  des  Antiquités  et 
du  Conseil  municipal  de  ladite  commune  ; 

Considérant  que  ce  monument  est  digne  d'intérêt,  tant 
au  point  de  vue  artistique  qu'au  point  de  vue  historique  ; 

Qu'il  est  le  seul  reste  de  l'église  primitive  construite 
dans  le  pur  style  roman  secondaire  (xii^  siècle),  et  qu'il 
offre  tous  les  caractères  de  cette  période  architecturale  à 
l'époque  normande, 

Arrête  : 

Art.  i".  —  La  tour  de  l'église  de  Caudebec-lès-Elbeuf 
est  classée  au  nombre  des  monuments  historiques  du  dépar- 
tement. 

Art.  2.  —  Une  expédition  du  présent  arrêté  sera  adressée 
à  M.  le  Maire  de  Caudebec-lès-Elbeuf;  une  deuxième 
expédition  sera  remise  à  la  Commission  départementale  des 
Antiquités. 

Rouen,  le  i8  novembre  1884. 

Le  Pré/et, 

Signé  :  E.  Henblé. 
Pour  expédition  conforme  : 

Le  Secrétaire  général^ 

Beverini-Vico 

Porche  de  la  Vieux-Rue.  —  M.  Gouellain  rappelle 
à  ce  propos  le  projet  de  classement  de  cet  intéressant 
monument,  et  demande  quelle  suite  lui  a  été  donnée. 
M.  le  Président  est  invité  à  rappeler  Tafifaire  à  l'atten- 
tion de  M.  le  Préfet. 

Fontaine-le-Bourg.  —  Déplacement  de  la  Fontaine- 
Nourrice.  —  M.  de  Beaurepaire  expose  que  le  petit 
édicule,  connu  à  Fontaine-le-Bourg  sous  le  nom  de 

29 


442 

Fontaine- Nourrice f  est  menacé  de  destruaion  par 
suite  de  travaux  de  voirie. 

M.  Bouctot  ajoute  que  les  habitants  tiennent  beau- 
coup à  ce  souvenir  du  passé;  ils  en  réclament  la  recon«- 
struction  sur  un  autre  point,  et  on  a  même  parlé  d'une 
demande  de  classement. 

M.  Lefort  estime  que  le  moyen  le  plus  simple  comme 
le  plus  sûr  de  donner  satisfaction  au  légitime  désir  de 
la  population  est  d'imposer  aux  entrepreneurs  du 
chemin  Tobligation  de  démonter  avec  soin  cette  fon- 
taine pour  la  relever  ensuite  en  lieu  convenable.  La 
Commission  émet  à  l'unanimité,  en  ce  sens,  un  vœu 
qui  devra  être  transmis  à  M.  le  Préfet. 

Portail  deSaint'Lô.  —  Le  même  membre  a  adressé 
à  M.  le  Président  une  lettre  où  il  expose  l'intérêt  du 
portail  de  Saint-Lô,  en  ce  moment  menacé  de  des- 
truction; et  la  possibilité  qu'il  y  aurait  d'employer  le 
jubé  de  la  Cathédrale  à  la  décoration  d'une  autre 
église. 

En  ce  qui  concerne  le  portail  de  Saint-Lô,  la  Com- 
mission, après  avoir  échangé  diverses  observations,  est 
unanimement  d'avis  qu'il  soit  réédifié  à  Tune  des 
entrées  du  jardin  Sainte-Marie. 

Jubé  de  la  cathédrale.  — Quant  à  ce  dernier  monu- 
L  ent,  la  Commission  remarque  qu'il  appartient  à 
l'État,  qui  en  peut  toujours  réclamer  les  fragments. 
Elle  craint  que  les  sanctuaires  indiqués  par  M.  Lefort 
ne  soient  point,  parleurs  proportions,  en  rapport  avec 
l'hôte  qu'on  voudrait  leur  donner.  Aussi,  sur  la  pro- 
position de  M.  Bouctot,  se  borne-t-elle  à  en  voter  la 
conservation  dans  son  intégrité  et  dans  chacune  de 
ses  parties. 


443 

Emmurées,  —  M.  Paul  Baudry  a  demandé  aux 
héritiers  de  M.  L.  Leclerc  une  pierre  provenant  des 
Emmurées,  pour  le  Musée  des  Antiquités.  M.  le  Pré- 
sident constate  que  cette  sculpture  présente  quelque 
intérêt,  et  qu'il  est  à  désirer  de  la  voir  entrer  dans  la 
collection  départementale. 

Le  même  membre  lit  la  notice  suivante  : 

Portail  de  Bonne-Nouvelle,  —  L'église  du  prieuré  de 
Bonne-Nouvelle  étant  menacée  d'une  ruine  complète  et 
prochaine,  par  suite  des  travaux  considérables  qui  vont 
avoir  lieu  pour  transformer  en  caserne  d'infanterie  le 
quartier  de  cavalerie  qui  s'était  installé  dans  cet  ancien 
prieuré,  ne  serait-il  pas  à  propos  de  faire  des  démarches 
pour  obtenir  au  moins  la  conservation  ou  la  réédification 
du  portail? 

Ce  portail,  dont  la  première  pierre  fut  posée  par  D.  Da- 
vanne,  au  nom  de  la  duchesse  de  Longueville,  le  i6  février 
i655,  et  qui  porte  la  date  de  i656,  est  en  pierre  et  très 
richement  sculpté.  L'entrée  est  surmontée  d'un  fronton 
triangulaire  percé  d'une  niche  et  reposant  sur  quatre 
colonnes  corinthiennes.  Plus  haut,  quatre  pilastres  alter- 
nent avec  des  bouquets  de  fruits  et  de  fleurs,  accompagnés 
de  deux  cartouches,  sur  l'un  desquels  est  inscrit  le  mot 
PAX.  Au  milieu,  dernier  souvenir  de  la  période  ogivale, 
une  longue  fenêtre  supporte,  à  la  pointe,  un  acrotère 
chargé  d'un  vase,  et  est  divisée  par  des  meneaux  émoussés 
qui  se  terminent  par  une  grande  fleur  de  lys.  La  surface 
supérieure  est  occupée  par  TAnnonciation  de  la  sainte 
Vierge,  au-dessus  de  laquelle  se  trouve  le  symbole  du 
Saint-Esprit.  Enfin,  les  côtés  de  l'amortissement,  con- 
tournés en  ailerons,  formaient  autrefois  un  fronton  circu- 
laire que  dominait  la  croix. 

La  Commission  appelle  la  sollicitude  de  Padminis* 
tration  départementale  sur  ce  portail  aux  dimensions 


444 

importantes  et  d'un   aspect  vraiment   monumental. 

Un  beau  bâtiment  conventuel  en  pierre,  du  xviie  ou 
xvriic  siècle,  et  qui  contient  encore  une  partie  du  cloître 
de  Bonne-Nouvelle  sera  aussi  compris  dans  les  nouvelles 
destructions  qui  vont  s'exercer  là,  comme  elles  s*exercent 
si  fréquemment  dans  notre  ville. 

Dalle  tumulaire  du  Vénérable  de  la  Salle.  —  J*ai  pu 
obtenir  indirectement,  de  l'entrepreneur  des  travaux  exé- 
cutés pour  l'installation  de  l'Ecole  normale  dans  lancien 
asile  de  Saint-Yon,  un  fragment  de  dalle  tumulaire  en 
marbre  noir,  portant  une  inscription  sur  chacune  de  ses 
deux  faces,  et  qui  offre  un  véritable  intérêt  pour  l'histoire 
de  notre  ville. 

Cette  dalle  a  recouvert  successivement  deux  sépultures  ; 
et  les  deux  inscriptions  se  rapportent  à  deux  personnages 
différents. 

La  première  inscription,  détériorée  à  dessein,  lorsque  le 
marbre  changea  de  destination,  est  celle  d'Agnès  Lopez, 
femme  d'Emmanuel  Dias  Sanchez,  marchand  bourgeois  de 
Rouen,  lequel  décéda  le  i3  août  1643. 

Nous  restituons,  grâce  à  Farin,  les  lignes  dont  nous 
trouvons  des  traces  plus  ou  moins  considérables. 

D.  O  M. 

[Hic]  jacet  Agnes  Lopes, 
[vlissip]one  Lusitanise  ex  illustri 
[familia  or]ivnda  Emanvelis  Dias 
[Sanchez  A]nno  MDCV  digna  vxor, 
[Charitatis  a]c  Beneficentis  exemplv[m], 
[pudicitiae  ac  mod]estise  typvs,  côivgal  [isque] 
[benevolentiae  et  cjoncordise  simbolv[m] 
[obiit  die  23  junii  an  [CMDCXXXVI[I] 
[œtatis  52  in  cœlo  quiescat]. 

La  dalle  tumulaire  était  primitivement  placée  dans  le 
petit  chapitre  du  couvent  des  religieux  Cordeliers,  où  furent 


445 

inhumés  plusieurs  seigneurs  et  marchands  d'Espagne,  de 
Portugal  et  d'autres  nations. 

Par  je  ne  sais  quel  concours  de  circonstance,  cette  dalle 
a  recouvert,  en  second  lieu,  des  restes  autrement  illustres 
que  ceux  de  Agnès  Lopez.  Elle  a  servi,  ni  plus  ni  moins, 
au  vénérable  Jean- Baptiste  de  la  Salle,  instituteur  des 
Frères  des  Écoles  chrétiennes,  mort,  comme  on  le  sait,  le 
7  avril  1719,  dans  la  maison  de  Saint- Yon  qu^il  avait  fondée, 
et  où  il  reçut  la  sépulture,  le  16  juillet  1734,  après  avoir 
momentanément  reposé  dans  l'église  Saint-Sever. 

Les  caractères,  très  bien  tracés,  quoique  très  incomplets 
aujourd'hui,  ne  peuvent  laisser  à  cet  égard  aucun  doute. 
Nous  les  reproduisons  tels  quels,  sans  pouvoir  ajouter  ce 
qui  leur  manque,  aucun  document,  de  nous  connu,  ne 
nous  en  ayant  jusqu'à  présent  révélé  la  teneur  : 

[re]pose,  messire  Jean  [Baptiste] 
[de  La  Sal]le,  prêtre,  Docteu[r  en] 
[théol]ogie,  ancien  chano[ine] 
[de  n]otre  Dame  de  Re[ims] 
[instit]uteur  des  Frère[s] 
[des  Ecole]s  chrétiennes  ;  qu[i  zé] 
lé  dans  la  pratiqu[e] 
s  les  vertus  c[hrétiennes] 

[ch]arité  qui 

r  tous  ses 

X  e 

Messieurs  les  membres  de  la  Commission  des  Antiquités 
n'ont  pas  oublié  sans  doute  qu'une  première  pierre  tumu- 
laire,  que  la  tradition  disait  avoir  été  celle  qui  marqua 
dans  l'ancienne  église  Saint-Sever  le  lieu  de  sépulture  du 
vénérable  instituteur,  a  été  reportée  dans  l'église  nouvelle, 
en  1860,  et  que  l'inscription  latine  qui  en  avait  disparu, 
y  a  été  restituée  par  les  soins  du  digne  abbé  Cochet. 

La  seconde  pierre  du  vénérable,  celle  que  j'ai  l'honneur 
de  vous  signaler,  a  dû  être  brisée  et  rejetée  hors  de  la 


446 

chapelle  de  Saint -Yon,  à  Tcpoque  de  la   Révolution. 

En  i835,  lors  de  rintroduction  du  procès  de  canonisation 
de  Jean- Baptiste  de  la  Salle,  les  précieux  restes  de  celui  -ci 
furent  exhumés  de  Sainc-Yon  et  transférés  dans  l'ancienne 
chapelle  de  l'école  normale,  rue  Saint- Lô,  dirigée  par  les 
Frères  des  écoles  chrétiennes.  Ils  doivent  être  aujourd'hui 
conservés  dans  la  maison  des  Frères,  rue  Saint-Gervais. 

M.  L.  De  Boutteville,  alors  directeur  de  rétablissement 
de  Saint- Yon,  devenu  hospitalier  en  182  5,  assistait  à  l'exhu- 
mation, et  nous  tenons  de  lui  que  la  sépulture  fut  rencon- 
trée vers  le  chevet  de  la  chapelle.  Elle  était  derrière  la 
place  primitivement  occupée  par  Tautel,  lequel,  à  cette 
époque,  se  trouvait  à  l'entrée  et  non  au  fond  du  chœur. 

«  Le  corps  était  représenté  par  un  squelette  à  peu  près 
complet,  crâne  entier,  os  longs  des  bras  et  des  jambes,  etc. 

f  11  n^existait  pas  de  caveau.  Le  corps,  renfermé  dans 
un  cercueil  en  bois,  dont  il  ne  subsistait  plus  que  des  ves- 
tiges, était  déposé  dans  la  terre.  Avec  le  corps,  on  trouva 
un  crucifix  en  cuivre,  semblable  à  ceux  que  portent  les 
Frères  des  écoles  chrétiennes,  détaché  de  la  croix,  dont  le 
bois  avait  été  détruit  par  la  pourriture,  et  quelques  frag- 
ments des  ornements  sacerdotaux  dans  lesquels  le  corps 
avait  été  enseveli,  des  franges  surtout.  » 

Il  n'est,  dans  tous  ces  détails,  aucunement  question 
d'une  épitaphe  quelconque,  et  celle  qui  est  arrivée  entre 
mes  mains  est  une  véritable  relique,  et  semble  avoir  été 
jusqu'à  présent  ignorée. 

Pavilly.  —  Chapelle  Saint-Pierre,  —  Enfin  M.  de 
Beaurepaire  communique  surTancienne  église  Saint- 
Pierre,  à  Pavilly,  le  mémoire  suivant  : 

Notice  sur  le  prieuré  de  Sainte-Austreberte   de  Pavilly, 

Un  des  plus  anciens  établissements  religieux  du  diocèse 
de  Rouen  était,  sans  contredit,  le  monastère  de  Sainte- 
Austreberte  de  Pavilly,  dont  il  reste  encore  une  chapelle 


447 

que  M.  Tabbé  Baudet,  doyen  de  Gères,  par  respect  pour 
de  pieux  souvenirs,  a  rachetée,  il  y  a  quelques  années,  qu'il 
a  &Lt  restaurer^  qu'il  a  consacrée  à  une  œuvre  charitable, 
et  où  il  se  fait  encore,  au  moins  de  fois  à  autre,  quelque 
exercice  du  culte. 

M.  Tabbé  Cochet  en  a^  fait  une  description  sommaire 
dans  son  Répertoire  archéologique  de  la  Seine-Inférieure. 
Cest  assez  pour  exciter  la  curiosité,  peut-être  pas  assez 
pour  la  satisfaire. 

Voici  en  quels  termes  un  bénédictin,  D.  Hilaire  Belin, 
raconte  la  fondation  de  ce  monastère  : 

t  Le  prieuré  de  Sainte-Austreberte  de  Pavilly,  de 
l'ordre  de  S^  Benoist,  a  été  fondé  par  Amalbert,  seigneur 
de  Pavilly,  l'an  de  l'incarnation  de  Notre-Seigneur  664. 

t  La  fille  de  cet  illustre  seigneur,  Aure,  ou  Aurée 
d'après  d'autres  documents,  s'estant  vouée  à  Dieu  et  dési- 
rant estre  relligieuse,  communiqua  son  desseing  à  son 
père,  lequel  l'approuva,  et  au  mesme  temps  vouUut  le 
seconder,  et,  pour  cet  effet,  par  Tentremize  et  conseil  de 
s»  Phillebert,  pria  sainte  Austreberts  qui  pour  lors  de- 
mouroit  au  monastère  du  Port,  diocèze  d'Amiens,  et  y 
vivoit  en  réputation  de  grande  piété  et  saincteté  de  vye, 
de  vouloir  venir  gouverner  le  monastère  qu'il  avoit  faict 
bastir  et  construire  en  son  territoire  de  Pavilly. 

«  Sainte  Austreberte,apprès  avoir  consulté  s»  Omer,  son 
principal  directeur,  et  receu  ses  ordres,  s'achemina  audit 
lieu  de  Pavilly,  où,  par  le  consentement  de  s«  Ouen, 
archevesque  de  Rouen,  elle  fuct  establye  abbesse  de  ce 
nouveau  monastère,  et  apprès  l'avoir  gouverné  16  ans  et 
avoir  receu  24  religieuses,  elle  y  rendit  Pesprit  à  Dieu,  le 
loc  de  febvrier  680. 

«  Elle  fut  inhumée  dans  l'église  de  son  abbaye,  en  la 
chapelle  de  S. -Pierre,  où  son  corps  a  reposé  long  temps, 
et  Ton  y  veoit  encore,  dans  ladicte  chapelle,  son  sépulcre, 
qui  est  visitté  journellement  en  grande  debvotion  par  un 
grand  concours  de  peuple,  Dieu  y  ayant  faict  et  faisant 


448 

encore  journellement  plusieurs  miracles  évidens  par  l'in- 
tercession de  ceste  saincte. 

«  Aprez  son  decedz,  Benoiste  fuct  esleue  abbesse  de 
Pavilly,  et  donna  Thabit  et  admict  à  la  profession  Jullianne, 
pauvre  fille  du  bourg  de  Pavilly,  qui  est  aussy  décédée 
audict  lieu  et  inhumée  en  l'église  de  lad.  abbaye.  Le  Père 
Hugues  Menart  et  M.  Du  Saussay  la  publient  sainte  en 
leurs  martyrologes. 

c  Les  corps  de  ces  saintes  ont  esté  conservés  en  ladicte 
abbaye  de  Pavilly  jusques  en  l'an  841,  qu'ils  furent  trans- 
portés à  Montereul,  ville  du  diocèse  d'Amiens  en  Picardie,  à 
cause  que  les  Normans,  soubz  la  conduite  de  Hastan,  leur 
capitaine,  homme  barbare  et  inhumain,  faisoient  grands  dé- 
gastz  en  Normandie,  bruslant  et  pillant  touttes  les  églizes^ 
en  telle  sorte  qu'il  ne  resta,  d*un  monastère  bien  basty  et 
bien  construict,  que  les  marques  d'une  vieille  mazure. 

c  Et  ne  se  treuvant  plus  ny  abbesse,  ny  relligieuses,  es- 
glise,  ny  monastère,  les  seigneurs  de  Pavilly  se  remirent 
en  possession  des  biens  et  revenus  dont  Amalbert  l'a  voit 
dottc,  et  en  ont  jouy  jusques  en  l'an  1090,  auquel  temps 
Thomas  de  Pavilly  le  redonna  à  Gaultier,  3^  abbé  de  l'ab- 
baye de  la  Très-Saincte-Trinité,  fondée  au  Mont  de  Sainte- 
Catherine-lès-Rouen,  à  la  charge  de  rebastir  led.  monas- 
tère et  y  envoyer  des  religieux  de  son  abbaye  pour  y  faire 
l'office  divin  et  prier  Dieu  pour  les  fondateurs. 

c  Le  tout  fut  exécuté,  et,  depuis  ce  temps-là,  ladicte  ab- 
baye est  devenue  prieuré  de  Tordre  de  s»  Benoist,  membre 
deppendant  de  ladicte  abbaye  de  Sainte-Catherine,  à  la 
collation  de  l'abbé  dUcelleplenojure,  vacation  advenant.  » 

Un  manuscrit  du  xve  siècle,  conservé  aux  Archives  du 
département,  fournit  à  peu  près  les  mêmes  renseignements 
sur  la  fondation  de  ce  prieuré.  Malheureusement  ce  ne 
sont  que  des  notes  dont  l'exactitude  ne  peut  pas  être  véri- 
fiée, parce  que  les  documents  anciens  ont  péri  depuis  fort 
longtemps. 

«  L'an  de  grâce  Vie  XLVI,  eu  temps  de  Louis,  filz  du 


4<9 

noble  roy  de  France  Dagoubert,  quart  roi  chrétien  après 
Clovis,  qui  fu  le  premier  roy  de  France  chrétien  et  bap- 
tisé de  monsr  st  Rémi  Tan  de  grâce  IIIIc  IIIl»  XIX,  et 
resgna  xxx  ans, 

t  Aimabert,  chevalier,  sire  de  Pavelli,  funda  sur  son  fief 
et  seigneurie  ung  monastère  en  Touneur  et  révérence  de 
notre  Dieu,  et  y  ordonna  religieuses  de  Torde  Mons'  st 
Benest  et  y  mist  une  sienne  fille  nommée  Alvrée.  Et 
estoit  pour  icellui  temps,  mons^  s<  Ouen,  archevesque  de 
Rouen,  et  mons^  s<  Philiebert,  abbé  de  Jumièges. 

«  L'an  de  grâce  Vie  LXIIII,  madame  s^e  Austreberte, 
religieuse  du  monastère  nommé  Port,  sur  la  rivière  de 
Somme,  fu  abbesse  dudit  lieu  de  Pavelli,  par  Tordenance 
de  monsr  s^  Phillebert,  adonc  abbé  de  Jumiègez^  lequel 
gouvernoit  et  enseignoit  en  foy  et  en  saincte  religion  les 
religieusez  dudit  monastère  de  Pavelli,  au  nombre  de  vingt- 
chinq  religieuses. 

«  L'an  de  grâce  VIIc  et  III,  trespassa  madame  st«  Aus- 
treberte, le  x«  jour  de  frevier,  jour  de  dimence,  laquelle  fu 
enterrée  audit  monastère  en  la  chapelle  fundée  de  mons' 
s»  Pierre  apostre,  au  senestre  costé  du  grant  autel.  Moult 
sainctement  se  gouverna,  et  par  ses  mérites  et  prières 
moult  de  miracles  nostre  créateur  y  voulut  faire  et  dé- 
monstrer,  comme  il  appert  d'une  fontaine,  laquelle  est 
auprès  de  ladicte  chappelle  où  est  enterrée. 

f  L'an  de  grâce  Ville  LI,  fu  brullé  et  destruit  ledit  mo- 
nastère de  Pavelli  par  les  danois  sarrazins  ;  semblablement 
le  moustier  de  S*  Pierre  et  S*  Paul  de  Jumièges,  par  plu- 
sieurs aultres  de  Normandie  et  de  France,  et  demoura  en 
ruine  ledit  monastère  Tespasse  de  Ile  XXI III  ans. 

«  L*an  de  grâce  mil  et  trente.  Gosse  le  viconte  funda 
le  monastère  de  S«e  Trinité  au  Mont  de  S»»  Katherine  prez 
Rouen,  et  régnoit  le  duc  Richart  chinquieme  de  Norman- 
die, lequel  donna  la  place  dudit  monastère,  bois,  terres  et 
aultres  pocessions,  et,  aprez  sa  mort,  son  frère  le  duc 


45o 

Robert  omosna  et  donna  moult  de  ses  biens,  et  fii  à  la 
dédicasse,  qui  est  le  xxvi*  jour  de  juing. 

f  Lan  de  grâce  mil  IIII"  et  onze^  fu  translate  de  Pa- 
velli  véncrablement  et  honorablement  le  corps  de  madame 
s»*  Aubstreberte,  vierge,  au  monastère  de  S*e  Trinité  prez 
Rouen,  eu  Mont  de  S<e  Katherine,  eu  temps  de  Waltier, 
tiers  abbé  du  dit  monastère»  lequel  Waltier,  père  abbé, 
commencha  à  rédiffier  ledit  monastère  de  Pavelli. 

€  Uan  de  grâce  mil  Ile  resgnoit  Thomas  de  Pavelli, 
chevallier,  sire  dudit  lieu,  lequel  conferma  tout  ce  que  ses 
prédécesseurs  a  voient  donné  et  omosné  audit  monastère 
de  Pavelli,  présens  Eustache  de  Pavelli,  chevallier,  son 
frère,  et  Reynaus  de  Pavelli  et  plusieurs  aultres.  N*  que 
depuis  la  fundacion  dudit  monastère  n'ay  veu  ne  trouvé 
aucun  ensaignement  ne  escripture  dudit  prieuré  précé- 
dent. » 

La  pièce  suivante  nous  paraît  être  la  copie  d'un  placard 
qui  aurait  été  affiché  dans  un  endroit  apparent  du  monas- 
tère pour  être  lu  par  les  visiteurs  ou  les  pèlerins. 

€  Sachent  toux  voians  cestescript  que,  eu  temps  de  très 
noble  Dagoubert,  quart  roy  de  France  chrétien,  qui  res- 
gnoit Tan  de  grâce  VJc  XXXII,  Almabert,  chevalier,  sei- 
gneur et  baron  de  Pavelli,  constitua,  funda  et  édifia  sur 
son  fieu  et  seigneurie  de  Pavelli,  Tan  Vie  XLI,  ung  mo- 
nastère en  Touneur  et  révérence  de  la  glorieuse  vierge 
Marie  et  y  fist  plusieurs  chappelles  et  entre  les  aultres, 
Tune  de  mons'  s^  Pierre,  et  Tautre  de  mons""  s^  Martin,  et 
y  ordonna  et  mist  religieuses  de  Torde  mons.  s^  Benest, 
et  y  mist  une  siene  fille  nommée  Avrée,  lequel  Almabert 
pria  mons.  s<  Philebert,  adonc  abbé  du  monastère  de  Ju- 
mièges,  qui  luy  plust  visiter  et  instruire  en  foy  et  doctrine 
et  en  saincte  religion  icelles  religieuses  ;  donc  après  long 
temps  fu  madame  s^*  Aubstreberte  abbesse  dudit  monas- 
tère par  Tordennance  de  mons^  s«  Philebert  en  Tan  de 
grâce  Vie  LXIIII,  uquel  lieu  moût  sainctement  se  gou- 
verna, et  XXV  religieuses  avec  elle,  et  par  ses  mérites  et 


45i 

prières  moût  de  miracles  nostre  créateur  y  voulut  faire 
et  demonstrer  ;  et  y  donna  ledit  Almabert,  en  pure  omosne, 
rentes,  terres,  dismes,  pocessions  et  revenues,  sans  aucunes 
choses  retenir,  excepté  prières  et  oraisons  pour  le  salut  de 
son  âme,  ses  parens  et  amis  ;  et  semblablement  aprez, 
mons.  Guillaume  d'Esneval,  chevallier,  y  donna  et  aumenta 
moût  ledit  monastère  pour  le  salut  de  son  âme,  parens  et 
amis.  Cy  est  assavoir  que  le  siège  dudit  monastère  est 
fundé  de  sy  long  temps  et  créé  sur  ancienne  et  pure  omosne, 
que  le  Roy,  ne  le  prince  ou  seigneur  de  la  terre  ne  peuvent 
par  droict  faire  leur  justice  laye  pour  quelque  crime  ou 
chose  que  ce  soit  dedens  les  mectes  dudit  monastère  de 
lad.  vierge,  se  ils  ne  veulent  encourir  la  sentence  divine 
ou  ecclésiastique. 

€  N>  que  nulz  ne  doivent  édifier,  mectre  ne  empeschier 
aucunement  près  des  murs  de  la  cloison  dudit  prieuré,  que 
le  prieur  et  ouvriers  ne  puissent  aller  et  mettre  leurs  ma- 
tières pour  repparer  ladicie  cloison.  • 

L'église  actuelle  possède  encore  une  ancienne  inscription 
lapidaire  sur  trois  colonnes,  ornée  à  sa  partie  supérieure 
des  effigies  de  saint  Pierre,  de  saint  Paul  et  de  saint  Ur- 
bain, caractérisés,  saint  Paul,  par  deux  épées  croisées, 
saint  Pierre  par  deux  clefs,  saint  Urbain,  en  sa  qualité  de 
souverain  pontife,  par  le  même  emblème.  Au-dessus  de 
leurs  têtes,  on  distingue  des  écussons  ainsi  décrits  dans 
une  pièce  que  j*ai  sous  les  yeux  :  «  Écusson  d'armes  timbré 
d'un  casque  soutenu  par  2  sauvages,  tenant  chacun  un 
guidon  avec  écu,  écartelé  au  i^r  et  4*^;  échiqueté  au  2"  et 
3«,  12  annelets  de  3  à  3  ;  »  «  Écu  chargé  d'une  croix  fleur- 
delisée, etc » 

On  remarque  une  fracture  à  Tune  des  pierres  sur  les- 
quelles cette  inscription  a  été  gravée  ;  cette  fracture  est 
ancienne  :  elle  existait  dès  le  milieu  du  xvii^  siècle.  On  voit 
également,  que  dès  ce  temps-là,  une  partie  des  écussons 
avait  été  enlevée. 

Cest  ce  que  ne  manqua  pas  de  constater  Robert  Dan- 


452 

dasne,  commissaire  aux  Requêtes  du  palais,  à  Toccasion 
d'un  procès  qui  s'éleva  entre  Françoise  de  Pruneley,  veuve 
de  M.  Anne  de  Tournebu,  sieur  de  Livet,  président  aux 
Requêtes,  et  Elisabeth  de  Pruneley,  comtesse  de  Mussy, 
sa  sœur,  Tune  et  Tautre  dames  de  Pavilly  d'une  part,  et 
François  Louchard,  prieur  du  prieuré,  d'autre  part.  La 
contestation  avait  pour  objet  la  propriété  d'un  cours  d'eau 
et  du  marché  de  Saint -Laurent,  autrement  dit  de  Sainte* 
Croix  (i3  janvier  i655). 

L'inscription  en  question  était  alors  placée  f  au  coin 
d'une  paroi  entre  la  nef  et  le  chœur  du  côté  de  l'Épître, 
sous  la  tour  du  clocher  t.  Il  paraît  qu'elle  avait  été  posée 
là  en  1600,  à  la  réquisition  du  seigneur  d'Elsneval,  Ch.  de 
Pruneley,  du  consentement  du  prieur  Jean  Le  Cauchois. 
J'aurais  eu  sans  doute  beaucoup  de  mal  à  en  déchiffrer  le 
texte,  parce  que  les  lettres  sont  empâtées  par  la  couleur  et 
qu'elles  sont,  d'ailleurs,  hors  de  la  portée  de  la  vue.  Par 
bonheur,  j'ai  pu  le  relever  dans  une  feuille  imprimée  à 
laquelle  les  seigneurs  d'Elsneval  donnèrent  dans  le  temps 
une  assez  grande  publicité. 

Voici  la  teneur  de  cette  inscription  : 

Fundatio  seu  dotatio  hujus  cosnobii,  abbati  Sanctissimœ 
Trinitatis  de  Monte  Sanctœ  Catharinœ,  ac  religiosis 
ibidem  Deo  famulantibus^  facta  per  dominos  de  Pavilly  et 
d*EsnevaL 

Omnibus  Christifidelibus^  tam  futuris  quam  extantibus^ 
présentes  litteras  inspecturis,  salutem,  Noverit  universitas 
vestra  quod  ego  Thomas  de  Pavilly^  miles,  donavi  et  hac 
carta  sigilli  mei  munimine  impressa  conjirmavi,  pro  sainte 
anima  meœ^  et  animarum  antecessorum  meorum,  abbati 
Sanctœ  Trinitatis  de  Monte  Sanctœ  Catharinœ  juxta  Ro" 
thomagum,  et  monachis  ibidem  Deo  famulantibus^  eccle- 
siam  et  monasterium  de  Paviliaco^  quod  quondam  prœde- 
cessores  mei  in  honorem  Sanctœ  Mariœ  Virginis  funda- 
verunt^  et  proprio  censu  construxerunt  ,•  ubi  etiam  beata 


453 

Austreberta,  cum  non  parvo  ancillarum  Dei  numéro^  prœ- 
fuit,  Sed  quia  a  gentibus  et  paganis  vastatum  atque  diru* 
tum  multo  tempore  jacuit  ;  nos^  charitatis  intuitUy  eidem 
Abbati  redificandum  tradidimuSj  atque  quascumque  posses- 
Sîones  terrarunty  redituum^  decimarum  atque  libertatum 
olim  antecessores  met  eidem  ecclesice  contulerunt,  prœdicto 
abbati  et  monachisejus perpétua possidendum  concessimus, 
sub  ea  tamen  conditione  quod  prœdicti  abbas  et  monachi 
tenebuntur  mittere  ad  monasterium  prcedictum  Paviliaci 
quatuor  de  confratribus  suis  ad  faciendum  servitium  et 
ibidem  Deo  sub  regulari  observantia  perpetuo  serviendum. 
Huic  donationi  adfuit  Guillelmus,  archiepiscopus,  qui  et 
consensum  prœbuit  et  sigillo  suo  roboravit.  Acta  sunt  hœc 
anno  ab  Incarnatione  Verbi  divini  millesimo  nonagesimo 
primo^  testibus  Guillelmo^  fratre  meo^  Reginaldo  de  Beau* 
montf  Hugone  de  Povilla^  Othone  de  Alvito  et  pluribus 
aliis, 

Confirmatio  hujus  cœnobii  ac  tuitio  sanctœ  sedis 
apostolicce  indulgentiœque  huic  loco  in  perpetuum  con^ 
cessœ  per  dominum  Urbanum  II,  pontificem  maximum. 

Urbanus  episcopus^  servus  servorum  Dei^  venerabili 
confratri  nostro  Guillelmo^  archiepiscopo,  et  cœteris  ejus^ 
dem  provinciœ  fideiibus^  salutem  et  apostolicam  benedic^ 
tionem.  Cœnobium  quod  beata  Austreberta  virgo  in  pago 
Paviliaco  quondam  constnixerat^  ut  post  a  gentibus  diru* 
tum  esty  audivimus^  venerabilis  abbatis  Galterii  studio^  et 
quorumdum  fidelium  instant ia,  noviter  reparatum.  Ut 
igitur  pia  voluntas  apostolicce  sedis  favore  vires  assumât, 
dilectionem  vestram  ad  ejusdem  cœnobii  reparationem 
fit  exaltationem  litteris  prœsentibus  excitamuSy  in  quibus, 
ex  apostolica  auctoritate^  prœcipimus  ne  quis  deinceps 
-eumdem  locum  temeritate  qualibet  infestare  prœsumat. 
Omnibus  autem  qui  locum  istum^  pro  omnipotentis  Dei  et 
sanctœ  virginis  Austrebertœ  reverentia  diligere^  adjuvare^ 
protegerCy  et  exaltare  curaverint,  ejusdem  Dei  et  aposto^ 
lorum  ejus  benedictionem  etgratiam  imploramus,  bene/a" 


454 

cientibusque  et  eumdem  locum  colentibus  quartam  pœni- 
tentia  partem  ab  episcopo  sive  a  presbytero  illis  injunctœ 
condonamus  ;  diripientibus  pertinentia  vel  concessa  loco 
huic^  vi  vel  fraude aliqua^  usque  addignam  satisfaction efn 
gladio  anathematis  ferimus.  Datum  Cossinii,  quarto  idus 
octobriSy  annoab  Incarnatione  Verbidivini  millesimo  nona^ 
gesimo  primo. 

Sunt  et  alia  privilégia^  multœque  indulgentice  huic  loco 
impertitœ  a  summis  pontificibus^  Adriano  IV  scilicet  et 
Nicolao  F,  illustrissimisqiie  légat is  Guillelmo  de  Toute^ 
villa  et  Alexandro  de  Mangiis  atque  strenuissimis  equiti- 
bus,  magna  pietate  conspicuis,  Almaberto  domino  de 
Paviliaco,  primo  hujus  cœnobii  fundatore^  et  Roberto^ 
barone  d'Esneval^  quce  brevitatis  causa  in  hoc  lapide  non 
sunt  insculptœ.  Ad  perpetuam  rei  memoriam  hoc  affixum 
est  de  mandato  magni  et  potentis  domini  Caroli  de  Pru- 
neléy  equitiSj  viri  nobiliSy  or  dinar  ii  regiœ  camerœ^  ducis 
quinquaginta  militum  cataphractorum^  vice-domini  Pavi- 
liaci^  domini  de  Gas^eran  et  de Herbaut^  totiusque conventus 
ejusdem  abbatiœ  et  domini  Johannis  le  Cauchois^  Prioris 
cjusdem  loci  anno  1600  (i). 

La  charte  de  fondation  ci-dessus  rapportée  fut  très  fré- 
quemment alléguée  dans  un  procès  qui,  sous  des  formes 
diverses,  dura  plus  d*un  siècle,  et  qui  avait  eu  pour  cause 
la  suppression  de  l'abbaye  de  Sainte-Catherine-du-Mont 
sous  Henri  IV. 

Lorsque  cette  abbaye,  ainsi  que  la  forteresse  qui  y  était 
jointe,  eurent  été  détruites  par  ordre  de  Henri  IV,  confor- 
mément aux  vœux,  non-seulement  de  la  ville  de  Rouen, 
mais  des  États  de  la  province,  la  partie  des  biens  du  mo- 
nastère, afférente  à  la  manse  abbatiale,  fut  unie  à  la  Char* 
treuse  de  Bourbon-lès-Gaillon.  Le  reste,  après  bien  des 

(i)  Je  suis  loin  de  vouloir  garantir  Fauthenticîté  des  documents 
contenus  dans  cette  inscription. 


455 

pourparlers  et  des  réclamations,  fut  laissé  comme  par  grâce 
aux  religieux  Bénédictins,  qui  allèrent  s'établir  à  Saint- 
Julien  et  gardèrent  pour  eux  le  prieuré  de  Pavilly,  devenu 
depuis  longtemps  un  bénéfice  simple,  de  prieuré  conven- 
tuel qu'il  avait  été  à  l'origine.  La  communauté  bénédictine, 
mal  à  l'aise  et  comme  dépaysée  dans  sa  nouvelle  résidence, 
ne  se  recruta  plus  que  difficilement,  et  il  y  avait  bien  des 
années  qu'elle  traînait  en  quelque  sorte  une  vie  languis- 
sante et  sans  édification  pour  le  public,  lorsque  les  der- 
niers religieux  (ils  étaient  en  fort  petit  nombre)  se  déci- 
dèrent, moyenant  des  pensions  viagères  et  d'autres  avan- 
tages, à  céder  aux  Chartreux  leur  monastère  de  Saint- 
Julien  avec  toutes  ses  dépendances.  Le  concordat  inter- 
venu entre  eux  est  de  l'année  1661.  Alors  une  contestation, 
qui  ne  fut  ni  moins  longue  ni  moins  embrouillée  que  celle 
qui  avait  suivi  la  suppression  de  l'abbaye,  s'éleva  entre  les 
nouveaux  possesseurs,  qui  se  prétendaient  substitués  aux 
bénédictins,  et  les  seigneurs  de  Pavilly,  qui  soutenaient, 
en  leur  qualité  de  fondateurs,  qu'on  n'avait  pu  disposer 
du  prieuré  de  Sainte-Austreberte  sans  leur  agrément.  De 
titres  positifs,  on  n'en  pouvait  produire  de  bien  clairs  ni 
de  bien  anciens,  si  ce  n'est  l'inscription  qui  précède.  En 
1667,  le  procureur  général  du  parlement  se  détermina  à 
prendre  en  main  la  cause  des  seigneurs  de  Pavilly;  dans 
les  conclusions  qu'il  donna,  lors  de  l'arrêt  d'enregistrement 
du  concordat  passé  entre  les  Chartreux  et  les  Bénédictins^ 
il  déclara  s'opposer  formellement  à  l'homologation  de  l'ar- 
ticle relatif  à  l'extinction  du  monastère  de  Sainte-Austre- 
berte. Ce  ne  fut  que  bien  des  années  après,  le  ï  "  décembre 
1713,  qu'un  traité  put  être  conclu  entre  les  parties.  Aux 
termes  de  cet  accord,  le  président  d'Esneval  se  désistait 
de  toutes  les  oppositions  mises  par  lui  à  l'union  du  prieuré 
à  la  Chartreuse.  Les  Chartreux  s'obligeaient,  de  leur  côté, 
à  l'entretien  des  bâtiments  et  du  manoir  du  prieuré,  et 
consentaient  à  ce  que  le  président  et  ses  successeurs  nom-* 
massent  le  prêtre  desservant  qui  serait  chargé  de  dire  tous 


456 

les  jours  la  messe  à  la  chapelle  (i)  ;  ils  lui  assuraient  un 
traitement  de  3oo  1.  par  an,  outre  le  logement  et  le  casuel  ; 
ils  autorisaient,  en  ce  qui  les  concernait,  Tunion  de  la 
petite  cure  de  Pavilly,  qui  dépendait  d'eux,  à  la  grande 
cure  qui  dépendait  des  seigneurs  d'Esneval. 

Ce  traité  ne  réussit  pas  à  terminer  d'une  manière  com- 
plète la  lutte  entre  la  communauté  et  la  seigneurie.  Pour  en 
finir  avec  les  procès,  les  Chartreux,  de  guerre  lasse,  cédè- 
rent, le  5  juillet  1773,  à  M.  Elsprit-Robert-Marie  Le  Roux 
d'Elsneval,  président  à  mortier,  «  le  sol,  Téglise  ou  cha- 
pelle et  le  manoir  de  Tancien  prieuré  de  Sainte-Austre- 
berte,  à  charge  par  lui  de  pourvoir  à  Tentretien  et  à  la  déco- 
ration du  lieu  saint,  ainsi  qu'au  desservice  de  la  cha- 
pelle. » 

C'est  ce  qui  explique  pourquoi  la  chapelle  ne  fut  pas 
considérée  comme  un  bien  national  et  ne  fut  pas  aliénée  à 
la  Révolution. 

Jusqu*à  ce  jour,  elle  a  conservé  son  caractère  antique. 
C'est  un  des  rares  édifices  romans  de  ce  pays.  Je  ne  serais 
pas  surpris  que  sa  construction  eût  suivi  de  très  près  le 
rétablissement  du  prieuré. 

Les  manuscrits  des  xvi^  et  xvii«  siècles,  auxquels  j'ai 
emprunté  quelques-unes  de  mes  citations,  contiennent  en 
outre  un  censier  très  intéressant  du  bourg  de  Pavilly  (2) 

(i)  Jean-Baptiste-Ouen  Baudet,  oncle  du  propriétaire  actuel  et 
du  restaurateur  delà  chapelle,  fut  le  dernier  chapelain  du  prieuré 
de  Sainte-Âustreberte.  Voir  la  Notice  de  M.  l'abbé  Baudet, 
pp.  61,  62. 

(2)  Ce  censier  fut  composé  en  latin  par  un  nommé  Le  Fores- 
tier. 11  en  fut  fait  une  traduction  française  qui  commence 
ainsi  : 

«  L'an  de  grâce  mil  deux  cents  quattre  vingts  et  unze,  frère 
Guillaume  leForetier,  religieux  daustrier  du  monastère  et  abbaye 
de  Sainte-Trinité  du  Mont  Saincte-Katherine-lès-Rouen,  demou- 
rant  en  la  prieuré  de  Pavilly,  ou  temps  de  domp  Robert  dit 
Cousin  ou  de  Criquetot,  adonc  prieur  dudit  lieu,  feist  et  composa 


457 

et  quelques  notes  précieuses  à  recueillir,  au  moins  pour 
une  histoire  locale. 

En  voici  quelques-unes  : 

f  L*an  mil  II Ile  LVIII,  le  vendredi  xni«  jour  d'octobre, 
fu  fondue  une  cloque  audit  prieuré,  nommée  Marie,  sans 
faire  nulz  dons  de  cheulz  de  la  ville,  et  la  cuiderent  des- 
tourber  le  curé  de  la  mendre  porcion  et  le  chappelain  de  la 
grande,  natifs  de  lad.  ville,  disans  que  c*estoit  en  leur  pré- 
judice. Celluy  qui  est  vray  rctributeur  et  la  glorieuse 
Vierge  leur  veuUent  rétribuer,  et  tous  les  autres  griefs  et 
dommages  qu'ils  ont  fait  audit  prieuré  ! 

ce  petit  ex traict,  affin  que  quiconque  soit  prieur  dudit  lieusaiche 
combien  luy  doibvent  de  rente  tous  ceulz  ou  celles  qui  tiennent 
du  fieu  dudit  prieuré  de  Pavilly.  »  Le  censier  se  termine  par  ces 
mots  :  «  Cy  fine  le  rouUe  que  frère  Guillaume  dict  le  Foretier, 
natif  de  la  parr.  de  S.  Vandrille,  feist  et  composa  à  ses  propres 
coustz  et  despentz.  » 

A  la  suite  :  «  Et  sachent  tous  que  le  pont  de  Rîchebourg  (pont 
d*un  quartier  de  Pavilly)  l'an  mil  deux  centz  quarante,  estoit  faict 
de  boys  ;  et  quant  il  chayet,  les  tenantz  et  hommes  du  seigneur 
du  Plexis  le  debvoient  trouver,  lever  et  mectre  sus.  Or  advint-il 
une  fois,  que  Villaume  d'Yerville,  adonc  prieur  de  Pavilly,  aux 
despendz  de  ladicte  prieuré  de  Pavilly,  feist  faire  et  réparer 
ledit  pont  ;  et  fut  faict  et  édiffié  de  pyere  ;  et,  pour  ce  que  il  n*y 
estoit  point  tenu  et  qu'il  ne  le  debvoit  point  faire,  mais  le  feist 
de  sa  curialité  et  non  mye  par  coustume,  nous  conseillons,  en 
bonne  équité  et  bonne  foy  et  fidellité,  que,  eu  temps  que  ledit 
pont  cherra,  que  quiconques  soit  prieur  en  ce  temps  ne  le  face 

faire  ne  reparer aux  despentz  de  ladicte  prieuré  ;  car  ce  seroit 

péché  mortel,  quant  il  n'y  est  point  tenu,  de  y  despendre  ainsy 
les  biens  de  l'esglise  et  de  ladicte  prieuré.  Car,  pour  ce  que  ledit 
prieur  l'avoit  faict  au  devant  faire,  advint  que  ledict  pont  chist 
l'an  mil  deux  centz  quattre  vingtz  et  deux,  et  les  gentz  de  la 
ville  vouHoient  que  le  prieur,  qui  estoit  en  ce  temps,  le  feist 
réparer  et  relever  et  raruner  bien  et  deuement  ;  mais  ilz  labou- 
rèrent  en  vain,  car  ilz  ne  peurent  trouver  ne  droict  ne  coustume 
que  il  le  deust  faire.  » 

3o 


458 

€  Le  dimence  iii«  de  décembre  ensuivant  (1469),  Louys 
de  Dreux,  maistre  Franchais,  son  frère,  enfTansd'Esneval, 
firent  prendre  et  mettre  en  criée  tout  le  tenement  du 
prieuré  et  mettre  en  la  main  de  la  seigneurie,  leur  père 
absent,  deffendre  le  ciellir,  recepvoîr  le  paie  à  toulx  les 
tenans,  sur  paine  d'amende,  pour  eschever  prossez  donné 
despence  avec  iceulx  enfTans,  recepveurs,  procureur,  pre- 
vost  et  aultres,  lxii  s.  m  d. 

c  En  Fan  IIIIc  LXX  vint  à  Rouen  mons.  d'Esneval  ;  le 
V*  jour  de  juing  fu  devers  lui  plusieurs  fois  audit  lieu  de 
Rouen  devers  sa  femme  et  enffans  pour  avoir  paiement  de 
XVII 1.  d'arrérages  de  Tan  IIIIc  LXIV.., 

<  Le  xnii«  jour  de  novembre  audit  an  vint  ledit  seigneur 
à  Pavelli  ;  retint  d'icelle  somme  de  xvii  1,  viii  1. 

<  Item,  despencé  avec  ledit  seigneur,  femme,  enffans, 
procureurs,  receveurs  et  fermier,  pour  avoir  paiement 
d'icelle  somme,  audit  an,  xl  s. 

«  Le  dimence  xvi  de  juin  audit  an  (1471))  Louise  de 
Dreux  fit  prendre  et  mettre  toute  la  reuenue  et  apparte- 
nance du  prieuré,  son  père  absent,  à  Tessue  de  grant 
messe  par  trois  dimenches,  rapport  au  plais,  par  le  prévost, 
et  prinses  dictes  de  tour  le  tenement  dudit  prieuré  et 
arrest  sur  les  labours  des  terres  et  dismez. 

L'an  lîllc  LXIIIL 

«  Item  de  mon  hoste  pour  xxx  mines  de  blé,  vu  1.  x  s. 

c  Item  de  lui  pour  xv  cares  de  foin,  xlv  s. 

c  Item  de  lui  pour  xiiii  mines  d'avoine,  xlv  s. 

«  Nota.  —  Le  jeudi,  ix  de  mars  l'an  dessus  dit,  partit 
l'oste  dessus  dit  nommé  Pierres  de  Kdochennet,  escuier 
du  pais  de  Bertangne,  lequel  fut  logié  au  priouré,  lui  vi®  et 
VII  chevalx,  depuis  le  dimence  vi«  jour  de  novembre  Tan 
IIIIc  LXIII  jusques^iu  jour  dessus  dit  lxiiii,  et  me  lessa 
une  queue  de  vin  vermail,  du  pris  de  c  sous,  et  une  ceduUe 
en  papier  qui  riens  ne  m'a  valu,  et  print  moult  des  biens 
de  cest  hostel  et  arrera  le  bien  et  empira  moult  le  lieu. 

«  Nota.  — En  ce  temps  estoit  le  roy  de  France  et  le  duc 


459 

de  Bertaigne  en  discord,  tant  que  tous  Bertons  vindrerent 
hors  de  Tordenance  du  roy  de  France  et  de  Normandie  ; 
et  s'y  en  alla  le  duc  de  Berry,  frère  du  Roy,  le  comte 
punays  et  de  Longueville  et  plusieurs  seigneurs  et  cappi- 
taines,  dont  fu  grant  pitié  et  douleur. 

t  Nota.  —  Le  jeudi  xxi  de  marsIIIIc  LXIIII,  vindrent  à 
Pavelli  tenir  les  monstres  soubz  le  comte  de  Maulé- 
vrier,  Richard  Ville,  commissaire,  Louis  De  la  Haie,  Pierre 
de  la  Salle,  lieutenanz,  et  moustrèrent  au  pray  du  prieuré 
XXX  hommes  d'armes  et  4  escuiers  environ,  et  firent  sere- 
ment  de  servir  le  Roy  bien  et  loyalment  envers  tous  et 
contre  tous,  et  leur  fut  commandé  que  ilz  allessent  logier 
incontinent  Avranches,  et  logièrent  au  prieuré  viii  che- 
vaulx  et  X  hommes,  jusques  au  vendredi  none,  eurent 
foin,  avoine,  pain,  cervoise  et  moût  d  autres  choses,  pour 
ce,  VII  s.  VI  d. 

a  Nota.  —  Le  lundi,  viii«  de  juillet,  à  la  requeste  du 
seigneur  d'Esneval,  vindrent  logier  deux  lances  de  Torde- 
nance  Monsr  du  Boul  en  Paveilli,  l'un  nommé  Bertran 
Daché,  fourrier  dud.  seigneur,  lequel  logia  au  prieuré, 
lui  vi^  et  VI  chevalx  et  une  femme,  l'autre  nommé  Guil- 
laume Daché,  son  frère,  logia  quelx  Raoul  Yve,  lesquelx 
venoient  boire,  mangoint  toulz  les  jours  ensamble,  et 
leurs  gens  au  prieuré,  n'esparnoient,  ne  leurs  gens,  choses 
que  peussent  avoir.  Moût  en  fu  chargié  l'ostel  par  ledit 
seigneur,  sa  femme,  son  fîlz,  maistre  Franchais  qui  venoit 
souvent  etc.,  et  y  furent  jusques  au  xxiui«  jour  d'avril 
ensuivant  IIIIcLXXIL 

«  Nota.  —  Le  mardi  iiiio  de  décembre  LXXI,  Pierre 
Henri,  prévost  d'Esneval,  et  le  clerc  Blanchet  de  Bauque- 
mare,  procureur  et  recepveur,  furent  sur  toux  les  lieux 
tenans  du  prieuré,  firent  arrester  et  deffendre  de  paier  lez 
deniers  deubz  pour  le  fenestrage  au  jour  de  St*  Austre- 
berte. 

€  Nota.  —  Le  dimence  ix«  jour  de  frevier  Iin<=  LXXI. 
vindrent  après  disner,  de  par  le  Roy  notre  sire,  deux  com- 


4^0 

missaires  et  ung  sergent  royal  en  Tostel  d'Esneval,  la 
damoiselle  et  m  de  ses  filles  et  plusieurs  autres  présens, 
prindrent  pocession  dudit  hostel,  de  toutes  les  rentes, 
revenues  et  appartenances  de  la  baronnie  et  de  tout  ce 
que  peut  appartenir  à  Robert  de  Dreux,  escuîer,  absent, 
après  vespres  devant  l'cglise  ;  leurent  cinq  lestres  royaulx, 
contenantes  qui  faisoient  assavoir  que  toulx  ceulx  qui 
dévoient  rentes,  arrérages,  deniers  de  fermes  d'achas, 
a  voient  ou  sa  voient  où  avoit  aucuns  meubles  et  immeubles, 
vinssent  devers  iceulx  commissaires  le  dire  ou  faire  dire, 
sur  paine  de  confiscation  de  corps  et  de  biens,  dedens 
trois  jours,  pour  cause  que  ledit  Robert  de  Dreux  et  chinq 
de  ses  enffans  soi  estoient  asentés  hors  du  royalme  et  de 
Pobeissance  du  Roy. 

€  Nota.  —  Le  mardi  ensuivant,  le  xi«  jour  dudit  mois, 
fut  crié  en  la  ville  de  Rouen,  à  son  de  tronble,  par  le  Roy 
notre  sire  que  on  bennissoit  ledit  Robert  de  Dreux  et 
tiii  de  ses  filz  hors  du  royalme  et  de  la  duché,  toutes  ses 
terres,  rentes  et  revenues,  seigneuries  et  appartenances, 
avec  toux  ses  meubles  et  immeubles,  et  là  où  ledit  seigneur 
et  ses  enffans  seroient  trouvez,  que  l'on  les  menast  au  roy 
ou  a  justice.  » 

Liste  des  prieurs  de  Sainte^Austreberte  de  Pavilly^ 
d* après  la  notice  de  Belin^  complétée  à  Faide  de  mes  notes, 

D.  Guillaume  dTervile,  1240  (1). 

D.  Robert  Cousin  ou  de  Criquetot,  1292  (2). 

D.  Guillaume  Jacob,  i385-i395  (3). 

D.  Pierre  Lambert,  1404  (4). 

(i)  Censierde  Sainte-Austreberte. 

(2)  IbiJ. 

(3)  Qualifié  dans  le  registre  de  TÉchiquier  de  Pâques  iBgS, 
fo  i65  v  «  prieur  de  l'église  de  Sainte-Austreberte,  fondée  à 
Pavilly,  sous  Tabbé  et  le  couvent  de  la  Sainte-Trinité-du-Mont- 
lès-Rouen.  »  V.  Tab.  de  Rouen,  reg.  9,  fo  i33. 

(4)  Tab^.  de  Rouen,  reg.  9,  f<>  1 19,  i33  ;  reg.  i3,  f<>  s5i. 


46 1 

D.  Maignet  Lambert,  1433. 

D.  Jean  Quiessebout  ou  Quiseboult,  12  mai  '  1452, 
i3  janvier  1478. 

D.  Jean  des  Allois,  1489-14  mai  iSoy. 

D.  Julien  Hamon,  i5i7-i52i. 

D.  Pierre  Le  Carpentier,  1 522-1 524  (i). 

D.  Franc.  Le  Carpentier,  1649  (2). 

D.  Jean  Ribault,  religieux  profèsdu  Bec-Hellouin,  abbé 
d'icelle  abbaye,  puis  abbé  de  Valmont  et  prieur  de  Pavilly 
par  la  résignation  de  François  Le  Carpentier,  en  i55o  — 
9  juillet  i55i. 

D.  Nicolas  Duport,  religieux  profès  en  l'abbaye  de  Val- 
mont,  prieur  de  Pavilly  par  la  résignation  de  Ribault,  en 
i556. 

D.  Nicole  de  Gustimesnil,  bailli  du  monastère  de  la 
Sainte-Trinité  du  Mont  Sainte-Catherine,  prieur  de 
Pavilly,  23  juillet  iSSy. 

M«  Emile  Mancenet,  chanoine  de  la  cathédrale  de 
Rouen,  curé  du  Boisguillaume,  grand  vicaire  de  Mons.  de 
Brives,  abbé  de  Sainte-Catherine,  pourvu  en  commande 
dudit  prieuré  par   le  décès  dudit  Duport,  de  l'an    i558. 

Messire  Henri  d'Escoubleau,  protonotaire  du  saint  siège, 
fils  de  Jean  marquis  de  Sourdis,  prieur  de  Pavilly  par  la 
résignation  dudit  Mancenet,  i562;  fut  depuis  abbé  de 
Sainte-Catherine  et  évéque  de  Maillezais. 

Me  Sébastien  Le  Grand,  clerc  du  diocèse  de  Sens,  prieur 
de  Pavilly   par  la  résignation  dudit  d*Escoubleau,  1 572. 

M^'  Mathieu  Le  Thuillier,  prieur  par  la  résignation 
dudit  Le  Grand,  1577. 

M«  Jean  Deschamps,  prieur  par  la  résignation  dudit  Le 
Thuillier,  1577. 

(i)  Était  en  même  temps,  en  i522,  grand  prieur  de  Tabbaye 
de  Sainte-Catherine. 

(2}  Était  en  même  temps  grand  prieur  de  Saint-Ouen  de 
Rouen. 


462 

M«  Henri  Le  Thuillier,  abbé  de  Saint-Maurice,  prieur 
de  Pavilly,  par  la  résignation  dudit  Deschamps,  1578. 

M*  François  Le  Thuillier,  prieur  par  la  résignation 
dudit  Henri  Le  Thuillier,  1 578. 

<  En  conséquence  de  toutes  les  provisions  et  résigna- 
tions en  commande  cy-dessus,  s'ensuivit  ung  long  procès 
entre  ledit  Le  Thuillier  et  Daomp  Nicole  Commère, 
Anthoine  Langlois  et  Jehan  Le  Cauchois,  tous  religieux 
de  ladicte  abbaye  de  Sainte-Catherine,  qui  avoient  obtenu 
lettres  en  court  de  Rome  en  forme  et  dévoUut  sur  les 
deffectuosités  desd.  provisions  en  commande  des  prieurs 
commendataires  sus-nommés,  lequel  procès  fut  termine 
par  arrest  donné  en  la  court  de  parlement  de  Rouen  en 
Tan  1608,  par  lequel  ledit  Le  Thuillier  fut  débouté  dudit 
prieuré,  et  ledit  Cauchois,  envoyé  en  la  pocession  d'icel- 
luy,  et  par  ainsy  ledit  prieuré,  en  ladicte  année  1608, 
retourna  en  règle  (i). 

<  Daomp  Jean  Le  Cauchois,  soubz  prieur  de  ladicte 
abbaye,  pourveu  par  lettres  de  subrogation  au  droit  dudit 
NicoUe  Commère,  fut  envoyé  en  possession,  par  arrest 
de  ladicte  cour,  d'icelluy  prieuré  audit  an  1608. 

c  Daomp  Guillaume  EUyes,  relligieux  et  omosnier  de 
ladicte  abbaye  de  Sainte-Catherine,  docteur  en  théologie, 
aumosnier  de  la  Reyne,  prieur  des  prieurés  de  Cléville, 
de  Bréval,  et  cy-devant  prieur  de  Villaines,  a  possédé 
ledit  prieuré  de  Pavilly,  au  droit  de  la  permutation  ^icte 
d'icelluy  avec  ledit  Le  Cauchois  pour  l'abbaye  de  Lan- 
vault  en  Basse-Bretaigne,  de  Tordre  de  Cisteaux,  où  ledit 
Le  Cauchois  est  décédé,  après  avoir  esté  bénit  dans  Tcglise 
de  Sain t-Jullien-lès- Rouen  par  messire  Charles  de  Balzac, 
évesque  de  Noyon  et  abbé  de  Saint-Georges-de-Boscher- 
ville,  en  Tannée  161 5. 

(i)  Jean  Le  Cauchois,  religieux  de  Sainte-Catherine,  prend  le 
titre  de  prieur  de  Pavilly  dans  des  actes  du  S  mai  i  SgS  et  18  juin 
1597. 


•463 

«  Messire  Nicollas  de  Hacqueville,  seigneur  de  Pon- 
ponne,  abbé  de  ladicte  abbaye  de  Vallemont,  par  permu- 
tation avec  ledit  EUyes  d'icelle  abbaye  avec  ledit  prieuré 
de  Pavilly  et  ceulx  de  Cléville  et  de  Bréval,  celuy  de  Clé- 
ville,  dépendant  de  Tabbaye  de  Saint-Etienne  de  Caen,  et 
Bréval  du  Bec-Hellouin,  en  l'année  1622. 

€  Daompt  François  Louchart,  religieux,  chantre  de  la- 
dicte abbaye  par  provision /y/^wo^i/r^  du  prieur  et  religieux 
dUcelle  abbaye,  ledit  prieuré  ayant  vacqué  par  le  dccedz 
dudit  sr  de  Hacqueville,  et  par  ce  moien  est  rentré  en 
reigle  en  Tan  1648. 

c  Daomp  Hilaire  Belin,  grand  prieur  et  bailly  de  ladicte 
abbaye  de  Sainte-Catherine  par  provision  pleno  jure  des 
religieux  de  ladite  abbaye  capitulairemeni  assemblés,  ledit 
prieuré  vacant  par  le  decedz  dudit  Louchart,  le  xx^  dé- 
cembre 1661  (i). 

«  Ledict  Belin  a  pris  l'habit  de  religieux  de  l'ordre  de  S. 
Benoist  en  ladicte  abbayede  Ste-Catherine  le  4e  may  1626; 
il  a  rendu  ses  vœux  le  22  mars  1629,  et  fut  pourvu  à  l'of- 
fice de  bailly  le  20  febvrier  i636,  et  esleu  grand  prieur  le 
17  juillet  1647,  laquelle  charge  il  exerce  encore  main- 
tenant en  l'année  1647.  Il  a  été  aussi  prieur  des  prieurés  de 
S. -Nicolas  de  Caudecotte  près  Dieppe  et  de  S.-Georges  de 
Mottelles  au  diocèse  d'Évreux^  deppendant  de  Tabbaye  de 
St- Pierre  de  Chartres.  Il  a  esté  vicaire-général  de  messire 
Jean  de  Croisilles  et  des  abbayes  de  St-Riez  et  de  Jumièges.  i 

Il  eut  pour  successeur  Jacques  de  Gaugy,  religieux  de 
Sainte- Catherine,  prieur  de  Remalard  et  prieur  de  Pa- 
villy, 1674- 1686,  décédé  le  18  avril  1694. 

Antoine  de  Gaugi,  bénédictin  de  Troam,  prétendant  au 
prieuré  de  Pavilly  par  droit  de  permutation. 

Dom  Jean  Loir^  religieux  de  Cormeilles,  prieur  de  Pa- 
villy de  1701  à  1705. 

(i)  Adrien  Lepelletier,  religieux  de  Sainte-Catherine,  prend  le 
titre  de  prieur,  dans  un  acte  de  1641. 


464 

Dom  Jean  Edeline,  bailli  prieur  de  Cormeilles,  pourvu 
du  prieuré  de  Pavilly,  par  Claude  Le  Roux,  abbé  de 
Bouge,  au  nom  et  comme  tuteur  et  gardien  noble  du  s' 
d'Esneval,  171 3. 

Charles  Le  Tellier  de  Vaulibert,  prieur  de  Cormeilles, 
prieur  de  Pavilly,  1717-1719  (i). 

Estât  du  bien  et  revenu  du  prieuré  de  Ste-Austreberte  de 

Pavilly. 

€  Ledict  prieuré  consiste  en  unne  grande  chapelle  dédiée 
à  la  bienheureuse  vierge  Marie  et  à  SteAustreberte,  dans 
le  cœur  de  laquelle  il  y  a  unne  contretabie  de  pierre  des 
carrières  de  Caen,  dans  laquelle  il  y  a  ung  tableau  de 
TAnnonciation,  et  a  esté  icelle  contretabie  faict  construire 
de  neuf  par  ledict  Belin,  prieur,  en  la  présente  année 
1667;  et  dans  icelle  chapelle,  est  unne  autre  petite  cha- 
pelle desdiée  au  prince  des  apostres  S.  Pierre,  dans  laquelle 
est  le  tombeau  de  ladicte  Ste  Austreberte,  lequel  est  vénéré 
de  tout  le  peuple  du  pays  et  d'une  grande  quantité  de  pè- 
lerins; et  au  bout  d'icelle  chapelle,  dans  le  jardin  du 
sr  prieur,  se  veoit  unne  fonteyne  de  Teau  de  laquelle  les 
peslerins  en  boyvent  par  grande  debvotion.  Au  costé  de 
ladicte  chapelle  est  le  manoir  du  prieur,  consistant  en 
unne  bassecourt,  avec  maison,  où  il  y  a  salle,  cuysine, 
seulle,  plusieurs  chambres  et  antichambre,  guernier  et 
caves.  Au  dessoubz  et  vis-à-vis  de  lad.  maison,  de  l'autre 
costé  de  la  cour,  vers  le  Septentrion,  est  unne  autre  lon- 
gueur de  bastiment  qui  se  compose  :  une  chambre,  seulle 
et  caveau,  qui  est  Tappartement  que  le  prieur  destine  pour 
son  chappelain,  au  costé  duquel  sont  les  escuries,  avec  unne 
remise  de  carrosse,  et,  au  bout  de  ladict  court,  est  unne 

(i)  Jean  Chabert,  religieux  de  Saint- Victor-1' Abbaye,  nonnmé 
au  prieuré  par  les  Chartreux,  s'était  démis  le  dernier  juillet 
1716. 


465 

vollièrc  garnie  de  pigeons  au  costc  de  laquelle  est  ung  vieil 
bastiment. 

Et  devant  la  maison  dudit  manoir  est  ung  jardin  planté 
de  nains,  avec  deulx  parterres  à  lad.  fonteyne  de  Ste-Aus- 
treberte,  ledit  jardin  contenant  viron  demye  acre,  i 

M.  P.  Baudry  signale  une  vie  manuscrite  de  sainte 
Austreberte  à  la  bibliothèque  de  Rouen. 

M.  Pabbé  Tougard  ajoute  que  le  crâne  de  la  sainte 
est  précieusement  conservé  dans  Péglise  Saint-Vivien, 
oti  il  aura  été  porté  après  Pentière  destruction  de 
Tabbaye  de  Sainte-Catherine.  Il  rappelle  que  Téglise 
Saint-Pierre,  fermée  à  la  Révolution,  fut  rendue  au 
culte  en  1860,  grâce  au  zèle  d'un  prêtre,  M.  Tabbé 
Baudet,  aujourd'hui  doyen  de  Clères.  Il  a  publié  à  cette 
occasion  une  petite  Vie  de  Sainte  Austreberte  et 
Notice  sur  son  monastère;  72  pp.  in- 18,  avec  une 
vue  de  la  chapelle. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  moins  le  quart. 


Le  Secrétaire  intérimaire, 
A.  Tougard. 


466 


SÉANCE  DU  3o  DÉCEMBRE  1884 


La  séance  ouvre  à  deux  heures,  sous  la  présidence  de 
M.  Ch.  de  Beaurepaire. 

Sont  présents  :  MM.  Adeline,  Baudry,  le  marquis 
de  Blosseville,  Bouquet,  Gouellain,  d'Iquelon,  Lor- 
mier,  Tabbé  Loth,  Maillet  du  Boullay,  de  Merval, 
Pelay,  de  la  Serre,  Tabbé  Tougard,  et  le  comte 
d^Estaintot,  secrétaire. 

M,  de  Vesly  s'est  fait  excuser. 

La  correspondance  imprimée  comprend  : 
Compte-rendu  de  la  Commission  impériale  de 
Saint-Pétersbourg  pour  Tannée  1881,  avec  atlas;  — 
Société  archéologique  de  Bordeaux,  t.  VI 1 1  ; — Annual 
Report  of  the  Smitsonian  institution,  1882;  —  Aca- 
démie des  ScienceSy  Belles-Lettres  et  Arts  de  Besan- 
çon, i883; — Société  académique  de  V arrondissement 
de  Boulogne-sur-Mer  (2«  et  3*  trimestres  1884);  — 
Société  d'histoire,  d'archéologie  et  de  lettres  et 
arts  de  r arrondissement  de  Beaune,  année  i883;  — 
Bulletin  des  procès-verbaux  de  la  Société  d'Emu- 
lation d'Abbeville,  années  1881,  1882,  i883;  — 
Bulletin  du  Comité  des  travaux  historiques  et  scien-- 
tifiqueSy  section  d histoire  et  de  philologie,  année 
1 884,  n®  2  ;  — Mémoires  de  la  Société  d'' Emulation  du 
Doubs,  188  3;  —  Société  d'histoire,  d'archéologie  et 
de  littérature  de  V arrondissement  de  Beaune,  1882  ; 
—  Comité  archéologique  de  Senlis,  années  1882- 
i883;  —  Bulletin  de  la  Société  des  Antiquaires  de 
rOuesty  2«  trimestre  1884. 

M.  le  Président  donne  ensuite  connaissance  d'une 
circulaire  de  la  Société  nationale  des  Antiquaires  de 


467 

France  contenant  communication  d^un  vœu  émis  par 
cette  société  dans  sa  séance  du  9  juillet  dernier^  et 
invitation  à  en  adopter  les  conclusions. 

Ce  vœu  est  ainsi  conçu  : 

«  La  Société  des  antiquaires  de  France^  reconnais- 
sant que  les  dispositions  prises  jusqu^à  présent  pour  la 
conservation  des  monuments  de  Tantiquité,  particu- 
lièrement dans  l'Afrique  française,  sont  restées  ineffi- 
caces, parce  qu'elles  manquaient  d^une  sanction 
légale,  émet  le  vœu  que  le  gouvernement  prenne 
auprès  du  Parlement  l'initiative  d'un  projet  de  loi 
destiné  à  assurer  la  protection  des  monuments  anciens 
dans  toute  l'étendue  du  territoire  national  et  des  pos- 
sessions françaises,  et  charge  son  bureau  de  trans- 
mettre l'expression  de  ce  vœu  à  M.  le  Ministre  de 
l'Instruction  publique  et  des  Beaux- Arts. 

«  Elle  décide,  en  outre,  qu'un  pressant  appel  sera 
adressé  aux  Sociétés  savantes  en  vue  d'obtenir  leur 
adhésion.  » 

Un  débat  s'engage  sur  la  solution  à  donner  à  cette 
proposition. 

Un  certain  nombre  de  membres,  tout  en  étant  très 
sympathiques  au  but  que  poursuit  la  Société  des  Anti- 
quaires de  France,  trouve  que  des  dispositions  légis- 
latives seront  difficilement  applicables  à  la  propriété 
privée,  et  ne  pourraient  guère  atteindre,  en  Afrique, 
que  les  concessions  émanant  de  l'Etat,  dans  lesquelles 
une  réserve  pourrait  utilement  être  introduite. 

La  Commission  consultée  donne  son  adhésion  au 
vœu  émis  par  la  Société  des  Antiquaires  de  France, 
sous  la  réserve  des  droits  de  la  propriété  privée. 

M.  Dutuit  fait  hommage  à  la  Commission  pour  son 
portefeuille  d'un  dessin  et  de  deux  grandes  aquarelles 


46g 

signées  Rozieo  représentant  les  deux  faces  du  jubé  de 
la  cathédrale  récemment  détruit. 

La  Commission,  très  reconnaissante  de  cette  atten- 
tion de  notre  savant  collègue^  prie  M.  le  Président  de 
lui  transmettre  Pexpression  de  ses  remerciements  em- 
pressés. 

Lettre  de  M,  le  Préfet  relative  au  jubé.  —  M.  le 
Vice- Président  a  reçu  de  M.  le  Préfet  une  lettre  ainsi 
conçue  : 

Rouen,  le  26  décembre  1884. 

Monsieur  le  Vice- Président, 

Vous  m'avez  communiqué  le  vœu  cmis  le  22  novembre 
dernier  par  la  Commission  départementale  des  Antiquités 
de  la  Seine-Inférieure,  demandant  la  conservation  du  jubé 
de  la  Cathédrale  de  Rouen  dans  son  intégrité  et  dans  cha- 
cune de  ses  parties. 

J'ai  l'honneur  de  vous  faire  connaître  qu'il  résulte  des 
renseignements  que  vient  de  m'adresser  M.  Sauvageot, 
architecte  diocésain,  que  ce  vœu  sera  en  partie  réalisé  par 
le  transfert  déjà  opéré  des  deux  autels  complets  dans  les 
chapelles  de  transepts  de  la  (Cathédrale,  par  l'installation 
du  christ  dans  une  autre  chapelle  et  par  l'emploi  projeté 
de  la  grille  provenant  du  jubé  pour  servir  de  clôture  à  la 
chapelle  de  la  Vierge  du  même  édifice;  ce  qui  assurera  la 
consécration  des  parties  essentielles  dudit  jubé. 

Quant  aux  parties  de  Tédicule  édifiées  en  plâtre  sur 
galandage,  en  charpente  avariée,  c'est-à-dire  les  deux 
escaliers  latéraux  et  le  plafond,  la  nature  de  leur  cons- 
truction n'a  pas  permis  de  les  conserver  dans  leur  intc- 
grité  lors  du  démontage. 

Je  vous  prie  de  porter  cette  communication  à  la  con- 
naissance de  la  Commission,  lors  de  sa  prochaine  réunion. 


469 

Agréez,  Monsieur  le  Vice- Président,  l'assurance  de  ma 
considération  la  plus  distinguée. 

Pour  le  Préfet  de  la  Seine-Inférieure  : 
Le  Secrétaire^Général  délégué^ 
Beverini-Vico. 

Un  membre  observe  qu'aucun  renseignement  h*est 
donné  sur  la  destruction  des  parties  essentielles  du 
jubé.  La  Commission  persiste  dans  son  vote  antérieur. 

Fouilles  de  Saint'Ouen.  —  M.  d'Estaintot  obtient 
ensuite  la  parole  pour  communiquer  à  la  Commis- 
sion les  résultats  des  constatations  faites  à  Toccasion 
des  fouilles  exécutées  en  ce  moment  dans  la  grande 
nef  de  Téglise  Saint-Ouen,  pour  la  construction  d'un 
calorifère. 

Il  indique  à  la  Commission  que  dès  les  premières 
découvenes  il  s'est  mis,  de  concert  avec  notre  col- 
lègue, M.  de  Vesly,  qui  a  bien  voulu  consacrer  à  cette 
œuvre  ses  connaissances  spéciales  d'architecte  et  son 
talent  de  dessinateur,  en  mesure  de  donner  à  ces  cons- 
tatations un  degré  aussi  absolu  que  possible  de  pré- 
cision. . 

Cinq  plans  successifs  ont  été  levés  aux  niveaux  di- 
vers de  la  fouille,  de  i  à  5  mètres,  plans  sur  lesquels 
remplacement  des  sarcophages  est  indiqué,' et  ces  di- 
vers sarcophages  sont  munis  d'un  numéro  d'ordre 
qui  permet  de  spécialiser  les  objets  intéressants  décou- 
verts dans  chacun  d'eux. 

Des  coupes  transversales  ont  été  également  dressées 
par  les  soins  de  l'entrepreneur,  M.  Requîer,  et  de  son 
contre-maître  Louis.,  qui  a  apporté  un  soin  vigilant  à 
la  surveillance  des  fouilles,  et  les  objets  ont  été  immé- 


470 

diatement  recueillis  et  conservés  à  la  sacristie  par  les 
soins  de  la  fabrique. 

A  cet  égard,  M.  dTstaintot  est  heureux  de  faire  part 
à  la  Commission  des  intentions  du  Conseil  de  fabrique, 
qui  a  la  pensée  d^offrir  au  département,  pour  son  mu- 
sée des  antiquités,  tout  ce  qui  aura  été  trouvé  d'inté- 
ressant. Il  sera  heureux  de  reconnaître  ainsi  Tem- 
pressement  avec  lequel  le  département  s'est  toujours 
associé  aux  travaux  de  restauration  de  Téglise. 

M.  d^Estaintot  ajoute  que,  pour  donner  aux  plans 
dont  il  vient  de  parler  tout  leur  intérêt,  il  a  l'intention 
de  rédiger  avec  M.  de  Vesly^  et  à  l'aide  des  notes  que 
Tun  et  l'autre  ont  journellement  prises,  une  sorte  de 
procès- verbal  racontant  les  constatations  faites  depuis 
le  commencement  des  travaux. 

Aujourd'hui,  il  se  propose  seulement  d'esquisser  à 
grands  traits  Pimpression  générale  qui  se  dégage  des 
fouilles,  et  d'indiquer  les  objets  les  plus  précieux 
qu'on  y  a  rencontrés.  Il  espère  qu'à  Tissue  de  la  séance 
la  Commission  voudra  bien  se  transportera  la  sacristie 
oti  il  a  fait  déposer  les  différents  objets  en  vue  de  sa 
visite. 

Ce  qui  a  frappé  dans  les  fouilles,  c'est,  d'une  pan, 
la  grande  quantité  de  sarcophages  retrouvés  dans  la 
partie  de  la  fouille  qui  commence  à  peu  près  vis-à- 
vis  la  chaire  et  s'étend  vers  l'entrée  de  la  nef,  et  sur- 
tout dans  la  profondeur  de  2  à  4  mètres.  Tous,  à  cette 
profondeur,  paraissent  antérieurs  à  la  période  capé- 
tienne, et  les  couches  inférieures  semblent  incontesta- 
blement remonter  à  la  période  mérovingienne. 

Dans  la  profondeur  de  2  mètres,  un  très  petit 
nombre  d'inhumations,  mais  quatre  d'une  impor- 
tance considérable,  puisque  ce   sont  les  tombes  de 


47' 

quatre  abbés,  dont  on  avait  perdu  la  trace  au  dix- 
septième  siècle,  et  que,  grâce  à  une  inscription  décou- 
verte l'un  d^eux  a  pu  être  daté  et  a  permis  de  constater 
qu'il  abritait  les  restes  de  D.  Rainfroy,  que  les  annales 
de  Tabbaye  font  mourir  en  i  i5o.  (Voir  p.  \j  de  ce  vol.) 

Dans  la  profondeur  de  2  à  4  m.  tous  les  sarcophages 
en  pierre  d'un  seul  morceau,  à  une  seule  exception 
près,  plus  étroits  aux  pieds  qu^à  la  tête,  au  couvercle 
plus  ou  moins  tectiforme,  provenant  des  carrières  de 
Vergelé,  constataient  la  persistance  pendant  plusieurs 
siècles  d^un  même  mode  d'inhumation. 

Une  observation  assez  curieuse,  c'est  qu'en  1870, 
lors  des  travaux  de  nivellements  exécutés  dans  le 
jardin  deSaint-Ouen,  notre  regretté  et  savant  collègue 
M.  l'abbé  Cochet,  a  surveillé  des  fouilles  analogues 
exécutées  aux  environs  du  portail  des  Marmousets 
(on  trouvera  son  rapport  dans  le  t.  Il  du  Bulletin  de  la 
Commission  à  la  page  216);  et  dans  ces  fouilles,  il  a 
rencontré,  à  une  profondeur  similaire,  la  même  na- 
ture de  tombeaux. 

Comme  dans  la  fouille  actuelle,  c'est  de  2'°  80  à 
3"  40  que  l'on  rencontre  les  cercueils  mérovingiens, 
et  comme  il  Tindique  lui-même,  ils  sont  agglomérés 
et  entassés  les  uns  contre  les  autres. 

Ce  serait  une  question  intéressante  à  étudier  que 
celle  de  savoir  si  les  sarcophages  nouvellement  ren- 
contrés avaient  été  déposés  à  l'origine  dans  Pintérieur 
d'une  église  ou  dans  le  cimetière  qui  Tavoisinait. 

M.  d^Estaintoc  estime  qu'il  serait  assez  difficile  de 
résoudre  la  question  ;  il  est  également  utile  de  consta- 
ter que  les  fondations  de  la  basse  nef  au  nord  paraissent 
antérieuresL  au  dépôt  des  tombeaux,  qui,  de  ce  côté, 
semblent  juxtaposés;  qu'au  contraire,  les  fondations 


472 

de  la  nef,  du  côté  du  midi,  sont  postérieures  aux  inhu- 
mations; que,  de  ce  côté,  les  tombeaux  sont  boule- 
versés; quelques-uns  sont  éventrés  et  contiennent  des 
ossements  accumulés  après  coup;  toutefois,  il  n*oserait 
se  prononcer,  les  fondations  du  côté  du  midi  ayant 
été  remaniées  par  la  construction  de  sortes  d'éperons 
enveloppant  des  piles  intermédiaires  aux  piliers 
actuels,  sur  lesquels  il  se  propose  d'appeler  l'attention 
de  la  Commission. 

M.  d^Estaintot  ajoute  que,  dans  les  tombeaux,  on 
a  trouvé  un  grand  nombre  d^armes,  mais  dans  un  état 
d^oxydation  qui  les  rend  à  peine  reconnaissables^  sauf 
un  magnifique  fauchard,  dessiné  avec  le  plus  grand 
soin  par  M.  de  Vesly,  une  hache  d'armes  et  une  sorte 
de  faucille. 

En  revanche,  une  collection  fort  intéressante  de 
boucles  en  bronze,  ovales  ou  carrées,  trois  magnifiques 
plaques  de  ceinturon,  trois  styles  dont  deux  en  argent, 
l'un  desquels,  pièce  hors  ligne,  est  revêtu  en  partie 
d'un  fourreau  d^or  délicatement  fouillé,  et  orné  au 
centre  d'un  renflement  avec  une  croix  gravée  en  creux, 
deux  magnifiques  fibules  en  argent  et  or,  avec  incrus- 
tations de  pierres  de  couleur,  des  débris  fort  curieux  de 
galon  (Tôt,  trois  ou  quatre  monnaies,  dont  une  de 
Probus,  et  une  délicieuse  fiole  en  verre  à  anse,  tirée 
intacte  d^un  tombeau  brisé. 

Il  note  encore  la  présence  de  deux  œufs  dans  une 
tombe  d'enfant. 

Tous  ces  objets  passeront  sous  les  yeux  de  la  Com- 
mission, ainsi  que  Tinscription  de  Tabbé  Rainfroy, 
et  celle  que  Ton  a  trouvée  dans  le  tombeau  d'un  moine 
inhumé  au  xi«  siècle,  Hugues  Tarchidiacre. 

Avant  de  terminer,  M.  d'Estaintot  insiste  sur  Tim^ 


473 

portance  des  fouilles  opérées  par  la  canalisation  des 
bouches  de  chaleur,  qui  ont  permis  de  constater  entre 
les  piliers  actuels  la  trace  d'anciennes  piles  offrant,  du 
côté  des  nefs,  un  pilier  isolé;  du  côté  des  arcatures^  un 
double  pilier  :  piles  évidemment  contemporaines  de 
l'église  du  xii®  siècle,  mais  peut-être  de  celle  du  xi«, 
peut-être  même  de  Téglise  primitive;  l'embase  des  pi- 
liers, la  proportion  des  colonnes,  et  même  trois  ou 
quatre  anciens  chapiteaux  retrouvés  dans  les  fonda- 
tions, permettraient  de  retrouver  la  physionomie  de 
cette  église  antérieure,  qui,  on  en  a  maintenant  la 
preuve,  recouvrait  l'espace  occupé  par  l'église  actuelle, 
au  moins  jusqu^au  petit  portail  latéral  du  midi. 

On  a  également  retrouvé  l'emplacement  du  mur 
extérieur  du  bas  côté  du  midi. 

M.  d'Estaintot  appelle  encore  Tattention  de  la  Com- 
mission sur  les  traces  d'incendie  retrouvées  dans  les 
fouilles,  à  des  hauteurs  variées,  qui  correspondent 
évidemment  à  des  époques  différentes. 

Le  sol  de  Péglise  antérieure  était  de  o^  90  en  contre- 
bas du  sol  actuel  de  Tédifice.  A  cette  profondeur 
se  retrouvent  des  fragments  d^un  ancien  pavage  en 
pavés  émaillés  du  xiii«  siècle,  rapprochés  sans  soin, 
mais  dont  quelques-uns  offrent  des  spécimens  inté- 
ressants, entr'autres  celui  qui  représente  un  moine  les 
bras  élevés  dans  une  arcature  trilobée;  sa  forme  dé- 
montre qu^il  se  rattachait  à  une  rosace  dont  les  dimen- 
sions pourraient  être  déterminées. 

M.  d'Estaintot  offre  en  terminante  la  Commission 
une  photographie  de  la  vue  des  tombeaux  des  quatre 
abbés  et  une  photographie  de  Pinscription  de  Fabbé 
Rainfroy. 

M.  le  Président  lui  exprime  tous  les  remerciements 

3i 


474 

de  la  G)mmission  pour  son  intéressante  communica- 
tion. 

M.  Bouquet,  à  propos  des  deux  œufs  retrouvés  dans 
le  tombeau  d'enfants,  communique  la  note  suivante  : 

Lœuf  est  un  symbole  dans  les  sépultures.  —  Chez  les 
premiers  chrétiens  Tœuf  était  un  symbole,  et  on  a  trouvé 
dans  le  tombeau  d'un  martyr  et  parmi  les  reliques  de 
quelques  saints  des  œufs  de  marbre  tout  semblables  à  ceux 
des  poules.  On  a  trouvé  aussi  des  coquilles  d'œufs  natu- 
rels dans  les  loculi  des  martyrs.  Cest  que  l'œuf  était  re- 
gardé, parmi  les  premiers  chrétiens,  comme  un  symbole 
de  régénération^  et  en  particulier  de  la  résurrection  des 
corps.  De  là  le  pieux  usage  de  manger  Tœuf  béni,  avant 
toute  autre  nourriture,  le  jour  de  la  Pâque  de  résurrecîiony 
appelée  aussi,  pour  le  même  motif,  Pâque  de  Vœuf. 

S.  Augustin  considérait  Tœuf  comme  un  symbole  d'es- 
pérance. Dans  un  de  ses  sermons,  il  dit  :  «  Restât  spes^ 
quae,  quantum  mihi  videtur,  ovo  comparatur.  Spes  enim 
nondum  pervenit  ad  rem;  et  ovum  est  aliquid,  sed  non- 
dum  est  puUus.  •  L'abbé  Martigny,  auquel  ces  détails  sont 
empruntés,  conclut  justement  en  ces  termes  :  €  L'œuf, 
dans  les  sépultures  chrétiennes,  était  donc  l'un  des  innom- 
blables  symboles  de  résurrection  au  moyen  desquels  nos 
pères  dans  la  foi  échappaient  à  l'horreur  que  la  mort 
inspire  à  ceux  qui  n'ont  pas  d'espérance.  »  (Dictionnaire 
des  Antiquités  chrétiennes^  p.  470.) 

La  Commission  décide  que  le  procès- ver  bal  que 
M.  d^Estaintot  va  dresser  avec  M.  de  Vesly  sera  annexé 
au  procès-verbal  de  la  présente  séance. 

M.  le  Président  lève  la  séance  à  quatre  heures  et  les 
membres  se  rendent  à  la  sacristie  de  Saint-Ouen,  sui- 
vant le  désir  exprimé  par  leur  collègue. 

Le  Secrétaire, 
Comte  d'Estaintot. 


475 


Procès-verbal  relatif  aux  fouilles  de  Saint-Ouen,  dressé 
par  MM.  d'Estaintot  et  de  Veslx. 


La  fabrique  de  Téglise  Samt-Ouen  de  Rouen  ayant 
décidé  Texécution  d'un  grand  calorifère  souterrain,  placé 
au  centre  de  la  grande  nef  de  Tancienne  abbatiale,  entre 
le  second  et  le  cinquième  piliers  â  partir  du  transept,  les 
soussignés,  comte  d'Estaintot,  correspondant  du  ministère 
de  l'Instruction  publique  pour  les  travaux  historiques, 
secrétaire  de  la  Commission  départementale  des  Antiquités 
de  la  Seine- Inférieure,  et  de  Vesly,  architecte,  professeur 
à  r école  des  Beaux- Arts  et  membre  de  la  même  Commis- 
sion, nous  sommes  réunis  pour  tenir  note,  jour  par  jour, 
des  découvertes  intéressantes  auxquelles  ces  fouilles  pour- 
raient donner  lieu. 


Le  8  décembre,  M.  de  Vesly,  en  présence  de  M.  l'abbé 
Biard,  vicaire  de  la  paroisse,  et  de  M.  G.  Prévost,  archéo> 
logue,  demeurant  à  Évreux,  prend  les  dimensions  d'un 
cercueil  d'enÊmt  et  d'un  cercueil  d'adulte,  que  le  plan 
joint  au  présent  journal  désigne  sous  les  nos  5  et  6. 

Tous  deux  sont  en  pierre  de  Vergelé.  Le  cercueil  d'en- 
fant (n<>  5)  contient  encore  quelques  traces  de  vêtement 
ou  plutôt  d'orfroi. 

Les  sarcophages  nos  21  et  22,  également  en  pierre  de 
Vergelé,  contiennent  des  ossements  dont  la  présence  ne 
peut  être  expliquée  qu'en  supposant  des  inhumations 
multiples. 

La  même  observation  s'applique  au  tombeau  en  maçon- 
nerie no  7,  où  se  rencontrent  quatre  fémurs. 

Le  même  jour,  on  constate  la  présence  dans  les  débris 


476 

provenus  des  fouilles,  de  fragments  assez  nombreux  de 
carrelages  émaillés. 

Ces  carrelages  paraissent  se  rattacher  à  un  pavage  dont 
l'existence  est  facile  à  reconnaître  encore  à  o^o  en  con- 
trebas du  dallage  actuel,  au-dessous  du  banc  d'œuvre 
situé  en  &ce  de  la  chaire. 

Deux  de  ces  pavés  méritent  particulièrement  de  fixer 
Tattention  :  l'un  d'eux,  ayant  comme  dimensions  o,io5  à 
la  partie  supérieure,  0,084  à  la  partie  inférieure  et  0,168 
de  longueur,  représente  un  personnage  monastique  les 
bras  levés  vers  le  ciel,  sous  une  arcature  trilobée. 

Il  s'enlève  en  jaune  sur  un  fond  brun. 

Un  autre  pavé,  mesurant  comme  dimensions  0,12  en 
carré,  représente  une  fleur  de  lys. 

Le  même  jour,  les  fouilles  ont  été  visitées  par  S.  G. 
Mgr  Thomas,  archevêque  de  Rouen.  MM.  Gouellain,  Pré- 
vost et  de  Vesly  sont  présents. 

Les  fouilles  ont  complètement  dégagé  quatre  cercueils 
en  pierre,  placés  parallèlement  à  la  hauteur  de  la  chaire, 
les  pieds  tournés  vers  l'autel. 

Mardi  g  décembre.  —  En  présence  de  M.  le  curé  de 
Saint-Ouen,  de  M.  de  Beaurepaire,  président  de  la  Com- 
mission départementale  des  antiquités,  de  MM.  l'abbé 
Loth,  Gouellain,  d'Estaintot  et  de  Vesly,  membres  de  la 
même  Commission,  il  est  procédé  à  l'ouverture  des  quatre 
sarcophages  de  pierre  placés  sur  la  même  ligne,  portant 
sur  le  plan  les  nos  i,  2,  3,  4. 

Le  no  I  est  du  côté  du  midi. 

On  commence  par  le  n<>  4,  du  côté  du  nord. 

Le  cercueil  est  en  pierre  de  Vergelé.  Les  dimensions 
sont  0,47  de  largeur  extérieure,  aux  pieds  ;  o,55  à  la  tête; 
longueur  2™  10.  Le  couvercle  est  tectiforme  ;  on  y  trouve 
des  ossements,  quelques  traces  de  vêtement  de  couleur 
brune,  qui  tombent  en  poussière  dès  qu'on  les  touche  ;  la 
semelle  des  sandales  en  cuir  est  bien  conservée  ;  un  bâton 


477 

en  bois  est  placé  le  long  des  ossements,  à  leur  droite  ;  La 
tète  du  mort,  dont  il  ne  subsiste  que  des  débris  informes, 
reposait  sur  un  lit  de  sable. 

Le  cercueil  n9  3  est  en  pierre  dure,  pierre  de  Cau- 
mont  ou  pierre  de  Vernon,  à  couvercle  plat  ;  ses  dimen- 
sionsy  un  peu  supérieures  à  celles  du  cercueil  précédent, 
sont  :  longueur  extérieure,  2,3o;  largeur  extérieure,  à  la 
tête,  0,70;  largeur  extérieure,  aux  pieds,  0,62;  sur 
la  droite  du  cercueil,  la  pierre  est  ébréchée  et  effritée  ; 
les  ossements  sont  en  petite  quantité  et  désagrégés 
par  le  temps  ;  les  vêtements  y  ont  superposé  une  lé- 
gère couche  de  couleur  brune.  A  la  droite  du  défunt  se 
retrouve  un  bâton  de  bois  en  partie  rongé,  comme  le  pré- 
cédent, par  l'humidité,  et  dont  la  contexture,  excessive- 
ment poreuse,  semble  rappeler  celle  du  tilleul  ;  les  os  du 
crâne  sont  à  peu  près  complètement  disparus.  Mais  à  la 
tête  du  cercueil  on  retrouve  une  plaque  en  plomb,  longue 
de  o"*320,  haute  de  o"i55,  offrant  neuf  lignes  divisées  par 
un  trait  creux,  contenant  l'inscription  suivante,  tracée  à 
la  pointe,  en  caractères  offrant  un  mélange  de  majuscules 
romaines,  de  minuscules,  de  cursives  et  de  lettres  on- 
ciales. 

Une  partie  de  l'inscription  se  trouve  rongée  par  la  for- 
mation de  sels  de  plomb  que  semble  avoir  provoqués  le 
contact  de  la  boîte  crânienne. 

Voici  ce  qu'il  a  été  permis  d'en  lire  : 

j-  HIC  REQVIESCIT  PIE  MEMORIE  DO 
NNVS  RINFREDVS  MONCVS  ET  abbs  HVJV 
S  LOCI  QVI  ECCLESIAM  ISTAM  POST 
COMBVSTIONEM   ,  .ESTAVIT  MV 

RO  CINSIT  ET ET  ALIIS 

BONIS  DITAVIT 


^  ' 


478 

Le  cercueil  no  2  est  en  pierre  tendre  ;  Tentrepreneur, 
M.  Requier,  croit  qu'il  provient  des  carrières  de  Beaumont 
(Oise)  ;  la  forme  du  cercueil  légèrement  arrondie  à  la  tête 
a  été  constatée.  Son  couvercle,  de  forme  plate,  déborde  de 
omo5  de  chaque  côté. 

Le  cercueil  n<>  1  est  ouvert  le  dernier  ;  il  est  en  pierre 
dite  roche  de  Saint- Maximin.  Le  couvercle  fragmenté  est 
légèrement  bombé. 

A  l'intérieur  il  récèle  des  ossements  ;  la  forme  des  vêle- 
ments est  par&itement  conservée  ;  ils  forment  surtout  à 
la  hauteur  de  la  hanche  et  du  fémur  gauche  une  série  de 
plis  caractéristiques,  indiquant  que  le  défunt  a  été  inhume 
avec  tes  vêtements  abbatiaux  ;  un  galon  décoré  d'un  léger 
tissu  d*or  Pagrémentait  ;  malheureusement  toutes  les  par- 
celles de  ces  différentes  couches  de  vêtements,  qui  tous  ont 
la  couleur  brune  remarquée  déjà  dans  les  tombeaux  pré- 
cédents, tombent  en  poussière  dès  qu'on  y  porte  la  main. 

A  la  droite  du  défunt  est  également  placé  le  bâton  ab- 
batial en  bois,  dont  il  ne  reste  que  des  fragments,  à  ses 
pieds,  les  semelles  en  cuir  de  ses  sandales  ;  mais  dans  au- 
cun d'eux  ne  se  retrouvent  de  fragments  de  vases,  de  mon- 
naies, ni  de  bijoux. 

A  10  heures  et  demie,  l'exploration  est  terminée.  Tous 
les  couvercles  de  ces  sarcophages  n'ont  pu  être  enlevés 
que  par  fragments. 

Nous  mesurons  les  dimensions  d'un  beau  sarcophage,  à 
entaille  pour  la  tête,  et  en  pierre  dure,  qui  porte  sur  le 
plan  le  n»  8.  Il  mesure  2,55  de  long  ;  0,90  à  la  tète,  o,55 
aux  pieds.  Il  a  été  trouvé  vide  et  sans  couvercle,  à  côté  du 
caveau  cimenté,  dont  la  situation  est  accusée  sur  le  même 
plan.  Ce  caveau  cimenté,  dont  les  dimensions  sont  de  1,40 
sur  I  mètre,  avec  une  profondeur  de  plus  de  2  mètres,  pa- 
raît formé  à  l'aide  d'un  revêtement  en  plâtre  appliqué  sur 
la  paroi  des  sarcophages  contigus. 

On  retrouve  dans  les  fouilles,  aux  environs,  des  frag- 
ments de  moulures  en  plâtre,  archivoltes  et  colonnettcs. 


479 

paraissant  appartenir  à  la  période  ogivale  primitive  et  dé- 
corées de  peintures  représentant  des  rinceaux  tous  gris  et 
noirs. 

Ces  moulures  sont  mises  de  côté. 

Il  en  est  de  même  de  fragments  en  pierre  revêtus  d'une 
sorte  de  stuc  coloré  en  rouge. 

On  trouve  également  quelques  fragments  de  dallage. 

Constaté  sur  les  .fouilles  la  présence  de  MM.  Pabbé  Loth 
et  P.  Baudry,  membres  de  la  Commission. 

Mercredi  lo  décembre,  —  Nous  faisons  procéder  à 
l'ouverture  de  deux  sarcophages,  le  premier  de  forme  rec- 
tangulaire, en  pierre  deVergelé  (no du  plan),  le  second  en 
plâtre  (no  24)  ;  le  couvercle  de  ce  dernier  présente  une 
sorte  de  croix,  dont  la  partie  centrale  offre  un  boudin 
assez  grossièrement  exécuté,  s'élargissant  à  son  extrémité 
supérieure,  et  dont  les  bras,  placés  diagonalement,  et  non 
à  angle  droit,  simulent  le  même  renflement  terminal. 

A  la  tête  du  sarcophage,  un  dessin  en  relief,  représen- 
tant une  croix  inscrite  dans  un  cercle  avec  quatre  demi- 
rayons  partant  de  la  circonférence,  entre  chacun  des  bras 
de  la  croix. 

Des  dispositions  sont  prises  pour  consolider  les  frag- 
ments brisés  du  couvercle  et  permettre  d'enlever  le  sarco- 
phage intact  en  dehors  de  la  fouille. 

M.  Witz, photographe,  prend  la  vue  générale  des  fouilles. 
Il  se  place  du  côté  du  chœur. 

Les  sarcophages  en  pierre  (n®*  IX  et  XIV  du  plan  de 
^^esly)  sont  visités.  Ils  ne  contiennent  que  des  ossements 
et  des  fragments  de  vêtements. 

Il  en  est  de  même  du  sarcophage  placé  obliquement 
vers  le  midi  (n^  VII  du  plan  de  Vesly,  —  26  du  plan  Re- 
quier).  Ses  dimensions  sont  :  2,o5  de  long,  0,90  à  la  tête, 
0,37  aux  pieds  ;  l'ouverture  en  a  lieu  en  présence  de 
MM.  Tabbé  Biard,  Gouellain,  Devaux.  Le  couvercle  vient 
en  morceaux;  l'intérieur  est  rempli  d'un  mélange  de  chaux 


480 

et  de  sable  agglutinés  avec  les  ossements  ;  les  ossements 
ont  été  déplacés,  les  fémurs  occupent  la  place  de  la 
tête. 

M.  G.  Prévost  trouve  dans  les  fouilles  un  fragment  de 
poterie  dite  de  Samos.  On  trouve  également  une  défense  de 
sanglier. 

Jeudi  1 1  décembre.  —  Dans  un  cercueil  placé  dans  la 
même  direction,  mais  à  l'extrémité  ouest  et  en  dessous 
du  n»  26  (plan  Requier  ci-dessus)  et  qui  porte  le  n^  27 
(longueur,  2">oo,  largeur,  à  la  tête  0^70,  aux  pieds,  o»4o) 
avec  couvercle  en  batière,  cercueil  placé  a  la  limite  des 
fondations  des  piliers  sud  de  la  grande  nef,  on  remarque 
que,  du  côté  droit,  ce  cercueil  a  été  brisé  et  que,  par  l'ou- 
verture ainsi  faite,  on  a  introduit  quatre  ou  cinq  crânes 
jetés  pêle-mêle. 

Les  sarcophages  nos  19  et  25  ne  présentent  que  des 
ossements. 

Le  cercueil  no  3o,  en  pierre  de  Saint-Leu  comme  les 
autres,  présentait  un  couvercle  de  forme  très  intéressante 
et  à  peu  près  unique  ;  sa  forme  extérieure  était  tectiforme, 
mais  à  forme  polygonale,  Tarète  centrale  étant  accompa- 
gnée de  deux  arêtes  latérales,  qui  divisaient  Textérieur  du 
couvercle  en  quatre  pentes  accolées,  avec  diminution  pro* 
gressive  de  hauteur  en  arrivant  vers  les  pieds. 

Cette  disposition  entraînant  un  excédant  d'épaisseur  du 
couvercle,  on  en  avait  diminué  le  poids  en  Tévidant  à  Pin^ 
tcrieur  ;  et  on  avait  assuré  la  clôture  hermétique  du  sar- 
cophage en  Tentaillant  intérieurement  de  manière  à  ce 
qu'il  s'emboitât  sur  la  cuve. 

En  outre,  aux  deux  extrémités,  pour  en  rendre  le  ma- 
niement plus  facile,  on  avait  réservé  à  même  la  pierre  un 
tenon  carré,  à  arêtes  abattues,  faisant  saillie  de  10  centi- 
mètres. 

Cette  disposition,  fort  intéressante,  n'a  pu  malheureu- 
sement être  conservée,  le  couvercle,  malgré  les  soins  pris 


48 1 

pour  le  soulever,  s'ctant  littéralement  émietté  entre  les 
mains  des  ouvriers. 

M.  G.  Prévost,  qui  a  surveillé  avec  beaucoup  de  soin 
Tenlèvement  des  terres  accumulées  auprès  du  gros  bloc 
de  pierre,  de  i™io  sur  o"6o  en  carré,  y  découvre  de  petits 
fragments  d'inscription,  en  caractères  romains,  paraissant 
de  répoque  carlovingienne,  et  qui  s'enlèvent  en  blanc  sur 
un  fond  brun. 

On  distingue  sur  le  plus  considérable  d^entre  eux,  long 
de  20  centimètres,  les  lettres  :  NDI. 

Sur  les  deux  autres  :  A  M  et  VII. 

M.  Prévost  retrouve  également  un  petit  fragment  de 
mosaïque»  fond  noir. 

Les  ouvriers  rencontrent  des  fragments  nombreux  de 
plaques  de  marbre  blanc  paraissant  avoir  servi  de  revête- 
ment. On  y  ajoute  un  fragment  de  médaillon  en  pierre  de 
Saint- Leu,  dont  la  partie  supérieure  a  été  brisée.  Le  sujet, 
encadré  dans  une  moulure  formant  boudin,  représentait 
un  enfant  nu,  les  jambes  écartées  ;  la  jambe  gauche  avec 
une  partie  de  l'abdomen  et  les  organes  sexuels  sont  seuls 
figurés  sur  le  fragment  conservé.  On  a  également  trouve 
des  fragments  de  tuiles  à  rebords. 

Tous  ces  objets  sont  mis  de  côté. 

Les  ouvriers  préparent  l'enlèvement  du  cercueil  en  plâ- 
tre no  24, 

Vendredi  t2  décembre.  —  Les  ouvriers  disposent  le 
palan  à  Taide  duquel  sont  successivement  enlevés  le^cer- 
cueil  no  3,  de  l'abbé  Rainfroy,  le  cercueil  en  plâtre  n»  24, 
et  le  cercueil  à  entaille  no  8. 

Malgré  les  précautions  prises  pour  sauver  un  cercueil 
en  plâtre  no  37,  placé  sous  celui  de  l'abbé  Rainfroy,  il  est 
réduit  en  morceaux  et  irréparable.  On  conserve  seule- 
ment l'ornement  qui  se  trouvait  placé  en  tète  du  cercueil, 
analogue  à  celui  qui  a  été  précédemment  décrit.  Nous 
notons  que  l'ornementation  du  couvercle  offrait  les  deux 


482 

bras  de  croix  dans  une  situation  à  peu  près  horizontale 
et  que  les  bras  et  la  partie  supérieure  de  la  croix  se  ter- 
minaient en  forme  de  croix  pattée. 

Dans  ce  cercueil  on  trouve  deux  crânes. 

Nous  procédons  successivement  à  l'ouverture  de  diffé- 
rents cercueils. 

Le  no  49  (profondeur  de  3  à  4")  offre,  à  côté  des  osse- 
ments intacts,  bras  allongés,  à  droite  des  fragments  oxy- 
dés de  lame  d'épée  et  de  poignard,  un  fragment  de  fer  à 
gauche,  une  boucle  en  bronze. 

Nous  prenons  les  mesures  du  cercueil,  en  pierre  de 
Saint-Leu,  qui  peut  être  considéré  comme  le  type  de 
tous  ceux  trouvés  au-dessous  de  2  mètres  du  dallage  de 
réglise. 

Longueur,  2'nio;  épaisseur,  o"o8;  profondeur  inté- 
rieure :  à  la  tète,  o°i42;  aux  pieds,  o*°33  ;  largeur  à  la 
tête,  0^72  ;  aux  pieds,  o°»45. 

Couvercle  tectiforme  : 

Tête,  épaisseur  centrale...  o"i5 

—  —        latérale....  o™io 
Pieds        —        centrale...  o"i2 

—  —       latérale....  o^oS 

Le  n»  5 1  (même  profondeur,  mêmes  dimensions),  placé 
près  des  fondations,  au  midi,  nous  offre  un  squelette  d'en- 
fant admirablement  conservé  ;  les  phalanges  de  ses  mains, 
étendues  de  chaque  côté  du  corps,  sont  intactes;  la  lon- 
gueur du  squelette  est  d'environ  i  mètre  ;  à  sa  droite, 
deux  objets  ronds  attirent  notre  attention  et  sont  amenés 
avec  soin  ;  nous  constatons  deux  écallesd'œufs  ayant  con- 
servé leur  forme  ;  à  gauche  du  squelette,  à  la  hauteur  de 
1  épaule,  un  objet  en  fer  décomposé  par  Toxydation. 

Du  côté  opposé  des  fouilles,  contre  les  fondations  du 
pilier  du  nord,  le  no  1 5  (profondeur  de  2"5o,  couche  infé- 
rieure) nous  réserve  les  découvertes  les  plus  intéressantes 
(présents  :  MM.  d'Estaintot,  Prévost  et  Geffroiin). 


483 

Les  ossements  se  trouvent  noyés  sur  une  épaisseur  de 
5  à  6  centimètres,  qui  arrive  à  près  de  o^^io  aux  pieds^ 
dans  un  dépôt  calcaire  sédimenteux  agglutiné  et  encore 
tout  imprégné  d^humidité. 

A  droite,  une  boîte  crânienne  renversée,  à  droite  et  à 
gauche  de  celle-ci,  une  mâchoire  inférieure  parfaitement 
conservée  avec  ses  dents,  dont  Témail  est  intact  ; 

A  la  hauteur  des  clavicules,  un  style  fortement  oxydé  ; 

Une  plaque  de  ceinturon  avec  sa  contre-plaque,  une 
série  de  lames  de  bronze  de  5  centimètres  de  long  parais- 
sant un  ornement  de  ceinturon,  trouvées  à  la  hauteur  des 
hanches; 

Une  autre  plaque  ajourée,  avec  ses  quatre  ardillons, 
trouvée  entre  les  genoux  ;  une  petite  plaque  et  contre- 
plaque  à  jour,  sans  ardillons  ; 

A  gauche,  près  du  genou,  les  débris  d'un  vase  en  bois, 
ayant  o»o6$  de  diamètre,  avec  ses  cercles  de  bronze  et 
ses  plaques  estampées,  paraissant  avoir  décoré  le  centre 
du  fond  et  le  dessus  ; 

A  gauche,  un  poignard  avec  l'ornementation  en  bronze 
qui  décorait  la  partie  supérieure  du  fourreau  à  son  atta- 
che à  la  ceinture  ; 

Sur  la  droite,  traces  brunes,  comme  de  bois  décomposé; 
à  leur  extrémité,  objet  en  fer  déformé  par  la  rouille. 

Les  ouvriers  posent  les  madriers  destinés  à  soutenir  le 
treuil  et  le  plancher  de  service. 

Samedi  i3  décembre,  —  Nous  continuons  Texamen  des 
cercueils,  dont  le  travail  des  ouvriers  exige  Tenlèvement. 
Les  ossements  continuent  à  être  recueillis  avec  soin  par 
M.  l'abbé  Biard,  pour  être  plus  tard  réunis  dans  un  ca- 
veau spécial. 

Le  no  52  (couche  de  3  à  4  mètres)  n*offre  au  milieu  des 
ossements  qu'une  petite  boucle  carrée  en  bronze  avec  son 
ardillon  et  une  pointe  de  métal. 

Nous  constatons  a  3  mètres  du  niveau  supérieur  de 


484 

réglise  les  traces  très  accentuées  d'une  couche  épaisse  de 
plusieurs  centimètres,  en  terre  cuite  dans  sa  partie  infé- 
rieure (o<"i2),  en  charbons  et  cendres  noires  dans  la  par- 
tie supérieure  (o^ioé),  et  qui  se  continue  à  partir  du  centre 
de  la  fouille,  en  passant  au-dessous  de  la  grosse  pierre 
rencontrée  dans  la  fouille  de  2  à  3  mètres. 

Le  no  53  (à  3"20  en  contrebas)  offre  entre  les  fémurs 
un  anneau  de  bronze  réunissant  trois  petites  chaînettes  de 
même  métal,  longues  de  o°>io  :  Tune  se  termine  par  deux 
petites  lames  de  bronze  longues  de  o™o5,  recourbées  à 
leurs  extrémités,  fixées  à  la  chaînette  par  leur  centre  et 
disposées  en  croix  ;  elle  paraissent  avoir  eu  pour  objet  de 
fixer  un  petit  barillet  dont  le  diamètre  aurait  été  de  o^^oS  ; 
l'autre  chaînette  eût  pu  soutenir  une  pince  à  épiler. 

Le  cercueil  est  percé  dans  le  fond  d'un  trou  circulaire 
pour  l'évacuation  des  matières  putrides  ;  sous  la  tête  du 
squelette,  étendu  les  bras  allongés,  un  fragment  de  pote- 
rie grise,  un  anneau  et  une  petite  boucle  plate  en  bronze 
avec  un  seul  ardillon  ;  aux  pieds,  cendre  et  fragments  de 
bois  avec  écorce  :  couvercle  du  cercueil  absolument  plat. 

Il  est  à  remarquer  qu^on  a  trouvé  des  squelettes  sans 
cercueils  de  pierre,  Fun  à  2"»20  de  profondeur,  Tautre 
placé  au-dessus  du  sarcophage  n^  52. 

Le  no  47  (dans  la  partie  inférieure  de  la  couche  de  2  à 
3  mètres)  présente  un  squelette  les  bras  allongés,  la  moitié 
d'une  agrafe  en  bronze  argenté,  des  fragments  de  fer  et  de 
verre  aux  pieds^  à  gauche. 

A  gauche  également,  des  fragments  d'épée  et  anneaux, 
un  fragment  rond. 

A  la  hauteur  du  cou,  un  objet  en  fer  allongé. 

Le  no  3o  (partie  supérieure  de  la  couche  de  2  à  3  mè- 
tres), entièrement  défoncé,  contient  une  plaque  de  ceintu- 
ron, un  fragment  d'épée  ou  de  couteau,  trouvé  à  la  hau- 
teur de  la  poitrine. 

Dans  le  no  45  (partie  inférieure  de  la  même  couche) 
deux  crânes. 


485 

Le  11062  (couche  de  3  à  4  mètres)  semble  entouré  d'une 
couche  de  terre  végétale  ;  au-dessus  règne  une  ancienne 
voûte  qui  se  prolonge  en  allant  vers  le  chœur  et  vers  le 
portail.  Cest  à  peu  près  au-dessous  de  cette  ligne  que- 
réapparaissent  les  traces  d'argile  cuite  par  masses  ;  le  sque- 
lette a  les  mains  allongées. 

Quelques  menus  objets  ;  un  pendant  allongé  en  amé- 
thyste ou  en  verre  teinté  de  violet,  traversé  par  son  centre  ; 

Trois  petites  monnaies  en  bronze,  dont  une  de  Probus, 
une  boucle  rectangulaire  à  facettes  ; 

Des  fragments  d'armes  décomposées  par  la  rouille  ;  un 
fer  de  lance  à  droite,  le  scramasaxe  à  gauche  ;  à  la  tète  un 
petit  morceau  de  cuir,  un  silex  à  briquet,  traces  de  char- 
bon aux  pieds. 

No  54  (couche  de  3  à  4  mètres  vers  le  centre  de  la 
fouille),  deux  crânes.  Cette  fouille,  continuée  par  M.  Tabbé 
Loth,  amène  la  découverte  de  deux  plaques  de  ceinturon, 
dont  une  fragmentée,  des  débris  d'épée,  un  cabochon,  des 
débris  d'armes  et  de  cuir  ;  divers  ornements  argentés  for- 
mant méandre,  un  ornement  en  bronze  sous  forme  de 
cercle  à  trois  partitions  en  S  trouvé  à  la  hauteur  des  épaules, 
deux  belles  fibules  en  or,  ornées  d'incrustations  de  pierres 
en  couleur,  quelques  débris  de  poteries. 

No  60  (cercueil  en  plâtre  de  la  couche  inférieure  de  2  à 
3  mètres)  ;  ce  cercueil,  menaçant  de  s'effondrer,  est  visité 
par  M.  de  Vesly. 

Le  squelette  est  complet  ;  les  branches  de  la  mâchoire 
et  les  os  de  la  tète  sont  dessoudés.  Dans  la  partie  corres- 
pondant à  la  région  iliaque  se  trouvent  une  boucle  de 
ceinturon  en  bronze  et  une  petite  bouclette  avec  ardil- 
lon ;  plusieurs  rivets  de  bronze  en  forme  de  losange  ;  un 
poignard  en  fer  avec  la  coquille  de  sa  garde,  un  fragment 
de  scramasaxe,  et  un  fer  de  lance  sont  au  côté  gauche  du 
mort  ;  à  sa  droite  était  placée  sa  hache*  dont  le  fer  était 
placé  à  la  hauteur  de  la  malléole. 

No  64  (profondeur  de  3  à  4  mètres).  Deux  squelettes 


486 

placés  côte  à  côte,  mais  Tun,  la  tète  aux  pieds  de  l'autre. 

Lundi  iS  décembre.  —  On  découvre  la  partie  anté- 
rieure d'un  cercueil  dont  le  surplus  reste  engagé  dans  le 
sol  non  fouillé  de  l'église,  vers  le  portail  ;  il  se  trouve  à 
une  profondeur  de  i^gS  du  dallage;  on  lui  donne  le  no  73  ; 
on  reconnaît  les  traces  d'un  vêtement  brun  sur  les  osse- 
ments. Aux  pieds  des  sandales  de  cuir. 

On  commence  les  fouilles  du  tombeau  n^  63,  placé  à 
côté  du  no  62  (couche  de  3  à  4  mètres). 

Aux  pieds,  une  charmante  fiole  en  verre  blanc  à  anse  ; 
la  panse  est  décorée  haut  et  bas  de  deux  rangs  de  doubles 
filets,  l'ouverture  en  forme  de  trèfle  ;  ce  joli  spécimen  est 
ramené  intact,  à  la  pelle,  du  milieu  des  décombres  qui 
ont  envahi  le  cercueil  effondré.  A  la  gauche  du  squelette 
on  rencontre  une  lame  de  couteau  en  fer,  des  petites  pla- 
ques de  bronze,  des  anneaux  en  bronze  de  o^^oS  de  dia- 
mètre, reliés  à  du  cuir  fixé  par  des  rivets  et  offrant  la 
plus  grande  analogie  avec  ceux  trouvés  dans  le  n»  14 
(12  décembre). 

A  gauche,  à  la  hauteur  de  la  main,  une  chaînette  de 
cuivre  terminé  par  un  anneau  fixé  à  un  objet  en  ivoire, 
fragmenté,  paraissant  offrir  deux  plaques  d'ivoire  fixées  à 
un  montant  de  même  matière  par  deux  anneaux  d'argent. 
Les  dimensions  de  cet  objet,  fournies  par  le  rapproche^ 
ment  de  ses  débris  incomplets,  donnent  en  hauteur  1 1  cen- 
timètres, en  largeur  7  centimètres.  L'écartement  des  deux 
lamelles  d'ivoire  est  de  3  millimètres;  on  conjecture  qu'il 
était  destiné  à  contenir  une  tablette  de  cire. 

On  trouve  encore  dans  cette  sépulture  des  restes  de 
charbon  ;  à  la  droite  de  la  tète,  une  boucle  de  fer,  quel- 
ques débris  informes  de  même  métal  et  des  menus  frag- 
ments de  poterie. 

Pendant  ces  découvertes,  le  comte  de  Rochemonteix, 
archéologue  du  Cantal,  l'abbé  Allard  et  M.  Devaux,  sculp- 
teur, sont  présents. 


487 

Le  cercueil  n^  17  (couche  inférieure  de  2  à  3  mètres) 
donne  un  scramasaxe  et  des  débris  d'armes  en  fer. 

Le  soir,  une  plaque  en  bronze  laissant  apparaître  des 
parties  dorées  est  retrouvée  par  les  ouvriers  dans  les  dé- 
blais ;  on  suppose  qu'elle  peut  avoir  appartenu  à  la  sépul- 
ture n<>  62. 

Le  cercueil  R,  voisin  des  fondations  des  piliers  de  la 
nef,  au  midi,  ne  contient  que  des  débris  de  maçonnerie  ; 
ce  caractère  est  commun  à  tous  les  tombeaux  placés  dans 
la  même  situation. 

Les  ouvriers  ont  trouvé  un  fragment  de  fauchard  aux 
environs  de  remplacement  du  tombeau  de  Rainfroi. 

Mardi  r  6  décembre,  —  Dans  un  cercueil  situé  au  cen- 
tre de  la  fouille  (no  57)  (couche  supérieure  de  2  à  3  mè- 
tres). MM.  Tabbé  Biard  et  G.  Prévost  trouvent  les  objets 
suivants  : 

Une  boucle  elliptique  de  0,06  de  >long  sur  o,o35  de 
large,  une  pointe  en  silex  taillé  adhérait  à  la  boucle  ; 

Deux  plaques  de  fer  avec  de  petites  pointes  ; 

A  la  hauteur  de  la  poitrine,  une  croix  pattée  en  argent, 
légèrement  concave  ;  des  pointes  apparentes  servaient  à 
la  fixer  sur  un  support  quelconque  ; 

Une  petite  boucle  de  bronze,  avec  ardillon  à  la  hauteur 
de  la  ceinture  ; 

Une  épingle  en  métal  blanc  ; 

Une  sorte  de  style  de  même  métal,  avec  tête  plate 
taillée  à  facettes  ; 

Une  fermeture  de  collier  en  bronze  et  un  petit  morceau 
de  cuir. 

Une  petite  pince  à  épiler  en  bronze,  placée  vers  le  mi- 
'  lieu  du  corps,  de  petits  morceaux  d'ivoire  et  une  dent  de 
sanglier  ;  aux  pieds,  des  fragments  de  charbon  et  des  dé- 
bris de  poterie  noire. 

No  77,  cercueil  en  plâtre  défoncé,  rien. 

A  une  heure  et  demie,  en  présence  de  Mgr  Thomas, 


488 

archevêque  de  Rouen,  ouverture  du  tombeau  n»  8i. 
MM.  de  Beaurepaire,  Gouellain  et  Sauvageot,  présents 
sur  les  fouilles. 

M.  de  Vesly  procède  à  la  recherche  des  objets  contenus 
dans  la  sépulture.  On  y  rencontre  une  boucle  de  ceintu- 
ron en  fer  et  des  fragments  d'armes  décomposées  par  l'oxy- 
dation ;  puis  un  magnifique  style  en  argent,  long  de  0,22, 
décoré)  sur  une  longueur  de  0,08,  d'un  fourreau  d*or  or- 
nementé d*anneaux  délicatement  fouillés.  Il  présente,  a  a 
centre  de  cette  ornementation,  un  renflement  en  argent 
qui,  sur  deux  côtés,  offre  une  croix  pattée  gravée  en 
creux,  le  creux  rempli  par  une  sorte  de  pâte-émail,  et,  sur 
les  deux  autres  côtés,  une  croix  en  sautoir  inscrite  dans 
un  losange. 

Les  autres  objets,  recueillis  dans  la  sacristie,  ont  été 
successivement  soumis  à  l'attention  de  Monseigneur  par 
M.  d'Estaintot. 

Les  deux  petits  cercueils  d'en£aints,  nos  74  et  79  (couche 
de  2  à  3  mètres),  ne  contiennent  que  du  sable  et  du  mor* 
tier  ;  de  nombreux  fragments  de  poterie  commune  sont 
trouvés  aux  environs  (couche  de  2  à  3  mètres). 

Le  cercueil  n^  82  ne  présente  également  aucun  détail 
intéressant  :  les  ossements  sont  déplacés,  les  fémurs  sont 
à  la  hauteur  des  épaules. 

A  l'extrémité  est  de  la  fouille,  aux  pieds  de  la  tombe  de 
l'abbé  Rainfroi  et  à  une  profondeur  de  3  mètres,  les  ou- 
vriers rencontrent  de  nombreuses  pierres  portant  des  tra- 
ces d'incendie. 

Mercredi  77  décembre.  —  MM.  l'abbé  Biard  et  G.  Pré- 
vost sont  présents  sur  les  fouilles. 

Les  cercueils  21  et  22  (de  la  couche  de  2  à  3  mètres),  61 
(de  la  couche  de  3  à  4  mètres),  fournissent,  les  premiers, 
quelques  objets  en  fer  corrodés  par  la  rouille;  le  second, 
un  clou  et  un  morceau  de  verre  irisé  ;  le  troisième,  un 
morceau  de  corne  et  un  clou  de  fer. 


489 

Le  cercueil  no  75  (couche  de  2  â  3  mètfes),  à  demi  en- 
gagé sur  le  côté  est,  offre  cette  particularité  de  reposer 
sur  une  couche  de  mortier  épaisse  de  7  à  8  centimètres, 
qui  se  continue  à  droite  et  à  gauche,  offrant  un  développe- 
ment total  de  plus  de  3  mètres  ;  son  niveau  est  à  3">io  en 
contre  bas  du  sol  actuel.  Ce  tombeau,  rempli  de  décom- 
bres, contenait  un  fragment  de  poterie  noire  d'un  grain 
très  fin,  un  fragment  d'os  taillé  et  des  fragments  de  pote- 
rie blanche  et  rouge. 

Un  mur  transversal  est  rencontré  au  milieu  de  la  fouille  ; 
sa  crête  se  trouve  à  2">3o  du  sol  actuel  ;  au  côté  de  Touest 
est  placée  une  auge  en  pierre,  longue  de  o">8o,  large 
de  o"6o,  profonde  de  o"i8,  et  remplie  d'ossements. 

Ouverture  des  cercueils  nos  75  et  80  ;  dans  ce  dernier, 
fragments  de  scramasaxe  et  d'un  couteau  en  fer,  une  grande 
et  une  petite  boucle  de  bronze,  une  pièce  de  monnaie  en 
bronze  absolument  fruste  et  un  petit  fragment  de  verre. 

Sont  venus  aujourd'hui  sur  les  fouilles  :  MM.  G.  Le 
Breton,  Pelay,  Paul  Baudry,  les  abbés  Âllard  et  Dela- 
fontaine. 

Jeudi  iH  décembre.  —  Vers  le  centre  de  la  fouille,  dans 
la  profondeur  de  3  à  4  mètres,  rencontre  de  deux  sarco- 
phages d'une  forme  spéciale. 

Le  no  87,  placé  contre  la  limite  nord  en  deux  morceaux 
à  peu  près  égaux,  aux  côtés  légèrement  convexes,  offrant 
2^20  de  longueur  extérieure  et  2°»oo  de  longueur  inté- 
rieure, avec  une  largeur  de  0^36  à  la  tête  et  aux  pieds,  de 
o™52  au  milieu. 

Le  second,  no  86,  d*un  seul  morceau  et  de  forme  rec- 
tangulaire, plus  étroit  aux  pieds  qu'à  la  tête,  offre,  vers  le 
milieu  de  son  côté  gauche,  une  ouverture  circulaire  pla- 
cée à  o™09  du  fond,  ayant  01^06  de  diamètre,  elle  est  bou- 
chée par  un  tampon  en  pierre  placé  du  dedans  qui  en 
remplit  exactement  le  vide. 

Dans  ce  dernier  cercueil,  MM.  l'abbé  Biard  et  de  Vesly 

3a 


490 

découvrent  une  plaque  de  fer  et  une  grande  boucle  de 
bronze,  une  bague  de  bronze  à  la  main  gauche,  un  mor- 
ceau de  cuir  à  la  hauteur  de  la  ceinture. 

A  Touest,  la  paroi  de  la  fouille  dressée  permet  l'explo- 
ration des  cercueils  portant  les  nos  7 3  (dans  la  couche  de 
2  à  3  mètres),  87,  88,  89  et  90  (dans  la  couche  de  3  à  4  mè<- 
tres). 

Le  no  73,  déjà  sigaalc  sous  la  date  du  i5  décembre, 
contient  les  restes  d^un  moine  reconnaissable  aux  frag- 
ments de  vêtement  de  laine  brune  et  aux  sandales  de  cuir  ; 
à  la  partie  la  plus  profonde,  M.  Requier  fils  aperçoit  et 
retrouve  une  plaque  de  plomb  légèrement  convexe  par  le 
bas  et  fortement  oxydée,  large  de  o™i6,  haute  de  0^16. 

Neuf  traits  horizontaux  la  divisent.  Entre  les  1*^  et  2®, 
le  3«  et  le  4e,  le  5*  et  le  6e,  le  7«  et  le  8«,  se  Usent  avec 
difficulté,  pour  les  deux  dernières  lignes,  les  caractères 
suivants  (i)  : 

XVI   KL  OCTO 
RIS   OBIIT   HV 
GO  ARCHIDIACONI 
AN  NO  DNI 

MLVII  XO 

Dans  la  sépulture  no  88,  MM.  de  Vesly  et  Prévost  dé- 
couvrent le  mobilier  suivant  :  un  scramasaxe,  une  pointe 
de  flèche  et  un  couteau  en  fer,  un  conglomérat  de  fer, 
que  M.  de  Vesly  considère  comme  un  umbo  de  bouclier 
ou  l'extrémité  d'un  carquois  ;  tous  ces  objets  à  la  gauche 
dusque)ette; 

A  hauteur  du  bassin,  une  boucle  en  bronze  trapézoïdale 
et  une  contre-plaque  à  redans  portant  des  dessins. 

A  droite,  des  débris  en  fer  d'une  lance  ou  angon,une  pièce 
de  monnaie  en  bronze  de  petit  module,  très  fruste,  des  dé- 

(i)  L'interprétation  des  deux  dernières  lignes  nous  a  été  don- 
née par  le  comte  Robert  de  Lasteyrie. 


491 

bris  de  poterie  et  de  charbon  complètent  Pinyentaire  de 
cette  sépulture. 

Le  cercueil  no  90  est  rempli  de  décombres. 

Le  no  89,  en  partie  effondré,  présente  aux  pieds  une 
forme  de  lanière  ou  lacet,  une  petite  plaque  de  bronze 
formant  rivet  ou  attache,  puis  des  fragments  d'armes  en 
fer. 

Le  no  87  est  complètement  effondré  et  presque  engagé 
sous  la  paroi  de  la  fouille.  On  y  trouve  cependant  une 
boucle  de  bronze  enveloppée  dans  une  gangue  d'oxyde  de 
fer  et  un  scramasaxe,  sur  lequel  se  voient  de  belles  souf- 
flures produites  par  le  sulfure  de  fer.  Une  de  ces  poches 
se  vide  et  laisse  couler  un  liquide  blanc  et  transparent. 

Vendredi  ig  décembre,  —  Quelques  débris  de  poterie 
sont  retrouvés  près  du  mur  transversal.  Sur  Tune  d'elles, 
M.  G.  Prévost  croit  pouvoir  lire  :  of  pr..  i. 

A  onze  heures,  M.  RiCard,  maire  de  Rouen,  accompa- 
gné de  M.  Capelle,  premier  adjoint,  vient  visiter  les 
fouilles. 

M.  le  Curé,  plusieurs  membres  du  Conseil  de  fabrique 
sont  présents. 

On  procède  devant  eux  à  l'ouverture  des  sarcophages 
71  et  72  (profondeur  de  3  à  4  mètres). 

Le  premier  offre  aux  pieds  les  deux  boucles  attachant 
la  chaussure  et  une  petite  pièce  de  bronze  paraissant 
avoir  orné  l'extrémité  des  courroies  ;  à  la  droite  du  sque- 
lette, un  fauchard  recourbé,  tranchant  à  l'intérieur  et 
présentant  au  milieu  de  la  partie  extérieure  un  arrêt 
coudé  à  angle  droit,  terminé  par  une  sorte  de  volute 
recourbée  ;  de  nombreux  fragments  de  tissu  d'or  et  de 
galons  sont  recueillis,  mélangés  aux  détritus  de  la  sépul- 
ture. 

Le  second  n'offre  d'instruments  d'aucune  sorte  ;  mais, 
sur  les  ossements  qu'il  contient,  se  remarque  la  présence 
d'une  frange  d'or  partant  de  l'épaule  et  se  développant 


492 

sur  la  poitrine,  pour  se  séparer  ensuite  à  la  hauteur  de 
la  ceinture  et  contourner  les  fémur  et  se  terminer  de  cha- 
que côté  â  la  hauteur  des  tibias.  Le  sarcophage,  engagé  à 
moitié  dans  le  sol  non  exploré  de  la  nef,  offrait  comme 
disposition  anormale  une  largeur  égale  aux  pieds  et  à  la 
tête;  sa  longueur  était  de  i">90. 

Les  filigranes  d'or  provenant  des  deux  tombes  ci-des- 
sus ont  été  recueillies  et  déposées  avec  les  autres  objets  à 
la  sacristie. 

Ordre  avait  été  donné  de  conserver  la  disposition  des 
galons  du  no  72  jusqu'à  ce  que  le  dessin  en  eût  pu  être 
relevé  ;  malheureusement,  en  notre  absence,  les  ouvriers 
ont  vidé  le  sarcophage  et  réuni  en  bloc  tout  le  galon,  ce 
qui  a  empêché  d*exécuter  le  projet  que  nous  avions 
conçu. 

Samedi  20  décembre.  —  Les  ouvriers  ramènent  avec 
la  terre  des  fouilles  une  petite  coupe  en  terre  fine,  dite 
de  Samos,  un  goulot  d'amphore  en  terre  blanche  avec  ses 
deux  anses,  un  grand  fragment  de  poterie  rouge  com- 
mune, ornée  de  torons,  baguettes,  etc. 

A  4™40  au-dessous  du  pavage,  couche  de  béton  de 
2in6o  de  large  et  de  3  à  6  mètres  de  développement  ;  elle 
se  prolonge  dans  Taxe  de  Tcglise,  un  peu  plus  rapprochée 
des  fondations  du  côté  du  nord  et  commence  vers  le  troi- 
sième pilier  de  la  nef. 

Lundi  22  décembre,  —  Quelques  fragments  de  poterie 
et  trois,  nouveaux  sarcophages  sont  découverts. 

Du  mardi  23  décembre  au  4  janvier.  —  Les  différents 
sarcophages  découverts  n^offrent  aucun  intérêt  ;  tous  sont 
remplis  de  décombres,  paraissent  aussi  avoir  été  visités. 

Dans  les  fondations  du  quatrième  pilier  de  la  nef  ac- 
tuelle (côté  du  nord  à  partir  du  chœur)  se  trouve  encas- 
tré un  chapiteau,  dont  la  proportion  et  la  forme  ont  été 
relevés  avec  soin. 


493 

Les  galeries  latérales  du  calorifère,  ouvertes  pour  les 
conduites  de  chaleur  et  de  fumée,  ont  permis  de  consta- 
ter entre  chacun  des  piliers  actuels  les  assises  d'anciens 
piliers,  dont  la  base  des  colonnes  est,  du  côté  du  midi,  à 
un  niveau  inférieur  de  20  centimètres  au  côté  du  nord, 
accusant  ainsi  entre  les  assises  de  ces  piliers  de  même 
époque  une  dénivellation  dont  nous  avons  dû  nous  bor- 
ner à  constater  l'existence. 

Voici  les  proportions  de  la  pile  rencontrée  entre  les  3» 
et  4<»  piliers  (côté  de  T Évangile). 

Elle  se  compose  d'un  massif  offrant  vers  la  grande  nef 
un  front  de  i^iS  sur  une  profondeur  de  i"58. 

Vers  la  grande  nef  et  le  bas-côté,  une  demi-colonne 
ayant  o^^So  de  diamètre  et  0^25  à  o™3o  de  saillie  se  dé- 
gage du  milieu  du  massif. 

Sur  les  deux  autres  faces  se  détachent  deux  demi-co- 
lonnes  juxtaposées  et  offrant  les  mêmes  proportions. 

Le  massif  rencontré  dans  l'intervalle  des  mêmes  piliers, 
côté  du  midi,  présente  des  proportions  plus  fortes  :  i"4o 
de  face  et  i">88  de  profondeur  ;  les  dimensions  des  colon- 
nes sont  les  mêmes. 

Nous  avons  constaté  la  dénivellation  des  piles  du  midi 
par  rapport  à  celles  du  nord.  Ces  piles  ont  d'ailleurs  con- 
servé leurs  assises  horizontales. 

Il  faut  ajouter  à  cette  remarque  ce  fait,  que  les  assises 
du  midi  ont  été  à  une  époque  postérieure,  enveloppées 
dans  un  massif  en  maçonnerie  parementé,  affectant  la 
forme  d'un  losange  dont  les  pointes  font  saillie  en  forme 
d'éperon  du  côté  des  nefs,  et  que  les  massifs  avaient  été 
prolongés  presque  jusqu'au  niveau  du  dallage  actuel,  en- 
veloppant ainsi  la  base  et  une  partie  du  fdt  des  colonnes 
dont  nous  venons  de  signaler  l'existence. 

Les  mortiers  de  cette  enveloppe  sont  tout  différents 
comme  aspect  de  ceux  de  la  pile  qu'ils  enveloppent. 

Nous  avons  pu  constater  les  deux  éperons  du  losange 
rencontré  sur  remplacement  de  la  galerie  d'accès  \  celui 


494 

qui  Élisait  face  au  mic^i  offrait,  à  11^3 1  au-dessous  .du  dal* 
lage  actuel  les  traces  apparentes  d'un  ancien  dallage. 

Jeudi  6  janvier.  —  Le  percement  de  la  galerie  d'accès 
du  calorifère  à  travers  le  bas>côté  du  midi  fait  remonter 
à  o^^SS  en  dedans  du  parement  intérieur  du  mur  actuel 
le  parement  de  l'ancien  b?s-côté,  dans  lequel  se  trouve 
encore  engagée  une  demi-colonne  faisant  face  à  la  demi- 
colonne  de  la  pile  dont  nous  avons  précédemment  cons- 
taté Texistence. 

Cette  colonne  a  oin40  de  saillie.  Elle  se  termine  par  une 
double  moulure  séparée  par  une  gorge.  Ce  motif  de  dé- 
coration a  0^1 1 5  de  hauteur. 

Le  dessous  de  cet  ornement  est  à  i^^iS  du  dallage  ac- 
tuel. 

La  colonne  repose  sur  une  base  carrée,  précédée  d'un 
chanfrein,  le  tout  ayant  oi^Si  de  hauteur,  ce  qui  donne 
pour  niveau  du  dallage  de  Tédifice,  auquel  cette  colonne 
appartenait,  i""66  au-dessous  du  dallage  actuel. 

Les  fouilles  faites  dans  les  bas-côtés  pour  le  passage  des 
bouches  de  chaleur,  de  la  galerie  d'accès  ou  du  conduit 
de  fumée,  ont  permis  de  constater  qu'aucune  inhumation 
n'y  avait  été  faite. 

Jeudi  1 3  janvier.  —  La  fouille  poursuivie  sous  l'empla- 
cement du  banc  d'oeuvre  (entre  le  second  et  le  troisième 
pilier,  côté  du  sud)  a  mis  à  découvert  une  pile  analogue  à 
celles  rencontrées  déjà;  le  massif  de  maçonnerie  qui  l'en- 
veloppe, au  lieu  d'affecter  la  forme  du  losange,  a  ses  pans 
coupés  sur  les  deux  faces  et  celle  qui  regarde  l'est  vient 
buter  contre  un  ancien  mur  épais  de  o^^gS,  qui  se  conti- 
nue dans  la  direction  du  chœur  et  que  l'on  trouve  assis 
sur  o"20  de  déblais. 

L'axe  de  la  nouvelle  pile  indique  un  mouvement  de 
flexion  marqué  vers  le  nord. 

Contre  le  mur  dont  nous  venons  d#  parler,  on  retrouve, 


495 

à  niveau  de  oi^go  au-dessous  du  dallage,  un  fragment  de 
pavage  composé  de  Tassemblage  de  pavés  émaiPés  ayant 
o«i2  de  côté,  mais  qui  présente  cette  particularité,  à  Tex- 
ception  de  deux  ou  trois  pavés  à  peu  près  entiers,  de  n'of- 
frir que  la  moitié  gauche  de  pavés. 

Quelques-uns  sont  simplement  recouverts  d'un  vernis 
brun  uniforme. 

Les  autres  présentent  un  demi-lion  rampant  à  la  queue 
fourchetée,  les  autres,  un  demi-ccu  losange,  les  autres, 
des  fragments  de  rinceaux  s'enlevant  en  jaune  sur  un 
fond  brun.  Un  seul  donne,  sous  une  arcaiure  trilobée^ 
une  figure  de  moine  à  la  tète  rasée,  les  bras  à  demi- éten- 
dus levés  vers  le  ciel,  que  nous  avois  déjà  signalé  sous  la 
date  du  8  décembre. 

Vendredi  14  janvier.  —  Dans  la  contre-aîlée,  derrière 
le  banc  d'œuvre,  on  rencontre  un  dalbge  à  0*90  en  des- 
sous du  dallage  actuel.  La  trrnchée  ouverte  entre  les 
3e  et  4e  piliers,  du  côté  de  l'Evangile,  permet  de  consta- 
ter l'existence  dans  les  fondations,  à  la  droite  de  ce  der- 
nier pilier,  d'un  ancien  demi-chapiteau,  haut  de  o^^S^ 
large  de  o^^So,  dont  la  décoration  consiste  dans  une  suc- 
cession de  cannelures  légèrement  concaves,  dont  la  partie 
supérieure  a  o"i5  de  haut,  la  partie  inférieure  o"25,  entre 
lesquels  se  dessine  une  ornementation  en  forme  de  dents 
de  scie  de  oi^^oS  de  haut,  assez  espacées  pour  que  le  péri- 
mètre du  demi-chapiteau  n'en  contienne  que  huit  et 
demi. 

M.  de  Vesly  veut  bien  en  relever  soigneusement  le 
dessin. 

Mercredi  28  janvier.  —  La  tranchée  de  prise  d'air  ou- 
verte vers  le  chœur,  sur  une  longueur  de  6™,oo  à  partir 
du  calorifère  et  une  profondeur  de  2"»5o,  révèle  à  0^50  du 
parement  extérieur  du  mur  du  calorifère  la  présence  d'un 
gros  mur  transversal  épais  de  ii^ôo. 


496 

A  11B07  de  ce  mur  en  avançant  vers  le  chœur,  on  ren- 
contre à  I  mètre  de  profondeur  la  partie  saillante  d'un 
mur  circulaire  ayant  i™35  de  rayon  et  venant  buter  sur 
un  mur  parallèle  au  gros  mur. 

Les  parements  constitués  en  appareil  régulier  sont  ex- 
posés vers  Touest. 

L'axe  du  mur  circulaire  est  à  S'^bo  de  Taffleurement 
extérieur  de  la  colonne  qui  décore  le  pilier  du  transept 
sud  et  â  4"*95  du  pilier  du  transept  nord. 

On  trouve  dans  la  fouille  des  fragments  de  moulures, 
ornementées  de  blUettes,  des  parements  de  mur  ornemen- 
tés de  larges  traits  à  Tocre  brune,  des  fragments  de  fûts 
de  demi-colonne  présentant  à  l'extérieur  de  faux- joints  à 
Focre  brune. 

Cette  demi-colonne  a  o™  17  de  rayon.  Cette  pierre,  d*un 
blanc  très  mat,  d'un  grain  assez  fin,  est  considérée  par  les 
ouvriers  comme  pouvant  provenir  des  carrières  de  Bi- 
horel. 

Le  long  du  côté  nord  de  la  fouille  se  trouve  un  ancien 
mur  parementé  dont  les  fondations  sont  de  0^80  en  contre- 
bas du  dallage  ;  on  remarque  sur  une  de  ces  pierres  des  faux 
traits  à  Tocre  brune  et  une  marque  de  tâcheron,  haute 
de  o°*i5,  présentant  l'apparence  d'une  crosse  légèrement 
renversée. 

Jeudi  2g  janvier,  —  A  2"»5o  du  calorifère  et  à  i™55  de 
profondeur,  on  a  trouvé  un  nouveau  cercueil  en  pierre  de 
Saint-Leu,  long  de  1^90  à  Tintérieur,  couvercle  tecti- 
forme,  large  à  la  tête  de  0^57,  haut  au  milieu  de  o"2o. 

Au-dessous,  un  autre  sarcophage  offre  cette  particula- 
rité d'être  absolument  arrondi  en  tète  et  de  présenter  à 
l'intérieur,  sur  la  longueur  de  2  mètres,  une  réserve  pour 
la  tête  constituée  par  un  relief  de  o"04  sur  le  fond  du 
cercueil,  commençant  à  o«3o  de  l'extrémité  supérieure, 
relief  dans  lequel  on  a  circulairement  creusé,  sur  un  dia- 
mètre de  on^So  et  une  profondeur  deo"02,  l'emplacement 


497 

de  la  tête  avec  ouverture  de  o"  1 8  pour  le  passage  du  cou. 
Dans  les  fouilles  pour  la  prise  d'air,  vers  Touest,  fouilles 
qui,  à  leur  extrémité,  ont  été  approfondies  de  2  mètres 
pour  la  construction  d'un  caveau  destiné  à  recevoir  le  sar- 
cophage de  D.  Rainfroy  et  les  restes  des  quatre  abbés, 
avec  tous  les  ossements  trouvés  dans  les  fouilles  (i),  on 

(i)  Le  cercueil  de  D.  Rainfroy  a  été  ultérieurement  déposé 
dans  ce  caveau  par  les  soins  du  clergé  de  Saint-Ouen  et  du  G>n- 
seil  de  fabrique.  Dans  ce  cercueil,  divisé  en  quatre  comparti- 
ments, ont  été  replacés  les  restes  des  quatre  abbés.  Sur  le 
compartiment  contenant  les  restes  de  D.  Rainfroy  a  été  mise 
une  plaque  en  plomb  reproduisant  Tantique  inscription  qui  va 
être  déposée  au  musée  des  antiquités,  et,  au-dessus,  cette  men- 
tion :  «  Reproduction  du  texte  de  Tinscription  originale  déposée 
au  musée  des  antiquités  delà  Seine-Inférieure,  i885.  » 

Avant  de  clore  le  caveau,  la  Fabrique  y  a  fait  placer  l'inscrip- 
tion suivante  sur  une  plaque  de  plomb. 

L'an  de  grâce  mdccclxxxv 

au  mois  de  Février 

ont  été  précieusement  déposés  dans  ce  caveau, 

par  les  soins  du  clergé  et  du  Conseil  de  Fabrque 

de  la  paroisse  Saint-Ouen, 

les  ossements 

trouvés  dtmsla  nef  principale  de  cette  église 

pendant  les  'fouilles  faites  pour  la  construction 

du  calorifère  ; 

parmi  lesquels 

ceux  de  D.  Rainfroy,  abbé  de  Saint-Ouen,  mort  en  1 1 5o 

et  de  trois  autres  abbés  demeurés  inconnus, 

ont  été  recueillis  séparément 

et  placés  dans  le  tombeau  où  reposent 

les  restes  de  D.  Rainfroy. 


Un  service  solennel  pour  le  repos  des  âmes 

de  ces  défunts 

a  été  célébré  à  Toccasion  de  la  translation 

de  leurs  restas. 


498 

rencontre,  à  5  mètres  du  mur  du  calorifère  et  à  i">40  de 
profondeur,  un  sarcophage  placé  contre  un  gros  mur 
transversal,  dans  un  sol  qui  présente  les  apparences  de  la 
terre  végétale.  Il  est  en  pierre  de  Saint- Leu,  à  couvercle 
tectiforme,  la  cuve  en  deux  morceaux.  A  Tintérieur,  des 
ossements  sans  aucun  objet  permettant  de  dater  la  sépul- 
ture. 

Au-dessous,  dans  un  autre  sarcophage,  ouvert  en  pré- 
sence de  M.  Morton,  ministre  des  États-Unis,  a  été  trouve 
un  style  en  bronze  très  commun  et  fruste. 

Mardi  !  y  février,  —  Les  ouvriers,  parvenus  en  face  le 
côté  nord  de  la  baie  qui  clôt  la  chapelle  des  Sept-Dou- 
leurs,  pour  la  conduite  de  fumée  du  calorifère,  découvrent 
deux  anciens  chapiteaux  romans,  que  Ton  dégage  avec 
soin.  De  cet  endroit  à  la  sortie  par  la  petite  porte  du 
transept,  ils  travaillent  dans  un  massif  plein  de  maçon- 
nerie. 

Fait  et  arrêté  le  28  février  i885. 

C»<  d'Estaintot,  L.  de  Vesly. 


TABLE  DES  NOMS  D'HOMME 


Abaquesne,  262. 
Achéry  (d'),  294. 
Alexandre  VII,  265. 
Anard(rabbé),  210. 

—     (Paul),  206. 
Alleurs  (des),  264,  414. 
AUiaume  (Vabbé),  122. 
Amalbert,  447,  449-451. 
Amaury  de  Meulan,  66, 
Amboise  (cardinal  d'),  i3i. 

249,  404. 
Ancel,  123. 
Ango  (Roger),  1 2. 
Ansbert  (S.),  260. 
Anselme  (le  P.),  191. 
Asseline,  95. 

Aubeaux  (Pierre  des),  106. 
Aubert  (S.),  18. 
Augustin  (saint),  474. 
Aurée    (sainte),    447,    449* 

45o. 
Austreberte    (sainte),     447, 

449,  450,  464,  465. 
Auvray    (Fabbé),   communi' 

cation,  3o4-3i2. 

B 

Balf,  i38. 
Bajot,  366,  367. 
Barentin  (Charles),  23. 


Barthélémy,  122,  126. 
Basilée  (saint),  265. 
Baudetot  de  Dairval  393. 
Baudet   (l'abbé),  446,  456, 

465. 
Becquet(R.),  i5i. 
Bedfort  (duc  de),  254. 
Behotte,  410. 

Belbeuf  (de),  149,  i55-i58. 
Belhomme  de  Franqueville, 

414. 
Belin  (dom  Hilaire),  447,463- 

464. 
Bénédicte  (sainte),  448. 
Benoist  (C.-J.),  356. 
Bernage  (de),  369. 
Béthencourt  (Jean  de),   io5. 

Bigot,  89,  319. 

Blanc  (Ch.),  119. 

Blanche  de  Castille,  1 3o. 

Blondel,  353. 

Bohier  (D.  Antoine),  281. 

Boilly,  121. 

Bonnechose    (cardinal    de), 

420,  424. 
Bordeaux  (Raymond),  166- 

168. 
Boulanger,  206. 
BouUenger  (Le),  368-369. 
Bourbon  (Charles  de),  235, 

364. 
Bourdaloue,  167. 


5oo 


! 


Bourdonnaye    (Je  la),   14S, 

399-401. 
Bourgeois  (frère  N.),  344. 
—        (Le),  407-409. 
Boutteville  (de),  446. 
Bréauté  (J.  de),  126. 
Brèvedent  (de),  376. 
Brinon  (de),  422. 
Brument  (Le),  148,  244. 
Brun  des  Marettes  (Le),  i33, 

141,  143,  147. 
Bucy  (S.  de),  74. 


Calizte  III,  i3o. 
Carpentier    (Le),     257-258, 

402. 
Carpentier  (J.  Le),  428. 
Cal  (Le),  68,  256. 
Cavelier  (Barbe),  287. 
Célestin  III,  229. 
Chardon  (Robert),  281. 
Charles  V,  76,  134. 
Charles  VI,  20,  io5,  147. 
Charles  VII,  196,  258,  283. 
Charles  VIII,  238,  399. 
Charles  IX,  21,  28,  i38, 236, 

307. 
Chéruel,  28. 

Chevalier  (Jacob  Le),  426. 
—       (Lucas  Le),  425. 
Cideville  (de),  4o3. 
Cignerre  (Le),  197. 
Ci  ville  (de),  66,  94,  245. 
Clerc  (Le),  66,  67,  409. 
Clovis,  18,  19. 
Cochet  (l'abbé),  47,  71,  72, 

203,    211,     222-223,     281, 


3oo,    304-309,     320-3x2, 

390,445,  447,471. 
Cœur  (Le),  i . 
Coipel  (Pabbé),  122. 
Colbert,  i5. 
C0I20S  (Jean),  283. 
Commode,  38o. 
Constance,  114. 
Coppinger  (M.),  communica^ 

tion,  222-226. 
Coquebourne  (R.  de),    i36- 

137. 
Coquin,  409,  41 3. 
Corneille  (P.),  I23,  422. 
Cornu  (L.  Le),  79. 
Cottey  (l'abbé),  4 1 4-4 1 5 . 
Couvet,  187. 
Crcvel  (l'abbé),  257. 
Croix  (le  P.  de  La),  3o2. 


D 


Dagobert,  449,  45 o. 
Dampierre  (Xavier  de),  89. 
Davanne  (dom),  443. 
Delisle  (Léopold),  129,  139. 
Depoin,  3o2. 
Descamps,  395. 
Deschamps  (F.),  I23. 
Desportes    (Philippe),    119- 

121. 
De  ville,  117. 
Drouet,  227,  3 80. 
Duclos,  396. 
Du  Guesclin,  197. 
Dunois,  196*  199,  459. 
Duplessis  (D.Toussaint),  45- 

47»  69,  82. 
Dutuit,  354,  467. 


5oi 


Duval,  34,  7»,  87. 
Duval    (Nicolas),   architecte, 
197. 

E 

Erasme,  367. 

Esneval  (les  d*),  206,  45 1- 

458. 
Es  tien  ne  (Henri),  263. 
Estouteville (cardinale!'),  i3o, 

i36,  232,  235,  243,  454. 


Farin,  8g,  91,  i3o,  i32,  i36, 
145,  148,  168-169,  228- 
229,  242,  245,  246,  263, 
265,  3i3-3i5,  327,  402- 
404,  422,  444. 

Faroult  (A.),  35 1. 

Paye  (l'abbé),  275. 

Feudriz,  283. 

Fèvre  (J.  Le),  73-76. 

Floquet,  12,  247,  357. 

Florentin  (Dominique),  356. 

Fontenelle,  1 1 . 

Forestier  (G.  Le),  456-457. 

Fortin  de  la  Hoguette,  366. 

France  (de),  i53. 

François  1er,  i38,  366. 

Fremont  (Louis),  docteur  de 
Sorbonne,  24. 

Fromentin,  280. 

Frontin  (les),  169-173,  179. 


Gaillard  (Emm.),  309. 
Galland,  1 3 8- 139. 
Gallemand    (le    vénérable), 
167,  288. 


Galloway,  292-299. 
Gaudefroid  des  Pois,  110. 
Gautier,  448,  45o,  453. 
Germont  (de),  270-271. 
Gilbert  (Louis),  80. 
Godard  (saint),  17. 
Godefroy  (l'abbé),  122. 
Gomboust,  233,  374-375. 
Gosse,  449. 
Gosselin,  227,  359,  36o,  373- 

376,  399. 
Goujon  (J.),  i5o,  i58. 
Grainville  (le  P.  de),  394. 
Guilbert,  327. 
Guillaume  Bonne-Ame,    17, 

453. 
Guillaume  de  Haucourt,  i  lo. 
Guillaume  de  Tancarville,  66. 
Guillaume  du  Bec,  77. 
Guillaume  -  le  -  Conquérant, 

70,  426. 
Guilmeth,  70. 
Guionnet,  34. 
Guise  (duc  de),  356. 


H 


Hanyvel  (R.  de),  412. 
Harcourt  (les  d*),  320-321. 
Hardy   (Michel),    21 5,  222- 

223,  226,  422. 
Hastan  (Hasting),  448. 
Hellot,  92. 
Hendlé,  io3. 
Henri  III,  1 20. 
Henri  IV,  21,  27,  47-5o,  56, 

65,  119-122,3-26-335,368, 

390,  454. 
Henri  V  d'Angleterre,  258. 


502 


Hérodote,  aao. 
Hire  (La),  197. 
Horcholle,  140,  146. 
Houel  (Jean),  40. 
Hue-Quesnel,  353. 
Hugues  de  Haucourt,    110, 

m. 
Hugues  d'Orges,  260. 

—     archidiacre,  472,490. 
Hurel,  i65. 


I 


Innocent  X,  236. 


Jadoulie,  268,  327-334. 
Jarry,  8,  402. 

Jean,  duc  de  Normandie,  73. 
Jeanne  d*Arc,  2 1 . 
Jolimont  (de),  147. 
Jouvenet,  146,  239,412. 
Julienne  (sainte),  448. 


Leschevin,  271. 
Lescollier,  285. 
Lesguiilez,  328-329. 
Levavasseur  (Jacques),  27. 
Licquet,  262. 
Lieur  (R.  Le),  12. 

—    (J.  Le),  354,  382. 
Littré,  412. 
Longpéricr  (de),  322. 
Lop^z  (Agn^s),  444- 
Loquet,  404. 
Lorraine  (Cl.  de),  356. 
Louf,  233,  235. 
Louis  (saint),  89,   i29-i3o, 

314. 
Louis  XI,  78,  i3o,  i3i,  367, 

396. 
Louis  XII,  1 36-1 37,  404. 
Louis  XIH,    i5,    145,    i53, 

181,  395. 
Louis  XIV,  43,  400. 
Louis  XV,  5,  44,  220,  401, 

404,  429. 
Lourdet  (Michel),  Notice,  95- 

100,  i52-i53. 
Lourdet  (Pierre),  97. 


Lacaille,  71. 
Langlois,  412-413. 
Langlois  (l'abbé),  419, 
Lasteyrie(R.  de),  490. 
Lefebvre  (Elie),  33o-334. 
Legendre,  387. 
Lejeune  (le  P.),  167. 
Lemoyne  (J.-B.),  220. 
Lenfant,  407. 
Lepautre,  226. 
Lérue  (de),  394. 
Lesage,  35. 


M 


Marais  ou  Mareis,  399. 
Mare  (de  la),  366. 
Marguery  (Albert),  279. 
Mariette,  119. 
Marigny  (Enguerrand  de),  26, 

28,  82. 
Martainville  (de),  253. 
Martigny  (l'abbé),  474. 
Martin  (le  P.  A.),  i23. 
Masquerel  (les),  90-94,  242. 


5o3 


Mathon,  67,  ao3. 
Mauconduit,  71. 
Mazeline  (Pierre),  98. 
—       (Robert),  98, 
Ménard  (dom  H.),  448. 
Miry  (famille),  352. 
Mesard    (Guillaume),     1 3o- 

i33,  i36,  i5o,  i53. 
Mignard,  400. 
Milet    des    Ruisseaux,    146, 

40a. 
Millin,  334. 
Miromesnil  (de),  403. 
Molière,  357,  361,376. 
Monicault,  77. 
Montalembert,  laa. 
Monteclair  (de),  412. 
Montholon  (de),  4o3. 
Montjay(de),  148-149. 
Montgommery,  28. 
Montmorency,  60. 
Moreau  (Frédéric),  59. 
Motte-Lambert  (de  la),  264. 
Moustier  (Côme  et  Daniel), 

Notice,  1 19-122. 
Mulotin,  391,  410,  414. 


Pardieu  (de),  6a,  66. 
Partiot,  84. 

Pasquier  (Etienne),  367. 
Périaux    (Nicétas),   47,    56, 

329,  360-363,  368. 
Pernot,  356, 
PhiUbert  (saint),  447,  449, 

45o. 
Philippe-le-Bel,  32 1. 
Picard  (J.),  dit  le  Roux,  356- 

357. 
Pinel  (Robin),  319,  398-3(.9. 

—  (Robert),  399. 
Platon,  195. 
Pommeraye  (D.),  16-18,  22 

24-26,  3i5,  382. 
Pontcarré  (de),  8,  394,  402- 

404. 
Poterat  (les),  187-188. 
Poultier,  146. 
Poupel,  89. 
Poussin,  146. 
Prévost  (A.  Le),  261. 
Puchot,  414. 


N 

Nicolas  IV,  232. 
Nicolas  (l'abbé),  16,  17, 
Novion  (de),  400. 


Quérière  (de  la),  128,  378. 
Quesnel  (Henri),  3o5. 
Quiterie   (sainte),   75,    409, 
413-414. 


Omer  (saint),  447. 
Oppien^  i38. 
Ornay  (d*),  a66. 
Ouen  (saint),  447,  449. 
Ouin-Lacroix  (l'abbé),  367, 


R 


Rainfroi  (l'abbé),    17,   471, 

477»  497- 
Resnel  (l'abbé  du),  a75. 

Rlbard,  395. 


5o4 


Richard  [\c  duc),  16,449. 
Richard  Cœur-de-Lion,  1 1 1 . 
Richier,  356-357, 
Rigaud   (Eudes),    iio,    i%8, 

lag,  134,  ig3. 
Robert  (le  duc),  425,  45o. 

—      de  Dreux,  460, 
Rochefoucauld  (cardinal  la), 

189. 
Romain  (saint),  17,  i5|  i35. 
Roque  (La),  3a  i. 
Rosso  (Le),  357. 
Roux  (Rouland  Le),  1 2. 

—  (Guillaume  Le)  249. 

—  (dom),  281. 
Roy  (baron  Le),  i23. 


Sage  (Gautier  Le),  i33. 
Saint-Laurent   (famille    de), 

3i5. 
Saint-Romuald   (le    P.    de), 

X19. 
Sainte-Croix   (cardinal    de), 

20. 
Saintigny,  275. 
Salinas  (de),  413. 
Salle  (Vénérable  J.-B.  de  la), 

444-446. 
Sanchez  (Emmanuel -Dias), 

444. 
Sarrazin,  29. 
Saulx-Tavannes  (Mg'),    i32- 

i33,  352. 
Saussay  (du),  448. 
Sauvage  (l'abbé),  260,  294, 

296,  3o7,  413. 
Seignelai,  394. 


Séraphin  (le  P.),  242. 

Siméon  (saint),  3 1 5. 

Sixte  V,  236. 

Soulié  (E.),  373. 

Stacpool,  294. 

Sully,  48^^  5o. 

Suresnes  (Michel  de),  283. 


Taillepied,  242,  375. 

Talbot,  245,  254. 

Tamizey  de  Larroque,    139. 

Taylor,  356. 

Thibaud,  archevêque,  229. 

Thieury,  i63. 

Thomas   (Mgr),     420,    476, 

487. 
Thouret,  433-434. 
Titelouze,  i52. 
Titien  (Le),  395. 
Tourte  (Raoul),  16. 
Trébons  (de),   3i5. 


U 


Urbain  [I  (saint),  45 1,  453. 
Urbain  III,  229. 


Valricher,  23o-23i. 

Vanloo,  221. 

Varin  (Toussaint),  280. 

Vasari,  357. 

Vasse,  181. 

Vaultier  (Bernard),  375. 

Vauquelin,  267-272. 


5o5 


Vergère,  i38.  W 

Veris  (N,  de),  76. 


Wace  (Robert),  3o5. 
Wailly  (N.  de),  12. 


Vieil  (G.  Le),  239. 
—   (J.  Le),  257. 
Villain  (Jean  Le),  i3o.  Y 

Vitruve,  416. 
Voltaire,  378  Yolande  de  Flandre,   191, 


33 


TABLE  DES  NOMS  DE  LIEU 


Aix,  388,  393. 

Aiziers,  228. 

Alincourt  (manoir),  34,  86- 

88,  106,  205,391. 
Allouville,  261. 
Ambourville,  102. 
Amiens,  418,  447,  448. 
Angerville-rOrcher,  209. 
Arques,  8i,  114,  304,418. 
Arras,  396-398. 
Aubette  (V),  425-428,  43 1- 

432. 
Auch,  41 3, 
Auffay,  190-195,  365,  424, 

439. 
Aumale,  81,  xi3. 
Authieux  (les),  1 14. 
Avranches,  459. 

B 

Barentin,  3 10. 
Beaubec,  xio. 
Beaunay,  114. 
Beauvoir  (Rouen),  229-232. 
Bédanne,  349. 
Bernay,  70. 
Bertheauville,  243. 
Bival,  82. 
Blainville,  409. 


Blanc-Mesnil,  114. 

Bléville,  162. 

Blosseville  (Bonsecours),  1 7 

27,  426-427. 
Boissière  (la),  ix3. 
Bolbec,  69,  320-32I. 
Bondeville,  3i3. 
Bonport,  83,  119-121, 
Bonsecours,  17, 27, 122-123, 

2l3. 

Boos,  262. 
Bordeaux,  400. 
BouvUle,  3o3, 
Breny,  59. 
Bréval,  462-463. 
Buchy,  X14. 


Caen,  369* 
Cailly,  22,  409. 
Campeaux,  X14. 
Canaries,  xo5. 
Canteleu,  3x4,  33o-334. 
Caudebec-en-Caux,    35-44, 

82,203-204,221,228,230, 
304. 

Caudebec-lès  -  Elbeuf,  227, 

390,  440-44  X. 
Charny,  11 3. 
Chartres^  418. 


5o8 


Cidetot,  353. 
Cléon,  414-416,  423. 
aères,  358. 
Cléville,  461-463. 
Cottévrard,  124,  174,  177. 
G>urcelles,  11 3. 
Crevon,  385. 
Criquetot-sur-OuvilIe,  304- 

3l2. 

Criquiers,  112. 
Croisset  (château  de)»  Notice^ 
61-67. 

D 

Darnétal,  214,  427. 
Dieppe,  95,    114,   196-198, 

395,  463. 
Digeon,  11 3. 
Doudeville,  309. 
Drosay.  1x4. 
Duclair,  297,  428. 


Ecouis,  82. 
Elbeuf,  160. 
EmendrevUle,  187, 190, 433, 

437. 
Envermeu,  82,  84,  86. 
Ërmenouvilley  89* 
Escles,  II 3. 
Etrépagny,  387. 
Eu,  335-336,  422. 
Evreux,  122. 


Flamanville,  11 3. 
Fontaine-Jacob     (baronnie), 

^oftce,  425-437. 
Fontaine-le-Bourg,  441-442. 
Fontaine-le-Dun,  11 3. 
Fontainebleau,  357. 
Forcenyes  (Fourcigny),  11  a- 

ii3. 
Forges,  122. 
Franqueville,  22. 
Frettencourt,  112. 


Falaise,  129. 

Fécaipp,  55y   i3o,  23o-23i, 
280-281,  433. 


Gahiffine  (port),  29  t. 
Gaillarde  (la),  114. 
Gaillefontaine,  67,82,    iio, 

112. 
Gaillon,  i65. 
Gainneville,  85. 
Gau  ville,  11 3. 
Genétel,  m. 
Gisors,  106-109. 
Gors~A£ons,  ito. 
Gournay,  82. 
Grainville-  la  -  Teinturière  , 

114. 
Grammont,    368-369,   433, 

437. 
Graville  -  Sainte  -  Honorine , 

3 1-33,  392,  407. 

H 

Harfleur,  5i,  53,  286-292. 
Havre  (le),  60,  88-89,   106, 

122,  344. 
Haucourt,  iio. 
Haye   de    Neufmarché   (la), 

114. 


5o9 


Hénouville^  275-278. 
Hodenc-au-Bosc,  11 3. 
Houssaye-Bérenger  (la),  11 3. 

I 

Igoville,  79. 

Illois,  112. 

Imbleville  (château  d*),  No- 

tice,  89-95. 
Ingouville,  280. 
Ivry-le-Temple,  114. 


Joinville,  356. 

Jumiéges,  296-299, 3 1 3, 403, 
449-450,  463. 


Lamerville,   X14. 

Leure,  291. 

Lézarde  (la),  291. 

Lillebonne,  34,  70,  72,  86- 
88,  106,  180,  2o5,  294- 
298,  320-322,  391-392. 

Limésy,  23 1,  244,  246,  309. 

Limoges,  57. 

Lisieux,  83. 

Londe  (la),  355,  3 80. 

Longue  ville,  81,   190-202. 

Luneray,  11 3. 

M 

Magny-le-Fréville,  407. 
Martincamp,  387. 
Maudétour,  385. 
Mesnil-David,  112. 
Mesnil-Esaard,  22. 


Mesnil-Bous-Verdives,  427, 
Mivoie  (la),  404. 
Mondeville  (Calvados),  290. 
Mont  -  aux  -Malades,    5o-5  3 , 

82,   174,  176/    ï77i    ïS'> 

2i3,  214,  229,   3i4,  341. 
Mont-Rôti,  114. 
Mont-Saint-Michel,  97. 
Montigny,  22. 
Montivilliers,    5i-54,     239, 

280-291,  433. 
Montreuil,  448. 
Monville,  358. 
Morgny,  384-386,  391,407- 

414. 
Morvillers  -  Saint  -  Saturnin, 

ii3. 
Motteville,  221,  409. 
Moulineaux,  418. 
Moullineaux-sur-Longueville, 


93. 


N 


Nesle-rHôpital,  îi3. 
Neuville  (Dieppe),  ix3. 
Névillç,  126. 
Nid-de^Chien,  23o. 
Normare,  17}  22. 
Notre-Dame-de-Grâce(prieu- 

ré),  24. 
NuUemont,  xi2. 

O 

Octeville,  52,  54. 
Oise  (vallée  de  1*),  12. 
Oissel,  2ii-2i3,  348-349. 
Orgeville,  427. 
Ormesnil,  112. 


5io 


Ouainville,  353. 
Ouville-l'Abbaye,  307,  3 10. 


Paris,  235,  379,  38i,  429. 
Pavilly,    17,  27,  236,   353, 

446-465. 
Perruque  (la),  1 14. 
Petit-Couronne,  83,  i23. 
Petit-Quevilly,  i58. 
Picardie,  iio. 
Pierreval,  22. 
Pollet(le),  114, 
Pommeraye  (la),  385,  386. 
Pont-Authou,  206. 
Pont-Sainl-Pierre,    i5,  427, 
Port  (monastère),  447,  449. 
Port-Saint-Ouen,  82, 
Poses,  214. 
Préaux,  77, 
Provins,  167. 


Quevilly,  213.214,  265, 


Raffetot,  21 5. 

Rançon,  37. 

Repentigny,  114. 

Robec,  16. 

Romaiy,  387,  427. 

Ronchois,  X12. 

Rosay,  114. 

Rouen,  Académie  de  musique 

Notice,  372-379. 
—    Basse-Vieille-Tour,  226, 

383. 


Rouen,  Bonne<NouTelle,433, 
443. 

—  Chapelle  S.-Etien  ne,  a  3o- 

233. 

—  —    S.-Nicolas  de  Beau- 

voir, 229,  23o. 

—  —    des  Trépassés,  233- 

242. 

—  —    de  THospice-Géné- 

ral.  Notice,  263- 
272. 

—  —    Saint-Léonard,  339. 

—  —    Saint- Yon,  275. 

—  Chartreux,  43  x  -434,454- 

456. 

—  Cimetière  S.-Julien,  1 8g. 

—  —    S.-Maur,  Notice, 

228-258. 

—  Collections     anciennes  , 

393-395. 

—  Collégiale  S.-Georg.,  387, 

—  Colonie  à  Arras,  396. 

—  Comédie  (la),  376-379. 

—  CordeIiers,42  3, 439, 445 . 

—  Croix  de  la   place  de   la 

Calende,  380-384. 

—  Eglise    Cathédrale,    12, 

25,   95,  96,  164-165, 

Ï77.  i7«,  aai,  3o3, 
335,  417-420,  424, 
442»  468-469, 

—  Eglise  des  Carmes,  97. 

—  —    N.-D.  de  la  Ronde, 

96;  Notice,  127- 
i58. 

—  —    S.-Cande-le-Jeune, 

96. 
""       —    S.-Gervais,     10 1, 
x63. 


5ii 


Rouen,  Eglise  S.-Herbland, 
98,  l^^. 

—  —    S.-Hîlaire,    122, 

427. 

—  —    S. -Jean,  96,  1 39, 

141,  255. 

—  —    S.-Lô,  127,  275, 

422-423, 437. 

—  —    S.-Maclou  ,    96  , 

126,  169-173. 

—  —    S.-Michel,  100. 

—  —    S.-Nicolas,  124. 

—  —    S.-Paul,  33,    59, 

122,  287,    426- 
427. 

—  —    S.-Romain,  257, 

262. 

__         —    S. -Vivien,  41 3, 

465. 

—  Emmurées,  274,443. 

—  Entrée  de  Charles  VUl, 

399. 

—  Hôpital  S.-Vivien,  No- 

tice, 73-81. 

—  Hôtel-Dieu,   228,   23o, 

240-250 ,    375,    382- 
384. 

—  Hôtel-de-ViUe,  127-128, 

144,  400. 

—  Hôtel  des    Sociétés   sa- 

vantes. Notice,  401- 
404. 

—  Hôtel  du  Tôt,   Notice, 

168-173. 

—  Hôtel  Ste-Catherine,  No- 

tice,  279,    3 12-3 19, 
353. 

—  Ile    Notre-Dame,    169, 

X70« 


Rouen,  Jacobins,  319. 

—  Jeux  de  paume.  Notice, 

357-370,  372-379. 
^    Maisons   sculptées,    35, 
88,  io5,  162,  322. 

—  Manoirs.  Voir  ce  mot, 
^    Mont-Gargan,  16,    139. 

—  Monuments  païens,  438. 

—  Notre-Dame  -  des  -  Prés 

(prieuré),  68. 
^    Palais-de-Justice  (agran- 
dissement), 2. 

—  Plans,  126,  354. 

—  Pont  de  bateaux,  x8i. 

—  Porte    Sainte  •  Apolline, 

423. 

—  Prieuré   S.-Michel,  No- 

tice, 14. 

—  Privilège  des  bourgeois, 

398. 

—  Rue  des  Charrettes,  374. 

—  Saint-Gilles  -  de-Répain- 

ville,  427. 

—  Saint- Amand    (abbaje), 

336-344. 

—  Saint-Ouen  (abbaye  de), 

16-27,  174,  440,  469- 
498. 

—  Saint-Sever    (faubourg), 

47-5o,  187-190,  387, 
445, 

—  Saint- Yon,  444-446. 

—  Sépultures,  rue   Tabou- 

ret, 127,  210-21 X. 

—  Topographie,  423. 

^    Vieux  «  Palais  (fontaine 
du),  Notice,  327-334. 
Ry,  2,  391,  407-409. 


5l2 


Sainneville,  417. 
Saint-Aubin  (Elbeuf),  279. 
Saint-Aubin^ur-Scie,  aia. 
Saint-Denis,  11 3. 
SaîntoDenis  (abbaye  de),  23. 
Saint  •  Etienne  -  du  •  Haut  • 

Prieur,  114. 
Saint-Etienne  -  du-Rouvray , 

214. 
Saint-Filleul   (sources),  327. 
Saint-Georges   (abbaye  de), 

221,  3i3,  392,  462. 
Saint-Gilles(léproserie),  286. 
Saint-Jean  -  d*Abbetot,    86} 

117-118,  x86,  225,  347. 
Saint-Jean-de-Folleville,  2o5. 
Saint-Julien  (chapelle),  i58, 

3 17,  425,  462. 
Saint-Laurent-en-Caux,  x36. 
Saint-Léger-du-Bourg-Denis, 

21 3,  427. 
Saint-Leu,  74. 
Saint-Martin-Ie-Galllard,  104, 

180. 
Saint-Pierre-Manneville^  162 
Saint-Pierre-le-Petit,  55. 
Saint-Saens,  273,  278,  335. 
Saint-Thomas    du    Louvre, 

148. 
Saint-Victor-l'Abbasp,     95, 

464. 
Saint-Vigor,  1x4. 
Saint  -  Wandrille,    292-300, 

3i3. 
Sainte-Catherine  (côte  et  ab- 
baye), 14,  25-29,56,  126, 


425-426  ,  44a-45o,     454, 

462-465. 
Sainte-Marguerite,  1 14. 
Sainte-Vaubourg  (chapelle), 

124,  280. 
Sanxay (monuments  de),  3oi. 
Senlis,  346. 
Sotteville,  21 3,  368. 


Tocqueville,  xi3. 
Torcy-le-Petit,  X23. 
Touffreville,  11 3. 
Trois-Pierres,  32  x. 
Tronq  (le),  40. 
Tunis,  89. 


U 


Utrecht,  233. 


Val-de-la-Haye,  1 24,  280. 
Val-des-Leux,  2X,  22. 
Valognes,  97. 
Vatrival,  1x4. 
Vatteville,  X25,  299. 
Vaudreville,  8x. 
Veules,  1x4,  280. 
Vieux-Rue,  372,  390,  407, 

441. 
Villedieu-la-Montagne,  iio- 

XI 5. 


Yonville,  327. 
Yquebeuf,  22. 


TABLE  DES  PRINCIPALES  MATIÈRES 


Agrafe  en  bronze,  484. 
Ambons  projetés  à  la  cathé- 
drale, 424. 
Amphore,  492. 
Ampoule,  223. 
Amulette,  223. 
Ange  pour  lutrin,  147. 
Anneau  en  bronze,  484,  486. 

—  en  fer,  484. 

—  en  argent,  486. 
Antiquités     préhistoriques , 

i65,  21 3-21 5,  348,  349. 
Antiquités  romaines,    6,    7, 

34,  45-47,   58-59,  86-87, 

160,  227,   279,  349,   353, 

438. 
Antiquités    mérovingiennes, 

7,  34,  87,    160-161,   207, 

470. 
Antiquités    du     moyen-âge, 

161. 
Antiquités    d'époque   incer- 
taine, 161,  i65,  474-498. 
Arcade  de  crucifix,  I23. 
Ardoise,  197-198. 
Arènes  de  Senlis,  346. 
Armes  gauloises,  160. 
—     gallo-romaines,   227, 
349. 


Armes  mérovingiennes,  1 60- 
161,207,274,348, 
485. 
Armoiries,  208,  386. 
Art  ogival,  122-123,  272. 
Asile  (droit  d'),  286. 
Auge  en  pierre,  489. 
Aumônes  en  faveur  des  dé- 
funts, 249,  3 16. 
Aumusse,  i3o-i32,  x36-i37. 
Autel  à  la  romaine,  145. 


B 


Bas-reliefs    dits  de   Michel- 
Ange,  344,  350-357. 

Bâton  abbatial,  476-478. 

Bestiaux  normands,  192. 

Béton,  492. 

Bière  de  Dieppe,  renommée, 
198. 

Boiseries,  xvie  siècle,  35,  88. 
—         xviic   —    35 1. 

Boisseau  étalon   de  Bolbec, 
Notice,  320-322. 

Bollandlstes,  259-260. 

Boucle  en  bronze,  482-485, 

487-489,491. 
Boucle  à  facettes,  485. 
^~     en  fer,  486. 


5i4 


Bourguignons;  leurs  ravages, 

198. 
Bouts  rimes,  281. 
Briques  romaines,  438. 


C 


Cabochon,  485. 

Cachet,  84. 

Cichette  monétaire,  162. 

Cafés  à  Rouen,  378. 

Calende,  38o-3l3i. 

Calligraphie  grecque,  i38. 

Carrelages  émaillés,  262, 
476. 

Cartes  à  jouer,  341. 

Céramique  égyptienne,  220. 

Cercueils  en  pierre  de  Ver- 
gclé,  475,  476. 

Cercueils  en  pierre  de  Cau- 
mont,  477. 

Cercueils  en  pierre  de  Beau- 
mont,  478. 

Cercueils  en  pierre  de  Saint- 
Maximin,  478. 

Cercueils  en  pierre  de  Saint- 
Leu,  480,  496,  498. 

Cercueils    en    plâtre ,    48 1 , 

487. 

—  percés   d'un    trou, 

484,  489. 

—  avec  entaille    pour 

la  tête,  496. 
Chaînettes  de  bronze,  484. 
—       de  cuivre,  486. 
Chainture  noire  (litre)  dans 

des  chapelles,  284. 
Chaires  anciennes,  166-168, 
288,  3o3. 


Chapelle     Saint-Martin-du- 

Vivier,  69-71. 
Chapelle  Saint-Pierre  à    Pa- 
villy,  446-463 . 

—  Voir  Rouen. 
Chapiteau,  492,  49 3 ,  498. 
Charbon,  484. 

—  dans   les  cercueils, 

485-487,  491. 
Charniers,  240,  286,  333. 
Châsses,  95-96,  i5i. 
Château  Fontaine-Martel,  70- 

71- 

—  du  Bellay,  275. 

Chaux  dans  les  sarcophages, 

479,  483. 
Chronogramme,  29. 
Cimetière  gallo-romain,  222- 
224. 

—  ?  mérovingien,  387. 

^    des   protestants,  246- 
248. 

—  de  Champfleury  (Har- 

fleur),  286. 

—  de  Brisegaret,  239,283. 

—  Saint- Maur,    Notice, 

228-258. 

Classement  de   monuments 

historiques,  372,  390-3gi, 

407,  441. 
Clergé  constitutionnel,  272. 
Collections  locales,  204,  227, 

393-395. 
Colonne  (demi-),  493-496. 
Commanderie  de   ViUcdieu, 

Notice,  iio-i  17. 
Commanderie  de  Repentigny, 

114. 


5i5 


COMMISSION     DES      ANTIQUITÉS 

Communications  : 

MM.  Baudry  (Paul),  56,  67, 
i65,  187,  208,  35i, 
386,  387,  417,  443, 
465. 

Beaurepaire(de),  14,47, 
73,  95,  119,  i63, 
168,  189,  190,  228, 
263,  279,  280,  3 12, 
322,  355,  357,  395, 
408,  441,  446. 

Billiard,  io6,2i3,  353. 

Bouctot,  273,419,  442. 

Bouquet,  27,  45,  67, 
164,  262,  372,  474. 

Brianchon,  14,  59,  69, 
84,86,  117,  2i5,  221, 
261,  320,  355,  391, 
421. 

Darcel  (A.),  292. 

Estaintot  (d*),  89,  261, 
469. 

Félix,  275. 

Girancourt  (de),  57. 

GlanviUe  (de),  61. 

Gouellain,  56,  226-228, 
35o,  38o,  390,  395, 
406,  422,  437,  441. 

Guéroult,  35. 

Le  Breton  (G.),  102, 
122,  220,  225-227, 
260,  262,  335. 

Lefort,  2,  44,  3o2,  335, 
392,  406,  442. 

Lormicr,  319. 

Loih  (Pabbé),    164. 

Maillet  du  Boullay,  34, 


86,    88,     107,    161, 
162,  2i5,  275,   388. 
MM.  Merval  (de),  no. 

Pelay,  207,  21 5,   3 12, 

353,  355,  387,   407. 

Robert  (chanoine),  392, 

407,  419. 
Roessler,  60. 
Serre  (de  la),  204,  274, 

278. 
Simon,  58. 

Tougard    (l'abbé),  122, 
179,  221,   258,  259, 
279,   3o3,  335,  393, 
424,  439,  465. 
Vesly  (de),    106,    160, 
211,  348,  414,  423, 
473. 
Membres  décédés,  61,  2o3. 
Membres  nommés,  io3. 
Hommages,  67,  60,  71,  90, 
127,  162,  207,   211,   212, 
259,  274,  278,   3 12,  588, 
4o5,  422. 
Bulletin,  226,  260. 
Dessins,  354,  ^7'- 

Séances  de    la  Commission 

Pages 

1882     janvier i 

mars 3o 

mai 58 

juin 85 

juillet io3 

août 125 

décembre i59 

i883     février i85 

mars 209 

mai 225 


5i6 


i883     juin 269 

octobre 277 

décembre 3ot 

—        ....  326 

1884    février 346 

avril 371 

mai 389 

juillet 406 

octobre 421 

novembre 439 

décembre 466 

Confession n aire  (confession- 
nal), 284. 

Confréries,    141,   233,   243, 
284-285,  367,  38i,  413. 

Coupe  en  terre  fine,  492. 

Coupelle  romaine,  6. 

Couvercles  de  sarcophages, 
476-484,  498. 
—       entaillé,    480. 

Croix,  425,  479,  482,  487. 

Crucifix,  181,  288-290,  446. 

Cupules  en  briques,  41 5. 


D 


Dallage     ancien ,     476-479, 

494. 
Dalles  tumulaires,  89,  392- 

393,  406-407. 
Danois,  349, 448-449. 
Défense   de    sanglier,    480, 

487. 
Devant  d*autel,  35o. 
Dorure,  487. 
Dragages    (découvertes    par 

les),    160-161,    i65,   211, 

274,  348-350. 


Eglises  conventuelles  et  pa- 
roissiales, 282. 
Epée  Scandinave,  21 1>2 12. 

—  espagnole,  274. 

—  normande,  349. 

—  pistilllforme,  348. 

^    avec  inscription,   404. 

—  388. 

Epi  en  plomb,  275. 

Epingle,  487. 

Esquelle  (cloche)  de  N.-D., 

75. 

Etendard  ennemi  en  ex-'VOto^ 

285. 
Exécutions    capitales,    1 95- 

196. 


Fauchard,  487,  491. 

Faune  (débris  de  la),  71,  1 6  x , 

i65. 
Fer  (fragments  divers),  482- 
484,  487-488,490,491. 
—    de  lance,  485,  490. 
Fermeture  de  collier,  487. 
Feux  de  joie,  144. 
Fibule  en  or,  485. 
Fiefs  (dans  les  villes),  173- 

179. 
Fief  au  Moutardier,  174, 

Fiole  en  verre  blanc,  486. 

Fouilles  du  Palais  de  Justice, 

5,  45. 

—  de  Bolbec,  71. 

—  de  Pont-Aulhou,  206, 

207. 

—  duMusée(Rouen),  207. 


i 


5i7 


Fouilles  de  Caudebec-lès- 
Elbeuf,  %2y. 

—  de     Cléon,    414-417, 

423. 

—  de  Saint-Lô,  422,  437. 

—  de  Saint-Ouen,   469- 

498. 
Fourneaux     gallo-romains, 

414-416. 
Fourreau  de  style,  en  or,  488. 
Frais  d'inhumation,  199,342, 

344. 
Franchise    (nom    d'Arras) , 

396. 
Franciscains,   44,  i3o,  394. 
Frange  d'or,  49 1 . 
Frapper  à  la  porte  (obligation 

de),  172-173. 


Gages  desservit»  (xvi*  sièc), 

200-203. 

Galon,  478,  491. 


Inscriptions,  xie  siècle,   490. 

—  xiie      —      477. 

—  xiii«     —         7 

—  xive     ^       92. 

—  xve       —       89. 

—  xvi«      —  7,  60, 

95. 

—  xvii*    —     208, 
218,  444,  452-454. 

—  modernes,  2  5  3, 265- 
271,  391,  407-408, 
445. 

—  ?  carlovingienne,  481. 
Ivoire  (plaque  d"),  486. 

—  fragments,  487. 


Jeu  de  paume.  Voir  Rouen. 
Jubé  de  la  cathédrale,    420, 

424,  442,  468-469. 
Juifs,  i3,  127. 
Justices  (hautes),  432-433. 


H 


Hache  en  fer,  485. 

Hanaps,  5o. 

Hareng,  383. 

Hématite  d'oxyde  de  fer,  208. 

Hôpitaux,  73-83. 

Hospice  Sainte-Anne,  40. 


Lame  d'épée,  482,  484. 

—  de  couteau,  484,  486, 

489,  490. 

—  de  poignard,  482. 

—  de  bronze,  483,  484. 
Lépreux,  5o-55. 

Lutrin,  147,  417. 


I 


M 


Incendie  (traces   d'incendie), 

488. 
Incrustations  en  pierres,  485. 


Maisons     marquées     d'une 

croix,  425. 
Manoir  d'Alincourt,  34,  106. 


5i8 


Manoir  de  la  Planquette,  35. 

—  de  la  Motte,  68. 

—  Méry,  35 1,  386. 
Marque  de  tftcheron,  496. 
Marqueurs,  252. 
Médaillon  en  pierre,  481. 
Mesquicher,  398. 
Messeline,  ^\%. 
Mesure  (double),  279. 
Meule   romaine,   279. 
Mobilier  d'un  lépreux,  5o. 
Mœurs  judiciaires  anciennes, 

425-437. 
Monnaies  gauloises,  227. 

—  romaines,  6,  227,  279, 

355,  38o,  391. 

—  en   bronze,  485,  489- 

491. 

—  modernes,  8,  1 8 1 , 2  74. 
Monuments  historiques  (  Voir 

classement),  2,  3i,  33,  59, 
85,  104,  iio,  117,  123, 
125,  126,  i58,  180,  186, 
209,  217,  226,  261,  273, 
281,  3o2,  335,  347,  407, 
424,  439,  440. 

Mosaïque,  481. 

Motte  (manoir  de  la),  Notice, 
68. 

Moulures  en  plâtre,  478. 

Muret  de  la  Ronde,  144. 

Murs  romains,  6,  45,  58. 

—  anciens  de  Rouen,  268, 

279. 
Musée  des  Antiquités,  i3,  86, 
88,  io5,  i6i-i63,  212- 
21 5,  226,274,  280,  320, 
35o,  35 1,  353,  38o,  392- 
393,  406-407,  470,  497. 


N 
Nivellement  (défaut  de),  493. 

O 

Ocre  (traits  à  T),  496. 
Orfroi,  475. 

Ornements  en  bronze,  483, 
485. 

—  argentés,  485. 

—  de  moulures,  496. 
Œufs  de  Pâques,  412. 

•—    symboliques,  474, 482. 
Orgues,  i5o-i52. 


Paratonnerres,  210. 

Pavés  émaillés  du  xiii*  siècle, 

473. 
Peigne  mérovingien,  7. 
Peintures,  479. 
Pèlerinage^»   (souvenirs    de), 

395. 
Pendant  d'oreille,  485. 
Perles  en  os  mérovingiennes, 

7- 
Peste,    43,     246-249,    25 1- 

254. 
Pichets,  xve  siècle,  i3,  21 5. 
Pince  à  épiler,  487. 
Planquette   (manoir  de   la). 

Notice  y  35-40. 
Plaques  de    ceinturon,    483, 
485. 

—  de  marbre  blanc,  481. 

—  de  bronze,  486, 487. 

—  d'ivoire,  486. 

—  de  fer,  487. 


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5i9 


Plaque  commémorative,  8. 
Poignard,  483,  485. 
Poteries  romaines,  7, 84,  87, 

106,  222-223,  227,  391. 
Poteries  mérovingiennes,  87, 

207,  423. 
Poteries,  xvie  siècle,  7,  387. 

^    fragments  divers,  486- 
488,  492. 
Protestants,  236,  246-248. 
Proverbe,  245. 


Religieux  morts  au  service 
des  pestiférés,  252-254, 
258. 

Responcion     (contribution) , 

1x5. 
Retables,  98-101,  285. 
Revestiaire,  i33,  134. 
Rivets  de  bronze,  485*486. 
Rondelle  mérovingienne,  7. 


Sable  dans  les  sarcophages, 

477,  480,  488. 

Saint  -  Jean  -  de  -  Jérusalem 

(ordre),  iio. 
Samos  (terre  de),  480,  492. 
Sandales  monastiques,  476, 

478,  490. 
Sceau,  xiiie  siècle,  7- 

—  xvie      —      67. 

—  319. 
Scramasaxes,  485, 487, 489- 

491. 
Sépultures     gallo-romaines, 
2x0,  222-224,  227« 


Sépultures  franques,  206- 
Serment  canonial,  134. 
Silçx  taillés,   2x3-2X4,  487. 

—  à  briquet,  485. 
Statuettes,  7X. 
Stuc,  479. 

Style,  483,  487. 

—  en  argent,  488. 

—  en  bronze,  498. 


Tabatière,  57. 
Tabernacle,  142. 
Tableaux,  395,  399-401. 
Tapisseries,    x53-x55,    192, 

205. 

Terre  cuite,  484. 

Terres  portées  à  Saint-Maur, 

255. 
Testament,  408. 
Têtes  en  marbre,  215-2x7. 
Tissu  d'or,  478,  49^  49»- 
Toile  (fabrique  de),  5o. 
Tombeau  circulaire,  102. 

—      en  maçonnerie,  475. 
Traduction    française   de   la 

Bible,  X92. 
Trésorier  (fonctions  de),  410- 

411. 
Truie  inculpée  de  meurtre, 

194. 

U 

Urne  romaine,  353. 


Valet  de   chainbre  du   roi, 

119,    X2I.